J’ai regardé cette vidéo récente d’Alain Soral envoyée par un ami qui me demandait ce que j’en pensais. Et comme ça parle de la pandémie du Sida – que Soral dit « anecdotique » puis même « inexistante » -, je me dis qu’il fallait que je m’y arrête un peu et que je vous dise en quoi sa démonstration témoigne d’un truc qui ne va pas. Et pour cela, j’ai relevé 4 grands axes.
LA VULGARITÉ :
Tout d’abord, la tonalité, c’est-à-dire comment Alain Soral s’exprime et comment il parle des gens. Ça a l’air d’être un détail par rapport au fond. Mais non, c’est très important, le ton. Ça indique si une personne est dans l’Amour ou pas. Et dans cet extrait vidéo, Soral se montre particulièrement vulgaire, tranchant, et que du coup, il n’y a pas d’Amour. J’ai relevé certaines expressions telles que « maladie d’homosexuels », « gueule », « l’autre enculé », « virus d’enculés », « pédosataniste », « ses potes », « junky », etc. Il se permet de parler des gens – même pour les défendre et pour dire qu’ils sont victimisés – de la manière la plus violente qui soit. À un moment, il parle même d’un « petit myopathe : un enfant en train de baver sur son fauteuil roulant ». Quel est le respect que Soral a vis-à-vis même des victimes qui soi-disant seraient persécutées par des plus grands bourreaux que lui ? Honnêtement, aucun. Rien qu’avec le ton de la démonstration d’Alain Soral, je vois qu’il y a un problème et qu’il y a une violence. Donc même si cette violence verbale se veut illustrative d’une autre violence censée la dépasser, il y a une violence.
TROUVER UNE CAUSE AU MAL :
Deuxième point : je me méfie beaucoup des gens qui veulent trouver une origine au mal. Alors qu’on sait très bien, grâce à la parabole biblique du bon grain et de l’ivraie, que lorsqu’on demande au maître du domaine d’où vient l’ivraie, il dit « Je ne sais pas. Mais ce n’est pas moi qui l’ai posée ». Donc Jésus ne trouve jamais de justification ni d’origine au mal. Et ceux qui veulent trouver une origine au mal, en général, sont des créateurs ou des justificateurs du mal qu’ils dénoncent… sauf qu’ils se cachent derrière l’identité d’accusateurs ou de lanceurs d’alerte pour ne pas se voir complices : comme ça, on ne va pas précisément les accuser du mal qu’ils pointent du doigt. Mais trouver une origine au mal, ça, c’est une démarche qui ne va pas. Et dès le début de la vidéo, il y a une recherche des « causes » du mal… donc finalement une justification en filigrane. Il est question d’« origine », de « la racine du Sida », et concernant les soi-disant causes du Sida, il est question des « drogués », des « pratiques de sodomie », du « business », du « lobby ». Pour lui, c’est ça « l’origine » du mal. Alors que nous catholiques nous reconnaissons le mal, nous ne nions pas qu’il existe, mais en revanche, si nous lui reconnaissons une origine, c’est celle du péché originel. C’est donc une origine surnaturelle, dans le cadre d’un combat spirituel angélique (et non prioritairement humain ni matériel) entre les forces du Bien et les forces du mal. Mais ce n’est certainement pas des causes humaines ni des pratiques. On ne cherche pas une origine au mal. Sinon, quelque part, on le justifie.
DES THÈSES PERTINENTES MAIS PARANOÏAQUES :
Troisième point : Alain Soral se base quand même sur des vérités pragmatiques qui sont pertinentes. Il dit des vérités. Déjà parce que Soral est un esprit brillant. Il est très très fort pour surprendre, retourner les évidences en scuds et en scoops. Par exemple, quand il balance cet effet d’annonce « Le Sida n’est pas une maladie », en soi, l’hypothèse est recevable : en effet, on peut envisager le Sida comme un symptôme. C’est intéressant de dire qu’il n’existe pas et que ce qu’on appelle « Sida » n’est autre que le Sarcome de Kaposi ou une misère nationale, et non – comme ça nous est annoncé – « le Sida » ni un virus ou une menace planétaire. Autre exemple : quand il dit aussi une autre vérité « L’antidote ou le traitement ou le vaccin est le possible poison », bon ben là, il ne peut pas le prouver, mais c’est une posture intellectuelle qui est intéressante. Alors bien sûr, ça reste quand même l’histoire insoluble de la poule et de l’oeuf (on ne saura jamais qui a commencé ! qui est l’origine ou le résultat de quoi !). Donc t’as toujours raison quand tu sors ce genre de vérités. La cause et la conséquence, a fortiori quand elles ne sont pas claires dans le cadre d’une épidémie, c’est toujours intéressant de les inverser. Il n’empêche que ce n’est pas pour ça que forcément il a raison, ou que l’antidote ou le traitement est nécessairement le poison. Ça, c’est un axiome, un a priori, un postulat déjà paranoïaque. Et je pense que quasiment tout suinte la paranoïa chez Soral.
OBSESSION POUR L’ARNAQUE :
Dernière chose : On a l’impression que le but d’Alain Soral, dans toutes ses prises de parole, en plus de cracher sur des gens dits « intouchables », c’est de prouver que tout est mensonge, qu’on « nous a mentis », que tout est manipulation. J’ai relevé le nombre de fois dans la vidéo où il a utilisé les mots « arnaque », « mensonge, « erreur », « escroquerie », « combine »… Et il développe tout un fatalisme du mensonge : c’est toujours « une fois de plus », et « une fois de plus ». Pour lui, tout est mensonge. Ou en tout cas, il est plus intéressé par le mensonge que par la Vérité-Charité. Et là, on voit qu’il y a un problème au niveau de la Priorité. Au niveau du Coeur. C’est le propre des personnalités paranoïaques souffrant du complexe de persécution ou du complot (fussent-elle ironiques sur leur propre réputation de « complotistes » !), et qui vont peu à peu, à force de tout inverser, de tout retourner ou de tout nier, tenir des raisonnements au révisionnisme exacerbé, même s’ils sont d’une grande brillance intellectuelle et qu’ils se tiennent.
Donc au-delà des vérités qu’Alain Soral peut sortir – et je pense que tout mérite d’être interrogé, y compris le Sida qui est, c’est vrai, sanctuarisé actuellement (Quand j’étais prof, dans mon ancien établissement scolaire, tous les 1er décembre, pour la journée mondiale de lutte contre le Sida, il y avait carrément un préservatif géant exposé au milieu de la cour : c’était vraiment Saint Sida !), ce n’est pas faux ce que dit Soral mais ce n’est pas vrai non plus. Dans le sens où la Vérité sans Amour n’est plus la Vérité. Finalement, l’agitateur public illustre et reproduit ce qu’il dénonce : il est aussi violent que les violents, il est marginalisé autant qu’il marginalise. Et ça, c’est pervers.