Mon coloc Abdel est vraiment un saint ! Il est loin d’être parfait… mais c’est quand même un saint (musulman).
Ce matin, dans une conversation qui s’annonçait anodine, il m’offre un verre de thé marocain, comme il sait bien le faire… et là, il me parle très humblement de l’acte de justice qu’il a opéré jeudi de la semaine dernière, il y a 8 jours (le 27 juin), dans son restaurant à Clichy : un de ses clients s’est fait voler tous ses papiers, son porte-feuilles et son ordi portable, par un gang de trois voleurs qui ont ensuite pris la fuite en bagnole. Abdel ne s’est pas démonté. Il est monté sur le scooter d’un Renoi qui passait par là, ils ont rattrapé la voiture, et Abdel a récupéré toutes les affaires dérobées du client, a empoigné l’un des gars, à qui il aurait pu clairement casser la gueule… mais il s’est arrêté quand il l’a entendu parler arabe, comme lui… et en une fraction de seconde, il a pensé à son peuple, à la mère de ce pauvre garçon, aux emmerdes, à la tristesse et à la honte que ce règlement de compte aurait générées, et il s’est arrêté, l’a relâché, et les a laissés partir. Il est revenu au resto, a été célébré comme un héros par la clientèle et tous les commerçants de son quartier qui ont assisté à la course-poursuite. Abdel est tellement généreux que même le petit pourboire de remerciement/récompense (15 euros) que lui a filé l’heureux (mais quand même radin) client ayant récupéré ses biens, il l’a partagé avec une de ses collègues serveuses. C’est dire son détachement par rapport au matériel et même à la gloire humaine ! Et pour ce midi, il a partagé avec moi le poulet frit que l’un des vendeurs bengalis de son quartier, témoin de la scène, lui a offert (c’est d’ailleurs en demandant l’origine de ce cadeau qu’Abdel a commencé à raconter son haut fait de la semaine dernière!).
J’étais stupéfait de ce qu’il me racontait, ému jusqu’aux larmes de son humilité, de son courage, et gentiment en colère qu’il m’ait averti aussi tard (« Ce n’est que maintenant que tu me racontes ça ?!? Mais t’es un ouf, toi !! »). Je suis fier de lui, et surtout « de Jésus en lui » (lui, en m’entendant dire ça, m’a corrigé en se marrant : « Tu es fier de Allah en moi » ! haha. « Nan nan. De Jésus en toi ! » ai-je insisté). Je sais que, même si on retrouve les voleurs de notre cambriolage d’avril dernier, il agira avec force, justice et sainteté.