Du plus loin que je me souvienne, et si je suis vraiment honnête avec moi-même, mon désir homosexuel est apparu au moment de mon enfance où j’ai eu peur : peur de mon corps, de mon unicité, de ma liberté, de ma singularité, du Réel, du monde, des autres, des groupes. J’étais certes un enfant sage, souriant, prévenant… mais je cachais bien mon jeu. Je cherchais à être quelqu’un d’autre parce que mon image de moi-même et des autres était négative, me faisait souffrir. Parce que je ne me supportais pas. Dès l’âge de 5 ans, j’ai joué à la mauviette. À la boule d’hyper-sensibilité, fragile, qu’un rien ne casse, qui fuyait les autres et l’amitié car elle les voyait comme des menaces. Je sais que l’homosexualité est une blessure d’orgueil, qui donne raison à la peur, et qui, pour se justifier de le faire sans que ça se voit, use de l’excuse des goûts ou de l’esthétisme. Pendant toute mon adolescence, j’ai manqué de simplicité. J’étais une personne à l’orgueil blessé. Un adolescent trouillard, effrayé par l’effort et la nouveauté, choisissant des rôles de planqué. Un être paresseux en même temps que craintif, mal à l’aise avec le collectif, misanthrope, paranoïaque, mal dans ses baskets, orgueilleux. Toute personne homosexuelle, je crois, connaît tacitement le contexte peu glorieux de l’émergence de son désir homosexuel. Sa genèse boueuse.