Comment je vais? Difficile de répondre aux quelques amis qui prennent sincèrement de mes nouvelles.
Et pour leur répondre en vérité, je ne vais pas bien. Et en même temps, j’ai beaucoup de chance d’être (encore) libre (de penser comme je pense, de voir ce que je vois, de dire librement ce que je vois). Et donc je paye le prix de cette liberté. Par conséquent, ce n’est ni grave ni triste ni désespéré/désespérant ni inquiétant. C’est « juste » ce que je vis, et comment je le vis. Éprouvant et inconfortable, mais il y a largement plus malheureux que moi.
Inconfortable : ma situation l’est. Internet est devenu maintenant le maître du réel de beaucoup de gens. Ils vont le consulter plutôt que de se confronter aux choses, de comprendre et penser par eux-mêmes, plutôt que de rencontrer les gens. C’est devenu les Renseignements Généraux, et même pire que ça : le tribunal, voire, si on est jugés fautifs ou extrémistes ou dangereux par eux, le casier judiciaire. Moi, comme je vous l’ai dit récemment, mon casier judiciaire n’est plus vierge, car j’ai fait le choix de la transparence et de l’exposition de mes combats et de ma vie, le choix de la vie publique, le choix de passer de l’autre côté de la barrière et de parler en mon vrai nom. Et je refuse de renier mes propos et faits passés, d’expurger quoi que ce soit, comme le font les figures publiques qui souvent paient des agences pour effacer toutes traces virtuelles et redorer leur image. Et force est de constater que je suis désormais mort socialement, amicalement, amoureusement, professionnellement, ecclésialement, sacerdotalement. Mon seul nom m’empêche de trouver du travail, de donner ne serait-ce que des petits cours particuliers, d’être invité à témoigner, d’avoir des amis ou un amoureux, d’avoir une vie sociale comme avant. D’ailleurs, je ne sors quasiment plus, sauf pour aller à la messe ou au confessionnal ; et je me retrouve – en plus d’écrire – à passer mes samedis soirs devant la Star Ac (c’est ça, mon quotidien : véridique. Je n’exagère même pas). La seule évocation de mon nom fait peur aussi bien aux gays friendly et incroyants qu’aux catholiques. Que je me taise ou que je parle, que je réduise mon C.V. au strict minimum ou pas, rien n’y change. Je suis associé ad vitam aeternam à des sujets clivants à la fois gravissimes (dans leurs actualisations concrètes) et en même temps dont la gravité n’est pas comprise, voire est banalisée, parce que ça arrange tout le monde : pratique homo + « mariage » gay + « vaccins » + identifiant numérique remplaçant notre être de chair et de sang + Franc-Maçonnerie + Fin du Monde. Même les gens qui croient m’aimer ne me lisent pas et ne consultent pas mon blog (j’ai rencontré pas plus tard qu’hier un couple d’amis qui applaudissent mon courage… mais en les écoutant, je découvre qu’ils ne lisent ni mes livres, ni mon blog, et que ça fait 12 ans qu’ils n’ont même pas pris la peine de s’intéresser à ma pensée. Des soutiens en carton).
Ce matin, j’ai tout simplement pleuré (de tristesse ? d’émotion?) en écoutant le montage que j’ai réalisé de tous les extraits de The Voice qui parlent de « Singularité (monstrueuse) ». Et c’est objectivement très bien vu, brillantissime, prophétique, en même temps qu’accablant. J’intègrerai ce medley à l’épisode 15 de ma saga Singularity is devil, où le personnage de l’adolescente (Lilou) explique à Matéo la Marque de la Bête, autrement dit le caractère diabolique, universel et prophétique de la singularité. J’ai aussi écouté mon montage sur toutes les pubs reliant symboliquement la Marque de la Bête avec « l’être soi » ou « l’être VOUS » (« La Marque de la Bête, ce sera VOUS »). Cette conscience, cette lucidité, cette compréhension, de ce qu’est la singularité, de ce qu’est la Marque de la Bête décrite par saint Jean dans l’Apocalypse, à la fois me rend hyper heureux (parce que ça veut dire que le retour de Jésus, et la fin des injustices, est proche ; parce que j’ai découvert la clé d’un trésor, d’un secret) et en même temps hyper triste (parce que c’est mon isolement, et que personne n’écoute, et pire, qu’on m’en veut pour ça).
Ces jours-ci, je parle à beaucoup de gens trentenaires/quarantenaires certes sympathiques, adorables, reconnaissants, mais nos échanges sont extrêmement pauvres : ils n’ont presque rien à dire. Je leur parle de plein de sujets hyper intéressants (culturels, même politiques, spirituels) : ça ne suscite aucune réflexion, aucun écho, aucune réaction, aucun débat, aucune observation. Ils sont juste là pour consommer, pour le paraître, pour l’image, pour leur compte Instagram. Et à ce propos, je remarque que Paris est en train de changer à la vitesse grand V, et de manière extrêmement inquiétante. Un truc véritablement monstrueux (au double sens du terme « monstrueux » : « monstrare », en latin, veut dire « montrer »). Il faut que vous le sachiez. Et pourtant, je connais très bien la capitale, maintenant que j’y réside depuis bientôt 17 ans! Mais là, en 1 an, je vois la déferlante de la mondialisation arriver de manière spectaculaire (vague due à l’hégémonie des téléphones portables, à la généralisation de la Marque de la Bête, à l’influence des J.O. et de la multiplication de l’image de la France à l’international, due aussi à l’individualisme de masse numérisée appelé « partage »). Pendant la balade dominicale, j’avais l’impression de contempler un Monde qui part en vrille, une fourmilière en panique paradoxalement anesthésiée et souriante (… à elle-même et à sa perche), une vague migratoire de Fin des Temps. Aux Jardins des Tuileries, par exemple, on était hyper nombreux hier après-midi (quasiment pas un mètre carré d’espace par personne ; ça sortait et débordait de partout !). Et alors, la Place du Trocadéro en pleine nuit, idem : un festival d’égotisme numérique de masse. Paris est en train de perdre son âme, se transforme en décor de shooting ou de tournage. Le Monde entier s’y donne inconsciemment rendez-vous, pour se retrouver aux mêmes endroits, faire les mêmes choses, manger les mêmes choses, se prendre en selfie avec la Joconde, écouter les mêmes musiques (« Imagine » de Lennon sur les Champs-Élysée, « Freed from Desire » jouée par une fanfare devant le Conseil d’État, l’horrible « Marseillaise » sur le rond-point de l’Étoile…). Il devient une masse d’individualistes qui ne se parlent quasiment pas entre eux, et qui sont sur le lieu tout en n’y étant pas, tout en l’instrumentalisant/le pillant comme une carte postale, tout en privilégiant le paraître/la photo à la ville en elle-même. Au Trocadéro, désormais, il y avait, face à la Tour Eiffel, 4 lieux de shooting photos identiques et alignés, avec gros projecteurs professionnels, bouquets de ballons gonflés rouges en forme de cœurs, envois automatiques de portraits digitaux après achats. C’est nouveau : encore 1 an en arrière, ce dispositif n’existait pas. Et je ne vous parle même pas de la transformation de la Place Colette devant la Comédie Française en plateau « vivant » de chorégraphies/flash-mobs collectives pour vidéo-clips, ni des miroirs de la BNF (Bibliothèque François Mitterrand) utilisés comme salles de danse pour des groupes de jeunes banlieusards, ni des ponts de Paris pris d’assaut pour les shootings de mariages asiatiques ou pour les books de mannequins, voire carrément les tournages de film à chaque coin de rue de la capitale. Paris s’est véritablement métamorphosé en lieu de shooting et de tournage en l’honneur du dieu « Caméra ». C’est un fait. Et c’est un crève-coeur à voir.
Par ailleurs, je me sens orphelin ecclésialement parlant. Je vais à l’église des artistes de Paris (Saint-Roch), parce qu’il faut bien aller quelque part, mais ce n’est pas tellement que je m’y retrouve. Je trouve le concept (ou le mélange des genres : Église + monde artistique) un peu « strange » et folklorique (en tout cas, tel qu’il est associé là-bas : messes-spectacles, démonstrations d’acting en lecture, « éphémérides de stars », artistification des prières universelles, etc.), et les homélies juste un peu plus bobos qu’ailleurs (car contrairement au père Philippe Desgens qui savait rester humble tout en proposant des homélies de haute volée, les aumôniers des artistes maintenant sont dans la représentation, jubilent de célébrer des messes de stars – genre Michel Blanc – tout en cherchant à paraître cools, percutants, « missionnaires », et honnêtement le mélange ne fonctionne pas : leurs homélies sont bavardes, sont de l’épate-bobos, et on n’en retire quasiment rien. L’exception, c’est le père Olivier Horovitz, qui ne parle pas pour ne rien dire). Je n’arrive même plus à chanter certains chants (notamment les chants de l’Emmanuel, que j’appelle les « chants BIOMAN », tellement ils sont faussement énergiques et auraient pu être composés par Bernard Minet ; et « Regardez l’humilité de Dieu », chant catho pseudo « beau » plébiscité actuellement par beaucoup de cathos, me donne envie de vomir. À la sortie de la messe d’hier, en marchant dans la rue Saint-Honoré, j’ai secrètement inventé une nouvelle version : « Regardez l’humidité de Dieu… » L’Église prend l’eau : je trouve que la revisite fonctionnait bien…).
Voilà ma vie actuelle, mes amis. Pour ceux qui veulent vraiment savoir comment je vais, et à qui je ne sais pas mentir.