Je rajoute à mon article celui qui l’a précédé, par rapport au livre d’Arthur Herlin, Thérèse Hargot et Mgr Gobilliard Aime, et ce que tu veux, fais-le !. Ci-dessous, je cite la critique incendiaire du Père Louis, prieur de l’abbaye du Barroux, à l’égard de cet ouvrage, et commenterai ensuite cette réaction.
« Thérèse Hargot, ça suffit !
Aime, et ce que tu veux, fais-le ! C’est le titre du livre paru en avril 2018, écrit à deux voix par Mgr Emmanuel Gobilliard et la sexologue Thérèse Hargot, où les auteurs répondent aux questions du journaliste Arthur Herlin. Le sous-titre du livre, Regards croisés sur l’Église et la sexualité, laisse espérer que l’éclairage d’une professionnelle vienne opportunément compléter et soutenir sur le plan scientifique et humain la parole d’un pasteur de l’Église en matière de sexualité.
Hélas !, après avoir lu les propos lumineux de Mgr Gobilliard, je crains que les lecteurs tombent de haut en découvrant ceux de T. Hargot : « Heureusement que vous avez la masturbation ! répond-elle à des religieuses, c’est le seul moment où votre corps est touché, vos pulsions évacuées, votre sexe considéré » (p.79). Même si elle précise qu’elle dit cela « pour provoquer », cette provocation est insupportable, laissant entendre que la masturbation pourrait être facteur d’équilibre ! On ne voit pas que Mgr Gobilliard ait eu la possibilité de répondre à cette affirmation honteuse. Et on pourrait citer bien d’autres passages lamentables, comme : « l’Église est mal à l’aise pour parler de sexualité à ses consacrés » (p.27), et : « À force de maladresses, on aurait plutôt envie qu’elle se taise ! Elle a trop dit, mal dit. Ras-le-bol (…) Pour qu’elle cesse d’apparaître comme “donneuse de leçons”, il y a donc deux options aujourd’hui : soit l’Église décide de se taire sur ces sujets, soit elle décide de se former. Par pitié, qu’elle se forme ! » (p. 32 à 35).
Mais pour qui se prend-elle, cette jeune sexologue qui a à peine dix années d’expérience, pour faire elle-même la leçon à l’Église ? Certes, le jansénisme a laissé des blessures durables, mais le magistère récent a admirablement parlé de la sexualité. Quant aux Pères de l’Église et aux auteurs du Moyen-Âge, c’est avec une très grande liberté qu’ils ont commenté les images érotiques audacieuses de la Bible. Par pitié, qu’elle se forme, Thérèse, avant de salir l’Église en rapportant des propos de consultations avec quelques prêtres et religieuses ayant des difficultés avec la chasteté ! C’est un peu facile de ridiculiser ainsi les consacrés et de faire ricaner toute la galerie, en laissant croire que tous ceux qui vivent le célibat consacré sont des refoulés sexuels plus ou moins déséquilibrés. Et vous, Thérèse, parlez-vous avec justesse aux consacrés en leur suggérant la masturbation ? Et aux jeunes, n’avez-vous jamais “trop dit” ou “mal dit”, en utilisant un langage encore plus “trash” qu’eux ? Or, ce sujet exigerait tellement de tact et de délicatesse ! Ils en attendent une parole, certes, simple et directe, mais surtout, belle et attirante. Ne sont-ils pas déjà saturés, par ailleurs, d’une sexualité banalisée et écœurante à force d’être vidée de son mystère et rabaissée à une simple technique de jouissance ?
C’est sympathique de voir une jeune sexologue avoir l’audace d’affirmer que « la contraception est le plus grand scandale du siècle » et dénoncer vigoureusement les dégâts de la pornographie avec des réparties vives et pleines de bon sens. Toutefois, sa vision purement horizontale et écologique de la sexualité, déconnectée du don total de soi, n’est ni chrétienne ni humaine ! Quelle image de la féminité offre-t-on à nos jeunes en leur faisant écouter cette sexologue au style provocateur et au ton arrogant ? Qu’est ce donc que les catholiques en attendent pour aider leurs enfants à admirer et à respecter le mystère de l’amour et de la vie ? Saint Jean-Paul II nous a laissé une magnifique théologie du corps, dont nous sommes loin d’avoir tiré toutes les richesses… théologie du corps que T. Hargot a eu l’odieuse prétention de critiquer, en prétendant sur son blog qu’elle « pouvait avoir les mêmes effets désastreux que la pornographie sur la sexualité », l’une idéalisant la sexualité par le haut, et l’autre par le bas ! Stop ! Trop, c’est trop ! Qu’elle se taise, elle aussi ! »
Père Louis, prieur de l’abbaye du Barroux
Mon avis : Je trouve que ça balance dur… et par toujours bien. J’en pense que cet article est à la fois mérité mais trop peu proposant et argumenté. Les moines du Barroux (ou plutôt celui qui les représente) identifient intuitivement un problème réel… mais ne donnent pas les arguments pour en sortir. Ils sont dans la réaction (défensive), l’indignation (bien compréhensible), mais très peu dans la réflexion et l’identification du problème. Rappeler la Théologie du Corps de Jean-Paul II, ou encore l’épanouissement du célibat consacré, c’est un peu maigre. Ils ne nomment pas le mal car ils ne l’ont pas identifié – l’hétérosexualité -… ce qui ne leur enlève en rien le mérite d’avoir réagi, car un livre pareil doit être dénoncé. Par ailleurs, ils restent également cantonnés à un cléricalisme qui les aveugle, étant donné qu’ils tapent sur Thérèse Hargot pour mieux auréoler Mgr Gobilliard et son statut ecclésiastique … alors que c’est quasi bonnet blanc et blanc bonnet. Bref, pour moi, ça sent chez eux la susceptibilité puritaine et la déférence mondaine. À mon avis, le prieur a perdu son sang-froid et a manqué de discernement car il n’a dénoncé que la moitié des coupables du forfait.