(Traduction en espagnol)
Attention, les cathos pro-vie ! Ne vous emballez pas trop vite et ne vendez pas la peau de l’ours…
À première vue, cette prise de position des stylistes Dolce & Gabana paraît positive, courageuse et à contre-courant de ce qu’on entend en bouche des militants pro-mariage homo faisant partie du lobby LGBT. On pourrait la voir comme une cohérence, une auto-critique pleine de sagesse, une leçon qui brille par sa nouveauté (Laurent Ruquier, Guillaume Gallienne ou Pierre Palmade nous avaient fait le même coup), et qui prouve la violence de la pensée unique dans une communauté homosexuelle qui se dit « tolérante ». Il n’en est rien !
En réalité, il s’agit d’une attitude contradictoire et homophobe totalement ordinaire et généralisée dans le « milieu » homosexuel, y compris parmi les activistes gays les plus zélés : ils veulent un droit et ensuite, quand ils se rendent compte que celui-ci ne correspond pas à leur réalité, ils disent qu’ils ne l’ont jamais voulu. Ils ont pour habitude de se présenter comme « homos mais pas gays », comme des marginaux discrets qui ne demandent comme unique privilège que l’indifférence sociale. Ils imposent un découpage superficiel et manichéen de la communauté homosexuelle en deux, comme s’il y avait d’un côté le « milieu » homo invisible, pur et intégré, et de l’autre le « milieu » homo sale, débauché, pervers, exhibitionniste, politisé, sans remettre en cause leurs propres actes ni leurs « amours ».
Ce discours pudibond non seulement n’est pas satisfaisant (bien qu’il semble un premier pas encourageant, ou la première moitié du chemin vers la Vérité) mais en plus je crois qu’il vient brouiller l’esprit des catholiques pro-Vie, parce qu’il ne propose aucune critique de la violence de la pratique homosexuelle (et j’y inclus ici la pratique homosexuelle privée, fidèle, « hors-milieu »).
À l’instar de la rhétorique du FN, la réaction de Dolce & Gabana vient rassurer uniquement les râleurs et entre aussi, de manière plus perverse et hypocrite, dans un processus de justification du « mariage gay » : « Nous voulons ce mariage homosexuel au nom de l’amour, mais nous ne sommes pas d’accord avec ses conséquences. » Ces arguments anti-lobby gay (typiquement le discours hétérosexiste du pourtant courageux Bobby Oscar López, le discours des personnes homosexuelles de Homovox en France, ou de Jean-Pier Delaume Miard dans La Manif Pour Tous), centrés uniquement sur la filiation, finissent par faire diversion sur les débats traitant des actes homosexuels, par nous orienter sur la justification voilée d’un « amour homosexuel chaste y discret » qui ne poserait pas problème s’il ne se politisait pas ou s’il ne se voyait pas publiquement. Ce discours paraît louable. Mais il flatte en chacun de nous un fond d’homophobie gay friendly.
À mon avis, la seule manière d’être justes et vraiment évangéliques dans nos mots sur l’homosexualité et le « mariage gay », c’est de se détacher de l’argumentaire anti-lobby LGBT ou uniquement centré sur l’enfant ; c’est de parler de continence et des actes homosexuels privés aussi. Il n’y a pas d’autre chemin. Sinon, on reste dans une logique de paraître, d’images, de points de vue, sans regarder le Réel. On n’avance pas, et on ne voit pas que Dolce & Gabbana tiennent finalement le même discours et posent quasiment les mêmes actes qu’Elton John qui appelle pourtant au boycott de la marque Dolce & Gabbana : ils ne vont juste pas aussi loin les uns que les autres dans les excès d’une pratique homo qu’ils justifient quand même tous les trois par leur croyance en « l’amour » homosexuel. La polémique entourant la guerre entre Elton John et Dolce & Gabbana est en réalité une fausse bataille, un débat de diversion, un écran de fumée alimenté par les personnes homophobes et les personnes gay friendly : les unes comme les autres justifient (dans la diabolisation ou la sacralisation) l’« identité » ou l’« amour » homosexuels, quand en réalité il ne faudrait que les expliquer pour les invalider. Elton John, Dolce & Gabbana, malgré la mise en scène médiatisée de leur opposition, servent une seule et même idéologie sentimentaliste et asexuée (les seconds sont juste plus mesurés, moins jusque-boutistes et logiques que le premier : c’est tout…). « Je ne suis ni Dolce & Gabbana, ni et encore moins Elton John » !
P.S. 1 : Je me rends compte, en recevant des mails de certains amis, que personne n’a lu mon livre L’homophobie en vérité, et donc que beaucoup de cathos se délectent de cette polémique Dolce&Gabbana vs Elton John, pour les mauvaises raisons, sans comprendre le problème de fond, et sans voir que les 3 célébrités tiennent à peu de choses près le même discours. On retrouve exactement le même problème d’incompréhension de l’homophobie dans les rangs LMPT. Ça me désole, la paresse, la haine et l’absence de réflexion. Je sens que je vais avoir affaire à la même montagne d’incompréhension samedi prochain après la projection de « Guillaume et les garçons à table! » au Cinéforum à Rome… Je reste zen et patient.
P.S. 2 : Et Frigide Barjot qui applaudit Dolce & Gabbana… Vraiment, mais y’en a qui ne comprennent rien à rien à l’homosexualité et au « mariage pour tous ». C’est un truc de dingues…
P.S. 3 : D’autres liens renvoyant à des interviews qui sont sorties dans des revues en espagnol, français ou italien (dont une inédite à INFO CATÓLICA, et trois sur l’affaire Dolce & Gabbana) : 1 – Entrevista « Sin pelos en la lengua » de Remedios Falaguera en la revista INFO CATÓLICA ; 2 – Interview « Entrevista con Philippe Ariño ‘Dolce y Gabbana son unos hipócritas: defienden la diferencia de sexos, pero la difuminan en su pareja’ » sur ALFA Y OMÉGA par JM Ballester (en espagnol ; traduction française) Cette interview arrive après l’article de Jean-Pier Delaume-Myard qui se dit « homo mais pas gay » et qui offre du prêt-à-penser aux anti-mariage-pour-tous qui veulent un discours anti-lobby-LGBT, nataliste, hétérosexiste, le plus simpliste possible ; 3 – Entrevista « Philippe Ariño: un omosessuale « atipico » » en ZENIT ITALIA por Franco Olearo (en italiano ; traduction en français) ; 4 – Ma critique « La Décharge des stylistes Dolce & Gabbana contre le mariage gay et l’adoption : la fausse solution. » ; traducción española « Descarga de los estilistas Dolce & Gabbana contra el matrimonio gay : la falsa solución. ») suite à l’annulation puis la substitution de mon interview à RADIO VATICANA par celle, affligeante, de Jean-Pier Delaume-Myard)
Vous retrouvez toutes ces interviews à la rubrique « Le Phil de l’Araignée » de mon blog.