Profession : démonologue. Quand Philippe Muray affirme, dans Festivus festivus (2005), que « Ce n’est pas de chercheurs sociologues ou de prétendus philosophes que ce monde a besoin, c’est à proprement parler de démonologues. Il faut, et je ne m’excuse pas d’employer ce langage quasi médiéval, des spécialistes de la tentation ; du moderne en tant que tentation démoniaque. (…) Il faut inventer une nouvelle démonologie, cela me paraît être la mission de la littérature d’aujourd’hui. » (pp. 24-29), je suis complètement d’accord. La tentation et les fonctionnements du diable m’ont toujours passionné. C’est d’ailleurs un travail de démonologue que j’ai tenté de faire en traitant dans mon livre de la merde, du mal, des satanismes collectifs, des dictatures et des dictateurs, des techniques amoureuses homosexuelles et des paradoxes du libertin, des manoeuvres et du cheminement bien-pensant du diable. Nous avons à nous frotter au mal (sans agir pour autant comme lui). Au mal qui est en chacun de nous et qui est universel. Au mal qui n’en supporte pas le nom (car n’oublions pas que satan se déteste, ne veut pas entendre parler de lui). Nous avons le devoir de nous approcher du mal, sans peur d’être magiquement contaminé par lui. Avec humour et finesse. Nous avons à parler du mal en tant que force inférieure au Bien, à tenir tête à ces diabolisateurs manichéens laïcards qui ne veulent pas qu’on prononce le mot « mal »… mais qui pourtant partagent précisément le monde entre amis du mal (qu’ils ne seraient jamais, évidemment) et ennemis du mal (qu’ils seraient toujours dans l’idée… mais qu’ils sont rarement dans les faits et les pensées). Il ne s’agit pas du tout de se lançer dans une « croisade contre le Mal pour s’innocenter à son contact », mais bien d’identifier le mal en soi, de se l’attribuer un peu, et de comprendre sa logique démoniaque agissante en soi et chez les autres (car logique, mécanique et rouerie, du mal il y a!) pour mieux le combattre et ne pas le justifier inconsciemment dans un relativisme bien-pensant ou une extériorisation systématique sur les autres. La littérature est un combat, et un combat spirituel pour la définition du mal et en faveur du plus réel des réels : Jésus vivant, amour ressuscité. Écrire c’est tâter le diable en soi. »