Concernant la prise de parole des journalistes Frédéric Casadesus et Yasmina Jaafar sur la chaîne CNEWS au sujet de la polémique des enfants handicapés adoptables par des « couples » homos, je suis étonné de la pauvreté – et plus que de la vacuité, de l’idéologisme – de leurs arguments pour soi-disant « élever le débat » et « agir pour faire évoluer les mentalités ». L’homosexualité dans un couple n’est pas neutre, et encore moins dans l’accueil d’une personne fragilisée par un handicap. Moi, je connais beaucoup de « couples » homos dans mon entourage à qui je ne confierais absolument pas de gamins; et je ne suis pas sûr que beaucoup de personnes handicapées soient demandeuses d’être élevées dans un « couple » homo (mais évidemment, s’est-on intéressé, au-delà du buzz, à ces enfants et aux personnes homos réelles? Non). Et ces journalistes, au lieu de ça, sortent des arguments idéologiques publicitaires et sans consistance : « Il faut que tous puissent adopter s’ils le désirent », « Il faut que ça évolue », « La France est en retard », « On n’est plus dans les temps anciens », etc. Que signifie les termes très subjectifs de « retard », d’« évolution », de « progrès », d’« ouverture », a fortiori quand dans les faits, la différence des sexes est rejetée ou transformée en « option » et en variable d’ajustement, et que donc à travers cette indifférenciation on se retrouve plutôt face une régression que face à une « avancée » ?
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La fin d’un monde arrive (Handicap et Gouvernement Mondial)
Comme je l’écrivais récemment, le Gouvernement Mondial de l’Antéchrist se sert du pouvoir émotionnel (et bien logique humainement parlant) du HANDICAP pour asseoir son hégémonie technologiste et imposer à toute l’Humanité le primat de la CAPACITÉ personnelle, du POUVOIR individuel, de l’optimisme performatif et combatif révolutionnaire, du SAVOIR-FAIRE. #JustDoIt #YouCanDoIt #Mélaniepeutlefaire.
Et personne ne dénonce cette instrumentalisation des personnes handicapées (mises à l’honneur par les maîtres du « Monde des X« , et vivant leur « quart d’heure de gloire télévisuelle » warholien), personne ne dénonce cet honteux marché de la vulnérabilité (car celle-ci est réelle et ressemble à une leçon de vie et d’espoir pour tous). Même la plupart des catholiques sacralisent la vulnérabilité en elle-même. On n’est pas dans la merde… Notre monde devient fou.
« La vulnérabilité est une force » : n’importe quoi !
Je n’en peux plus. Ils (les bobos cathos) vont nous bassiner encore combien de temps avec leurs histoires de « fragilité », de « solidarité », de « dignité » et de « vulnérabilité » (qui habillent en réalité leur misérabilisme, voyeurisme pharisien, douilletterie et lâcheté à prendre position sur des sujets vraiment importants)??
Je n’ai rien contre les personnes handicapées et fragiles (Notabene pour les cons), et je soutiens la Vérité selon laquelle le Christ transcende nos faiblesses : « C’est lorsque que je suis faible qu’alors je suis fort. » (Saint Paul). La question n’est pas là. C’est Jésus qui transcende nos fragilités. « La vulnérabilité n’est pas une force » en soi. Elle ne devient une force qu’en Christ, bon sang!
Cf. mon article sur le handicap.
Code n°48 – Différences physiques
Différences physiques
NOTICE EXPLICATIVE
Homosexualité : Le corps mal porté
La question tabou qui habite toute personne homosexuelle par rapport à l’homosexualité, et qui suit une croyance populaire relativement tenace et homophobe, c’est : Devient-on gay/lesbienne parce qu’on est laid(e) et qu’on n’a pas su plaire ? (sous-entendu : L’amour homosexuel est-il positif, vraiment libre, ou bien naturellement mauvais à la racine ?).
Cela vaut le coup de s’arrêter sur cette question, non pour y répondre et la justifier… mais pour la reformuler autrement:
Et si nous parlions de la haine de soi comme probable terrain porteur de l’homosexualité ? Et si nous abordions chez les personnes homosexuelles la question du mépris de son corps et de son sexe de naissance, un mépris « naturalisé » sous forme d’orientation sexuelle éternelle qui définirait un individu dans son entier pour éviter de se poser des questions et noyer le poisson ? Et si nous parlions ENFIN du lien entre corps biologique et désir (ou plutôt « manque de désir » dans le cas homosexuel) ?
Bizarrement, nos contemporains, en applaudissant à l’« identité homosexuelle », en validant/justifiant le désir homosexuel comme un désir d’amour, comme un signe de réconciliation extraordinaire avec son MOI profond, n’ont pas compris que le masque collé sur le visage des personnes homosexuelles n’était pas leur vraie peau, mais juste un cache-misère non pas d’une tête objectivement affreuse derrière, mais d’une honte existentielle et d’un manque d’amour de soi/des autres, encouragé par une société matérialiste violente qui privilégie la beauté plastique à la beauté du coeur, qui veut nous transformer en objets de consommation.
N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Haine de la beauté », « Différences culturelles », « Homosexualité noire et glorieuse », « Extase », « « Je suis différent » », à la partie « Diable au corps » du code « Ennemi de la Nature », à la partie « Foot » du code « Solitude », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.
Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.
1 – PETIT « CONDENSÉ »
Ce n’est pas la laideur qui rend les personnes homosexuelles. C’est le sentiment de laideur
Nous entendons toujours le même croyance absurde de la part des membres de la communauté homosexuelle : la conscience – parfois précoce – d’être fondamentalement différents des autres (cf. je vous renvoie avec insistance aux codes « « Je suis différent » » et « Différences culturelles » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels).
Cette différence homosexuelle dite « naturelle », « objective », « corporelle », qui ne serait pas le fruit d’un choix mais bien une donnée biologique voire génétique, repose en réalité sur des dissemblances physiques ressenties comme minoritaires, écartantes/écartées socialement, et qui deviennent ensuite, selon ce qu’en font l’entourage et la personne qui les porte, une « identité » intégrée mentalement et sexuellement. Cela peut provenir de la taille, de l’obésité, de la dentition, d’une voix suraiguë, de la maigreur, d’un handicap quelconque, d’une couleur de peau rejetée, d’un physique génériquement opposé au sexe biologique ou aux estampes des garçons et des filles télévisuels, d’un complexe de se savoir fragile, limité, ou insignifiant (la croyance et l’identification à l’Homme invisible rôdent…), etc. Difficile de ne pas faire le lien entre des physiques honteux d’eux-mêmes et l’affirmation d’une homosexualité. Cependant, ce lien n’est pas de causalité, mais de coïncidence, c’est-à-dire qu’il a été instauré davantage par le fantasme ou l’impression subjective que par la Réalité. L’homosexualité n’est pas une question de physique particulier – il n’y a pas de « corps homosexuel » (contrairement à ce que proclament certains militants homosexuels radicaux) – mais de rapport idolâtre à son corps et aux images médiatiques des corps sexués.
Pour moi, cette « différence physique homosexuelle » n’est ni vraiment innée ni vraiment acquise, ni totalement biologique ni à l’inverse totalement culturelle : elle est surtout symbolique, désirante, relationnelle ; elle a trait à un manque d’amour, à notre liberté fondamentale permise par notre unicité, unicité matérialisée entre autres par notre incarnation. Elle se joue dans les rapports de désir – des rapports souvent violents et peu pacifiés dans le cas du désir homosexuel – entre l’individu et son propre corps, et entre l’individu et le corps social.
Beaucoup de personnes homosexuelles ne se considèrent pas comme rentrant dans les canons de beauté mondialisés, ne sont pas, pour reprendre les mots de Pierre Loti, « leur genre », c’est-à-dire conformes au reflet projectivement valorisé d’elles-mêmes. La plupart d’entre elles n’ont pas cru en leur physique, n’ont pas désiré habiter leur corps sexué, ont refusé – puis adulé – le sport. Que cela soit à juste titre ou non n’est pas la question : la beauté d’une personne n’est pas mesurable à la plastique de son corps. Ce n’est pas tant le corps réel que la démarche, la manière de se tenir, un regard fuyant, une carcasse physique mal portée, la posture ou la stature chétive exprimant un « excusez-moi d’exister » qui indiquent une homosexualité. À l’âge adulte, il arrive que certaines personnes homosexuelles fassent payer leur sentiment de laideur physique aux autres en jouant les monstres qu’elles croient être, en accentuant leurs traits prétendument horribles par une humeur massacrante et une fierté provocatrice. « Verlaine vécut le drame de se croire tel : mal-né, environné sans fin de l’épouvante qu’il suscitait. » (cf. l’article « Poétiquement correct » d’Alain Borer, dans le Magazine littéraire, n°321, mai 1994, p. 40) Ou alors au contraire, elles se découvrent belles à vingt ans. Après des années de galère au collège et au lycée, l’heure de la vengeance esthétique sonne et la métamorphose est parfois spectaculaire. Elle ne dit pas pour autant une réconciliation avec soi-même : le narcissisme est souvent une auto-déclaration de haine déguisée.
2 – GRAND DÉTAILLÉ
FICTION
Dans certaines œuvres de fiction traitant d’homosexualité, le personnage homosexuel dit qu’il n’aime pas son corps. Je vous renvoie notamment au film « Les Complexés » (1965) de Franco Rossi, au film « Odio Mi Cuerpo » (« Je hais mon corps », 1975) de Leon Klimovsky, au film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant (avec Harvey évoquant ses grandes oreilles), à la chanson « Dieu a-t-il les oreilles décollées et le Front National » de Nicolas Bacchus, à la pièce Les Gens moches ne le font pas exprès (2011) de Jérémy Patinier, à la chanson « Qu’est-ce que t’es belle » de Marc Lavoine et Catherine Ringer, à la pièce Scènes d’été pour jeunes gens en maillot de bain (2011) de Christophe et Stéphane Botti (avec Chloé, l’hétéro rejetée à l’école parce qu’elle est rousse), etc.
En général, le héros homosexuel ne se trouve pas beau. Écoutez sa litanie de la dévalorisation de soi : « Je ne suis pas mignonne. » (Rinn, l’héroïne lesbienne de la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez) ; « Je suis petit, gringalet, moche. » (Marcel dans la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand) ; « J’aime pas trop ma mâchoire. » (le premier amant de Nathan s’adressant à ce dernier, dans le film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo) ; « Je suis maigrelet, maigre et laid. » (Ernst décrivant son adolescence, dans le roman J’apprends l’allemand (1998) de Denis Lachaud, p. 120) ; « Je suis d’une laideur ridicule. » (Emmanuel Fruges dans le roman Si j’étais vous (1947) de Julien Green, p. 193) ; « J’étais horriblement laid. » (Dzav parlant de lui quand il était enfant, dans la pièce Quand je serai grand, je serai intermittent (2010) de Dzav et Bonnard) ; « J’ai toujours su que je n’étais pas une enfant comme les autres. J’étais assez vilaine, bien sûr, vous n’en serez pas surpris. Grosse et terne, déjà. Et comme si ça ne suffisait pas, j’étais malade. Hémophilie sévère, m’avait-on dit un jour, sans plus de précision. […] Une barrière me séparait de mes camarades. Je n’avais pas le droit de shooter comme eux dans un ballon, ni de courir comme une folle dans la cour. » (Corinne dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 214) ; « Ednar ne vivait que pour survivre. Il avait tant morflé dans sa jeunesse, qu’il avait fini par se détester lui-même car il ne s’était jamais senti réellement bien dans sa peau. » (Jean-Claude Janvier-Modeste, dans son roman très autobiographique Un Fils différent (2011), p. 141) ; « Je suis moche, juif, pédé. Je fume de l’herbe pour avoir le courage de me regarder en face. » (Harold, l’un des héros homosexuel du film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Jane avait détesté la puberté, l’intrusion du sang et des seins, les messes basses entre filles et les invitations des hommes qui les suivaient en voiture en roulant au pas. » (Jane, l’héroïne lesbienne du roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 29) ; « J’ai vraiment un corps de base. Si j’étais une voiture, je serais sans option. Mon père m’a eue en soldes. C’est un radin. Moi, si je me mets à nue, je peux faire une pub pour Action Contre la Faim. Avec des mouches autour des yeux. » (Shirley Souagnon dans son concert Free : The One Woman Funky Show, 2014) ; « J’ai un corps lourd, pas attirant. J’ai la physionomie d’un clown. » (la figure de Sergueï Eisenstein, homosexuel, dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway) ; « C’est là ton problème : avoir cru qu’une femme ne pourrait pas être attiré par ton corps. » (Palomino, l’amant d’Eisenstein, idem) ; « À l’époque, je pensais que j’étais horrible. Ils me traitaient comme un chien galeux. » (Jean-Marie, homosexuel parlant de ses camarades scolaires, dans le film « Plaire, aimer et courir vite » (2018) de Christophe Honoré) ; « J’étais très maigre. Très seul. Tout le temps. On me surnommait le Corbeau blanc. » (Rudolf Noureev, dans le biopic « Noureev, le Corbeau blanc » (2019) de Ralph Fiennes) ; etc.
Par exemple, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, Vianney organise via internet un « plan cul » avec Mike, mais lui demande de venir chez lui qu’à la stricte condition d’arriver « les yeux bandés » : « Tu ne dois jamais voir ma laideur repoussante. » (p. 84) Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand se désigne lui-même comme un « thon ». Dans le one-man-show Jefferey Jordan s’affole (2015) de Jefferey Jordan, le héros homosexuel commence son spectacle en disant qu’il était Superman et qu’il s’est transformé en nabot homosexuel : « L’homme du futur, plus fort et plus résistant, s’est transformé en nain efféminé. » Le comédien tourne en dérision sa petite taille, et dit qu’il aurait aimé être grand, blond aux yeux bleus : « 1m66, ça fait marrer. »
Cependant, ce sentiment paranoïaque d’être différent peut se fonder chez le héros homosexuel sur un substrat de réel : un handicap ou une difformité perçue comme minoritaire socialement parlant : « Je pense à mon corps maigre, à mon grand nez pointu. » (le narrateur homosexuel du roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 39) ; « Sir Philip regardait Stephen lorsqu’elle jouait avec les chiens dans le jardin, il observait la curieuse impression de force qui se dégageait de ses mouvements, la ligne allongée de ses membres – elle était grande pour son âge – et l’équilibre de sa tête sur ses épaules plus larges qu’elles n’auraient dû l’être. » (le père décrivant sa fille lesbienne Stephen, dans le roman The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928) de Marguerite Radclyffe Hall, p. 36) ; « Cette boule-là, c’était la confirmation que j’étais pas comme les autres. » (Gérard, l’un des héros homosexuels, racontant qu’à 16 ans il a eu peur d’une ex-croissance, dans la pièce En ballotage (2012) de Benoît Masocco) ; « Willy était toujours malade. » (Éa parlant de Willy, le gamin transgenre M to F qui se prend pour une fille, dans le film « Le Tout Nouveau Testament » (2015) de Jaco Van Dormael) ; « J’étais un enfant à la santé fragile. » (Willy, idem) ; etc. Physiquement, le personnage homosexuel n’est pas toujours « gâté » par la Nature : on peut penser à Devotee, l’homosexuel privé de bras et de jambes dans le film « Devotee » (2008) de Rémi Lange. Dans le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro, Léo, le héros homosexuel, est aveugle de naissance et n’a aucune idée de sa beauté plastique.
Dans la pièce Nous deux (2012) de Pascal Rocher et Sandra Colombo, Bernard, le héros homosexuel, raconte que quand il était petit, il était dyslexique et prenait des cours de rattrapage tous les samedis. Il marchait les pieds en canard et avait les oreilles décollées. Il louchait, ce qui l’obligeait à porter des lunettes. Il était appelé « Nanard, le vilain p’tit Canard » par ses camarades. Un tel traumatisme lui a, selon lui, bloqué la parole et lui donnait l’air d’« un autiste ». Et une fois arrivé à l’âge adulte, il complexe d’avoir une petite bite. Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, Adam, le héros homosexuel, est complexé par la taille de son sexe anatomique. Il va même faire un coming out pour assumer ce dernier, et descendre son pantalon devant tous les camarades de son lycée à la cantine.
On découvre peu à peu que le problème soi-disant « physique » du personnage homosexuel sort du cadre strictement naturel et privé du corps individuel, et concerne en fait une réalité relationnelle, désirante, sociale, un manque (ou un trop-plein) d’amour qui n’a rien à voir en soi avec son corps objectif : « À cette date, Olivier était un garçon très maigre, avec un appareil dentaire et des lunettes, timide et solitaire. Il était le souffre-douleur de la classe tout entière. » (Olivier, le personnage homo du roman Le Musée des amours lointaines (2008) de Jean-Philippe Vest, pp. 69-70) ; « Je me croyais malingre, mal bâti, rachitique, principalement parce que je ne plaisais pas aux filles. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « La Chaudière » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 20) ; etc. Par exemple, dans le one-man-show Presque célèbre (2010) de Thomas VDB, Freddie Mercury a les « dents en avant parce qu’il suce des bites ».
Le héros homosexuel semble avoir des problèmes physiques (phobies, allergies, maladies bénignes…) liés davantage au psychique qu’à son corps extérieur… même si ce dernier finit par être le signe visible de son traumatisme interne. « Je suis fragile, moi. J’ai eu les oreillons petit. » (Yoann, le héros homosexuel, dans la pièce Ma belle-mère, mon ex et moi (2015) de Bruno Druart et Erwin Zirmi) Par exemple, dans le film « C.R.A.Z.Y. » (2005) de Jean-Marc Vallée, Zac est asthmatique ; dans le film « My Own Private Idaho » (1991) de Gus Van Sant, Scott est neurasthénique ; dans le film « Elle ou lui ? » (1994) d’Alessandro Benvenuti, Leo est victime d’allergies ; dans le film « Guillaume et les garçons, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne, Guillaume, le héros bisexuel, fait des crises de tachycardie dans les dortoirs du collège ; etc. Le personnage homosexuel est généralement cru et encouragé dans sa douilletterie, dans sa simulation de maladie : « On lui avait recommandé de ne pas courir : le docteur Caronade […] interdisait à Fabien tout exercice violent. » (Julien Green, Si j’étais vous (1947), p. 19) ; « Je suis allergique au pollen. » (Alan Turing, le mathématicien homosexuel, dans le film « Imitation Game » (2014) de Mortem Tyldum) ; etc. Trop dorloté, le personnage homosexuel est aussi trop peu reconnu dans sa peur d’exister : « Ta scarlatine à dix ans, tu n’avais pas eu des tas de misères auxquelles les médecins ne comprenaient rien ! et puis ta bronchite chronique l’année de ton volontariat… » (la mère dans le roman Génitrix (1928) de François Mauriac, pp. 29-30)
Ce n’est pas tant le corps visible que le corps invisible, fantasmé, insignifiant, non-désiré, qui tourmente le personnage homosexuel : « Je crois que mon plus gros problème est d’être jeune et beau. C’est mon plus gros problème parce que j’ai jamais été jeune et beau. Oh bien sûr j’ai été beau, et Dieu merci j’ai été jeune, mais les deux en même temps jamais. De toute façon, ça ne se remarquait pas. » (Arnold, le héros homosexuel du film « Torch Song Trilogy » (1989) de Paul Bogart) ; « Vous auriez tant voulu être beau. […] Vous êtes quelconque… […] Quelques centimètres vous manquent. » (la voix narrative s’adressant à elle-même, dans le roman N’oubliez pas de vivre (2004) de Thibaut de Saint Pol, p. 123) ; etc.
C’est le corps trop désiré d’une vedette, une projection narcissique sur grand écran ou sur magazine, qui lui fait dévaluer son propre corps, par comparaison. « J’aurais aimé beaucoup de choses. J’aurais aimé être beau. » (Éric Caravaca dans le film « Dedans » (1996) de Marion Vernoux) ; « La seule chose que j’ai toujours voulue est d’être beau. » (Albert dans le roman Mademoiselle de Maupin (1835) de Théophile Gautier); « Il n’était pas aussi beau qu’il l’aurait voulu. » (Fabien dans le roman Si j’étais vous (1947) de Julien Green, p. 35) ; « ‘J’ai longtemps voulu être admiré, pensa M. Fruges. J’ai enragé de ma laideur.’ » (idem, p. 168) ; « De toute façon, je vois pas pourquoi j’me fais chier. Chuis pas normale. » (Marie, l’héroïne lesbienne par rapport à sa musculature, dans le film « Naissance des pieuvres » (2007) de Céline Sciamma) ; etc.
On découvre que l’impression de vilenie vient du refus de se reconnaître unique, d’accepter ses limites corporelles : « Solitaire dans mon photomaton, j’suis pas belle. » (cf. la chanson « Amélie m’a dit » d’Alizée) Le héros homo n’aime pas son corps parce qu’au fond il dévalorise les autres ou au contraire les idéalise : « Malcolm est même trop beau pour moi, moi qui n’ai jamais eu aucune assurance sur mon physique. » (Adrien dans le roman Par d’autres chemins (2009) d’Hugues Pouyé, p. 60)
Le héros homosexuel est souvent attiré par ce dont il croit manquer corporellement (poils, muscles, poitrine, minceur, etc.), par un inaccessible corporel. Par exemple, dans le film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras, le jeune Dany, homosexuel au corps glabre, est attiré par les hommes très poilus du torse.
L’impression d’être « négativement différent physiquement » peut aller jusqu’à la négation de sa propre sexuation : « Vous savez, Collins, je dois être un garçon parce que je sens exactement comme si j’en étais un, je me sens semblable au jeune Nelson de l’image, là-haut. » (Stephen, l’héroïne lesbienne, à Collins, dans le roman The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928) de Marguerite Radclyffe Hall, p. 28) Le personnage homosexuel non seulement se trouve moche, mais en plus, peut avoir tendance à associer cette soi-disant laideur à son homosexualité pour ne pas remettre en cause le mépris qu’il se porte. « C’est laid, les gays. […] J’suis gay. » (les quatre personnages homos de la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel)
Le personnage homo n’est pas « objectivement » moche. Quand il se croit « quelconque », son insignifiance ne vient pas, en réalité, de son physique, mais de son attitude à ne pas se rendre aimable. Son impression de laideur est juste obsessionnelle : comme il ne correspondra jamais complètement au « reflet projectivement valorisé de lui-même » que ses fantasmes ont construit, son purisme esthétique lui fera dire qu’il est incurablement affreux : « Quand je me regarde dans la glace, je ne me trouve pas magnifique. » (Frank l’homo dans la pièce Fixing Frank (2011) de Kenneth Hanes) En somme, il ne sera jamais satisfait de lui parce que dans sa tête, il a décidé de ne pas l’être. Le mécontentement est une posture narcissique de principe chez lui : il serait magnifique qu’il n’en fera pas moins la gueule aux soirées. C’est tellement niais, de sourire ! C’est tellement con, la bonté ! Et, aussi paradoxal que cela puisse paraître, pour cet esthète, c’est tellement laid, la vraie beauté ! Seul le mépris ou l’indifférence trouve physiquement grâce à ses yeux.
Au lieu de se reconnaître tel qu’il est, il arrive qu’il pousse l’orgueil jusqu’à s’enlaidir exprès, et se présenter comme un ignoble monstre : « Ces derniers temps, mon corps a poussé dans tous les sens, mon visage est devenu un tableau de bord de supersonique, tous les matins je découvre de nouveaux boutons. Je suis repoussant, un spécimen au bestiaire de l’horreur. » (Ernst décrivant son adolescence, dans le roman J’apprends l’allemand (1998) de Denis Lachaud, p. 112) ; « À cause des blessures que j’ai reçues à la guerre du Pacifique, mon aspect physique est tel que tout le monde est révulsé à ma vue, au point de vomir ou même de s’évanouir. » (Garnet Montrose dans le romanJe suis vivant dans ma tombe (1975) de James Purdy, p. 10) ; etc.
Il y a parfois chez ce personnage homosexuel une forme de complaisance dans la paresse (une paresse qui a l’air éthique puisqu’elle se pare d’une sagesse stoïcienne : à quoi bon se fagoter comme il faut et se soigner physiquement puisque tout n’est qu’apparences et que tout passe ?), d’abandon complice à la laideur, d’héroïsme trouvé dans le fait de se laisser vaincre par le temps et la mort, de démarche militante à s’éloigner des poncifs physiques définis par la mode.
Dans l’extrême inverse, certains héros homosexuels redisent autrement leur haine du corps en devenant cette fois de vraies beautés à l’âge adulte. Il est rare que le personnage homosexuel revienne sur son passé ingrat (= un gras), sur la genèse de sa métamorphose corporelle, mais cela arrive quand même. Par exemple, dans la comédie musicale Sauna (2011) de Nicolas Guilleminot, un des clients du sauna avoue qu’il était obèse dans son adolescence, une « taille XXL, large comme une baleine » : « J’ai pas toujours été l’Adonis sculptural que vous avez devant les yeux. » Il nous fait comprendre que lui et ses compagnons au corps parfait sont en fait très mal dans leur peau, non d’être enfin parvenus à tailler leur corps selon leur convenance, mais parce qu’ils sont restés nombrilistes.
Ce n’est pas parce que le personnage homosexuel se dirige docilement vers les salles de sport qu’il aime pour autant son enveloppe corporelle. N’oublions pas que ce qui l’a motivé à la travailler, ce n’est pas l’amour de son corps : son corps ne sera que l’instrument d’une vengeance dirigée contre… son propre corps d’enfant ! C’est pourquoi le protagoniste homo peut tout à fait adopter le comportement apparemment contradictoire de Stephen, l’héroïne lesbienne du roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall : elle commence par dire « Je déteste toutes ces sortes de sports pour les filles. » (p. 78), puis se lance quand même tête baissée dans l’escrime et l’équitation : « La passion de Stephen pour la culture physique s’accrut et envahit la salle d’étude. » (idem, p. 79) Se considérer comme un objet d’adoration, cela ressemble à une démarche d’amour et de réconciliation avec soi-même, pour se sentir mieux dans sa peau : c’est en réalité une nouvelle forme de détestation de soi.
Beaucoup de personnages homosexuels, pour masquer leur haine d’eux-mêmes dans le narcissisme, versent dans l’homosexualisation de leur corps (ils parlent d’un « corps homosexuel »), autrement dit dans une forme d’eugénisme positif qui réduit les êtres humains à leurs fantasmes asexués de toute-puissance et à leurs pulsions sexuelles. Par exemple, dans son one-woman-show La Lesbienne invisible (2009), Océane Rose Marie explique que « LA lesbienne aurait l’index plus haut que l’annulaire ». Dans le film « Rafiki » (2018) de Wanuri Kahiu, les deux amantes Ziki et Kena s’amusent à s’habiller de vêtements féminins inhabituels pour Kena la garçonne : « Je te l’ai dit : mon corps est allergique aux robes. »
FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION
PARFOIS RÉALITÉ
La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :
Force est de reconnaître qu’il existe un lien de coïncidence (très connu par les personnes intéressées, mais si peu montré au grand jour, forcément…) entre laideur physique et homosexualité, entre complexes physiques et désir homosexuel. « Attends, Sonia, elle peut pas être lesbienne. Elle est trop belle. Tous les garçons, ils craquent sur elle. » (Clara, l’héroïne lesbienne s’adressant à sa meilleure amie Zoé qui lui annonce que la belle Sonia est également lesbienne, dans le téléfilm « Clara cet été-là » (2003) de Patrick Grandperret) Si les personnes homosexuelles n’avaient pas une sombre affaire de vengeance à régler avec leur propre corps/passé, jamais elles ne se sentiraient le besoin urgent d’aller se refaire une musculature de rêve dans les salles de sport ni une garde-robes impeccable et fashion pour être au goût du jour ; jamais certains artistes comme Océane Rose-Marie (qui, lors de son one-man-show La Lesbienne invisible (2009), part en guerre contre le « préjugé tenace » de la mocheté homosexuelle : « Je tiens à préciser que ce n’est pas la laideur qui rend les femmes homosexuelles. » ; traduction = « On peut être homo ET désirable ; si si, je vous assure, c’est possible ! » ou « L’homosexualité n’est pas une identité et un amour par défaut, motivée par un complexe, une peur, ou une souffrance »), ou encore des revues telles que Têtu (nous proposant des modèles gays « canons » pour leur couverture), ne s’insurgeraient autant contre la « fallacieuse réputation » de laideron-mal-dans-ses-baskets, de pauvre-type-incasable-et-pas-cool, de garçon manqué « pas baisable/mal baisée » ou de tapette quelconque sur la cour du collège, qui collerait à la peau de tout individu homosexuel (… en réalité, une réputation majoritairement colportée et pérennisée par les personnes homosexuelles elles-mêmes !).
Beaucoup de personnes homosexuelles disent explicitement ne pas aimer leur physique : « Je suis né le 30 mars 1933. […] J’étais très laid, un véritable petit singe. » (Jean-Claude Brialy, Le Ruisseau des singes (2000), p. 22) ; « Dès que ma mère a appris qu’elle était enceinte de moi, elle a hésité à me garder. Viens ensuite la naissance où l’accouchement fut une boucherie tant pour elle en perfusion de sang que pour moi avec l’oreille déchiré, je suis arrivé dès le départ dans la souffrance. […] À l’âge de 6 mois, méningite à haemophilus, les médecins ne savaient pas si j’allais en ressortir vivant, seul un groupe de prière a intercédé en ma faveur auprès du ciel pour que j’en ressorte indemne. » (cf. le mail d’un ami homo, Pierre-Adrien, 30 ans, reçu en juin 2014) ; « J’étais si complexé par mon corps malingre. » (Frédéric Mitterrand, La Mauvaise Vie (2005), p. 251) ; « Ce que j’ai trouvé difficile, c’est ma féminité, ma fragilité physique. » (un témoin gay dans l’essai Mort ou Fif (2001) de Michel Dorais, p. 47) ; « Je hais mon visage. » (le peintre britannique Francis Bacon dans le documentaire « Francis Bacon » (1985) de David Hinton) ; « J’ai été pendant l’enfance un vrai garçon manqué avant de me transformer à la puberté en une godiche timide, puis en boudin coincé vers vingt ans. » (cf. l’article « À trois brasses du bonheur » de Sophie Courtial-Destembert, cité dans l’essai Attirances : Lesbiennes fems, Lesbiennes butchs (2001) de Christine Lemoine et Ingrid Renard, p. 56) ; « Je me trouvais grosse et inacceptable. » (Louise Bourgeois parlant de son adolescence, dans le film documentaire « Louise Bourgeois : l’araignée, la maîtresse, la mandarine » (2009) d’Amei Wallach et Marion Cajori) ; « J’étais maigre, ils avaient dû estimer ma capacité à me défendre faible, presque nulle. […] Quand j’ai commencé à m’exprimer, à apprendre le langage, ma voix a spontanément pris des intonations féminines. Elle était plus aiguë que celle des autres garçons. Chaque fois que je prenais la parole mes mains s’agitaient frénétiquement, dans tous les sens, se tordaient, brassaient l’air. » (Eddy Bellegueule dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 16 puis p. 27) ; « Certains universitaires homosexuels, alors honnis et secrets, m’accordaient pleinement leur confiance et leur société, qui était instructive ; car, marginalisés par leur ‘vice’ comme moi par ma difformité, ils avaient spécialement développé leur culture, leur originalité ou leur talent ; ils faisaient généralement d’excellents professeurs. Passant moi-même pour un peu excentrique aux yeux du vulgaire, je me sentais comme normal en leur société. » (Paul Veyne, atteint d’une difformité physique à la tête, dans son autobiographie Et dans l’éternité, je ne m’ennuierai pas (2014), p. 159) ; « J’ai été mal dans ma peau jusqu’à l’âge de 20 ans. Je me trouvais moche, je ne plaisais pas. J’ai vite compris qu’il fallait que je séduise par autre chose que mon physique. J’avais l’humour caustique, un peu anglais. J’étais vieux à 20 ans et jeune à 40, l’âge où j’ai commencé à déboutonner mon corset. » (Stéphane Bern, Paris Match, août 2015) ; « Tu nais, coiffée de la tête jusqu’aux genoux, toute velue. » (la voix-off de Christine s’adressant à elle-même par le tutoiement, dans le docu-fiction « Christine de Suède : une reine libre » (2013) de Wilfried Hauke) ; « J’espère ne pas devoir faire les cours de natation. » (Isaac, femme F to M qui s’appelle initialement Taïla, dans l’émission Zone interdite spéciale « Être fille ou garçon, le dilemme des transgenres » diffusée le 12 novembre 2017 sur la chaîne M6) ; « Je me sentais pas du tout bien dans ma peau. » (Lucas Carreno, femme F to M, pendant le débat « Transgenres, la fin d’un tabou ? » diffusé sur la chaîne France 2 le 22 novembre 2017) ; etc.
Dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz, Christian, le dandy homosexuel de 50 ans, raconte son appréhension des salles d’éducation physique et sa peur des scènes de douches collectives dans les vestiaires. « C’est extrêmement difficile à vivre. J’ose à peine regarder les autres. Quand c’était intime, j’étais dans le malaise. »
Dans l’émission Radioscopie sur France Inter, le 6 mai 1976, quand Jacques Chancel demande à Jean-Louis Bory si « physiquement il se plaît », Bory lui répond spontanément : « Ah nan ! Devant ma glace, je ne me ferais pas ! » Il trouve qu’il a le pif énorme de son grand-père. Et il se rappelle avoir sorti une phrase qui avait blessé sa mère : « Tu aurais pu faire un effort avec papa pour me réussir physiquement parlant. »
La romancière lesbienne Carson McCullers est « cette adolescente trop grande et embarrassée d’elle-même se vivant comme ‘anormale’. » (Josyane Savigneau, Carson McCullers (1995), p. 198) Edmund White adolescent se sentait un Sissy Boy qui n’arrivait pas à « parler viril », à « paraître viril » (Edmund White, Un Jeune Américain (1984), p. 9). Marc Batard se décrit lui-même comme « le petit bâtard aux grandes oreilles » (Marcel Batard, sur le site www.e-llico.com, consulté en juin 2005). Yves Saint Laurent et Karl Lagerfeld ont porté, quand ils étaient tout petits, les cheveux longs. Jean Le Bitoux souffre pendant son adolescence de sa petite taille : « Je ne grandissais plus depuis des années. Je fus dix ans durant le plus petit de ma classe. » (Jean Le Bitoux, Citoyen de seconde zone (2003), p. 30) Pierre Loti ne supportait pas de ne mesurer qu’1,62 m… et c’est pour cela qu’il portait souvent des souliers à ressort ou à semelle compensée. James Dean, le gringalet solitaire, vivait mal sa petite taille et sa mauvaise vue (il gardait même ses lunettes au lit !). Le comédien Fabien Tucci a un cheveu sur la langue. Federico García Lorca zozotait et refusait qu’on enregistre sa voix lors des interviews. Le dramaturge Copi « a une voix de viole de gambe » (cf. la biographie Copi (1990) du frère de Copi, Jorge Damonte, p. 67). Suzy Solidor complexa de sa voix étonnamment grave, Tennessee Williams de ses jambes paralysées, Cy Jung de sa cécité de personne albinos (« Bigleuse à 8 ans. Maboule à 18 » écrit-elle dans Tu vois ce que je veux dire, 2003), Montgomery Clift de ses grandes oreilles ; Frida Kahlo de sa pilosité et de son corps accidenté ; Harry Glenn Milstead (Divine) de son obésité, Gastón Baquero ou James Baldwin de leur peau noire ; Truman Capote de sa petite taille et de sa voix suraiguë ; Violette Leduc, Paul Verlaine, ou Érik Satie, de leur physique prétendument disgracieux ; le chorégraphe Mehdi Kerkouche, de sa petite taille et de son efféminement. Par exemple, dans l’émission de speed-datings Et si on se rencontrait… sur M6 (diffusée le 2 mai 2022), Enrique, un Vénézuelien homo de 38 ans, de son propre aveu, a été obèse et a les oreilles décollées. Par ailleurs, j’ai très clairement en tête cette photo d’Andy Warhol (1958) de Duane Michals, où l’on voit justement le plasticien se cachant le visage avec les mains pour ne pas être vu : pour moi, c’est la photo de la haine de soi par excellence.
Ce qui est pervers dans cette histoire de la haine homosexuelle de son physique, c’est qu’elle peut parfois reposer sur un substrat de réalité, sur une difformité ou une laideur presque « objective » : une maladie, un handicap, un visage disgracieux, on ne les invente pas ! Cela s’impose à certains individus. Mais c’est à nous, êtres humains, de distinguer, parmi les contingences humaines, ce qui relève de notre liberté, et ce qui nous est imposé. Dans toutes les situations, y compris celles où notre marge de manœuvre est limitée, nous avons à comprendre que rien n’est une fatalité, pas même notre corps. Si on ne peut pas le changer, notre liberté s’exprime au moins dans notre manière d’y consentir ou de « vivre avec » le mieux possible. Il y a toujours une décision qui se joue en chacun de nous d’aimer notre corps ou de le rejeter. Et c’est vrai qu’on remarque chez les personnes homosexuelles une tendance au rejet plus qu’à l’acceptation. On le constate à leur posture et à leur démarche corporelle. « Physiquement, il ressemblait un peu à ses dessins : un être immatériel, un peu funambule, qui marchait à tâtons. » (Alfredo Arias en parlant de son ami Copi, dans l’article « Copi, ma part obscure » d’Hugues Le Tanneur, dans le journal Éden du 12 janvier 1999)
La haine de son corps est la marque d’une peur/misanthropie enfantine, d’un désir de se couper de ses semblables/de se fuir soi-même… et comme on somatise parfois, ce qui au départ n’était pas naturel peut donner l’apparence « naturelle » de la maladie ou de la phobie : « Je m’inventais des maladies pour rester à la maison. Mon père était au travail et je me sentais bien dans ce cocon auprès d’elle [ma mère]. Au point que j’allais devenir phobique de l’école. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), p. 18) ; « J’ai commencé à me détacher de ma mère. J’ai cessé de faire le malade. » (idem, p. 27) ; « Par souci de ma santé fragile et aussi pour éviter que je n’apprisse de vilaines choses, ma grand-mère m’avait interdit de jouer avec les garçons du voisinage. » (Yukio Mishima, Confession d’un masque (1971), p. 31) ; « Mon enfance fut maladive. On me diagnostiqua une maladie à l’époque où je ne connaissais pas encore l’existence de l’asthme. À cause de l’asthme, j’allais à l’école de manière sporadique. » (Patrick White cité sur le site www.islaternura.com, consulté en janvier 2003) ; « J’ai toujours vécu tellement protégé, quasiment sans sortir de chez moi. » (Frédéric Mitterrand, La Mauvaise Vie (2005), p. 78) ; « Par la suite, elle surveilla mon alimentation avec une telle affectueuse tyrannie que les repas de famille devinrent pour moi une véritable supplice de Tantale. » (Denis Daniel en parlant de sa mère, dans son autobiographie Mon Théâtre à corps perdu (2006), p. 17) ; « Jusque là, ma famille m’avait volontairement soustrait à l’épreuve d’éducation physique avec l’aide d’un tas de certificats médicaux. » (idem, p. 24) ; « Tu connais, chère amie, mes goûts avérés ou plutôt mes dégoûts et mes allergies ! » (idem, p. 65) ; « Une véritable peur de la vie résulta de sa façon de nous élever, mon frère et moi. […] Au début de ma tendre enfance, je n’ai été privé que d’une chose : jouer avec d’autres enfants. Ma mère prétendait que j’avais une santé fragile et me gardait constamment auprès d’elle. » (Jean-Luc, homosexuel, 27 ans, cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 76) ; « J’étais asthmatique et de terribles crises m’assaillaient parfois, me poussant dans un état plus proche de la mort que de la vie. » (Eddy Bellegueule dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 61) ; etc.
Dans la série des douillets homosexuels faussement/vraiment malades, jugés « naturellement différents » alors que leur corps n’avait bien souvent que la forme de leurs fantasmes, de leurs peurs inavouées, et de leur dégoût d’eux-mêmes inconscient, on retrouve par exemple le peintre Francis Bacon, qui, étant petit, souffrait d’asthme et dû suivre des cours particuliers. Couvé par sa mère, Andy Warhol avait peur d’aller à l’école et simulait des maladies telles que la scarlatine, les allergies, ou les crises nerveuses pour arriver à ses fins. Malcolm Lowry, quant à lui, était un adolescent douillet et fragile. Jean Cocteau faisait croire à de fausses appendicites, scarlatines, rubéoles, pour ne pas se rendre au collège, et sa mère cédait à tous ses caprices. Afin d’éviter les rigueurs de l’internat au lycée, Paul Verlaine fut placé sur décision de sa mère dans l’Institution Landry. Tennessee Williams ne pouvait pas faire de sport comme les autres parce qu’à 11 ans, il se retrouva avec les jambes paralysées. José Lezama Lima, Marcel Proust, et Raúl Gómez Jattin, n’ont pas été épargnés par les attaques d’asthme qui les écartaient des jeux des enfants de leur âge. Federico García Lorca, qui faillit mourir du typhus à 14 ans, n’aimait pas le collège, et prétextait son handicap aux jambes qui le rendait boiteux pour ne pas faire de sport. Montgomery Clift était allergique à la laine. André Gide simulait des crises nerveuses pendant lesquelles il hurlait : « Oh ! Je souffre tellement ! Je souffre tellement ! ». Durant sa vie d’adulte, Pierre Louÿs se croyait tuberculeux et se donnait peu d’années à vivre.
Ce que beaucoup de personnes homosexuelles ont du mal à intégrer, c’est que cette haine de leur corps, même si elle peut s’expliquer scientifiquement et visuellement, n’a rien de profondément objectif, fondé, justifié : c’est dans leur cœur et leur regard que le problème de la « laideur/différence » physique homosexuelle se joue ; pas ailleurs. « On me dit que je suis mignon, mais je ne me plais pas. » (Alexandre Delmar, Prélude à une vie heureuse (2004), p. 51) ; « Elle ne s’aimait pas et son corps, me semble-t-il, encore moins que le reste. Je pourrais écrire un florilège des expressions négatives dont elle se servait pour parler d’elle dans ses lettres : ‘une petite boulotte inculte’, ‘je me sens figée comme une vieille huile rance’, ‘tu vas serrer dans tes bras une bûche larmoyante’, ‘je tire au-dessus de ma tête le couvercle de ma poubelle’. Comment pouvait-elle se mépriser ainsi ? » (Paula Dumont par rapport à son amante Catherine, dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 170) Elles se focalisent sur un détail pour transformer ce dernier en énormité qu’il n’est pas : « Tout a commencé par le nez. J’avais un gros nez et personne ne voulait de moi. » (Harold Lang, cité dans l’autobiographie Palimpseste – Mémoires (1995) de Gore Vidal, p. 202) Le sentiment de laideur ne s’appuie pas sur la réalité, mais sur une jalousie par rapport aux modèles fantasmatiques médiatiques : « La forme d’amour la plus reculée dont je me souvienne, c’est mon désir d’être un joli garçon… que je voyais passer. » (Jean Genet cité dans la biographie Saint Genet (1952) de Jean-Paul Sartre, p. 99) ; « Je n’étais pas mon genre. » (Pierre Loti, cité dans le Dictionnaire des Cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 301) ; « De cette période, je sais également que j’enviais ma sœur. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, parlant de la beauté de sa sœur, dans le roman Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 75) ; etc. La dévalorisation de son corps vient surtout du rêve narcissique déçu de ressembler à ses héros cinématographiques : « On se demande pourquoi on a souvent tendance à oublier les héros de notre enfance tels que Robin des Bois, Spock et l’incontournable Superman auxquels on voulait ressembler, que ce soit pour leur physique ou leur témérité. Alors assumons, messieurs ! » (cf. l’article « Megging, Messieurs ! » de Monique Neubourg, dans la revue Sensitif, n°44, mars 2010, p. 54) Par exemple, dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, quand on demande à Yves Saint-Laurent quel est le don de la Nature qu’il aurait aimé avoir et qu’il n’a pas, il répond : « la force physique ».
C’est un rapport blessé/méfiant au corps qui peut indiquer une homosexualité : « À 8 ans, Gide entre à l’École Alsacienne. Il a peur de la plupart des autres enfants mais s’attache passionnément à deux garçons en particuliers. Ils ont en commun d’être pâles, fragiles et délicats, comme Gide lui-même. » (Virginie Mouseler, Les Femmes et les homosexuels (1996), p. 28). Qu’on le veuille ou non, il existe un lien entre désir homosexuel et misanthropie/haine de soi. « Il n’aimera jamais le sport. Il n’aura jamais confiance dans son corps. » (Jean-Paul Sartre à propos de Jean Genet, dans sa biographie Saint Genet (1952), p. 15) ; « Je ne me supporte plus moi-même. » (Nancy, un homme transsexuel M to F, dans le documentaire « Nous n’irons plus au bois » (2007) de Josée Dayan) ; « J’ai quatorze ans. Je ne suis pas très grand, plutôt frêle car je prends bien soin d’éviter les clubs de sport et je multiplie les excuses pour être dispensé des cours d’éducation physique au collège. » (Jean-Michel Dunand, Libre : De la honte à la lumière (2011), p. 18) ; « On voyait bien que Violette Morris n’était pas bien dans sa peau. Elle s’était coupée les seins. Elle avait des seins énormes. » (Marie-Jo Bonnet lors de sa Conférence « Violette Morris, histoire d’une scandaleuse », donnée le 10 octobre 2011 au Centre LGBT de Paris)
La volonté homosexuelle d’en finir avec son corps sexué peut aussi, malheureusement, résulter d’un manque d’amour et d’amitié dans la vie des personnes homosexuelles : « Jamais personne ne me dit que je suis belle. » (la femme transsexuelle F to M, portraiturée dans le documentaire « Le Genre qui doute » (2011) de Julie Carlier)
La honte originelle de son corps est tellement injustifiée et honteuse à révéler que certaines personnes homosexuelles ont trouvé la parade pour l’innocenter : elles la naturalisent, et créent une « espèce » anthropologique homosexuelle. L’expression « corps homosexuel » revient à différentes reprises : chez Monique Wittig (Le Corps lesbien en 1973), Jean Danet, Gregory Woods, Sylvain Ferez (Le Corps homosexuel en-jeu en 2007), Camilla Storgaard (et ses « corps queer »), etc. L’argument naturaliste du « corps homosexuel » ou de la supposée « laideur qui rendrait naturellement homo », même s’il est homophobe et fallacieux (ce n’est pas notre corps qui commande nos désirs ni notre manière de le regarder avec bienveillance), arrange bien des personnes homosexuelles qui ne veulent surtout pas faire état de leur rapport souffrant/complexé à leur propre corps, qui ne sont pas enchantées de découvrir leur liberté et leur responsabilité dans le mépris de leur personne, qui ne souhaitent pas que l’on fasse la correspondance entre leur honte existentielle et un probable viol qu’elles ont/auraient subi dans l’enfance (et dans lequel leur corps est fatalement impliqué). Elles finissent par se rendre compte que le désir homosexuel n’est pas une réalité objectivable comme d’autres réalités corporelles : « La différence entre être homosexuel et être Noir, c’est qu’être Noir, ça n’a pas à s’annoncer : ça se voit. L’homosexualité, ça ne se voit pas forcément. » (Lionel, témoin homosexuel interviewé dans l’émission-radio Je t’aime pareil d’Harry Eliezer, spéciale « Papa, maman, les copains, chéri(e)… je suis homo », diffusée le 10 juillet 2010 sur France Inter) Par exemple, dans son film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014), le réalisateur homosexuel Daniel Ribeiro a choisi de mettre sur le même plan l’homosexualité et la cécité. C’est forcément touchant pour l’homosexualité (en plus de la mettre à l’abri du jugement moral), mais c’est quand même faux et abusif : la cécité n’est pas, contrairement à l’homosexualité, de l’ordre du désir, mais est principalement de l’ordre corporel.
C’est généralement à travers l’art que la honte homosexuelle de son corps passe le plus inaperçue, trouve sa plus belle justification/cachette. Par exemple, la communauté homosexuelle a tendance à se choisir comme représentantes des chanteuses ou actrices à l’anatomie atypique (Juliette, Marianne James, Anne Roumanov, Chantal Ladesou, Rossy de Palma, Sylvie Joly, Valérie Lemercier, Lady Gaga, Brigitte Fontaine, Catherine Ringer, Juliette, etc. ; rien d’étonnant que la série télévisée Ugly Betty soit aussi homo-érotique !). Les créateurs homosexuels aiment mettre en scène des personnages socialement rejetés pour leur physique, au faciès peu publicitaire, voire carrément monstrueux : je pense à Tracy l’héroïne obèse de la comédie musicale Hairspray (2011) de John Waters, au Roi Jean le premier monarque sourd dans le film « Le Roi Jean » (2009) de Jean-Philippe Labadie, à l’Elephant Man (1980) de David Lynch, à Norma la femme défigurée du film « La Piel Que Habito » (2011) de Pedro Almodóvar, à la lilliputienne Jacqueline Mignot dans la nouvelle « La Césarienne » (1983) de Copi (« Elle était fort complexée vis-à-vis des autres femmes socialistes de sa génération », p. 65), à la Duchesse d’Albe dans la nouvelle « L’Autoportrait de Goya » (1978) de Copi (« Sa laideur jetait un froid autour d’elle. », p. 12), etc. Finalement, ils semblent vénérer davantage des spectres immatériels et des esprits de morts exposés dans un Musée des Horreurs, que des corps vivants, existants, et nous ouvrant à l’universelle incarnation.
Un peu comme chez certains gothiques qui prennent plaisir à s’enlaidir et à se tatouer de partout pour masquer leur mal-être corporel, certaines personnes homosexuelles font mine de rentrer volontairement dans le jeu de leur soi-disant « disgrâce congénitale ». Cela pourrait s’appeler l’inversion du stigmate en orgueil paradoxal : « Au lycée, son intégration n’est pas facilitée par son apparence physique. En quelques mois, elle est devenue une adolescente longue et maigre, qui ne tardera pas à atteindre, prématurément, sa haute taille d’adulte, 1,75 m. Ce ne fut sans doute pas très facile à vivre, mais la jeune fille en tire un sentiment accru de singularité. » (Josyane Savigneau, Carson McCullers (1995), p. 44) ; « Il se trouve simplement que je ne fais pas partie de celles-là. […] Je me suis toujours sentie moche, je m’en accommode d’autant mieux que ça m’a sauvée d’une vie de merde à me coltiner des mecs gentils qui ne m’auraient jamais emmenée plus loin que la ligne bleue des Vosges. » (Virginie Despentes à propos des femmes séduisantes, dans son essai King Kong Théorie (2006), p. 10) À l’âge adulte, il arrive que certaines personnes homosexuelles fassent payer leur sentiment de laideur physique aux autres en imitant les monstres qu’elles croient être, en accentuant leurs traits prétendument horribles par une humeur massacrante et une fierté provocatrice. « Verlaine vécut le drame de se croire tel : mal-né, environné sans fin de l’épouvante qu’il suscitait. » (cf. l’article « Poétiquement « correct » d’Alain Borer, dans le Magazine littéraire, n°321, mai 1994, p. 40) Alain Pacadis, après avoir eu honte de son physique, a entretenu l’image qu’il s’en faisait en devenant « crasseux, alcoolique et drogué, avec l’œil globuleux, le cheveux amidonné de gras, la démarche courbée par une scoliose soigneusement entretenue. » (cf. l’article « Alain Pacadis » de Didier Éribon, dans le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 349) Drôle de manière de prendre le pouvoir sur sa propre haine de soi… Parfois même, certaines célébrités homosexuelles se vengent de s’être crues aimées uniquement pour leur plastique : Marlon Brando, par exemple, se laissa complètement aller à la fin de sa vie, en devenant obèse et hideux. D’autres même se suicident parce qu’elles ne supportent pas de vieillir et de s’enlaidir. Ils opèrent un acte iconoclaste sur leur propre personne… comme s’ils se doutaient d’être vraiment faits de chair et de sang.
Je vous propose de passer outre cette comédie homosexuelle de la dévaluation/adoration de soi dans la destruction de son corps, pour aller à l’essentiel de mon propos : pour moi, la mocheté physique homosexuelle n’existe pas. Pas une seule personne homosexuelle n’est laide, en réalité. Vous m’entendez : pas une ! En revanche, je crois que beaucoup d’entre elles ne se rendent pas désirables (… et certaines vont même jusqu’à se rendre trop belles plastiquement pour se rendre inaccessibles et indésirables !) Je pense en particulier à ces nombreuses femmes lesbiennes qui, par paranoïa du viol/de la sexualité (paranoïa qu’elles n’avoueront pour la plupart jamais), s’enlèvent tout sex-appeal pour décourager les garçons de les draguer ; je pense à ces hommes gays qui s’abandonnent vestimentairement et physiquement parlant – ne me regardez pas comme ça, s’il vous plaît… – pour ne surtout pas « faire mec » et plaire ; ou bien à ces dandys qui affichent une arrogance et une sophistication tellement parfaites esthétiquement qu’ils sont très peu avenants, même physiquement.
C’est le rapport au corps qui est souvent laid chez les personnes homosexuelles ; non leur corps réel. En fin de compte, elles sont complètement à côté de la plaque quand elles parlent en mal de leur corps. Si elles devaient mépriser quelque chose dans cette affaire, cela devrait être uniquement leur manière de se comporter gestuellement et de se tenir, leur démarche parfois superficielle et hautaine/honteuse, leur manque d’amour d’elles-mêmes, leur relation haineuse/blessée/envieuse à leur propre corps et aux corps des autres en général.
Parfois, elles aiment trop leur physique pour l’aimer vraiment tel qu’il est (c’est à dire comme une matière sacrée et fragile à la fois), et s’en servent pour s’isoler des autres : « Mon caractère, ma façon d’être, de me vêtir me différenciaient des autres élèves. J’étais grand pour mon âge et, grâce à mes parents, à ma mère surtout, j’étais toujours vêtu avec recherche ; l’éducation que j’avais reçue faisait de moi, je l’avoue, un garçon assez précieux mais, à seize ans, bien des jeunes gens ressemblent à des filles. » (Jean-Luc, homosexuel, 27 ans, cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 82)
On a du mal à soupçonner cette haine de soi chez l’individu homosexuel bien fait, bien apprêté, très musclé, suffisant, fier de ses attributs physiques, narcissique à souhait, et sûr de son pouvoir de séduction donjuanesque. Qui, par exemple, ira voir dans l’assurance violente de l’acteur porno une auto-flagellation, une dévalorisation avilissante ? Et pourtant… se traiter comme un objet, n’est-ce pas autre chose que se détruire et s’enlaidir le cœur (et donc le corps) ?
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Jean-Baptiste Hibon : le Gogol de/au service
Jean-Baptiste Hibon, catholique pratiquant, homme marié de quarante ans, père de deux enfants, fortement handicapé suite à une erreur médicale à la naissance, s’exprimant avec grande difficulté et lenteur, mais qui a toute sa tête (et plutôt deux fois qu’une ! Son caractère bien trempé et son amour de la Vérité – qui m’ont fait craqué ! – contrastent complètement avec l’image de Quasimodo-débile-mental-boîtant qu’on peut avoir de lui à première vue), me l’a appris : Pas de pitié pour les victimes, car ce sont avant tout des PERSONNES LIBRES.
Je veux vous raconter un fait réel, que j’ai vécu avec lui il n’y a pas si longtemps. C’était à Lyon, en novembre dernier (2012). Nous étions en voiture. Jean-Baptiste au volant. Nous attendions au feu rouge. Et un homme estropié, sale, court vêtu, boitant avec sa béquille, faisait la manche, de voiture en voiture, en affichant une mine défaite pour apitoyer son monde. N’importe qui de normalement constitué se serait au pire réfugié dans une indifférence méprisante et banale, au mieux ému, en sentant la honte monter en lui d’« envoyer bouler » un infirme. Personne ne serait venu remettre en cause l’acte de cet homme, de peur de passer pour un raciste et un monstre d’insensibilité. Et là s’est produit un coup de théâtre que je n’attendais pas, qui m’a estomaqué. Jean-Baptiste a descendu manuellement la vitre de sa porte pour aller à la rencontre de ce mendiant qui faisait de ses moignons et de son handicap un fond de commerce et d’exhibition. Il lui a dit d’une voix forte, toujours avec son grand problème d’élocution : « Toi et moi, on est pareils ! ON EST PAREILS ! Tu donnes une mauvaise image. Tu donnes une mauvaise image de nous ! ». Il a remonté sa vitre et nous avons tracé notre chemin.
J’aurais pu mourir de honte sur place, liquéfié. J’aurais pu m’enfoncer dans mon siège et attendre que la gêne passe. J’aurais pu trouver que Jean-Baptiste y était allé un peu fort, qu’il avait manqué d’humanité, qu’il avait fait preuve du comble de la grossièreté. Mais au contraire. Je suis resté un moment coi. Puis je n’ai pas pu m’empêcher de sourire avec émerveillement. Intérieurement, j’étais convaincu que mon ami avait été juste et humain. Il n’avait pas succombé à une mauvaise compassion, celle qui encourage la personne qui se victimise à rentrer dans le paraître, et qui nivelle par le bas. En gros, Jean-Baptiste venait de dénoncer non pas le handicap de ce monsieur, mais ce qu’il en faisait : une caricature misérabiliste, un prétexte pour ne pas s’en sortir, un business où la relation humaine était complètement délaissée au profit du fric, de l’image et de la haine de soi. De l’extérieur, seul Jean-Baptiste aurait pu se permettre d’engueuler ainsi son semblable sans passer pour un ignoble personnage. C’est sa force et son privilège. Et inconsciemment, j’ai reconnu en lui la force, le culot, l’improbabilité, l’humour et la légitimité de ma position de « paradoxe vivant » et fragile parmi les personnes homosexuelles dont je passe mon temps à critiquer les actes, parce que, dans l’exigence, je les aime vraiment. Jean-Baptiste et moi, chacun à notre manière, sommes bipatrides. Ce sont notre handicap assumé et donné, notre écartèlement pour tendre à la Vérité dans la cohérence et le service, qui sont notre force de médiateurs-serviteurs, qui font de nous des signes de contradiction puissants et culottés.
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Réponse de Jean-Baptiste Hibon (janvier 2013) :
« Le Système H. J’ai rencontré Philippe Ariño cet automne, après avoir vu une vidéo où il analysait l’homosexualité, appuyé sur son expérience personnelle, qu’il livre avec une simplicité bouleversante. J’ai repéré aussitôt la convergence de nos pensées alors qu’il décrivait une situation apparemment éloignée de la mienne. Ainsi j’ai découvert que l’homosexualité éclaire la sexualité de tout être humain, tout comme le handicap éclaire la réalité de chacune de nos vies ! Ces deux réalités objectives, subies, peuvent paraître inimaginables à bien des gens… Pourtant, quand une différence est vécue dans l’exigence de la vérité, elle éclaire toutes les dimensions de la personne humaine. Je cite Philippe Ariño: «Reconnaître que la structure identitaire et amoureuse homosexuelle est lacunaire ne réduit en rien les personnes qui le portent en « espèce » ni en « malades ». Simplement, le désir homosexuel est une blessure qui, si on s’y adonne (…) peut (…) créer ou agrandir ce handicap. Il est possible (…) de s’installer ou non dans son handicap : tout individu humain, même très limité, reste libre d’assumer ce que la vie et les événements lui ont imposé. Personne n’est totalement victime des handicaps qu’il porte à plus ou moins long terme. » Cette rencontre m’a émerveillé, car c’est le désir de reconnaître la personne dans sa réalité et sa liberté, sans illusions ni victimisation, qui nous réunit. En frères du système H. »