« Seigneur, donne-nous des prêtres!! (… mais pas homos) »

Deux scènes accidentellement pathétiques et cocasses à la fois, à la messe de ce midi à Paris :
 

– Pour clôturer l’office, le prêtre prie bien fort, dos à l’assemblée, les bras grands ouverts levés au ciel, Jésus et la Vierge Marie, en invoquant aussi par la même occasion les anges et plein de saints, afin de « donner à l’Église des prêtres et de susciter ici-même des vocations » ! Moi qui connais la composition de l’assemblée, et au moins 3 jeunes hommes dans ma situation (à savoir qu’on est tout donnés à l’Église, tout offerts, et pourtant jetés des séminaires parce qu’homosexuels, exclus de la prêtrise, et certains d’entre nous sont même bien plus occupés et utiles à l’Église que des prêtres ! Par exemple, j’en connais un qui ne pourrait jamais exercer autant de tâches pour l’Église s’il avait été ordonné!), je souris amèrement en moi-même et trouve la situation bien ironique en même temps que révoltante. Car quelle injonction paradoxale, ou quelle supplication contradictoire. « Seigneur, donne-nous ceux qu’on a là sous nos yeux et qu’on refuse/boude! On veut des prêtres, mais pas les réels, pas ceux-là que tu nous donnes! » Ça me fait penser au détournement parodique qui avait été fait de l’affiche de Nicolas Sarkozy pour sa campagne aux élections présidentielles de 2007 « ENSEMBLE TOUT DEVIENT POSSIBLE » (sorte de « Yes, we can »), avec un ajout en lettres minuscules « ENSEMBLE (sauf les pauvres, les étrangers, les RMIstes, la gauche, l’extrême gauche, les communistes, le CDI, les homosexuels, les intermittents, les séropositifs, les handicapés, un ministère de l’éducation, de la culture, les journalistes indépendants, les Noirs, les Arabes, les Noah, les Thuram, et le mec qui m’a piqué ma femme…) TOUT DEVIENT POSSIBLE. » Version ecclésiale, ça pourrait donner: « SEIGNEUR, DONNE-NOUS DES PRÊTRES!… mais pas homosexuels, pas trans, pas divorcés, pas névrosés, pas dépressifs, pas fragiles, pas cabossés, pas tatoués, pas handicapés, pas Noirs, pas étrangers, pas mariés, pas malades, pas incultes, pas mal élevés, pas âgés, pas pauvres, pas inexpérimentés, pas militants, pas publics, pas activistes, pas clivants, pas antivax, pas de gauche… ». Le pire, c’est que c’est ce qui se passe. Rien d’étonnant qu’il n’y ait plus de prêtres. Je comprends pourquoi un de mes amis tourangeaux – qui aujourd’hui a finalement réussi à être ordonné prêtre – avait sorti au micro de sa paroisse, lors d’une journée de prière pour les vocations, une phrase qui avait choqué toute l’assistance : « Pas la peine de prier pour les vocations. Vu votre manière et sur quels critères discriminants vous excluez les vrais gens appelés! »
 

– Par ailleurs, l’organiste – qui est un ami – m’a fait rire, car il a joué (et ce n’était pas de son initiative) l’air d’« America » de la comédie musicale West-Side Story pour la transformer en Alléluia. Et sur le coup, j’ai trouvé ça choquant, et je suis allé lui dire que je n’avais pas apprécié le détournement. De toute façon, il avait vu mon désaccord et ma consternation en simultané. Et je lui ai dit : « Et pourquoi pas, tant qu’on y est, un Alleluia sur l’air de ‘Sans Contrefaçon’ de Mylène Farmer? » haha. « Puisqu’il faut choisir, à mots doux je peux le dire, sans contrefaçon, je suis un garçon » = « Allélu ou ya a a allélu ou ya, allélu ou ya, allélu ou ya ». Ça fonctionne à merveille!