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Témoignage « Homosexualité et Consolation » le 4 juin 2016 à Lille, par Philippe Ariño


 

Ce témoignage a été tenu lors d’une veillée magnifique à la Cathédrale de Lille, dans le cadre de l’Année de la Miséricorde. Il faisait suite à deux autres témoignages, l’un sur le veuvage, l’autre sur l’avortement, qui ne figurent pas sur la vidéo.
 

Il est en lien avec les « 247 questions sur l’homosexualité à l’intérieur de l’Église catholique » : 1ère partie + 2e partie + 3e partie.

Code n°64 – Fantasmagorie de l’épouvante (sous-codes : Fan homo des films d’horreur / Peur / Gothique / « Psychose »)

fantasmagorie

Fantasmagorie de l’épouvante

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

Film "Poltergay" d'Éric Lavaine

Film « Poltergay » d’Éric Lavaine


 

Pourquoi les films d’horreur attirent autant le désir homosexuel ? D’un côté, on pourrait se dire qu’ils ne concernent essentiellement qu’un public masculin en quête de sensations fortes. Pour des raisons culturelles, les hommes seraient en effet prédisposés à relever des défis, à encaisser davantage les fortes montées d’adrénaline, à regarder des images insoutenables en face sans se dérober. De l’autre, à y regarder de plus près, les films d’épouvante les plus connus défendent l’émancipation de la femme, à travers la figure d’une héroïne courageuse qui sort de son rôle de femme-potiche pour endosser celui du guerrier. Ça peut être une des explications de l’engouement de beaucoup de personnes homosexuelles pour ce genre de films. Par rapport aux films d’action, l’identification aux femmes est facilitée et renforcée. Et comme par hasard, les personnages masculins (souvent très beaux gosses) de ces films gore passent rarement à la casserole avec la femme de leur rêve : ils ont plutôt tout du « pédé placardisé » comme dirait BBJane Hudson (dans le cas où ils sont assassinés par le scénario) ou à l’inverse ils ont le profil type de l’assassin (la bombe sexuelle, icône du danger sexuel : je pense par exemple au personnage du bellâtre Bosco dans l’excellent film « Tesis » d’Alejandro Amenábar). On retrouve dans les films d’horreur et chez les méchants tout le maniérisme qui plait aux personnes homosexuelles : les héros qui disparaissent un à un de manière différente, tous plus beaux et plus suspects les uns que les autres ; le tueur qui compose un personnage d’esthète névropathe sophistiqué, peaufinant avec art, minutie et humour, ses supplices : il cherche toujours à être plus original que les autres (ce qui n’est pas le cas des vrais violeurs et assassins qui se baladent dans la Nature). Il se délecte de sa démence (contrairement aux véritables fous qui parfois sont tristes et effrayés d’être esclaves d’eux-mêmes : je pense à Jeffrey Dahmer, qui s’effrayait lui-même tout en persistant à continuer ses crimes odieux).

 

Alors, finalement, plaisir de frémir (étrange autant que bien commun) ou de voir souffrir, ou autre chose ? Je dirais plutôt : une angoisse de vivre et une peur encore très infantile de la sexualité et de la différence des sexes (je précise « infantile » car il y a aussi quelque chose de la régression puérile dans ce souhait d’avoir peur, d’être croqué par le loup et d’être pourchassé par ses propres émotions). Je crois que, plus que du côté des intentions, il faut chercher les raisons de cette attraction homosexuelle pour l’horreur-cinéma davantage dans l’inconscient, dans la confusion entre éthique et esthétique (donc dans l’idolâtrie), ainsi que dans la défense quasi incontrôlée que mettront en place certaines personnes pour faire face à des peurs existentielles qui les assaillent et les submergent. Concernant la réalisation de ces films, pourquoi serait-elle plus spécifiquement objet de conquête, d’excitation chez des metteurs en scène homosexuels ? Parce qu’à défaut d’expier une pulsion sadique intrinsèque au désir homosexuel (cf. je vous renvoie aux codes « Adeptes des pratiques SM », « Désir désordonné » et « Coït homosexuel = viol » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels), elle l’exprime et donne l’illusion à celui qui est « mort de peur » d’avoir la main sur sa peur. Le réalisateur de films gore se donne pour tache de devenir Dieu, c’est-à-dire d’imiter la réalité par l’artifice artistique, au point de la rendre repoussante (à ses yeux, « réelle ») … et finalement pour cacher que ce sont sa fuite du Réel, son orgueil, sa peur, sa haine de lui-même qui sont surtout repoussants. Pour lui, les apparences sont trompeuses ET pourtant, il misera tout là-dessus ! Ce paradoxe est typique de la croyance idolâtre selon laquelle l’image serait plus forte que le Réel et pourrait se supplanter à Lui, que les sens seraient plus forts que le Sens, que le mal serait plus fort que l’Homme, que les apparences seraient plus fortes que la Vérité, que la peur est créatrice. Dans les nanars de l’épouvante, tout est basé sur les effets, les impressions, le visible, l’auditif, l’humour noir, l’imaginaire. Très peu de psychologie, de profondeur, de rapprochement au Réel visible et invisible. Un désenchantement de l’Humanité et de la sexualité, de la vie (où tout ne serait qu’apparences trompeuses et déterminisme) est exprimé.

 

On a l’impression que les cinéastes homos de l’épouvante se délectent de la transcendance et du Réel visible (= ce qui se voit à l’œil nu) et invisible (= le monde du paranormal). En fin de compte, il n’en est rien. Tout comme les films érotiques ne célèbrent pas, malgré les apparences, la véritable sexualité, les films d’horreur ne célèbrent pas davantage le Réel (en accentuant les moindres bruits, les portes qui claquent, les robinets d’eau qui font « floc floc », bref, en forçant les vraisemblances). Les personnages de ces films de bas étage sont tous des objets, des jouets, des instruments d’un destin implacable. À la différence des films pornos qui mettent en avant la pulsion génitale, les films d’horreur insistent sur les sens, l’image (même l’image elliptique, quand l’horreur passe par sa propre suggestion) et toutes les pulsions. Ils célèbrent finalement le fantasme réaliste.

 

Le désir homosexuel, fuyant la différence des sexes qui est le socle du Réel, est par définition un désir pulsionnel. Il était logique que le genre filmique de l’épouvante l’appelle donc plus spécifiquement. Les productions gore sont, en somme, une confession angoissée de la peur – magnifiée et salie – de la sexualité chez leurs concepteurs. Plus simplement, ils sont une manière peu franche (ou, ce qui revient au même, trop franche !) d’attirer l’attention sur soi. Je me contenterai, pour me faire comprendre, de citer une réplique du personnage horrorifique de Vicky Fantômas dans la pièce La Nuit de Madame Lucienne (1986) de Copi : « J’espère que je ne vous fais pas peur. Si, je vous fais peur. Alors c’est parce que je n’ai pas d’autre moyen d’attirer votre attention. »

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Mort », « Morts-vivants », « Milieu homosexuel infernal », « Emma Bovary ‘J’ai un amant !’ », « Frankenstein », « Reine », « Homosexualité noire et glorieuse », « Symboles phalliques », « Se prendre pour le diable », « Clown blanc et masques », « Main coupée », « Déni », « Télévore et Cinévore », « Violeur homosexuel », « Couple criminel », « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été à l’orée des bois », « Vampirisme », « Haine de la beauté », à la partie sur le « Cri d’épouvante » du code « Viol », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 

 

FICTION

 

a) Des héros effrayés (par la sexualité) :

Beaucoup de personnages homosexuels se caractérisent par leur peur maladive (et pas toujours consciente) d’eux-mêmes et des autres : cf. la pièce Parano : N’ayez pas peur, ce n’est que du théâtre (2011) de Jérémy Patinier (avec « le Grand Concours de la Peur »).

 

« Parfois, je me fais peur toute seule. » (Jane, l’héroïne lesbienne du roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 70) ; « Que s’est-il passé dans votre vie pour que vous soyez aussi soupçonneuse ? » » (le docteur Mann à Jane, idem, p. 174) ; « Ma vie me faisait peur, je ne faisais que jouer un rôle… et je ne redevenais que moi-même quand j’étais dans le noir. La solution c’était le noir éternel ou porter ne perruque sur une scène. […] J’ai suicidé la réalité, j’ai fait une apnée de moi même. […] Mais dès que le rideau tombe, dès que la vie reprend, j’ai peur. […] C’est agressif la vie. C’est agressif la vérité. » (l’Actrice dans la pièce Parano : N’ayez pas peur, ce n’est que du théâtre (2011) de Jérémy Patinier) ; « Je reste presque seul, dans l’évident triomphe de mes seize ans, entouré de femmes qui prennent soin de moi, de leur affection excessive et peureuse. » (Vincent, le héros homosexuel du roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson, p. 14) ; « Tu es absolument paranoïaque. » (Michael, homosexuel s’adressant à son colocataire Harold, lui-même homo, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Mon Dieu, qu’est-ce que j’ai fait ? Ça commence. L’angoisse. Je la sens. [Levant les yeux au ciel] Seigneur, je n’y arriverai pas !!! […] Je me sens si mal. J’en ai assez de vivre et j’ai peur de mourir. Si on pouvait ne pas tant se haïr. C’est tout. Si on essayait de ne pas tant nous détester. » (Michael, le héros homosexuel s’adressant à son ami Donald, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « La vie me fait peur. C’est grave, docteur ? » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012) ; « Goliatha, le rat me regarde ! J’ai peur ! » (« L. » dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi) ; « Mais vous ne dites rien ? Regardez-moi. Je vous fais peur ? » (Cyrille, le héros homosexuel de la pièce Une Visite inopportune (1988) de Copi) ; « Ça doit être une déformation professionnelle : j’angoisse pour un rien. » (Mélodie, l’héroïne bisexuelle du film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell) ; etc.

 

En réalité, leur peur est liée à la sexualité en général, à la différence des sexes. « Je n’ai jamais été actif. Simon dit : ‘Tous les pédés c’est pareil, ils sont passifs quand ils ont vingt ans, et en vieillissant, ils deviennent actifs pour pouvoir continuer à coucher avec des mecs de vingt ans, c’est pathétique. » (Mike, le narrateur homosexuel du roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 68) ; « Polly aime bien être passive, ça l’arrange que Claude veuille toujours être dominante. Dans le fond, elle sent bien qu’elle est complètement inhibée avec le cul. » (idem, p. 74) ; « J’ai peur d’avoir des enfants ! » (Lou, l’héroïne lesbienne dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Je n’oserai pas regarder une femme en train d’accoucher ! » (Martin, idem) ; « Il a râlé comme une peine, comme une longue douleur, je crois qu’il a mal. Moi, je sais. Je n’aimerais jamais ça. Le vide devait rester vide, jamais plus aucun ne ferait sur moi l’expérience de sa virilité, jamais je ne ferais l’usage de la féminité. » (une héroïne racontant la douleur d’un homme après un acte sexuel avec une femme, dans la pièce Mon cœur avec un E à la fin (2011) de Jérémy Patinier) ; « Il l’a peint en rouge et me l’a monté en pendentif… » (la femme à propos du sexe de son ex-compagnon Jean-Luc, converti en homo, dans la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « Les papous ne s’embrassent jamais, ils ont peur qu’on leur vole leur âme… Moi je me sens papou bizarrement certains matins… » (le comédien dans la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « Juan-Carlos savait-il la gravité de son mal ? » (Manuel Puig, Boquitas Pintadas, Le plus beau tango du monde (1972), p. 120) ; « J’ai peur des phallus… J’en ai un, là, dedans. Faut me l’enlever. » (une patiente dans la pièce Psy Cause(s) (2011) de Josiane Pinson) ; « Ainsi de jour-là, était-ce dû à la chaleur ? À une pression artérielle trop élevée ? À une faiblesse nasale ? Ou peut-être les trois à la fois… Je me mis à saigner du nez. Une vraie hémorragie ! N’ayant pas de mouchoir et sentant mon nez couler, je m’essuyai discrètement d’un revers de main. Le liquide rouge que j’en ramenais était sans équivoque. Laëtitia, qui avait toujours tout, me donna ses mouchoirs. Je saignais tant que je vidais le paquet. Lorsqu’enfin les vannes se fermèrent, je n’étais plus en état d’embrasser qui que ce soit. Fini la frime, je me sentais très piteux. J’eus souvent peur de récidiver les fois suivantes, mais non, ce fut la première mais aussi la dernière. » (Bryan, le héros homosexuel qui a peur d’embrasser sa meilleure amie Laëtitia sur la bouche, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, pp. 27-28) ; « Je n’y arriverai jamais. » (Hugo, le héros homosexuel face à sa voisine Franckie avec qui il pourrait coucher, dans la pièce Ça s’en va et ça revient (2011) de Pierre Cabanis) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce Et Dieu créa les folles (2009) de Corinne Natali, Heïdi, l’une des deux héroïnes lesbiennes, ne supporte pas d’entendre le mot « zizi » : elle tombe dans les pommes dès qu’il est prononcé. Et lorsque Frédérique – l’amante d’Heïdi – est sur le point de passer au lit avec Romuald, le protagoniste homo – elle pousse un hurlement explicite : « J’ai peur !!! » ; et Romuald aussi : « Je vais porter plainte pour tentative de castration ! » Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, c’est la peur qui pousse Howard à se croire gay.

 

Film "Otto" de Bruce LaBruce

Film « Otto » de Bruce LaBruce


 

Parfois, le protagoniste homosexuel a peur de ne pas contrôler/réfréner ses pulsions sexuelles, et qu’elles se transforment en puissances violentes et mortelles : « Je n’aime pas ce mélange de rêve et de réalité, j’ai peur d’être encore amené à tuer comme dans mes précédents rêves. […] Je sais que même si je ne suis pas un criminel, mon emploi du temps de ces quatre derniers jours m’est complètement sorti de la tête, n’aurais-je pas pendant cette période tué pour de bon ? Est-ce que Marielle ne courra pas un danger restant seule avec moi ? Non, voyons, je suis la personne la plus pacifique du monde. Les gens violents dans leurs rêves sont dans la réalité incapables de tuer une mouche. » (le narrateur homosexuel du roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 134) ; « J’avais imaginé un moment demander à la petite voisine de passer me voir afin de faire ensemble ce que je l’avais obligée à faire seule devant moi, sachant combien j’aimais à outrepasser la pudeur des autres, pour le plaisir que son viol me donnait. Cette envie ne me quittait pas, mais je devais résister, c’était trop risqué. […] J’avais peur de moi. Quand je sentais monter ce besoin de chair, peu m’importaient les moyens et la figure de celle qui me donnerait ce qu’il me fallait. » (Alexandra, la narratrice lesbienne attirée par une mineure, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, pp. 56-57) ; etc.

 

Et plus encore : la peur des héros homosexuels est liée à l’homosexualité, à la pratique homosexuelle, et à la croyance en la vérité de l’identité homosexuelle et de l’amour homosexuel… même si, très vite, par auto-persuasion, ils vont se dire que c’est tout ce qui fait frein à celles-ci qui créerait leur angoisse (cf. je vous renvoie au code « Liaisons dangereuses » du Dictionnaire des Codes homosexuels) : « Je n’avais jamais fait ça de ma vie auparavant. J’avais une trouille bleue. » (Hank parlant de sa première expérience homosexuelle, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Ça chassera peut-être mon angoisse. » (Michael, héros homosexuel se rendant à la messe de minuit pour oublier la misère de sa condition homosexuelle, idem) ; « Je croyais que l’amour était quelque chose d’agréable, qui nous grandissait. Mais celui que je ressens pour toi, me fait parfois l’effet inverse, il me détruit ! Pourquoi ? Puisque ça fait si mal, faut-il avoir peur d’aimer ? » (Bryan s’adressant à son amant Kévin dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 417) ; « Je sentais que Marie était tétanisée par la peur que cela ne me déplaise. Dans un effort d’audace, pourtant, elle me prit par la taille. » (Alexandra, la narratrice lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 152) ; « Par peur d’être catalogués, les homosexuels sortaient uniquement à la tombée de la nuit (pareil à des chauves-souris) pendant que les voyous et les drogués squattaient en permanence les lieux. » (Ednar, le héros homosexuel parlant des Antilles, dans le roman autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 188) ; « Peut-être que ce qui fut jadis la Cour des Miracles saurait le guérir de sa peur, l’aider à s’affirmer auprès des siens. » (Ahmed, le héros homosexuel parlant du Marais, dans le roman Accointances, connaissances, et mouvances (2010) de Denis-Martin Chabot, p. 52) ; « Quand je l’ai pris dans mes bras, il était léger comme un gosse, j’avais presque peur de lui faire du mal. » (Martin en parlant de Lucas, dans le film « L’Homme que j’aime » (1997) de Stéphane Giusti) ; « Excuse-moi mais tout à coup j’ai peur de ce qui arrive […] peur de ne pas pouvoir te donner tout ce que tu veux, pas le temps, pas le désir. » (Lucas s’adressant à Martin, idem) ; « J’aime quand vous me faites peur. » (cf. la chanson « Consentement » de Mylène Farmer) ; « Je n’ai jamais peur. » (Roméo, le héros homo du film « Children Of God », « Enfants de Dieu » (2011) de Kareem J. Mortimer) ; etc.

 
 

Stephen – « J’ai peur maintenant… j’ai peur de vous.

Angela – Mais vous êtes plus forte que moi…

Stephen – Oui, c’est pourquoi j’ai si peur… vous me faites sentir ma force… »

(cf. un dialogue entre les deux héroïnes lesbiennes, dans le roman The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928) de Marguerite Radclyffe Hall, p. 189)

 
 

b) La caricature de cette peur homosexuelle de la sexualité : l’attrait-répulsion pour les univers d’épouvante

Les héros homosexuels sont effrayés et angoissés par ce qu’ils vivent en amour homo et en croyance identitaire homo, et se disent qu’en forçant le signe de leur honte (= la peur), en le grossissant, en le caricaturant et en l’esthétisant à la perfection, il se figera, ne se verra plus et sera hors d’état de nuire. Au-dessus de tout soupçon. Ou plutôt auréolé de soupçons !

 
 

Cyrille [le héros homosexuel] – « Comment me trouvez-vous, Hubert ?

Hubert – Effrayant, maître ?

Cyrille – Vous serez toujours mon meilleur public. »

(Copi, Une Visite inopportune, 1988)

 
 

Film "The Gay Bed & Breakfast Of Terror" de Jaymes Thompson

Film « The Gay Bed & Breakfast Of Terror » de Jaymes Thompson


 

Le film d’épouvante intéresse le personnage homosexuel, et beaucoup de créations traitant d’homosexualité sont des œuvres d’épouvante : cf. le film « À corps perdu » (1988) de Léa Pool, le film « Tesis » (1996) d’Alejandro Amenábar, le film « Frisk » (1995) de Todd Verow (sur les snuff movies), le film « La Sentinelle des maudits » (1977) de Michael Winner, le film « Nouveaux Monstres » (1977) de Dino Risi, le film « Trois visages de la peur » (1963) de Mario Brava et Salvatore Billitteri, le film « Matador » (1985) de Pedro Almodóvar (le personnage homo se masturbe devant des films d’épouvante), le film « Danse macabre » (1963) d’Antonio Margheriti, la comédie musicale Big Manoir (2007) d’Ida Gordon et d’Aurélien Berda, le film « House Of Horrors » (1946) de Jean Yarbrough, le film « La Maison du diable » (1963) de Robert Wise, le film « Les Monstres » (1963) de Dino Risi, la comédie musicale Créatures (2008) d’Alexandre Bonstein et Lee Maddeford, le film « Une poule, un train et quelques monstres » (1969) de Dino Risi, le film « Le Masque du démon » (1960) de Mario Bava, le film « L’Assassino Ha Riservato Nove Poltrone » (1974) de Giuseppe Bennati, les films « Besame Monstruo » (1969), « La Comtesse perverse » (1973), « Les Possédées du diable » (1974) de Jess Franco, le film « Sometimes Aunt Martha Does Dreadful Things » (1971) de Thomas Casey, le film « Thundercrack » (1975) de Curt McDowell, les films « The Brotherhood » (2000), « The Brotherhood 2 : Young Warlocks » (2001), « The Brotherhood : Young Demons » (2002) et « Final Stab » (2001) de David DeCoteau, le film « The Boy With The Sun In His Eyes » (2009) de Todd Verow (avec le héros homo fan de films d’horreur), le film « Le Fils de Chucky » (2004) de Don Mancini, le film « Troméo et Juliette » (1996) de Lloyd Kaufman, le film « Curse Of The Queerwolf » (1988) de Mark Pirro, les tableaux Autoportrait avec crâne (1977-1978) et Crâne d’Andy Warhol (1976-1977) d’Andy Warhol, la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar (avec Stéphane, le héros homosexuel adepte des films gore), le film d’épouvante « In The Blood » (« Dans le sang », 2006) de Lou Peterson, le film « Haute tension » (2003) d’Alexandre Aja (avec Cécile de France en lesbienne psychopathe), le film « Bettlejuice » (1988) de Tim Burton (avec le personnage homosexuel d’Otto), la comédie musicale La Nuit d’Elliot Fall (2010) de Vincent Daenen, le film « Who’s Afraid Of Vagina Wolf ? » (« Qui a peur de Vagina Wolf ? », 2013) d’Anna Margarita Albelo, le one-man-show Elle est pas belle ma vie ? (2012) de Samuel Laroque (avec la Schtroumpfette qui fait des films d’épouvante), les films « Jeepers Creepers » (« Le Chant du diable », 2001) et « Jeepers Creepers 2 » de Victor Salva (avec un des personnages ouvertement gay), la série American Horror Story (2011) de Ryan Murphy et Brad Falchuk (avec un couple homo qui se fait enfoncer un tisonnier), le film « October Moon » (2005) de Jason Paul Collum, le film « Hellbent » (2004) de Paul Etheredge-Ouzts (racontant l’histoire d’un psychopathe qui tue ses victimes dans le milieu homo), le film « Lesbian Psycho » (2010) de Sharon Ferranti, le film « The Silence Of The Lambs » (« Le Silence des agneaux », 1991) de Jonathan Demme, le film « Sleepaway Camp » (« Massacre au camp d’été », 1983) de Robert Hiltzik (où le tueur est un trans M to F), le film « Curse Of The Queerwolf » (1988) de Mark Pirro (là encore, l’assassin est transsexuel), le film « Pulsion » (1980) de Brian De Palma (avec le trans M to F maniaque), le film « Maniac » (2012) d’Alexandre Aja, le film « The Descent » (2005) de Neil Marshall, le film « Miss Paramount » d’Indochine (avec le Jardin des Tortures), etc. « Était-ce à ce moment-là qu’elle s’était mise à fumer – des après-midi d’école volés passés chez d’autres gamins ; rideaux tirés et vidéos de films d’horreur ; cigarettes communes fumées aux fenêtres du premier. Jane sourit à ce souvenir. » (Jane, l’héroïne lesbienne du roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 46) ; « Le clocher se dressait, haut et menaçant, au-dessus des tombes, tel un instrument de vengeance. Il ne manquait qu’une fille terrifiée courant dans l’allée en chemise de nuit pour la transformer en véritable affiche de film d’épouvante. » (idem, p. 72) ; « Je vois les films d’épouvante. Je m’en vante, je m’en vante. » (cf. la chanson « La Parisienne » de Marie-Paule Belle) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza, Chris, le héros homosexuel, est fan de films d’épouvante, et en réalisent : « Chris veut remettre à la mode le film d’horreur. » Quant à Toph, il a tourné un film d’épouvante intitulé « Blood In Barcelona ». Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, Jonas et son amant Nathan vont au cinéma voir le film d’épouvante sanguinolent « Nowhere » de Gregg Araki.

 

 

Dans le film « Scream 4 » (2011) de Wes Craven, il y a une référence explicite à l’homosexualité : « En fait, la plus sûre issue de secours pour survivre dans un film d’horreur moderne, c’est d’être gay. » D’où la scène cocasse qui suivra lorsqu’un des personnages est sur le point de se faire tuer : « Attendez, non, vous ne pouvez pas me tuer ! Vous ne pouvez pas ! Il y a des règles ! Je suis gay ! Je suis gay ! »

 

 
 

Dans Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, Omar propose à son amant Khalid d’aller au cinéma voir le film d’horreur « Re-Animator » racontant l’histoire d’« un homme qui réveille les morts » (p. 111).

Khalid – « On pleurera cet après-midi alors… tous les deux… en regardant ton film d’horreur…

Omar – Sur l’affiche, l’acteur principal porte des lunettes.

Khalid – Et alors ?

Omar – Comme toi, avant. »

 
 
 

« C’est toujours la pucelle qui s’en sort le mieux à la fin. » (Jonathan, le héros homosexuel parlant des films d’horreur, dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H.)

 

 

Les univers folkoriquement « effrayants » apparaissent dans différentes créations : le film « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1960) de Joseph Mankiewicz, le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier, le film « La Mala Educación » (« La mauvaise éducation », 2003) de Pedro Almodóvar, le film « Elephant Man » (1981) de David Lynch (repris par Mylène Farmer dans sa chanson « Psychiatric »), le film « Le Cas d’O » (2003) d’Olivier Ciappa, le film « The Halloween Parade » de Lou Reed, le film « The Rocky Horror Picture Show » (1975) de Jim Sharman, le film « Serial Mother » (1994) de John Waters, la pièce Penetrator (2009) d’Anthony Neilson, la pièce Amour, gore, et beauté (2009) de Marc Saez, la pièce La Belle et la Bière (2011) d’Emmanuel Pallas, la nouvelle « Les Garçons Danaïdes » (2010) d’Essobal Lenoir, le film « Cruising » (« La Chasse », 1980) de William Friedkin, etc. Par exemple, dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, Jason, le héros homosexuel, est un « grand admirateur d’Hitchcock » (p. 414). Dans le téléfilm « Prayers For Bobby » (« Bobby, seul contre tous », 2009) de Russel Mulcahy, Bobby, le héros homosexuel, connaît les trucages d’Alfred Hitchcock.

 

« La lumière de la lune se suffisait à elle-même, et les éléments du décor se recomposaient harmonieusement, lui révélant, sans plus de raison ni avec moins d’évidence, que l’horreur du monde a pour revers son inexprimable beauté. » (Jason, le héros homosexuel du roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 246.)

 

Film "Requiem For A Dream" de Darren Aronofsky

Film « Requiem For A Dream » de Darren Aronofsky


 

Le monde de la « peur de la mort » esthétisée entre en résonnance avec le monde gothique. On retrouve la confluence entre la culture gothique et l’homosexualité dans beaucoup de créations homo-érotiques : cf. le film « Gothic » (1986) de Ken Russell, le film « Adam et Steve » (1995) de Craig Chester, le film « Mysterious Skin » (2004) de Gregg Araki, la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez (avec Juna, la lesbienne gothique), le one-(wo)man-show Le Jardin des dindes (2008) de Jean-Philippe Set, le roman À ta place (2006) de Karine Reysset (avec Chloé la lesbienne gothique), le film « Occident (Statross le Magnifique 2) » (2008) de Jann Halexander, le one-woman-show Wonderfolle Show (2012) de Nathalie Rhéa (Nathalie parle à une gothique de 15 ans dans le magasin de chaussures qu’elle tient), le film « Órói » (« Jitters », 2010) de Baldvin Zophoníasson (où Stella, la FAP, est gothique), le concert Le Cirque des Mirages (2009) de Yanowski et Fred Parker (avec Freddie, l’homme gothique), le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot (avec Corinne, l’amie gothique d’enfance de Jason), la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez, le film « 22 Jump Street » (2014) de Phil Lord et Christopher Miller (avec Schmidt en gothique efféminé), etc. Par exemple, dans le téléfilm « Clara cet été-là » (2003) de Patrick Grandperret, Clara, l’héroïne lesbienne, se fait surnommer « Mercredi » (de la Famille Addams) par ses propres parents. Dans la pièce Le Gai Mariage (2010) de Gérard Bitton et Michel Munz, Henri allait à la messe avec ses costumes gothiques quand il était jeune.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Des êtres effrayés (par l’identité homo et la pratique homo qu’ils s’imposent, et par la sexualité en général) :

Beaucoup d’individus homosexuels se caractérisent par leur peur maladive (et pas toujours consciente) d’eux-mêmes et des autres : « Je me rends compte que j’ai toujours fait tout par peur. » (Guillaume Gallienne dans son film biographique « Les Garçons et Guillaume, à table ! », 2013) ; « Tous les matins se ressemblaient. Quand je me réveillais, la première image qui m’apparaissait était celle des deux garçons. Leurs visages se dessinaient dans mes pensées, et, inexorablement, plus je me concentrais sur ces visages, plus les détails – le nez, la bouche, le regard – m’échappaient. Je ne retenais d’eux que la peur. » (Eddy Bellegueule parlant de ses deux agresseurs au collège, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 63) ; « Je ne m’acceptais pas (jusqu’à mes 20 ans) parce que j’habite un petit village. C’est une chose dont on ne parle jamais. On se cache. On a peur. » (René, témoin homo suisse, dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta) ; etc. Ils ont souvent une réputation de mauviettes et de froussards, de personnes facilement impressionnables et peu courageuses. Et un certain nombre d’entre eux s’installent dans cette réputation. « Mon envie dans ce film est de faire apparaître la relation que j’ai eue avec Pêche. Parce qu’elle a été sans doute une soupape à mes questions. Parce que j’avais trouvé en lui quelqu’un à qui m’accrocher. À travers cette histoire intime avec Pêche, mais aussi à travers les failles et les choses du monde normées et non normées assimilées, ressortira le cheminement d’un enfant, de sa construction, de ses peurs anciennes face à son homosexualité, mais aussi de ses désirs et secrets les plus beaux qu’il n’ait imaginés. » (le réalisateur Thomas Riera parlant de sa figure-cheval, dans le documentaire « Pêche, mon petit poney », 2012) ; « Le monde s’est mis alors à trembler autour de moi. La terre s’ouvrait sous mes pieds. L’abîme. J’y suis tombé. Le cycle de la mort aveugle, que j’avais déjà croisé enfant, jeune homme, recommençait. C’était le désert. Le désert et la panique. […] J’avais peur, peur, peur… Peur de partir. » (Abdellah Taïa parlant de la mort et de son enfance, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), p. 93) ; « Tout m’inquiète. » (Bruno Wiel, jeune homme trentenaire homosexuel, agressé par quatre hommes qui l’ont laissé pour mort, dans le documentaire « Homos, la haine » (2014) d’Éric Guéret et Philippe Besson, diffusé sur la chaîne France 2 le 9 décembre 2014) ; « J’ai peur d’à peu près tout dans la vie. » (Michel Govignon, candidat gay dans le jeu Une Famille en Or, diffusé le 30 novembre 2021 sur TF1) ; etc.

 

En réalité, leur peur est liée à la sexualité en général, à la différence des sexes. « Le sexe n’existait pas pour moi quand j’étais petite puisqu’il n’était jamais nommé. » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), p. 108) ; « Comme Chouaïb, je ne mélangeais pas Dieu et le sexe. Le pur et l’impur. » (Abdellah Taïa, Une Mélancolie arabe (2008), p. 26) ; « Je faisais croire que j’étais branché sur les filles ! En réalité, elles me faisaient très peur. Dès qu’elles étaient trop proches, je reculais. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), pp. 29-30) ; « La grande majorité des malades qui consultent le psychothérapiste ne sont pas vraiment des homosexuels, mais plutôt des jeunes gens souffrant d’un état d’anxiété. Ignorant le processus de développement de l’instinct sexuel, ne se rendant pas compte qu’ils traversent une étape normale d’homosexualité, truffés de complexes d’infériorité qui leur font redouter l’idée même des responsabilités du mariage, ils montent en épingle leurs tendances homosexuelles pour expliquer leur incapacité à se marier. […] Ce sont les impressions de l’enfance qui marquent l’individu au point de vue sexuel. Si elles ont été désastreuses, l’individu cherche souvent refuge dans l’homosexualité. C’est l’histoire banale des foyers désunis, où la mère, malheureuse et terrorisée par un père brutal, étouffe son enfant sous des manifestations d’affection anxieuse. Elle le retient dans son développement et tend à le conserver pour elle, comme un bébé. L’enfant, dans ces circonstances, témoin d’un rapport sexuel entre ses parents, l’interprète comme une attaque contre sa mère, une brutalité. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 48)

 

 

Et plus encore : la peur des sujets homosexuels est liée à l’homosexualité, à la pratique homosexuelle, et à la croyance en la vérité de l’identité homosexuelle et de l’amour homosexuel… même si, très vite, par auto-persuasion, ils vont se dire que c’est tout ce qui fait frein à celles-ci qui créerait leur angoisse (cf. je vous renvoie au code « Liaisons dangereuses » du Dictionnaire des Codes homosexuels) : « J’étais heureux et j’avais peur. Tu étais l’homme, le roi. J’acceptais ton pouvoir. » (Abdellah Taïa s’adressant à son amant Slimane, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), p. 114) ; « C’est extrêmement difficile à vivre. […] J’ose à peine regarder les autres. […] Quand c’était intime, j’étais dans le malaise. » (Christian parlant de la découverte de son désir homosexuel pendant l’adolescence, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; « Catherine disait avoir peur : ‘Tu ne sais pas te protéger. Je ne veux pas te faire à nouveau souffrir. Il faut que tu saches qu’avec les femmes, je ne sais pas construire d’avenir. Avec un homme, c’est plus simple, je peux raisonner, ordonner, projeter, il n’y a pas à avoir peur de l’amour. Ne crois pas que tu pourras opérer de miracles. Dans ce domaine, je me sens infirme.’ Je n’arrivais pas à prendre au sérieux cette peur de l’amour et du désir sur laquelle Catherine revenait sans cesse et il me semblait, tant l’amour peut rendre présomptueux, que j’en viendrais facilement à bout. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 53) ; « Ce qu’il y avait entre nous [Martine et elle], c’était quelque chose de bien plus fort, à savoir la peur de la solitude. » (idem, p. 78) ; « Je nageais mais dans la peur. Je tremblais, à l’intérieur. Je ne voyais plus les garçons sauvages mais je les sentais venir, se rapprocher de mon corps, le renifler et le lécher. Dans un instant le violenter, l’un après l’autre le saigner. Le marquer. Lui retirer une de ses dernières fiertés. Le briser. » (Abdellah Taïa, Une Mélancolie arabe (2008), p. 25) ; etc.

 

Par exemple, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), Berthrand Nguyen Matoko évoque sa peur de l’acte sexuel (« Mes yeux se fermaient à l’idée que le sexe était une combinaison du bon et du mauvais. », p. 63), puis son effroi d’avoir vécu l’acte homo : il raconte la vue de son violeur et de son « sexe brandissant sous ses yeux, écarquillés de peur » (p. 71)

 
 

b) La caricature de cette peur homosexuelle de la sexualité : l’attrait-répulsion pour les univers d’épouvante

Film "The Rocky Horror Picture Show" de Jim Sharman

Film « The Rocky Horror Picture Show » de Jim Sharman


 

Comme pour avoir une main sur leurs peurs cachées (et ne surtout, pour les cacher et ne surtout pas les surmonter), certaines personnes homosexuelles vont, à l’âge adulte, rejoindre le monde de l’horreur cinématographique et donner à croire ainsi que plus rien ne leur fait peur. Quitte à singer la peur et s’illusionner elles-mêmes.

 

 

Il est fascinant de remarquer que beaucoup de réalisateurs de films d’épouvante sont homosexuels : James Whale (le créateur de Frankenstein), Friedrich Wilhem Murnau, Curtis Harrington, Ed Wood (pour son travestisme…), Victor Salva (attiré par l’homosexualité mais aussi la pédophilie), Kenneth Anger, Jack Smith (si on peut le classer comme réalisateur de films d’horreur – dans ce cas, le retenir comme personnalité, avec Andy Warhol et Susan Sontag), les frères Kuchar, Andy Milligan, David DeCoteau (initiateur du fantastique 100% et ouvertement gay), Paul Morrissey, Michael Armstrong (« Mark Of The Devil », « House Of The Long Shadows »), Zebedy Cold (porno fantastique ; il était bi), Tim Sullivan (le remake de « 2 000 Maniacs »), Alan Rowe Kelly, Todd Haynes, Joel Schumacher, Marc Pirro (« Curse Of The Queerwolf »), Tom DeSimone (porno + « Hell Night »), Bart Mastronardi (un jeune indépendant, auteur de très bons films underground), Jason Paul Collum, etc. Gros doute pour Jack Sholder, Philippe Mora et Tom Holland…

 

« Je veux faire qui rende les spectateurs fous, qui les pousse à commettre un meurtre. » (Hisayasu Sato) ; « Bien à l’âge de neuf ans, j’ai été abusée sexuellement par un adolescent et sa sœur. J’ai alors expérimenté une activité hétérosexuelle et homosexuelle affreuse à un très jeune âge et en même temps, j’étais élevée par la télévision – j’avais la permission de regarder des films réservés aux adultes, des films d’horreur, des films à contenu sexuel, donc mon éducation à l’amour et au sexe s’est faite par l’abus et en gros par la négligence parentale, puisqu’ils nous autorisaient à regarder ces choses. » (Shelley Lubben, ex-actrice porno) ; etc.

 

Un certain nombre de personnes homosexuelles (Clive Barker, Hervé Guibert, Gus Van Sant, etc.) s’inspirent du chef-d’œuvre d’Hitchcock « Psychose » (1960), un modèle du genre du film d’épouvante… et pour cause : Anthony Perkins (l’acteur qui joue Norman) était homosexuel (et très certainement Alfred Hitchcock aussi) ; d’ailleurs, le personnage de Norman Bates, dans le film, est soupçonné d’être inverti. Par exemple, Anne Heche, réalisatrice lesbienne du film « Sex Revelations » (2000), a joué dans le remake de « Psychose » (1998) de Gus Van Sant. Le réalisateur homosexuel espagnol Alejandro Amenábar est fan du film « Psychose », et dit qu’il « dévorait » les romans d’Agatha Christie quand il était adolescent. On retrouve des références à « Psychose » dans le film « Espacio 2 » (2001) de Lino Escalera, dans la pièce Doris Darling (2012) de Ben Elton (avec la musique stridente de « Psychose » au moment où Peggy tue à coups de marteau le vieux Douglas), dans le film « A Single Man » (2009) de Tom Ford (la rencontre entre George et le prostitué Carlos, avec derrière eux l’affiche du regard de Marion Crane dans « Psychose » d’Hitchcock), dans le one-woman-show Psy Cause(s) (2011) de Josiane Pinson, dans le film « Hitchcocked » (2006) d’Ed Slattery, etc. Dans le roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, Michael se compare à Norman Bates, le personnage principal du film « Psychose ».

 

« En revenant de la fête, en passant devant le Cinéma Odéon, j’ai remarqué qu’ils donnaient un film d’horreur. Déconseillé à tous les cardiaques. C’est l’histoire d’un dérangé mental qui s’habille comme sa mère et tue des pauvres innocentes qui passent la nuit dans un motel. » (une des 3 tantes d’Alfredo Arias, dans l’autobiographie de ce dernier Folies-Fantômes (1997), p. 131)

 

 

L’inversion de la peur en désir de créer/faire peur (et l’inversion en tant qu’homosexualité, finalement) est le propre du psychotique, de celui qui s’enchaîne à sa psychose/peur, précisément ! « Dans une psychose, les transformations ‘en contraire’ sont très fréquentes, le désir de battre devient envie d’être battu, le désir de dévorer devient la peur d’être dévoré, le plaisir de regarder du schizophrène se transforme en peur d’être épié (c’est la direction de la pulsion qui est transformée et aucunement la représentation de l’objet). L’exhibitionnisme lui-même peut nous proposer une solution acceptable, car il y a sans doute dans le travesti l’identification avec l’objet qu’on aimerait regarder, satisfaisant ainsi d’une façon narcissique un voyeurisme ‘retourné’. » (le docteur Hans Werner, cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 306)

 

Mais revenons plus largement au cadre des films d’horreur. Il existe une forte proximité entre milieu homosexuel et genres cinématographiques de l’épouvante. Je vous renvoie à l’étude sur l’homosexualité dans les films d’horreur Monsters In The Closet : Homosexuality and the Horror Film (1997) de Harry M. Benshoff. Ainsi qu’aux blogs de référence Mein Camp et Fears For Queers, tenus par les très queer BBJane Hudson et Valentine de Luxe, bien documentés (d’ailleurs, on lit sous leur plume toute la jouissance et l’admiration – l’adoration ? – homosexuelles pour les films d’horreur : pour eux, l’horreur visuelle est chef-d’œuvre merdique, bijou de cruauté, suprême et inimitable élégance odieuse !)

 

On peut facilement constater que les univers terroristes et surnaturels d’Anne Rice, Jean Boulet, Clive Barker, Poppy Z. Brite, Jacques Tourneur, Val Lewton, Pedro Almodóvar, Ian McKellen, Copi, drainent une grande partie du public homosexuel : cf. le documentaire « Halloween Queen 1 » (1999) de S. Nhieim, etc.

 

 

Il n’est pas rare non plus que les personnes homosexuelles/bisexuelles rejoignent le courant artistico-spirituel du gothique, c’est-à-dire de l’esthétisme de la mort, de la mélancolie, du diable. Les gothiques sont particulièrement androgynes dans leur style (on y trouve beaucoup d’adolescents, de personnes en panne d’identité et en panne de modèles religieux ou sexués auxquels se raccrocher) : cheveux longs, ongles peints et capes-robes chez les gars ; tatouages, écrase-merde et parfois cheveux rasés pour les filles.

 

David Gerard alias "Red Drag Diva"

David Gerard alias « Red Drag Diva »


 

On retrouve la confluence entre la culture gothique et l’homosexualité dans les univers musicaux de Mylène Farmer, d’Indochine, de Placebo, de Kiss, de Marilyn Manson, de Gossip, de The Smashing Pumpkins, etc. On peut penser également aux auteurs homosexuels amateurs de Sade et du sensationnalisme gothique dixhuitièmiste comme les romans de William Beckford, Charles Maturin, Horace Walpole, Matthew Lewis, etc.

 

 

L’attrait d’un grand nombre de personnes homosexuelles pour les films d’horreur serait drôle s’il était uniquement second degré, s’il se limitait à un jeu collectif, à un folklore de Gay Pride ou d’Halloween. Mais il n’est pas que signe de cela. Il montre une peur de soi et des autres qui, si elle n’est pas identifiée ni donnée, peut se retourner en violence contre soi-même (suicide, mutilation) ou en dictature (cf. je vous renvoie au code « Homosexuel homophobe », au code « Milieu homosexuel infernal », à la partie « Circulez, y’a rien à voir » du code « Déni », ainsi qu’à la partie sur le « terrorisme transsexuel » du code « Homosexuels psychorigides » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels).

 

Le monde de l’horreur visible permet à bien des personnes homosexuelles de transférer leur peur sur les autres, et notamment un public consentant, qui a soi-disant payé pour ce transfert. Par exemple, dans son article « Les Happenings : Art des confrontations radicales » (1968) traitant du mouvement artistique camp porté par les artistes homosexuels, Susan Sontag souligne l’usage des « techniques d’épouvante du surréalisme » (p. 415). Elle rappelle trois caractéristiques essentielles des happenings : « En premier lieu, l’objectivation ou la dépersonnalisation des personnages ; en second lieu, l’importance accordée au spectacle et au bruitage, au détriment de la parole ; enfin, une volonté délibérée d’éprouver durement le public. […] La technique de l’épouvante des surréalistes retrouve alors la source du meilleur comique : le sentiment d’invulnérabilité du personnage. L’absence de réactions émotionnelles profondes est l’élément essentiel de la comédie. Si nous pouvions rire de bon cœur au spectacle de scènes pénibles et grotesques, c’est que les personnes auxquelles de telles choses arrivent ne semblent pas en être profondément touchées. Peu importe que le public les voie gesticuler, et crier, et invoquer le ciel en se plaignant de leurs malheurs, il sait bien que tout cela demeure superficiel. […] Dans les Happenings, le bouc émissaire, c’est le public. » (pp. 417-420) Sontag souligne à juste raison toute la charge désirante et bien intentionnée (limite amoureuse) qu’investissent les personnes homosexuelles dans l’élaboration d’univers laids et odieux : « Le dernier mot du Camp : affreux à en être beau ! » (Susan Sontag, « Le Style Camp », L’Œuvre parle (1968), pp. 442-450)

 

Enfin, pour clore ce chapitre, j’aimerais vous livrer mon témoignage concernant mon propre rapport à la peur et aux films d’horreur… car j’ai un parcours étrange (très « queer », au sens originel du terme), qui va de l’excès de trouillardise vers un surprenant aguerrissement.

 

Je pourrais distinguer deux périodes de ma vie presque antagoniques. La première où j’étais, jusqu’à mes 20 ans, une vraie poule mouillée hyper impressionnable (quand j’étais petit, il m’arrivait de faire des cauchemars rien qu’avec les Dix Petits Nègres d’Agatha Christie ou bien la vue de films avec des scènes violentes tels que « Les Dents de la mer », « Le Silence des agneaux » ou les épisodes de Matt Houston, qui pouvaient me traumatiser au point que je fermais les yeux pour ne pas les affronter ; par ailleurs, il était très facile de me faire hurler si on m’assaillait par surprise derrière une porte ou dans un couloir ; j’avais super peur du noir). La seconde période où je me vois maintenant vacciné et armé pour regarder la mort cinématographique en face, et même parfois la souffrance/la peur/la mort réelles. Je ne veux présager de rien, ni présumer de mes forces : le propre de la mort et de la peur, c’est quand même de nous prendre par surprise. Et n’ayant pas de boule de cristal, je ne sais pas comment je réagirai à chaque fois que la peur me prendra. Néanmoins, je peux quand même dire, au jour d’aujourd’hui, que peu de choses me font vraiment peur (c’est la communion des saints et ma foi en Jésus et Marie qui m’aident incroyablement contre les assauts de la peur), que j’ai acquis avec le temps un courage qui m’étonne moi-même tant j’étais mal parti. Il semblerait que j’ai acquis une insensibilité à l’horreur tout en conservant une vraie empathie pour ceux qui souffrent. Pourvu que ça dure ! De quelqu’un de fragile et d’impressionnable, qui faisait éponge avec toutes les images choquantes qu’il avait sous les yeux, peut parfois sortir un blindage et un courage insoupçonnés ! Ce qui ne nous tue pas nous renforce parfois. Il en est ainsi pour moi. Les images violentes ne m’atteignent plus ; les réalités violentes ne m’atteignent pas au point de m’ôter ma joie !

 

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Code n°86 – Hitler gay (sous-code : Nazis homosexuels)

Hitler

Hitler gay

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 
 

Le Point Gaydwin :

Stratégie de ridiculisation méprisante et dévirilisante de l’ennemi

ou fond de réalité?

 

Ne fuyez pas en courant comme ça ! Ne criez pas avant d’avoir mal. Ce code n’a rien d’homophobe, de diabolique, de malsain. Pas la peine de coucher les enfants, de rentrer dans votre abris anti-nucléaire, d’appeler la police anti-extrémistes, ni de sortir vos crucifix. Cet article ne fait qu’œuvre de mémoire, et libère de certaines peurs, en plus. Une fois que vous l’aurez lu, je parie que vous baisserez la garde de votre scepticisme anti-homophobie (si jamais vous avez la chance de ne pas faire partie de cette énorme frange de la population française que sont les paranoïaques anti-fascistes), et vous me direz : « Et bien oui, en effet, il existe vraiment un lien entre Hitler et le désir homosexuel. On a tant à apprendre sur l’homosexualité ! On n’y connaît rien… ».

 

HITLER 2 Casquette rose
 

Car oui, ces liens de coïncidence sont criants, même s’ils sont peu connus. Pensez par exemple que dans les années 1930, les sections de S.A. en Allemagne ont été reconnues comme un foyer d’homosexualité ; la ville de Berlin était la capitale européenne la plus rainbow qui ait existé ; beaucoup de témoignages relatant des pratiques homosexuelles nous reviennent des prisonniers des camps de concentration ; toute la fantasmagorie nazie était centrée esthétiquement sur l’homosexualité ; on dit même qu’Hitler était homosexuel ; et encore aujourd’hui, le mouvement punk ou néo-nazi est affilié à la communauté homosexuelle ; la figure du soldat nazi reste une icône gay et lesbienne incontournable. Je vais aborder chacun de ces points plus en détail dans mon article. Mais vous voyez déjà qu’à eux seuls, ils appellent à beaucoup d’explications et d’étayage !

 

Je me souviens du jour (c’était le 14 octobre 2010) où j’ai parlé de ce code à l’émission Homo Micro, dans les studios parisiens de RFPP. Même si je m’y attendais un peu, j’avais été quand même frappé de l’ignorance, de la bêtise, et du déni des quelques chroniqueurs qui m’entouraient, et qui, quoi que je dise, n’avaient pas envie de se laisser surprendre… Notamment, il y a eu la réaction épidermique et gentiment suspicieuse de Séverine, la chroniqueuse juive. Je prononçais le mot « Hitler », et c’était comme si, à leurs yeux, je ressuscitais magiquement le personnage, je le défendais, pour un peu je l’incarnais ! Pour eux, il ne fallait pas que mon topo dure trop longtemps. J’en avais déjà trop dit. J’avais osé prononcer le mot diabolique : « Hitler ». Et c’était impardonnable. Ce rapport superstitieux au nazisme (je dis superstitieux car malheureusement, il n’est pas que naïf ; il dit l’obscurantisme anti-fascisant dans lequel notre époque s’engouffre petit à petit sans s’en rendre compte, en faisant lentement le lit des extrêmes), ce rapport blessé, lâche, m’énerve autant qu’il m’inquiète, car si vraiment nous ne rentrions pas dans le jeu actuel des nouveaux nazismes, nous oserions justement regarder le nazisme historique en face, nous n’en aurions pas peur. Oui : on peut posséder Mein Kampf dans sa bibliothèque (ce qui n’est pas mon cas) sans pour autant penser comme Hitler et épouser ses idées. Si si, je vous assure. Tout comme il est possible de rencontrer des personnes qui imitent en actes et en pensées Hitler alors même qu’elles s’affichent orgueilleusement anti-Hitler (je connais beaucoup de néo-fascistes de ce genre : à commencer par Hitler lui-même, qui voulait lutter contre une République de Weimar qu’il diabolisait). Et je vous rappelle aussi qu’Hitler est bien un homme, comme vous et moi : ce n’est pas le diable en personne, un animal, un esprit invisible, un nuage de fumée, ni un extra-terrestre, mais bien un être humain (je préfère vérifier cela avec vous en préambule au cas où, parce qu’un jour que je faisais cours à une classe d’élèves de terminale, je me suis amusé à leur demander s’ils pensaient qu’Hitler avait existé : une poignée d’étudiants reconnaissait timidement son incarnation humaine, mais beaucoup me soutenaient mordicus que ce n’était pas un être humain puisqu’il avait agi comme un monstre). Nos intentions anti-fascisantes et nos rêves totalitaristes d’éradication absolue du mal raccourcissent parfois notre mémoire et notre bon sens à une vitesse effrayante. Anders Behring Breivik nous l’a bien montré…

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Adeptes des pratiques SM », « Parodies de mômes », « Défense du tyran », « Homosexuel homophobe », « Homosexuels psychorigides », « Patrons de l’audiovisuel », « Androgynie Bouffon/Tyran », « Entre-deux-guerres » et « Milieu homosexuel infernal », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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1 – PETIT « CONDENSÉ »

 

Il suffit de s’intéresser un peu à la production artistique homosexuelle de la seconde moitié du XXe siècle, et même d’écouter les personnes homosexuelles d’aujourd’hui, pour être frappé d’une chose : ils se réfèrent tous énormément à la figure de l’Hitler gay. Que ce soit sur le mode de la diabolisation ou de la dérision, peu importe : le ridicule épouvantail à moineaux existe, et cache de nombreux secrets.

 

Pièce "The Producers" de Mel Brooks

Pièce « The Producers » de Mel Brooks


 

Surtout de nos jours, on ne prend malheureusement pas le phénomène assez au sérieux – ou bien, ce qui revient au même, on le prend trop au sérieux pour véritablement l’aborder avec dépassion et objectivité. En général, l’homosexualisation d’Hitler ou l’attrait pour les Nazis est présentée sur le mode de la farce, de la grosse blague potache (SM), voir comme une compromission politique (cf. la récente passion pour les cérémonies de commémoration des triangles roses) : on rabaisse le dictateur pour mieux démystifier le personnage. Alors, on me rétorquera que la dévirilisation d’Hitler dans les fictions – comme on peut la voir dans l’exemplaire film de Charlie Chaplin, « Le Dictateur », en 1940 – n’est pas à voir comme une Vérité sur Adolf Hitler : elle est surtout une technique bien connue de dévalorisation ou de ridiculisation de l’Ennemi. Certes. Je suis d’accord à 75%. Mais l’argument du « second degré » a bon dos. Je ne crois pas totalement à la toute-puissance démystificatrice de l’humour corrosif et militant, car derrière la caricature, il y a bien souvent une adoration muette, qui ne s’avoue pas à elle-même, une imitation et une collaboration secrètes qui en surprendra plus d’un. Certains faits parlent pour nous.

 

Film "The Dictator" de Charlie Chaplin

Film « The Dictator » de Charlie Chaplin


 

HITLER 14 Chaplin 2

Dans la blague, il y a toujours un fond de vérité. Et historiquement, la collaboration sérieuse avec Hitler et les Nazis a réellement existé. Oui. Les tyrans qui ont le plus persécuté la communauté gay étaient particulièrement entourés de personnes homosexuelles. Comme le dit Patrice Chéreau, « Nous sommes un peu comme le Dom Juan de Molière : nous avons développé une morale progressiste, mais nous, nous sommes toujours du côté des maîtres. » Beaucoup de personnes homosexuelles connaissent mieux que quiconque les mécanismes des systèmes dictatoriaux. Le seul problème, c’est qu’au lieu de les dénoncer, elles les adorent. Certaines se sont concrètement agenouillées devant les beaux soldats allemands (Maurice Sachs, Marcel Jouhandeau, Abel Hermant, Pierre Drieu la Rochelle, Abel Bonnard, Suzy Solidor, etc.), et expriment parfois leur amour-répulsion pour le régime nazi, à la fois dans l’humour camp, mais aussi très sérieusement : « Je ne peux pas m’empêcher d’avoir pour Hitler une admiration pleine d’angoisse, de peur et de stupeur » déclarera André Gide (cf. Journal, le 20 août 1940). Par exemple, au générique de son film « Passion » (1964), Yasuzo Masumara écrit le mot passion à côté d’une énorme croix gammée rouge : difficile d’être plus clair…

 

Par rapport à ce lien entre Hitler et l’homosexualité, en général, la communauté homo réagit mal. Très mal. En temps normal, par réflexe de survie, elle fait l’autruche (cf. l’édito « Hitler et les Talibans » de Thomas Doustaly, dans la revue Têtu, n°60, novembre 2001). Et puis, de temps en temps, elle s’insurge et sort les crocs sans chercher à comprendre la violence de son déni. Dès que la corrélation entre homosexualité et totalitarisme est faite, cela provoque un tollé fascinant dans les rangs de l’intelligentsia homosexuelle. « Problème sociologique : pourquoi tant de pédérastes chez les collaborateurs ? » s’indigne Jean Guéhenno (cf. l’article « Écrivains et Collaboration » d’Emmanuel Pierrat, dans le Dictionnaire des Cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 123). Certains intellectuels évacuent presque systématiquement le lien de coïncidence homosexualité-nazisme par le rejet pourtant justifié du lien de causalité. « Il est évident qu’il y avait des homosexuels parmi les nazis ou, inversement, des nazis parmi les homosexuels, mais cela ne signifie rien en soi. L’idée d’un lien intrinsèque entre adhésion au nazisme et orientation homosexuelle est si paradoxale… » (cf. l’article « Nazisme » de Michel Celse, idem, pp. 334-338.). Ils s’imaginent qu’ils fuient l’extrémisme d’où ils viennent, en choisissant celui qui lui est opposé. En réalité, ils passent souvent d’un fondamentalisme à un autre, de l’extrême droite à l’extrême gauche. Nous ne serons pas étonnés de lire André Gide écrire dans Morceaux choisis (1921) que « les extrêmes le touchent ».

 

Il faut avouer qu’il y a en effet quelque chose d’incompréhensible dans le soutien homosexuel au totalitarisme, une attitude de défense/déni comparable à celle du personnage de Molina dans le roman de Manuel Puig El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1976) face au film nazi « Destin » (pp. 58-59), une curieuse fascination qui refuse de se rendre intelligible :

 

Molina« Si l’on me donnait à choisir un film, rien qu’un film à revoir, c’est celui-là que je choisirais.

Valentín – Mais pourquoi ? C’est une ordure nazie. Tu ne t’en rends pas compte ?

Molina – Écoute… il vaut mieux que je me taise. »

 

Vidéo-clip de la chanson "Dégénération" de Mylène Farmer

Vidéo-clip de la chanson « Dégénération » de Mylène Farmer


 

Cette attraction homosexuelle vers la dictature suit majoritairement une logique esthétique et intentionnelle plus qu’une dialectique intentionnée et raisonnée d’Amour et de Réalité. Tout risible qu’il soit, le fantasme de l’uniforme et des attributs physiques de l’hyper-virilité nazie dans la communauté homosexuelle est assez marqué : pensez à Helmut Berger dans le film « Les Damnés » (1969) de Luchino Visconti, à la getapiste lesbienne dans le film « Rome ville ouverte » (1945) de Roberto Rossellini, au film « Les Dieux du stade » (1936) de Leni Riefenstahl, aux sculptures d’Arno Breker, à la coupe érotique des uniformes S.S. reprise par Calvin Klein ou Hugo Boss, aux dessins de Tom of Finland ou de Roger Payne, aux films pornos mettant en scène des néo-nazis, etc. (même le vidéo-clip de la chanson « Alejandro » de Lady Gaga, ou bien celui de la chanson « Dégénération » de Mylène Farmer, utilisent un traitement esthétique homosexualo-nazi). Vous connaissez sûrement la fameuse citation de Pascal : « Qui veut faire l’ange fait la bête ». Quand les personnes homosexuelles ne prennent pas conscience de la nature totalitaire et idolâtre de leur désir homosexuel, parce qu’elles veulent rester d’innocentes victimes responsables de rien, il arrive qu’elles cherchent à imiter en actes l’image du tyran qu’en intentions elles prétendent sincèrement combattre.

 

En effet, toutes ces images de l’Hitler gay rejoignent une certaine réalité fantasmée. Souvent dans l’histoire humaine, le dictateur et la personne homosexuelle ont fusionné concrètement. Par exemple, dans les années 1930, le régime nazi est touché de plein fouet par la découverte d’un foyer important de personnes homosexuelles au sein des Sections d’Assaut (Hitler en fait exécuter 150 le 30 juin 1934 pendant la Nuit des Longs Couteaux) : leur représentant le plus connu est Ernst Röhm. En Allemagne, les idées d’extrême droite et l’idéal homosexuel se marièrent très bien : pensons à Adolf Brand (qui fonda la revue homosexuelle Der Eigene), à la Communauté des Spéciaux (Gemeinschaft der Eigene), à l’Association masculine allemande (Männerbund) marquée par une esthétique-idéologie homo-érotique, à Hans Blüher qui projette la création d’une société fondée sur un État viril. Même si de fameux dictateurs ont persécuté les personnes homosexuelles, ils étaient contre toute attente eux-mêmes homosexuels. Ceux qui ont vécu les camps de concentration sont formels : beaucoup de leurs tortionnaires nazis étaient homosexuels (je pense au témoignage d’Aimé Spitz notamment). Toute la mystique hitlérienne était fondée sur l’homosexualité. L’historien italien Eugenio Dollmann aborde l’homosexualité d’Hitler dans Roma Nazista. Par ailleurs, en 2001, Lothar Machtan a consacré un ouvrage entier à l’homosexualité d’Hitler dans sa biographie La Face cachée d’Adolf Hitler. Cette thèse déchaîne bien évidemment les foudres de la communauté homosexuelle actuelle. À quoi bon montrer qu’Hitler était homosexuel ?, s’indigne-t-elle. Cela ne rajoute rien à l’horreur du personnage, et de surcroît, ne fait que charger inutilement la barque des personnes homosexuelles et convaincre l’opinion publique que l’homosexualité produit des dictatures et des monstres. On peut difficilement soutenir une telle affirmation. À mon sens, il importe peu que l’hypothèse soulevée par le livre de Lothar Machtan soit avérée ou non, puisque, même s’il est fort probable qu’Hitler a été une personne homosexuelle refoulée (quand on lit en intégralité la longue biographie en 2 tomes rédigée par l’historien Ian Kershaw – un ouvrage complètement neutre sur la question de l’homosexualité du Führer –, il ne fait aucun doute en effet que la vie d’Hitler comporte de nombreuses coïncidences de l’homosexualité relevées dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels), il est impossible d’assurer qu’il était l’incarnation humaine de « l’homosexuel » ou de « la personne homosexuelle » étant donné que ces deux personnages sont au mieux des mythes, au pire des réalités fantasmées que personne n’arrivera jamais à devenir complètement. C’est précisément le refus de la probabilité qu’Hitler ait pu être homosexuel, non pas parce qu’il était entièrement homosexuel mais simplement du fait de son humanité, qui est inhumain et homophobe. Comme le souligne très finement Gerald Messadié, « ce menteur dissimulait non pas un vice, mais ce qu’il était contraint de tenir pour un vice : son homosexualité. D’où son inhumanité ». Messadié soutient l’idée selon laquelle le rapport idolâtre d’attraction-haine concernant le désir homosexuel, c’est cela qui est inhumain et monstrueux, et non l’homosexualité en elle-même. Reconnaître les tendances homosexuelles d’Hitler, c’est finalement rendre l’homosexualité beaucoup plus humaine et moins monstrueuse que de la nier dans l’angélisme et la diabolisation d’un être humain historiquement figé au rang de « non-personne ». L’anti-fascisme homosexuel est une autre forme de négation du désir homosexuel. Il conduit tout autant à la dérive totalitaire et homophobe que le despotisme montré en tant que tel dans les manuels d’Histoire. Regardez le « milieu homosexuel » actuel, et ses chiens de garde hargneux…

 
 

2 – GRAND DÉTAILLÉ

 

FICTION

 

Film "Grégoire Moulin contre l’humanité" d’Artus de Penguern

Film « Grégoire Moulin contre l’humanité » d’Artus de Penguern


 

On retrouve un lien entre homosexualité et Hitler dans la chanson « Le Bâtard de Rhénanie » de Jann Halexander, la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel, le film « Radiostars » (2012) de Roman Lévy, le film « Novembermund » (« Lune de novembre », 1984) d’Alexandra von Grote, le film « Croix de fer » (1977) de Sam Peckinpah (avec Maximilian Schell, le capitaine nazi), le vidéo-clip de la chanson « Alejandro » de Lady Gaga, le concert d’Indochine Météor Tour à Bercy le 16 septembre 2010 (où il est énormément question d’Hitler), le roman Les Nouveaux nouveaux Mystères de Paris (2011) de Cécile Vargaftig (avec les camps de concentration), le film « Horror Vacui, Die Angst Vor Der Leere » (1984) de Rosa von Praunheim, le one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman (avec le salut nazi d’une Hitler-mère), le film « Megavixens » (1976) de Russ Meyer (avec Adolf Schwartz, sosie de Hitler, dévoré par un piranha), le tableau L’Énigme d’Hitler (1937) de Salvador Dalí, les films « Ilsa, She-Wolf Of The SS » (1974) et « Ilsa, gardienne du harem » (1976) de Don Edmonds, le film « K29 – Lager Di Sterminio » (1974) de Bruno Mattei, le film « Crime de David Levinstein » (1968) d’André Charpak (avec les tortionnaires nazis), le film « Chaque mercredi » (1966) de Robert Ellis Miller, le film « Chute libre » (1993) de Joel Schumacher, le film « American History X » (1998) de Tony Kaye (avec le personnage du néo-nazi), le film « Prinz In Hölleland » (« Prince en enfer », 1992) de Michael Stock (sur le néonazisme), le film « Oi ! Warning ! » (1999) de Dominik et Benjamin Reding, le film « Tu marcheras sur l’eau » (2005) d’Eytan Fox (avec le grand-père collabo), la chanson « Ce soir on danse au Naziland » de Sadia dans le spectacle musical Starmania de Michel Berger, le roman L’Autre (1971) de Julien Green, le film « Les Nuits fauves » (1991) de Cyril Collard (avec le traitement du néonazisme), le film « Allemagne année zéro » (1948) de Roberto Rossellini, le film « La Cinquième Colonne » (1942) d’Alfred Hitchcock, le film « Nés en 68 » (2008) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, la pièce Nietzsche, Wagner, et autres cruautés (2008) de Gilles Tourman, le film « Le Conformiste » (1970) de Bernardo Bertolucci, le film « Exodus » (1960) d’Otto Preminger, le film « Qu’as-tu fait à la guerre, papa ? » (1966) de Blake Edwards, le film « Gripsholm » (2002) de Xavier Koller, « L’Alcova » (1985) de Joe D’Amato, le film « La Niña De Tus Ojos » (« La Fille de tes rêves », 1998) de Fernando Trueba, le film « Sekret » (2012) de Prezemyslaw Wodcieszek, le roman Les Bienveillantes (2006) de Jonathan Littell, le roman Goodbye To Berlin (1939) de Christopher Isherwood, le film « La Folle Histoire de Max et Léon » (2016) de Jonathan Barré (avec le cabaret nazi), la chanson « Chanson de l’armée allemande » de Maurel et Vilbert, la chanson « Espionne » de Catherine Lara, etc.

 

Vidéo-clip de la chanson "Alejandro" de Lady Gaga

Vidéo-clip de la chanson « Alejandro » de Lady Gaga


 

Parfois, le thème d’Hitler semble tomber comme un cheveu sur la soupe dans l’intrigue homosexuelle d’un film ou d’un roman. « Les Français connaissent mal l’Autriche… à part Freud, Sissi, Hitler, Mozart, Mozart… Arnold Schwarzenegger ! » (Nicolas, l’un des héros homos du film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha) ; « La police se ramollit. Pas de croix gammée au défilé. » (Mark, le chef LGBT regrettant ironiquement que la Gay Pride n’ait pas été attaquée par les forces de l’ordre britanniques, dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus) ; « Le véritable amour à ceci de commun avec le crime contre l’Humanité qu’il est imprescriptible. » (Guillaume, le héros homosexuel, parlant de son amour pour Michael et du nazisme, dans la pièce Commentaire d’amour (2016) de Jean-Marie Besset) ; « C’est la guerre. Vous êtes des Nazis. » (Madame Albright, la prof de théâtre lesbienne du lycée, s’adressant à ses élèves et à Simon, le héros homo, pendant qu’il joue la comédie musical Cabaret, dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti) ; « Ça fait Hitler qui va draguer un mec. » (l’humoriste « hétéro » Arnaud Demanche se mettant dans la peau d’un internaute, dans son one-man-show Blanc et hétéro, 2019) ; « L’oncle Adolf s’était déjà flingué, son Eva l’avait accompagné, des fois qu’il aurait voulu draguer. Qui sait si, Là-Haut, il n’y a pas de folles ! » (c.f. la chanson « Et mon père » de Nicolas Peyrac) ; etc. Par exemple, dans le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier, Loïc, le héros homosexuel inculte, venu visiter le Muséum d’Histoire Naturelle de sa meilleure amie Marie, prétend s’intéresser à « l’hitlérisme », et feuillette une encyclopédie pour rechercher des informations sur Hitler. Dans le roman Le Contenu du silence (2012) de Lucía Etxebarría, il est question de la présence nazie aux Canaries. Dans le film « ¿ Qué he hecho yo para merecer esto ? » (« Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? », 1984) de Pedro Almodóvar, le Professeur propose à Antonio de réaliser une contrefaçon hitlérienne : « J’ai repensé aux fausses lettres d’Hitler et j’ai eu une idée de génie ! J’écris les mémoires d’un dictateur. Avec quelques retouches, ce dictateur pourrait être Hitler. J’écris le texte, ensuite vous le recopiez avec l’écriture d’Hitler. Quand ils apprendront que nous avons en notre pouvoir les véritables mémoires du Führer, on obtiendra ce qu’on voudra ! Je vous parle de millions, bien sûr ! » Dans la B.D. Pressions & Impressions (2007) de Didier Eberlé, un parallélisme entre les écrits nazis et la presse homosexuelle est fait : les collègues de Martial, le personnage « homophobe » qui rechigne à imprimer la revue gay que son entreprise d’impression doit tirer à des milliers d’exemplaires, lui font cette drôle de remontrance : « Ce n’est pas Mein Kampf non plus ! » (p. 3) La figure d’Hitler hante toutes les pages du roman La Vie est un tango (1979) de Copi, sans que le lecteur sache réellement pourquoi (car il n’est même pas fait véritablement mention des foyers d’expatriés nazis en Amérique du Sud…). À un moment, on nous informe qu’Hitler est en train d’envahir la Hollande. Un peu plus tard, le journaliste Semillita, caricaturiste du journal La Crítica, a une curieuse de manière de rendre hommage à la mort d’un homme appelé Silberman : « Silvano [le héros homosexuel] vit la caricature de Silberman à quatre pattes, le pantalon retroussé ; Hitler lui introduisait une croix svastique dans le postérieur. » (p. 72) Quand la deuxième proposition de dessin figurant Hitler arrive entre les mains d’Horacio, le directeur de rédaction, on craint l’infiltration nazie au sein du journal : « Nous ne pouvons pas titrer avec Hitler une deuxième fois dans la semaine ! » (Horacio, idem, pp. 35-36) Dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit, concernant l’échelle de Kinsey (barème d’homosexualité), Arnaud, l’un des héros homo, s’exclame : « C’est pas un truc inventé par les Nazis pour attraper les chiens errants ! » ; « Ça, c’est pas nazi ? » ; etc. Le Dr Katzelblum qui lui a soumis cette échelle qui va de 0 à 6, situe Arnaud à 6 parce que ce dernier ne s’assume pas homo : « Et vous, vous êtes un 6 allemand, un Nazi. » Dans le roman Les Bienveillantes (2006) de Jonathan Littell, Maximilian Aue, officier SS et grand massacreur de juifs, est homosexuel. Dans la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy, Thomas et François, les deux amants, reviennent de la « Soirée Mousse » organisée par leur ami Paul complètement bourrés : ils portent encore chacun sur le front le post-it du jeu auquel ils ont participé, et essaient de deviner quel personnage célèbre ils incarnent. À un moment, le jeu tourne mal puisque François porte le post-it « Adolf Hitler ». Thomas a tout le mal du monde à lui faire deviner qui il est : « Je suis une personne d’origine allemande. Et je porte des bottes en cuir. » François, sans le vouloir, confond le Führer et le couturier allemand homo Karl Lagerfeld : « Oh nan, pas lui ! Pas Karl Lagerfeld ! » Dans le film « Sing » (« Tous en scène », 2016) de Garth Jennings, Gunther, le cochon homosexuel, a un accent allemand prononcé. Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, pendant le cours d’histoire, Nathan simule un malaise alors que le prof parle de l’accord (pacte de non-agression) entre Hitler et Staline pendant la Seconde Guerre mondiale, pour être amené à l’infirmerie par son futur amant Jonas.

 

Quant au film « Prora » (2012) de Stéphane Riethauser, il a choisi comme cadre fictionnel de l’intrigue amoureuse homosexuelle entre les deux jeunes adultes Matthieu et Jan la station balnéaire désaffectée de Prora, fondée par les Nazis. Les amants figurent bien le double mouvement paradoxal qui caractérise le rapport idolâtre des personnes homosexuelles avec le nazisme : Matthieu (le Français) trouve Prora « beau » alors que Jan (l’Allemand) est révulsé par le lieu.

 

Dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, Petra, l’héroïne lesbienne allemande, sait que les sous-sol de l’immeuble où son frère Tielo et sa femme habitent sont d’anciens lieux de torture nazie : « Les nazis utilisaient le ‘Wasserturm’ comme prison pendant la guerre. Ils torturaient les gens dans le sous-sol. » (p. 36-37) L’idée qu’il puisse exister des fantômes nazis dans les catacombes d’habitations modernes fait froid dans le dos à son amante Jane (« J’aimerais pas être à leur place. ») qui se met à craindre pour leur immeuble berlinois à elle et Petra. Cette dernière lui rétorque agressivement : « Qu’est-ce que tu préfèrerais ? Qu’on se torture pour les péchés de nos ancêtres ? Mon grand-père était un nazi. Tu veux que je me suicide ? »

 

Il arrive que le personnage homosexuel soit comparé (ou se compare) à Hitler. « Mes initiales sont bizarres : S. S. » (Shirley Souagnon dans son concert Free : The One Woman Funky Show, 2014) Par exemple, dans la série Queer As Folk (version britannique, saison 3), l’efféminement d’Alexander est associé au dictateur : « Je te préviens : Alexander est un peu maniéré. Enfin, ‘un peu’… c’est comme dire ‘Hitler était un peu vache’. » Dans le roman Le Baiser de la Femme-Araignée (1979) de Manuel Puig, Valentín, au moment où il s’homosexualise progressivement, se défend de ressembler à Hitler : « Je ne suis pas un bavard qui parle politiquement dans les bars, non ? » (p. 46) Dans le film « Una Gionata Particolare » (« Une Journée particulière », 1977) d’Ettore Scola, la collaboration entre Mussolini et Hitler sert de toile de fond et de métaphore de l’homosexualité de Gabriele.

 

"Tilter"

« Tilter »


 

Très souvent, les Nazis ou Hitler sont féminisés ou homosexualisés : cf. le film « Les quatre cavaliers de l’Apocalypse » (1921) de Rex Ingram (avec les soldats allemands homosexuels), la pièce Dépression très nerveuse (2008) d’Augustin d’Ollone (avec l’Hitler homosexuel), la pièce Grand’ peur et misère du Troisième Reich (2008) de Bertold Brecht (avec l’allusion à l’homosexualité des S.A.), le film « Deseo » (2002) de Gerardo Vera (avec la lesbienne pro-nazie), la pièce Le Roi des Aulnes (1970) de Bernard-Marie Koltès (avec le héros nazi et homosexuel), le film « Rome ville ouverte » (1945) de Roberto Rossellini (avec la getapiste lesbienne), le film « La Grande Vadrouille » (1966) de Gérard Oury (avec le fils de Michèle Morgan travesti en bavaroise), etc. « Tu aurais pu être né en Bavière, en Basse-Saxe ou en Rhénanie, t’engager dans les Jeunesses avec tous les copains, te sentir très tôt un peu différent, caresser le torse imberbe de Franz sous les douches, le retrouver la nuit tombée dans sa couchette, devenir officier, ne jamais porter de triangle rose ou violet, être promu commandant, exterminer des homosexuels, coucher avec des garçons. Mais tu es né en France, tu es né juif, tu voulais être chimiste et rejoindre de Gaulle. » (Félix dans le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 110) ; « Les hommes à moustache sont des pédales ou des fachos, quand c’est pas les deux à la fois. » (Rossy De Palma en Juana dans le film « Kika » (1993) de Pedro Almodóvar) ; « Ma petite chochotte nazie ! » (Matthieu s’adressant à son futur amant allemand Jan, dans le film « Prora » (2012) de Stéphane Riethauser) ; « Les Nazis étaient des enculés. » (Kévin dans le film « Die Welle », « La Vague » (2009) de Dennis Gansel) ; etc.

 

Dans le film « Cruising » (« La Chasse », 1980) de William Friedkin, dans le club homo, il y a des soirées « Nuit de la Police » SM où tous les clients sont déguisés en flics, en Nazis. Dans le film « OSS 117 : Rio ne répond plus » (2009) de Michel Hazanavicius, on assiste à une scène de cabaret dans laquelle le méchant nazi, Heinrich, fait sa diva homosexuelle. Le film « Les Damnés » (1969) de Luchino Visconti dépeint les orgies homosexuelles des S.A. où certains soldats se travestissent. Dans la pièce Les Z’Héros de Branville (2009) de Jean-Christophe Moncys, il est question d’un « blondinet nazi en tutu ». Le film « Titler » (1999) de Jonathan Bekemeier montre la fusion étrange entre une cantatrice et le célèbre dictateur. Dans le film « The Producers » (« Les Producteurs », 1968) de Mel Brooks, deux escrocs montent une comédie musicale à Broadway, Springtime For Hitler, célébrant le grand retour d’un Hitler homosexuel gravitant dans un milieu artistique rempli de folles tordues. Dans son film « Salò O Le 120 Giornate Di Sodoma » (« Salò ou les 120 journées de Sodome », 1975), Pier Paolo Pasolini a souhaité faire de ses quatre bourreaux des répliques de chefs nazis : d’ailleurs, à la fin du film, on les voit se marier entre eux (ils sont déguisés en femmes mariées). Dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi, Freud est féminisé en despote nazi surnommé « Fraulein Freud », en travelo qui « descend le grand escalier des Folies Bergère » (p. 23). Dans la pièce musicale Érik Satie… Qui aime bien Satie bien (2009) de Brigitte Bladou, Érik Satie est filmé avec un visage d’Hitler. Dans le film « Miss Congeniality » (« Miss Détective », 2001) de Donald Petrie, Vic, homosexuel, est le relookeur officiel du concours de Miss États-Unis ; tacitement homo, il est surnommé « la Follasse bavaroise ». Dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud, le fiancé de Gatal, en lui tendant sa main, lui fait le salut nazi.

 

Film "Coming Out" de Matthias Freihof

Film « Coming Out » de Matthias Freihof


 

De manière apparemment paradoxale, le héros homosexuel se met à défendre Hitler et le nazisme. Par exemple, dans le téléfilm « Marie Besnard, l’Empoisonneuse » (2006) de Christian Faure, le bel Allemand Ady est protégé par Marie Besnard. Dans le film « A Single Man » (2009) de Tom Ford, George défend l’antisémitisme des Nazis de manière ambiguë devant ses étudiants. Dans le film « L’Arbre et la Forêt » (2010) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, Frédérick, pourtant ex-victime de la barbarie nazie, ancien Triangle rose des camps d’extermination nazis dans lesquels on diffusait de la musique wagnérienne, se met quand même, une trentaine d’années après, à défendre ses bourreaux et à rentrer dans leur moule puisqu’il est encore fan de Wagner : « Quand j’écoute Wagner, je prends ma revanche sur les Nazis. » Cette soumission s’opère pour des raisons purement esthétiques et sentimentales. Quand on dit que l’enfer est pavé de bonnes intentions, on touche au cœur des mécanismes du diable… Dans le roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1979) de Manuel Puig, Molina, le personnage homosexuel, illustre parfaitement cette ambivalence entre passion homosexuelle (esthétique) et raison humaine (éthique) : il sait très bien qu’il aime le film de propagande « Destin » – une vraie « ordure nazie » selon son compagnon Valentín – pour les mauvaises raisons, mais au moment où on lui demande de se justifier et d’arrêter de regarder ce type de films, il plonge dans le déni : « Écoute… il vaut mieux que je me taise. » (pp. 58-59)

 

Le soldat nazi, blond, musclé et vigoureux, représente l’archétype de la beauté qui fait fantasmer le héros homosexuel, le miroir narcissique androgynique dans lequel ce dernier peut se découvrir éblouissant ou bien Homme invisible : « Tu observes le bébé S.S. à la façon d’un diamantaire devant une pierre. » (Félix en parlant du jeune soldat blond, dans le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 148) ; « Tanguy se dit que leurs uniformes étaient plus beaux que ceux des Français et que les Allemands avaient plus d’allure. » (Michel del Castillo, Tanguy (1957), p. 50) ; « Nous sommes à Paris, depuis quelques mois occupé par les Allemands. Les troupes nazies paradent sous l’Arc de triomphe. […] Des soldats défilent, blonds et jolis garçons. » (Molina, le personnage homosexuel du roman Le Baiser de la Femme-Araignée (1979) de Manuel Puig, p. 51) ; « Pendant la guerre, on a souffert. Enfin… surtout à la Libération ! Moi, j’ai été tondue. Je peux vous dire que je connus les Allemands de près, de très très près. Surtout Hans. Des Allemands, des aristocrates… d’une classe foooolle. Des gens qui gagnaient à être connus. » (la femme collabo interprétée par Didier Bénureau, dans le spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012) ; etc.

 

Dans La Mort dans l’âme (écrit en 1949 et publié en 1954), Jean-Paul Sartre dépeint l’attrait homosexuel de son personnage Daniel pour les beaux soldats allemands arrivant à Paris. Dans le film « Chantons sous l’Occupation » (1976), Jean-Louis Bory condamne chez les hommes homosexuels « le goût de la botte, du cuir, du métal, et les fameuses messes de Nuremberg ». Dans la pièce Les Indélébiles (2008) d’Igor Koumpan et Jeff Sirerol, le fantasme de l’uniforme nazi est encore souligné.

 

Le Hitler homosexuel prend parfois le visage de l’amant : « Vous savez ce que ça fait de vivre avec la Gestapo ? » (Larry, reprochant à son amant Hank qui l’aime et qu’il trompe, de le faire culpabiliser de ses infidélités, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) Il arrive en effet que le personnage gay et le Nazi/Hitler fusionnent et se mettent en couple homo. Par exemple, dans le roman Le Monde inversé (1949) d’André Du Dognon, les patriotes français retournent leur veste pour s’allier sexuellement à l’ennemi allemand sous l’Occupation. Dans la comédie musicale Cabaret (1966) de Sam Mendes et Rob Marshall, le romancier Cliff se fait draguer et tripoter par un chef nazi homosexuel. Dans le film « Nous n’étions qu’un seul Homme » (1978) de Philippe Vallois, un homme sauvage vivant dans les Landes recueille un soldat de la Wehrmacht avec qui il va vivre une idylle sensuelle et génitale. Dans le vidéo-clip de la chanson « Dégénération » de Mylène Farmer, les soldats allemands se roulent des pelles très librement, et leurs chefs nazis participent aussi à la partouze générale. Dans le film « Un Élève doué » (1999) de Bryan Singer, Ian McKellen est un ancien officier nazi vivant aux États-Unis sous une fausse identité et entretenant une relation avec un adolescent. Dans le film « Les Maudits » (1947) de René Clément, Michel Auclair joue le rôle du mignon de Forster, un responsable de la Gestapo, Nazi convaincu. Tout le film « Brotherhood » (2010) de Nicolo Donato se centre sur une histoire d’amour homosexuel entre deux hommes gravitant dans un groupe politique néo-nazi. Dans le film « Tras El Cristal » (1987) de Agustí Villaronga, un pédophile nazi paralysé vit une histoire d’amour avec l’infirmier qui s’occupe de lui. Dans le film « Grégoire Moulin contre l’humanité » (2001) d’Artus de Penguern, Jean-François (Didier Bénureau) sodomise un homme déguisé en Hitler lors d’un bal masqué organisé dans un hôtel particulier de Paris ; après avoir fait sa petite affaire, il se rend compte que Grégoire Moulin, qu’initialement il recherchait, a réussi à s’enfuir avec le déguisement d’Hitler volé à ce pauvre monsieur bâillonné au sol… mais il ne regrette pas pour autant d’avoir joui à l’intérieur de ce faux Hitler : « Écoutez, je suis navré. Je vous ai pris pour quelqu’un d’autre. Ceci dit, c’était pas du tout désagréable. Vous allez me trouver un peu… mutin… mais j’ai bien envie de recommencer. Pas vous ? » Dans le roman Pompes funèbres (1947) de Jean Genet, Paulo baise avec Hitler, le fameux dictateur décrit comme une « mijaurée », et métamorphosé en « passive » : « Le petit gars de Paris accomplit son travail avec vaillance. D’abord il eut peur de faire du mal au Führer. Le membre était d’acier. De toute cette machine à supplice qu’était Paulo, la verge en était la pièce essentielle. Elle avait la perfection des rouages, des bielles fabriquées avec précision. […] Elle était également sans tendresse, sans douceur, sans le tremblement qui fait souvent frémir délicatement les plus violentes. […] Il fonça jusqu’au fond. Il éprouva une grande joie à sentir le tressaillement de bonheur de Madame. La reconnaissance de la beauté de son travail le rendit fier et plus ardent. Ses bras, par en dessous, près des épaules, s’agrippèrent au bras de l’enculé, et il fonça plus dur, avec plus de fougue. Le Führer râlait doucement. Paulo fut heureux de donner du bonheur à un tel homme. » (pp. 164-165) Ce même roman célèbre également l’histoire d’amour entre un Allemand nazi, Érik Seiler, et un milicien, Riton. Dans la pièce En ballotage (2012) de Benoît Masocco, Georges et Édouard ont « flashé » l’un pour l’autre pour la première fois lors d’une conférence d’Édouard traitant de la « Montée du néo-nazisme en Europe occidentale » ; d’ailleurs, à un moment, Georges compare Édouard à « Hitler ».

 

Film "Brotherhood" de Nicolo Donato

Film « Brotherhood » de Nicolo Donato


 

Il est fréquent de voir dans les œuvres homosexuelles une sacralisation de la traîtresse collabo, qui va s’offrir en holocauste à la beauté nazie, et se mettre tout le monde à dos (cf. le poème « Canción De Amor A Los Nazis En Baviera » de Néstor Perlongher, le film « Lili Marleen » (1980) de Rainer Werner Fassbinder, le spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons (2012) de Didier Bénureau, etc.) : « Ma tante a toujours été proche des Allemands. » (Zize, le travesti M to F parlant de sa tante qui a été tondue à la Libération, dans le one-(wo)man-show Zize 100% Marseillaise (2012) de Thierry Wilson) ; « Ma grand-mère me lisait Mein Kampf avant de m’endormir. » (Mémé Huguette, personnage transgenre M to F de 98 ans, tondue à la Libération, dans le one-(wo)-man show Désespérément fabuleuses : One Travelo And Schizo Show (2013) du travesti M to F David Forgit); etc. Dans le film « Stand » (2015) de Jonathan Taïeb, la vieille Olga raconte les horreurs de la Seconde Guerre mondiale à Katya et à Anton, le héros homosexuel, et dit qu’elle a connu les Nazis. Elle suscitera chez ce dernier une vocation : « Anton se bat contre le nazisme. » Dans le roman À mon cœur défendant (2010) de Thibault de Saint Pol, par exemple, Madeleine incarne tout à fait la comédie sincère de l’homosexualité collaboratrice : en effet, l’héroïne passe son temps à décrire ses sensations et ses bonnes intentions (« Je suis en danger. Où que j’aille, les nazis me rechercheront. », p. 78 ; « J’ai toujours été écœurée par le militarisme, et la tradition prussienne est ce qu’il y a de pire. Sa mécanique humaine est effrayante. Pourtant, ils sont beaux ces jeunes hommes dans leurs uniformes. », p. 49) pour finalement mal agir et coucher avec l’ennemi (« Je suis la maîtresse d’un espion, d’un traître, d’un ennemi ! […] Comment le sort a-t-il pu mettre un Boche sur ma route ? […] Comme je regrette ces nuits d’ivresse ! », p. 78 ; « J’étouffe ! Je me revois dans les bras de cette brute. », p. 86), et conclure en disant que cette trahison est finalement « quand même de l’amour » (« Il m’aime. Et je l’aime, malgré tout. », p. 201). En jouant le concerto violons de la grande folle perdue, de la vierge effarouchée (genre « Je ne suis pas celle que vous croyez… Lâchez-moi, espèce de sale pooorc ! »), la Tragic Queen homosexuelle se donne une excuse pour tomber concrètement et secrètement amoureuse de son bourreau nazi, et même lui faire un enfant !

 

On retrouve exactement le même cas de figure de l’identification du personnage homosexuel à la femme collabo tombant dans les bras d’un beau dirigeant nazi dans le roman Le Baiser de la Femme-Araignée (1976) de Manuel Puig. Molina, le personnage de la grande folle, raconte un film des années 1930, où Léni, une femme séduisante, est déchirée entre la fidélité à sa Patrie française, et sa passion pour un officier allemand… et là, pareil, c’est reparti pour les fausses questions existentielles, les esthétisations interrogatrices de la tragédienne, des questions sans but (si ce n’est celui de nier la collaboration en actes, puisque la femme fatale finira par trahir son camp) : « Alors Léni, restée seule, se demande si elle pourrait aimer un de ceux qui sont des envahisseurs de sa patrie. » (idem, p. 54) ; « Léni écoute fascinée, elle veut en savoir davantage ; en tant que femme, elle aimerait connaître le secret intime qui fait la force personnelle du Führer. » (idem, pp. 89-90) ; « Elle est effrayée, mais elle ne fait rien pour se défendre, elle est comme à la merci de ce qui va lui arriver. » (idem, p. 54)Les postures théâtrales homosexuelles visent à cacher l’objet d’indignation par l’indignation elle-même. On pleure et on gémit pour n’en faire qu’à sa tête et à ses pulsions.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

Je vous renvoie au documentaire « Männer, Helden Und Schwule Nazis » (2004) de Rosa von Praunheim (sur le néonazisme), au blog homo-érotique Mein Camp créé par le très queer BBJane Hudson (un site consacré au genre artistique homosexuel « camp »), à l’essai Le IIIe Reich et les homosexuels (2011) de Thomas Rozec.

 

HITLER 1 gay

 

L’homosexualisation d’Hitler et des Nazis (ces derniers d’ailleurs ne supportaient pas qu’on les qualifie ainsi) peut partir d’une provocation, d’une volonté de diaboliser et de ridiculiser d’autres personnes que celles singées. Par exemple, le 14 juillet 2013 à Paris (jour de la Fête nationale), quelques heures après le défilé sur les Champs-Élysées de François Hollande, les Hommen (= anti-mariage-gay) ont parodié le président en faisant défiler sa doublure masquée bras dessus bras dessous avec celles de Staline et d’Hitler, comme s’ils étaient le couple de l’année.

 

Le traitement comique ou agressif du lien entre désir homosexuel et nazisme donne à croire à certains que cette corrélation est absurde, voire que c’est elle et seulement elle qui pose problème, qui « crée un problème » qui sans elle n’aurait pas existé. Les choses ne sont pas aussi simples.

 

Téléfilm "Un Amour à taire" de Christian Faure

Téléfilm « Un Amour à taire » de Christian Faure


 

La dissociation radicale, manichéenne et victimisante, entre homosexualité et Hitler, est la spécialité de la communauté homosexuelle actuelle, même si elle rejoint un déni social plus large concernant la période 1930-1940, présentée comme apocalyptique et totalement étrangère à notre réalité contemporaine. On nous encourage à fermer les yeux sur la vie en Allemagne à cette époque-là (une époque tellement gémellaire à la nôtre !), à fuir le loup nazi et à le tenir bien loin de nous… si loin qu’on oublie qu’il a existé et qu’on peut, pour le coup, l’imiter, parce qu’on n’a pas décortiqué son fonctionnement, et qu’on l’a diabolisé. Les personnes homosexuelles s’étonnent de voir la tête hitlérienne montée sur ressorts sortir de la boîte de pandore où elles l’avaient soigneusement enfermée pour se donner bonne conscience.

 

C’est pourquoi, quelquefois, au détour d’une œuvre de fiction traitant d’homosexualité, on voit surgir inopinément le thème d’Hitler ou du nazisme, sans vraiment de lien logique avec l’intrigue en cours : « ‘Vous savez que Hitler vit toujours en Patagonie’, intervint soudain Alberto G., l’homme à la barbe rousse. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 240)

 

Mais il y a pire. C’est en tenant le « monstre » nazi bien à distance que certains individus homosexuels fusionnent identitairement avec lui, et agissent comme lui. Selon eux, inconsciemment, la substitution et l’incorporation au « diable » permettront son anéantissement total (en réalité, ils ne font que le cacher). On peut même entendre des personnes homosexuelles réelles se prendre pour le funeste dictateur : « Je deviendrais la plus célèbre vedette autrichienne après Hitler. » (Brüno dans le docu-fiction « Brüno » (2009) de Larry Charles)

 

HITLER 9 Affiche

 

N’en déplaise à l’opinion publique gay friendly, l’attraction homosexuelle pour les Nazis n’est pas du tout un mythe. Elle fut et reste une réalité. Déjà, pour commencer, beaucoup de personnes homosexuelles sont connues pour avoir collaboré pendant la Seconde Guerre mondiale : Jacques Chardonne, Gertrude Stein, Ramón Fernandez, Henry de Montherlant, Colette, Vénus Myrtille, Jean Genet, Gabriele D’Annunzio, Romaine Brooks, etc. « Les milieux homosexuels parisiens ont fourni de nombreuses et brillantes recrues. » (Jean-Paul Sartre cité dans le Dictionnaire des Cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 420) ; « Certains homosexuels grenouillent, se corrompent et collaborent avec les nazis : le souvenir des trafics d’influence, du marché noir, des profits d’origine douteuse, des spoliations de biens juifs et autres activités peu recommandables seront, à la Libération, et lors des procès de l’épuration, associés au monde et aux mœurs des invertis. » (cf. l’article « Il faut en être ! » de Christian Mirambeau, cité dans l’essai Folles de France (2008) de Jean-Yves Le Talec, p. 169) ; « Nul doute que sur certains autres que Brasillach (Jouhandeau, Fraigneau, Bonnard, Cocteau, Montherlant, Benoist-Méchin) ne se soit exercé l’attrait érotique du blond aryen sportif. […] Sartre a eu beau vouloir faire de jean Genet un maudit, victime de la société bourgeoise, Pompes funèbres n’en reste pas moins une déclaration d’amour enflammée au nazisme. » (Dominique Fernandez, Ramon (2008), pp. 56-57) ; « Dans cette fascination du chef et de la force, il y avait beaucoup de féminité latente, une certaine forme d’homosexualité. Au fond, chez la plupart de ces intellectuels fascistes, je pense à Brasillach, à Abel Bonnard, à Laubreaux, à Bucard, il y avait le désir inconscient de se faire enculer par les S.S. » (Emmanuel Berl s’adressant à Patrick Modiano) ; etc. Par exemple, Claude-Michel Cluny a eu une aventure avec un soldat allemand quand il n’avait que 14 ans. En 1940, Suzy Solidor appelle à la collaboration avec les Nazis dans Radio-Paris. L’écrivain français Maurice Sachs, juif et homosexuel, rejoint les rangs nazis et devient indicateur de la Gestapo. Jean Cocteau trinque au champagne avec les Allemands et écrit sa « Lettre ouverte à Brecker » . Harald Kreutzberg sert la propagande nazie dans les pays occupés. L’esthète bourgeois Pierre Drieu la Rochelle ne cache pas son amour des occupants nazis (il assiste même au congrès de Nuremberg en 1935). Abel Hermant collabore sous Vichy, et sa passion pour les soldats de la Wehrmacht est de notoriété publique. Robert Brasillach avoue à ses amis sa fascination pour la virilité des soldats allemands. Violette Morris, l’athlète lesbienne, travaille pour la Gestapo. La sympathie de Philippe Jullian pour les Alliés et l’Angleterre ne l’empêche pas de « succomber aux charmes des beaux soldats allemands qui rôdent le soir dans certains quartiers », comme il l’écrit dans son Journal en 1941. Marcel Jouhandeau tombe désespérément amoureux du lieutenant allemand Heller (Didier Éribon, dans son Dictionnaire des Cultures gays et lesbiennes (2003), s’interroge d’ailleurs sur les paradoxes de l’écrivain français : « Il est difficilement compréhensible qu’un analyste aussi aigu du processus d’abjection dont est victime une catégorie d’individus ait pu, presque au même moment, publier un opuscule intitulé Le Péril juif (1937) dans lequel sont condensés tous les poncifs antisémites de l’époque », p. 273). Abel Bonnard, travaillant au côté de Philippe Pétain, a porté le sobriquet de « guestapette » (« Paradoxal de constater que le régime de Vichy, qui avait été à l’origine de l’aggravation des peines de prison pour les homosexuels, choisit Abel Bonnard, pédéraste, comme Ministre de l’Éducation nationale », écrit Michel Larivière dans son Dictionnaire des homosexuels et bisexuels célèbres (1997), p. 71) Dans son « Domaine des Esprits » où il habitait, le chanteur homo Charles Trénet accueillait des mineurs pour des surprises-parties sexuelles. Il a été pris en flagrant délit avec 4 jeunes Allemands de 19-20 ans. Il fut condamné à la prison pour attentat aux mœurs, à Aix (France).

 

Luchino Visconti, quant à lui, a toujours été fasciné par l’Allemagne nazie : à la fois aristocrate et marxiste de salon, il s’est intéressé aux classes supérieures germaniques du IIIe Reich dans ses productions. Jean-Luc Lagarce, dans son Journal (2008), se passionne pour le procès de Klaus Barbie, et dit que sa fascination concernant le nazisme est « une chose indicible », inénarrable (d’ailleurs, il écrit qu’un de ses beaux amants homos a le visage « parfait » d’un Nazi). Une femme lesbienne du documentaire « Le Bal des chattes sauvages » (2005) de Véronika Minder avoue avoir partagé l’avis d’Hitler sur les personnes homosexuelles, avant de changer radicalement d’avis et de les idéaliser par la suite. Dans son essai Le Rose et le Brun (2015), Philippe Simonnot montre comment de nombreuses personnes homosexuelles ont contribuer à l’arrivée du nazisme et d’Hitler au pouvoir.

 
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Dans son essai Le Rose et le Brun (2015), Philippe Simonnot explique parfaitement que l’homo-érotisme a été la source d’inspiration et l’instrument du nazisme : « Les homosexuels ont-ils joué un rôle dans la montée du nazisme au Pouvoir ? Voilà une question tabou aujourd’hui, que personne n’ose poser, pas même évoquer. […] ce tabou qui a d’abord été mis en place par les nazis eux-mêmes. » (p. 11) ; « À partir de 1934, le lien entre homosexualité et nazisme est devenu le fonds de commerce de la propagande stalinienne au niveau mondial. Erich Fromm, de l’École de Francfort, prétendait trouver une relation entre l’homosexualité et les désordres sadomasochistes propres aux nazis. Encore dans les années 1970, la relation entre homosexualité et nazisme était fantasmée au plus haut niveau du Parti Communiste Français. » (idem, p. 15) ; « La libéralisation des mœurs était souhaitée par le nazisme. Le national-socialisme, en effet, s’est d’abord appuyé sur tout un courant de libération des pulsions sexuelles, et notamment des pulsions homosexuelles. Ces dernières, du reste, ne sont en rien causées par une vie conjugale répressive à en croire Hans Blüher et tant d’auteurs allemands de cette époque. Par conséquent chercher la naissance du nazisme (ou du fascisme) dans les berceaux de la famille patriarcale ne peut mener très loin. » (idem, p. 18) ; « L’effectivité de la culture nazie reposait sur l’abolition des tabous sexuels, l’émancipation de la vie érotique et l’appel au ‘droit de la nature’. » (idem, p. 19) ; « Le national-socialisme était pour la jeunesse des années 1920 et 1930 une forme de libération sexuelle, cohérent avec son paganisme foncier et son anti-christianisme viscéral. » (idem) ; « Le Führer était parfaitement conscient des avantages de la libération sexuelle pour le maintien de sa dictature. » (idem, p. 20) ; « Les nazis sont passés orfèvres dans l’effacement de leurs crimes, on le sait assez. À enfermer des homosexuels dans des camps de concentration, à les torturer et à les massacrer, n’est-ce pas une fois encore tout un pan de leur histoire originaire, de leurs racines homo-érotiques que les Hitlériens voulaient supprimer ? En fait, cet effacement de l’homosexualité nazie a commencé peu après l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Le 6 mai 1933, les nazis ont pillé l’Institut de Sexologie que Magnus Hirschfeld avait créé à Berlin en 1919 – une véritable innovation à l’époque – non pas seulement parce que Hirschfeld était juif, non pas seulement parce qu’il affichait son homosexualité et prétendait venir au secours des homosexuels, mais aussi et peut-être surtout parce que son Institut recevait des milliers de fiches d’homosexuels nazis qui étaient venus en consultation chez le sexologue vedette des années 1920. Et ce qui a été brûlé dans les premiers autodafés orchestrés par les chemises brunes en mai 1933, ce ne sont pas seulement des livres, mais aussi des fiches bien compromettantes pour ceux qui étaient maintenant au pouvoir et qui prévoyaient déjà de revenir publiquement à la norme hétérosexuelle. Du reste, une partie de ces fiches a été confiée à la police qui disposerait dorénavant de quoi faire chanter les malheureux clients, nazis ou pas, de l’Institut. » (idem, p. 21) ; « Ne serait-ce que pour ne pas rentrer dans le jeu de l’oubli sélectif, il nous paraît urgent d’au moins poser la question des origines homosexuelles d’une partie non négligeable du National-Socialisme. Manfred Herzer, l’auteur d’une biographie de Magnus Hirschfeld, un personnage central de notre enquête, l’admet volontiers : sur cette question, nous, homosexuels, nous faisons face à un vide que nous nous sommes imposés nous-mêmes dans notre connaissance, vide qui a pris les dimensions d’un tabou idéologiquement motivé. » (idem (2015), p. 23) ; « Hitler a renié et même massacré une partie de ceux qui l’avaient aidé dans sa ‘résistible ascension’. » (idem, p. 25) ; etc. Sous l’Allemagne nazie, les mouvements de jeunesse des Wandervögel (littéralement : Oiseaux migrateurs) étaient imprégnés d’homosexualité. Berlin était la capitale mondiale des moeurs légères, très « avancée » en matière de législations désincarnées (Le statut de ‘mère célibataire’ est inscrit dans le code civil allemand, par exemple). Avant de se durcir contre les personnes homosexuelles, Hitler, étonnamment, était très permissif en matière d’homosexualité, et défendait la séparation entre vie publique et vie privée, en soutenant que la sexualité c’était du domaine de l’intime : « Faites ce que vous voulez, mais ne vous faites pas prendre. » (idem, p. 246) Il a commencé à retourner sa veste quand son pouvoir et son image publique commençaient à être impactée négativement : « Les choses ont atteint un stade où des rumeurs courent maintenant dans les quartiers marxistes que vous seriez vous-même aussi homosexuel, mon très estimé Führer. » (cf. lettre de Paul Schulz adressée à Adolf Hitler le 2 juin 1932) Avant ça, contrairement à l’idée reçue, Hitler était très « moderne » pour son époque. Il serait même jugé laxiste et gay friendly aujourd’hui.
 

Face à autant de cas de collaboration, certains militants de la « Cause homosexuelle » s’indignent, ne veulent pas y croire : « N’aurions-nous donc, pour cette période terrifiante de l’histoire, que des héros ‘négatifs’, que des chroniques de massacres d’homos traqués et torturés, que des victimes impuissantes face à une haine des idéologies alors en cours dans la presque totalité de l’Europe ? » (Jean Le Bitoux, Les Oubliés de la mémoire (2002), p. 225) ; « Et que dire de la pénible fascination d’une partie de la mode masculine pour une esthétique évoquant immanquablement l’Allemagne nazie ? » (cf. l’article « Mode » d’Anne Boulay et Marie Colmant, dans le Dictionnaire des Cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 325)

 

L’esthétique homosexuelle rejoint souvent le fascisme nazi : pensez au film « Le Troisième Sexe » (1959) de Veit Harlan (qui est bel et bien un film nazi !), à Marlon Brando dans le film « Le Bal des Maudits » (1958) d’Edward Dmytryk, à Helmut Berger dans le film « Les Damnés » (1969) de Luchino Visconti, à l’esthétisme soigné du film « Les Dieux du Stade » (1936) de Leni Riefenstahl, aux sculptures homo-érotiques d’Arno Breker, et plus récemment à la coupe érotique des uniformes S.S. reprise par Calvin Klein et Hugo Boss, aux dessins de Tom of Finland ou bien de Roger Payne, aux films pornos dits de « nazixploitation » mettant en scène des néo-nazis (« Skin Gang » (1999) de Bruce LaBruce, par exemple), le look skin adopté par certains hommes gay dans les années 1980, etc.

 

Pink Svastika

Pink Svastika


 

The Pink Swastika défend même la thèse selon laquelle le nazisme viendrait de l’homosexualité. D’autres intellectuels font aussi le rapprochement, non par mauvaise foi, mais parce qu’il existe vraiment : « Cette virilité fasciste ou communiste est un fantasme d’homosexuels, Gide à Moscou, Brasillach à Berlin. Ce dernier ne s’est jamais inquiété des déportations d’homosexuels allemands par les nazis. » (Éric Zemmour, Le Premier Sexe (2006), p. 78) Quelques personnes homosexuelles ne démentent absolument pas cette part d’ombre de leur désir homosexuel : « Dans mes fantasmes d’enfant, ces baraquements plein de femmes étaient à la fois angoissants et très séduisants, homo-érotiques. » (l’écrivaine Cécile Vargaftig en parlant des camps de concentration, à l’émission Homo Micro sur Radio Paris Plurielle, Paris, le 7 mars 2011)

 

Docu-fiction "Brüno" de Larry Charles

Docu-fiction « Brüno » de Larry Charles


 

Malheureusement, l’adhésion esthético-sentimentale des personnes homosexuelles pour Hitler a tendance à être atténuée et déproblématisée par les intentions, par l’excuse de la « provocation ». On prête par exemple beaucoup de second degré à un Salvador Dalí qui, dans son Journal, écrit son amour pour Hitler « de dos ». En 1966, Yukio Mishima réalise une œuvre (ironique ?), Mon ami Hitler, dans laquelle il affirme qu’« Hitler avait raison ». Pareil pour l’engouement sexuel qu’avancent les personnages des romans de Jean Genet pour le dictateur : « Cette toute-puissance du faible, Genet lui trouvera un symbole épique : Hitler. » (Jean-Paul Sartre, Saint Genet (1952), p. 149) À propos des Nazis trahis en 1944 pendant la Libération par le peuple français qui avait auparavant collaboré avec eux, Genet écrit en 1947 dans Pompes funèbres : « Ils ne furent pas seulement haïs mais vomis. Je les aime. » (cf. l’article « Physique de Genet » de Philippe Sollers, dans Magazine littéraire, n°313, septembre 1993, p. 41) La passion de l’écrivain pour Hitler n’est pas qu’un gentil rôle. Dans son autobiographie Le Journal du Voleur (1949), Genet se prend très sérieux quand il dit : « Je donnerais tous les biens de ce monde pour connaître l’état désespéré. Hitler seul, dans les caves de son palais, aux dernières minutes de la défaite de l’Allemagne, connut sûrement cet instant de pure lumière – lucidité fragile et solide – la conscience de sa chute. » (pp. 236-237)

 

Il y a une forme d’orgueil et de goût de l’image (que certains pseudo artistes militants appelleront pompeusement « anti-conformisme iconoclaste et révolutionnaire ») dans la sympathie homosexuelle envers Hitler. C’est parce qu’il n’est/ne serait désiré de personne que certains individus homosexuels se mettent précisément à le désirer. S’il était aimé et aimant, il perdrait tout intérêt. Au fond, ce n’est rien d’autre que la mort (du Désir) qu’ils célèbrent en lui… en plus de l’occasion que le funeste dictateur leur fourni de faire leurs intéressants et de se célébrer eux-mêmes dans une « homosexualité noire et maudite ».

 

Maintenant, en ce qui concerne l’homosexualité attribuée à Hitler et aux Nazis, je ne pense pas qu’elle soit une invention délirante. Par exemple, rien que si nous regardons la ville de Berlin en 1933, nous y dénombrons 130 bars homosexuels, … c’est-à-dire plus qu’aujourd’hui à Paris ! En Allemagne, les idées d’extrême droite et l’idéal homosexuel se marièrent très bien : pensons à Adolf Brand (qui fonda la revue homosexuelle Der Eigene), à la Communauté des Spéciaux (Gemeinschaft der Eigene), à l’Association masculine allemande (Männerbund) marquée par une esthétique-idéologie homo-érotique, à Hans Blüher qui projette la création d’une société fondée sur un État viril. Dans les camps de concentration et d’extermination nazis, l’activité homosexuelle a bien existé. « Au camp de Gross-Raming, les kapos étaient à 90% des invertis. » (Christian Bernadac, Des Jours sans fin, 1976) ; « Quand quelqu’un va s’attaquer à l’homosexualité sous l’Occupation, on va bien rigoler ! J’ai commencé à travailler sur l’homosexualité à Ravensbrück… Je peux vous dire… C’est une époque où il n’y a plus de frontières. Tout est décuplé. » (Marie-Jo Bonnet, en conclusion de sa conférence « Violette Morris, histoire d’une scandaleuse » du 10 octobre 2011 au Centre LGBT de Paris ; l’historienne lesbienne n’en revenait toujours pas de découvrir le nombre de confluences entre homosexualité et nazisme, même si elle ne s’est trahie qu’à la fin, car elle se gardait bien de faire le lien !) ; etc. Le résistant alsacien Aimé Spitz interné au camp alsacien du Struthof puis à Dachau assure que « les chefs de bloc et autres kapos étaient presque tous devenus homosexuels au cours de leur détention. » (Aimé Spitz cité dans Jean Le Bitoux, Les Oubliés de la mémoire (2002), p. 93)

 

La recrudescence de la pratique homosexuelle côté allemand pendant la Seconde Guerre mondiale est confirmée par de nombreux sociologues et historiens : « Heinrich Himmler (1900-1945), le chef de la Gestapo, recrutait exclusivement ses subordonnés dans les milieux homosexuels. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 212) ; « Quant aux généraux homosexuels de l’armée allemande, de l’époque hitlérienne, leurs noms sont sur les lèvres de tous… Goering, Himmler, Reohm, et même Hitler. » (idem, p. 217) ; « Si l’Occupation avait radicalement supprimé la progression de la drogue en France, elle y avait en revanche développé l’homosexualité. Assez répandue outre-Rhin, la pédérastie s’étendit à la suite du passage des soldats allemands dans notre pays. Jusqu’alors, elle était le fait de quelques intellectuels ou de quelques blasés qui constituaient une confrérie très fermée. Les véritables invertis physiologiques se montraient encore plus discrets. Bref, la pédérastie n’était pas descendue dans la rue. Par goût, par entraînement, par intérêt, par lâcheté, de nombreux jeunes gens, et des moins jeunes, subirent l’initiation germanique. À la Libération, l’arrivée des Nord-Africains, les difficultés économiques, la fermeture des bordels, encouragèrent cette vague d’homosexualité. Pour la première fois à Paris, il existait une prostitution masculine avouée sur les trottoirs de Saint-Germain-des-Prés. C’est pourquoi la loi d’avril 1946 sur la prostitution n’établit aucune distinction de sexe. » (André Larue, Les Flics, 1969) ; « Pendant l’Occupation, je fus, bien entendu, l’ami de nombreux officiers allemands. J’évitais ainsi la déportation et pus, grâce à mes relations, ouvrir mon premier magasin d’antiquités. Ces quatre années furent, quoique comparativement plus calmes, une longue suite d’aventures sentimentales, fort compliquées, selon ‘notre tradition’. Très vite, grâce au premier argent si généreusement laissé par mon attaché d’ambassade, je me fis un nom dans la hiérarchie des antiquaires. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 86) ; etc.

 

Comme je l’ai écrit dans le petit « condensé » de cet article, et comme je le développe dans la partie sur les dictateurs homosexuels du code « Homosexuels psychorigides » du Dictionnaire des Codes homosexuels, l’hypothèse de l’homosexualité du Führer n’est pas non plus à écarter. Elle est une réalité déjà iconographique, comme on a pu le voir dans la première partie de mon exposé (et vous savez l’importance que j’attache à cette phrase faite maison qui soutient qu’« il n’y a pas de cliché sans feu »). Par exemple, en 1933, la revue Fantasio présentait déjà Hitler comme une folle perdue. L’historien italien Eugenio Dollmann aborde également l’homosexualité d’Hitler dans Roma Nazista (1949). Pour ma part, j’ai fait l’effort de lire les deux pavés de la biographie (2000) rédigée par l’historien Ian Kershaw – un ouvrage complètement neutre sur la question de l’homosexualité du Führer – ; il ne fait aucun doute en effet que la vie d’Hitler comporte de nombreuses coïncidences de l’homosexualité relevées dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels : mère possessive, père tyrannique, profond isolement amical, vocation artistique contrariée (Hitler est recalé de l’École des Beaux-Arts), haine de son propre corps (il ne se mettait jamais en maillot de bain), passion pour le cinéma (il avait sa salle de projection privée) et les mythologies anachroniques (Wagner, Bavière, militarisme, etc.), anti-catholicisme féroce, sensiblerie nostalgique et confusion de l’art avec la vie (Herman Broch, dans son essai Création littéraire et connaissance (1966), assure qu’Hitler était un fervent partisan du kitsch), goût pour les corps athlétiques et les statues, aucune appétence pour les femmes (le mariage in extremis avec Eva Braun n’a été qu’une couverture), etc. « En ce qui concerne Hitler, il est quand même de nombreux témoignages qui concordent pour assurer que les femmes ne l’intéressaient guère, comme le prouverait l’absence dans sa vie de la moindre aventure amoureuse qui ait eu un développement complet. » (Jean Boisson, Le Triangle rose (1988), p. 19)

 

Certaines thèses vont dans le sens d’une dévirilisation forcée d’Hitler. Par exemple, dans l’essai Secret Weapons: Technology, Science And The Race To Win World War II (2013), Brian Ford raconte comment les Alliés auraient tenté d’administrer des œstrogènes dans les aliments d’Adolf Hitler pour provoquer chez lui « une transformation sexuelle qui le ferait devenir plus féminin et moins agressif ».

 

Plus crédible et le travail de Lothar Machtan qui, en 2001, a consacré un ouvrage entier à l’homosexualité d’Hitler dans sa biographie La Face cachée d’Adolf Hitler. Cette thèse déchaîne bien évidemment les foudres de la communauté homosexuelle actuelle. À quoi bon montrer qu’Hitler était homosexuel ?, s’indigne-t-elle. Cela ne rajoute rien à l’horreur du personnage, et de surcroît, ne fait que charger inutilement la barque des personnes homosexuelles et convaincre l’opinion publique que l’homosexualité produit des dictatures et des monstres. On peut difficilement soutenir une telle affirmation. À mon sens, il importe peu que l’hypothèse soulevée par le livre de Lothar Machtan soit avérée ou non, puisque, même s’il est fort probable qu’Hitler a été une personne homosexuelle refoulée (quand on lit en intégralité la longue biographie en 2 tomes), il est impossible d’assurer qu’il était l’incarnation humaine de « l’homosexuel » ou de « la personne homosexuelle » étant donné que ces deux personnages sont au mieux des mythes, au pire des réalités fantasmées que personne n’arrivera jamais à devenir complètement. C’est précisément le refus de la probabilité qu’Hitler ait pu être homosexuel, non pas parce qu’il était entièrement homosexuel mais simplement du fait de son humanité, qui est inhumain et homophobe. Comme le souligne très finement Gerald Messadié, « ce menteur dissimulait non pas un vice, mais ce qu’il était contraint de tenir pour un vice : son homosexualité. D’où son inhumanité ». Messadié soutient l’idée selon laquelle le rapport idolâtre d’attraction-haine concernant le désir homosexuel, c’est cela qui est inhumain et monstrueux, et non l’homosexualité en elle-même. « Un vaste courant pseudo-historique voudrait faire croire qu’Hitler fut l’incarnation suprême du Mal, pourvu qu’elle fût supranaturelle, donc incompréhensible. L’inconscient collectif l’a investi d’un prestige sinistre, Antéchrist ou Satan, qui paradoxalement magnifie le personnage. Le travail de Machtan, au contraire, révèle un immonde et délirant minable qui se méprisait lui-même, parce que, dans son for intérieur, il portait une tare honteuse pour ses contemporains. Ainsi culpabilisé, il chercha des boucs émissaires : c’étaient ceux qui ‘dévirilisaient’ la nation : les communistes, les Juifs, les gitans, et, bien sûr, les homosexuels. » (la préface de Gerald Messadié, dans l’essai La Face cachée d’Adolf Hitler (2001) de Lothar Machtan, p. 11) Reconnaître les tendances homosexuelles d’Hitler, c’est finalement rendre l’homosexualité beaucoup plus humaine et moins monstrueuse que de la nier dans l’angélisme et la diabolisation d’un être humain historiquement figé au rang de « non-personne ». Je citerai deux ouvrages (le premier, C’est pour ton bien (1984) d’Alice Miller ; le second, La Fessée (2001) d’Olivier Morel), qui montrent combien il est important, au lieu de se désolidariser de certains actes odieux que l’on réduit à l’état de personnes diaboliques isolées, de les porter comme si nous aurions pu les commettre, au moins pour exercer notre propre humilité et nous empêcher de les reproduire par excès de bonnes intentions « démocratiques » : « Toutes les victimes ne deviennent pas bourreaux. Mais tous les bourreaux ont été victimes. » (Alice Miller) ; « Hitler, Staline, Ceaucescu, Mao, Saddam Hussein et Milosevic sont devenus ce que l’on sait à cause d’une enfance maltraitée et/ou vécue dans une atmosphère de froideur affective, sans rien ni personne pour compenser brutalité des coups et manque de tendresse. Des personnalités de ce type ont retenu de leur éducation que pour être il faut dominer les autres. » (Olivier Morel, p. 50) Bref, revenons à la genèse des dictatures humaines, toutes époques et pays confondus : la haine de soi due à un viol.

 

Revue homo et skinhead

Revue homo et néo-nazie


 

Et pour finir de convaincre les esprits étroits qui prendraient mon exposé sur Hitler pour un absurde passéisme anachronique totalement déconnecté de notre réalité homosexuelle actuelle, je mentionnerai les liens étroits qui existent aujourd’hui entre homosexualité et néonazisme. « Aujourd’hui encore, certains groupuscules néonazis entretiennent une forme d’ambiguïté. De nombreuses histoires circulent, sur fond de messes noires ou de satanisme. Dans leur esprit, nazisme et homosexualité participent de la même ambiance, d’une même esthétique. » (Philippe Broussard, Le Monde, 18 juin 1997) Je parle plus largement des liens entre extrême droite et homosexualité dans le code « Homosexuels psychorigides » du Dictionnaire des Codes homosexuels. Mais concernant spécifiquement les néo-Nazis, on a déjà de quoi dire ! Visiblement, beaucoup de ces fanatiques sont attirés par le « milieu homosexuel », puisqu’ils y multiplient les visites agressives/amoureuses. À titre d’exemples, je peux rafraîchir certaines mémoires : le 14 août 2007, des skinheads agressent les clients du Privé, une discothèque de Besançon (France) ; en octobre 2010, trois légionnaires néo-nazis s’attaquent à une boîte gay de Nîmes (France), le Lulu Club ; plus récemment, le 8 août 2011, en Angleterre, la librairie londonienne Gay’s The Word est saccagée par des néo-nazis. J’imagine qu’il doit y avoir de nombreux autres cas d’accrochages ambigus entre néo-Nazis et personnes homos. Et déjà, on dénombre dans les rangs néo-nazis un certain nombre de personnes homosexuelles : Nicky Crane, Michael Kühnen, Michel Caignet, etc.

 

Par ailleurs, et j’en terminerai là, il est intéressant de remarquer que l’accusation de « Nazi », tout comme celle de « Raciste » ou d’« Homophobe », est à la mode, dès qu’on veut descendre quelqu’un rapidement sans avoir à se justifier de le faire. Par exemple, en mai 2011, le directeur chrétien de l’American Family Association (AFA), Bryan Fischer, s’en est pris aux personnes homos, les traitant de « Nazis » dans son émission de radio Focal Point, diffusée via les 180 stations dans 40 États américains. Cette grotesque accusation reposait sur la dénonciation du terrorisme intellectuel exercé par certains militants LGBT actuels… donc quand même sur un substrat de réalité. Le plus amusant, c’est que le camp homosexuel et le camp non-homosexuel se traitent mutuellement de « Nazis » ou d’« Homophobes » pour se neutraliser, sans mesurer que ces mots agissent comme des miroirs de ce qu’ils cherchent à imiter ensemble en imaginant naïvement que seul l’autre camp ennemi le fait !

 
 

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Code n°122 – Milieu homosexuel infernal (sous-codes : Noir derrière l’arc-en-ciel / Descente aux Enfers)

Milieu infernal

Milieu homosexuel infernal

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

« Si seulement nous pouvions ne pas nous haïr autant… C’est ça notre drame. » Cette réplique de Michael, l’un des héros gays du film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1972) de William Friedkin, concernant ses jumeaux d’orientation sexuelle, nous plante bien le décor de la communauté homosexuelle réelle, et surtout la raison pour laquelle la grande majorité des communautaires homos n’arrive pas à faire l’unité (n’y croit même plus ! pour beaucoup, le « milieu homo » et la « communauté homosexuelle » n’existent pas et sont des concepts intellectuels méprisables !)… au point de se faire la guerre entre eux et de se faire vivre un véritable enfer : LA HAINE DE SOI, qui, si elle n’est pas identifiée comme intrinsèque au désir homosexuel, ni réglée, se mute en haine des autres.

 

Remarque très importante avant de commencer l’étude de ce chapitre. Ce code n’a pas pour but d’homosexualiser le malheur, ni de diaboliser le « milieu homosexuel » ou encore moins les personnes homosexuelles (elles le font déjà bien assez elles-mêmes !), ni de dire que les individus homosexuels ont le monopole du malheur et de la souffrance. Il existe bien des lieux et des rituels de drague « hétéros » glauques (Ce qu’on oublie de rajouter en général à ce juste parallélisme, c’est que les couples femme-homme qui rentrent dans ces cercles libertins sont justement en voie de bisexualisation et d’homosexualisation avancées…). Quoi qu’il en soit, le malheur humain, même émanant d’une minorité sexuelle où il est particulièrement (mais non-exclusivement) marqué, est toujours universalisable, et signe d’un viol social plus global dans les couples femme-homme qui ne s’aiment pas assez, donc hétérosexuels. Il va s’agir, dans ce code, d’étudier la signification du symbolisme folklorique des Enfers employé et même créé majoritairement par les personnes homosexuelles.

 

Allez, descendons maintenant dans les limbes iconographiques des enfers interlopes, dans la fournaise homosexuelle, ni si horrible que les communautaires non-assumés le disent, ni si banale que les communautaires « assumés » le prétendent.

 

Je signale pour finir qu’il est fortement conseiller de lire les sept autres codes de mon Dictionnaire des Codes homosexuels, en complément : les codes traitant plus particulièrement de l’individu homosexuel et de son couple – « Se prendre pour le diable », « Focalisation sur le péché », et « Amant diabolique » – et les codes traitant de la métamorphose de la communauté homosexuelle en dictature – « Homosexuels psychorigides », « Adeptes des pratiques SM », « Défense du tyran » et « Hitler gay »).

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Homosexuel homophobe », « Amant triste », « Cour des miracles homosexuelle », « Méchant pauvre », « Hitler gay », « Petits morveux », « Drogues », « Violeur homosexuel », « Homosexualité noire et glorieuse », « Patrons de l’audiovisuel », « Milieu homosexuel paradisiaque », « Focalisation sur le péché », « Se prendre pour le diable », « Appel déguisé », « Défense du tyran », « Entre-deux-guerres », « Manège », « Adeptes des pratiques SM », « Amant diabolique », « Humour-poignard », « Aube », « Faux révolutionnaires », « Amant triste » et à la partie « Dictateur gay » du code « Homosexuels psychorigides », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

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1 – PETIT « CONDENSÉ »

 

La dramatique extériorisation de l’homophobie sur « les hétéros »

 

Il ne suffit pas de traîner très longtemps dans les lieux – virtuels ou réels – d’homosociabilité pour découvrir assez vite que les personnes homosexuelles sont leurs pires ennemis, et que la « révolution homosexuelle » n’est qu’un joli concept romantique sorti des cerveaux des universitaires queer. La plupart d’entre elles n’aiment pas le collectif : c’est dommage, mais c’est souvent un fait. Les réunir autour de lieux-symboles, d’événements fédérateurs, de personnages emblématiques, de bars, d’associations, de sites Internet, a souvent relevé du tour de force ! La majorité des militants associatifs vous le confirmeront, surtout les soirs ingrats de Gay Pride où, exténués, ils se forcent à sourire en disant que « Ça a été une fois de plus un succès » alors que la joie est loin d’être dans tous les cœurs. La communauté homosexuelle constitue une famille turbulente dont la cohésion est bien plus une utopie sucrée marketing qu’une réalité. Si les personnes homosexuelles se retrouvent dans le « milieu », ce n’est pas vraiment par choix ni par engagement : elles viennent surtout consommer, trouver chaussure à leur pied, ou bien dans une logique d’adversité plus que d’unité. Même pour l’habitué des établissements gay friendly, l’entourage d’orientation sexuelle ne constituera jamais vraiment une seconde famille.

 

La communauté homosexuelle fait tout un pataquès autour des attaques homophobes qu’elle subirait pour ne pas regarder les paradoxes du désir homosexuel en face. Notamment, certains individus n’arrêtent pas de parler du ravage des suicides au sein du « milieu ». Pour les quelques cas de tentatives de suicide de personnes homosexuelles connus, ils sont tous généralement autant explicables par des phénomènes sociaux exogènes (hostilité de l’environnement familial, pression sociale, échec scolaire, etc.) que par des facteurs endogènes (déceptions amoureuses homosexuelles, drames issus du « milieu » homosexuel, comportements aberrants des personnes homosexuelles entre elles, médiocrité de l’accompagnement amical gay, manque de sens trouvé dans un certain mode de vie homosexuel, dégoût de soi et du monde, état dépressif, consommation de substances psychoactives ou d’alcool, angoisses dues à une infection par le VIH, difficile transition vers le troisième âge, etc.). Qui oblige les personnes homosexuelles à se cloîtrer dans la clandestinité ? Bien avant que ce soit « la société » qui les y ait contraints, c’est un mode de vie qu’elles ont elles-mêmes choisi. Qui pratiquent les sinistres outing ? Sûrement pas prioritairement « les hétéros homophobes ». Ceux qui outent les personnes homosexuelles sont les individus qui côtoient leurs bars, leurs réseaux Internet, leurs cercles amicaux ou amoureux, donc des personnes homosexuelles aussi. Qui critique le plus la visibilité homosexuelle à la télévision ou à la Gay Pride ? Qui empêche la communauté homosexuelle de se faire une place confortable dans la société et d’être forte ? Ses propres membres. « Comment y aurait-il un pouvoir gay ? Ils se détestent tous ! » ironise Frédéric Mitterrand (interviewé dans l’article « Y a-t-il une culture gay ? » sur la revue TÉLÉRAMA, n°2893, le 22 juin 2005, p. 18). Ceux qui défendent la cause homosexuelle dans les media s’étonnent que les seules lettres d’insultes qu’ils reçoivent proviennent presque exclusivement de leurs frères communautaires : « Je ne pensais pas qu’il y avait autant d’intolérance chez les homos. Ils se plaignent à longueur de journée de ne pas avoir tel ou tel droit et ils ne sont même pas unis entre eux. […] Les seuls papiers méchants que j’ai eus dans la presse, c’était dans la presse gay. Quand je suis sorti de La Ferme, j’ai eu 10000 lettres de fans, et six lettres d’insultes qui venaient toutes de gays. » (Vincent McDoom dans le magazine Egéries, n°1, décembre 2004/janvier 2005, pp. 52-55)

 

Actuellement, les gens ne voient dans la figure de la personne homophobe que l’individu gay frustré, honteux, « follophobe », tristounet, frigide. Ils oublient d’inclure dans le portrait toutes les personnes homosexuelles « assumées », extraverties, tout sourire. Par exemple, certains sujets homosexuels se plaisent à imaginer qu’« il n’y a pas plus lesbophobe qu’une lesbienne qui s’ignore » (Marie-Jo Bonnet, Qu’est-ce qu’une femme désire quand elle désire une femme ? (2004), p. 15). Qu’ils se détrompent ! Il y a tout aussi lesbophobe qu’une femme lesbienne refoulée : une femme lesbienne qui croit se connaître par cœur et qui, du fait de s’étiqueter éternellement lesbienne, refuse de reconnaître qu’elle puisse un jour devenir lesbophobe. On observe à bien des occasions des personnes homosexuelles, jouant en temps normal les grandes tapettes ou les militants de la première heure, se métamorphoser sans crier gare en brutes épaisses détestant leur communauté d’adoption. Bien des personnes homosexuelles, en disant qu’elles s’assument à 100% en tant qu’« homos », rejoignent dans l’extrême les personnes homophobes qui nient en bloc leur homosexualité, puisqu’elles aussi essentialisent le désir homosexuel, se caricaturent, se figent en objet, et donc refoulent qui elles sont profondément. S’il arrive exceptionnellement que certaines personnes homosexuelles reconnaissent que leur désir homosexuel est en partie homophobe, c’est pour mieux se donner l’illusion que depuis leur merveilleuse conversion à la « cause gay », elles s’assument pleinement en tant qu’homosexuelles et que la triste page de leur passé homophobe est déjà bel et bien tournée. S’avouer « ex-homophobe », cela revient pour elles à combattre l’homophobie et à montrer patte blanche. Mais derrière la personne homosexuelle et agressivement fière de l’être se cache souvent une personne (ex)homophobe convaincue, qui affirme haut et fort que l’homosexualité est quelque chose de monstrueux ou de génial : cela dépend des époques, du sens du vent, et des caprices de son désir homosexuel.

 
 

L’homophobie institutionnalisée en « communauté homosexuelle »

 

Le plus souvent, le despotisme homosexuel, avant de s’actualiser systématiquement à l’échelle d’une nation ou de la Planète, s’exerce d’abord au sein d’une communauté humaine réduite, autrement dit la communauté homosexuelle. Et, comme l’affirme à juste raison Frédéric Martel dans son splendide essai Le Rose et le Noir (1996), « la dictature de la majorité n’est pas plus enviable que la dictature des minorités. » (p. 713) Presque la totalité des personnes homosexuelles vous l’assurera : il se vit une forte exclusion dans ce que nous appelons, faute de mieux, le « milieu homosexuel ». En son sein, les moyens mis en place pour créer de vrais espaces d’expression sont apparemment suffisants mais concrètement inefficaces, sûrement par manque de volonté chez ses membres de se rencontrer sans se consommer. Dans les associations, la prise de parole se destine davantage aux « actions » militantes et à l’idéologie de la conquête ou de l’émotionnel qu’aux individus qui s’y trouvent. À l’intérieur des bars, des boîtes et sur les chat Internet, le dialogue y est également très limité et sclérosé par la drague. Par ailleurs, il existe un décalage vertigineux entre ce que nous pouvons voir sur les chaînes de télévision ou les magazines proposés à la clientèle homosexuelle – dignes de la plus mauvaise presse féminine –, et les aspirations profondes des personnes homosexuelles. Sous prétexte de respecter la liberté et l’intimité de chacun, la majorité des porte-parole de la communauté homosexuelle se défilent, et leur pensée n’attire pas les foules. L’unique réponse que l’ensemble des journalistes de la presse gay apportent aux questions existentielles de leurs camarades communautaires est l’affichage fier de leur propre démission, le renvoi à la responsabilité individuelle, l’exposition muette des plaintes dans la rubrique « Courrier des lecteurs » favorisant le narcissisme dans l’écoute du témoignage « je » larmoyant ou bien la révolte défaitiste.

 

Les réalisateurs gays essaient parfois d’atténuer à l’écran la cruauté du cérémonial de la drague homosexuelle en montrant des beaux gosses repentants et gentils avec leur amant moins beau ou moins jeune qu’eux. Mais rien n’y fait. Les individus homosexuels sont souvent extrêmement sectaires entre eux, envers les « folles », les personnes travesties, transsexuelles, lesbiennes, âgées, jeunes, séropositives (les « plombés » comme on les appelle parfois), et surtout les sujets homosexuels étiquetés « homophobes », autrement dit les personnes bisexuelles, celles qui viennent leur révéler que l’homosexualité est prioritairement une réalité mythique, non-figée. Quelques rares films osent tout de même montrer l’envers du décor (le court-métrage « Fast Forward », « D’un trait » (2004), d’Alexis van Stratum est à ce titre exemplaire). Malheureusement, ils sont en général récupérés dans le but de cultiver chez les personnes homosexuelles qui se disent « hors-milieu » le mythe du prince charmant homosexuel ou de leur supposée différence radicale avec le commun des habitants « du milieu ». Yves Navarre avait raison de dire que les personnes homosexuelles sont « bien plus racistes avec elles qu’on ne l’est avec elles ». Trop occupées à fuir leurs propres problèmes personnels dans un pathétisme mou, des délires forcés, un désir de se démarquer des autres, et un consumérisme égoïste, elles ne s’aident pas souvent entre elles. Elles n’ont qu’une envie : s’éloigner les unes des autres. « J’ai pour amis des folles comme moi, des amis pour passer un moment, pour rigoler un peu. Mais dès que nous devenons dramatiques… nous nous fuyons. Chacune se voit reflétée dans l’autre, et est épouvantée. Nous nous déprimons comme des chiennes, tu peux pas savoir. » (Molina, le héros homosexuel du roman El Beso De La Mujer-Araña, Le Baiser de la Femme-Araignée (1976) de Manuel Puig, p. 205) Il est difficile de rencontrer dans la communauté homosexuelle une seule personne homosexuelle qui se sente vraiment à sa place, même parmi les habitués des bars et des associations.

 

 

La majorité des individus homosexuels ne sont pas dupes. Ils expérimentent, dès qu’ils arrivent dans la communauté gay, un profond décalage entre leurs idéaux d’amour et les réalités relationnelles décevantes qu’ils y vivent, quand bien même ils savent pertinemment que les modes de vie homosexuels observables dans les bars et sur les réseaux virtuels ne sont pas généralisables à l’ensemble du « milieu » (terme hypocritement flou, désignant stricto sensu les établissements gay friendly spécialisés, mais qui pourrait tout à fait s’étendre d’une part à n’importe quel endroit public improvisé – et, surtout grâce à Internet, à tout lieu de vie où l’Homme désire se mythifier –, et d’autre part à toute personne croyant en la vérité du désir homosexuel : le « milieu homosexuel », c’est le désir homosexuel ; c’est le couple homosexuel). La plupart du temps, ils tombent de très haut. C’est pourquoi, pour figurer la communauté homosexuelle, certains artistes mettent en scène un enfer folklorique, bien après avoir cherché désespérément un éden gay dans une contrée lointaine et littéraire (cf. je vous renvoie évidemment au code « Milieu homosexuel paradisiaque »  dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels).

 

En réalité, le « milieu homosexuel » n’est ni aussi terrible qu’ils le disent – il y a bien des boîtes glauques pour personnes hétérosexuelles également – ni aussi banal. Bon nombre de personnes homosexuelles nous mettent en garde contre l’expérience d’Internet et des nuits dans les établissements gay et lesbiens : « Il y a une vraie violence à ouvrir la porte de ces lieux. » (Nina Bouraoui, l’écrivaine lesbienne, dans l’émission Culture et Dépendances, sur la chaîne France 3, le 9 juin 2004) Elles vivent douloureusement le formatage qu’elles s’imposent par la culture marchande homosexuelle. Mais l’impression d’enfer est chez elles souvent teintée d’amnésie, comme le montrent les propos d’Hervé Guibert dans son autobiographie Le Mausolée des amants (2001) : « Le sauna de la Kleiststrasse hier soir : une expérience du dégoût. Dégoût pour les corps, dégoût pour le lieu, dégoût pour les pratiques […]. (L’aisance, l’indifférence de T. dans tous ces endroits). » (p. 91)

 

Si le « ghetto gay » est tel qu’il est actuellement, ce n’est pas uniquement à cause d’un groupuscule réduit de personnes homosexuelles. Le malheur d’une minorité est toujours universalisable, et les sociétés hétérosexuelles (et surtout humaines !) auront très certainement à répondre de la construction d’infrastructures déshumanisantes dans lesquelles certains individus ont accepté de s’enfermer et de se détruire en cadenassant leur révolte intérieure : « Les terreurs que connaissent les homosexuels dans cette société ne seraient pas aussi grandes si la société elle-même ne devait pas affronter toutes ces terreurs qu’elle ne veut pas admettre. » disait James Baldwin dans une interview (au journal Village Voice en 1984).

 
 

2 – GRAND DÉTAILLÉ

 

FICTION

 

a) Les Enfers marais-cageux :

 

Film "The Game Of Juan’s Life" de Joselito Altarejos

Film « The Game Of Juan’s Life » de Joselito Altarejos


 

Très souvent dans les œuvres de fiction homo-érotiques, les héros homos décrivent le « milieu homosexuel » comme un enfer : cf. le film « J’ai rêvé sous l’eau » (2012) d’Hormoz, le roman Méphistophéla (1890) de Catulle Mendès, le film « Anatomie de l’enfer » (2002) de Catherine Breillat, le film « Back Room » (1999) de Guillem Morales, le film « Un Año Sin Amor » (2005) d’Anahi Berneni, le roman Todos Los Parques No Son Un Paraíso (1978) d’Antonio Roig, le film « Madagascar Skin » (1995) de Chris Newby, le roman Riches, cruels et fardés (2002) de Hervé Claude, la pièce La Descente d’Orphée (1957) de Tennessee Williams, la pièce Angels In America (2008) de Tony Kushner, le film « Salò O Le 120 Giornate Di Sodoma » (« Salò ou les 120 journées de Sodome », 1975) de Pier Paolo Pasolini (le réalisateur avoua lui-même qu’il a cherché, à travers son film, à figurer une descente dans l’enfer de l’inhumain), le roman Les Caves du Vatican (1914) d’André Gide, la chanson « Hellbent For Leather » du groupe Juda’s Priest, le film « Lucifer Rising » (1974) de Kenneth Anger, la pièce Macbeth (1623) de William Shakespeare, le film « Le Rôti de satan » (1976) de Rainer Werner Fassbinder, le film d’animation « L’Ombre d’Andersen » (2000) de Jannik Hastrup, le roman La Descente aux enfers (1963) de Marcel Jouhandeau, le film « Twist » (2004) de Jacob Tierney et Adrienne Stern, le film « Drôle de Félix » (1999) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau (avec la célébration du dieu Mercure), le roman Poupée Bella (2004) de Nina Bouraoui, le film « Orphée » (1950) de Jean Cocteau, la pièce Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens (2007) de Gérald Garutti, le film « Hell’s Highway » (1932) de Rowland Brown, le film « L’Enfer d’Ethan » (2004) de Quentin Lee, le film « Descentes aux enfers » (1986) de Francis Girod, le film « Irréversible » (2001) de Gaspar Noé, le recueil de poèmes Une Saison en enfer (1873) d’Arthur Rimbaud, le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier (avec le train-fantôme nommé « L’Enfer »), le roman Le Garçon sur la colline (1980) de Claude Brami, le film « Café du diable » (2011) de Maria Beatty, la pièce Dans la solitude des champs de coton (1987) Bernard-Marie Koltès, la pièce Chroniques des temps de Sida (2009) de Bruno Dairou, le spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès (dépeignant les bas-fonds des saunas gays), le film « Adults Only » (2013) de Michael J. Saul (dans les méandres d’une backroom gay), la chanson « Nous les amoureux » de Jean-Claude Pascal, le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso, etc. « Partir à la recherche de Greta a été comme entrer dans un des cercles de l’Enfer. » (Jane, l’héroïne lesbienne en quête de Greta la prostituée, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 177)

 

Par exemple, dans le vidéo-clip de la chanson « Jesus Is Gay » de Gaël, le héros homo va « s’encanailler » dans une boîte appelée Au Diable. Dans le film « Praia Do Futuro » (2014) de Karim Aïnouz, Donato se perd dans la boîte gay teintée d’un filtre rouge. Dans le one-man-show Gérard, comme le prénom (2011) de Laurent Gérard, Éric et Michael tiennent un bar dans le Centre Ville, le Gaytapens. Dans son one-man-show Hétéro-Kit (2011), Yann Mercanton décrit la fréquentation du sauna comme la descente d’Orphée aux enfers. Dans le roman Deux Femmes (1975) d’Harry Muslisch, Laura et sa copine vont voir au théâtre la pièce L’Épopée de Gilgamesh racontant l’histoire d’un homme qui va chercher son ami aux Enfers. Dans la comédie musicale Sauna (2011) de Nicolas Guilleminot, la voix-off est celle d’un diable doucereux invisible qui téléguide avec amusement les quatre personnages en les acheminant vers une descente progressive dans l’enfer du sauna gay. Dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, Jacques et Yves Saint-Laurent se rendent ensemble dans les bacchanales homos, sur fond de filtre rouge. Dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, pendant le jeu télévisé Questions pour un champion qu’Adèle, l’héroïne lesbienne, regarde avec ses parents, Julien Lepers pose la question suivante : « Quel est le nom de la femme d’Orphée qui descend aux enfers ? » (réponse : Eurydice). Plus tard, Adèle apprend à connaître le milieu lesbien parisien, montré comme un milieu hostile, moqueur, narquois, grippe-fesses, puéril, cancanier. Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, on aperçoit des mugs en forme de clowns blancs grimaçants et diaboliques au comptoir du bar-club gay Le Stud. Dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet, Caroline décrit le « milieu homo » comme une « caste de dépravés ».

 

Pour renforcer cette idée que le « milieu homosexuel » est infernal, il est fait parfois référence dans les fictions au Styx, le mythologique fleuve infernal : cf. les films « Adam et Steve » (1995) de Craig Chester, le film « Styx » (2004) de Falk Ulbrich, les chansons « On est tous des imbéciles » et « L’Instant X » de Mylène Farmer, le film « Parking » (1985) de Jacques Demy, etc.

 

Beaucoup de personnages homosexuels affirment rentrer dans le « milieu » comme ils pénètrent dans la géhenne, le néant : « L’Enfer, c’est l’autre boîte de nuit à Montparnasse. » (l’héroïne lesbienne dans le one-woman-show La Lesbienne invisible (2009) d’Océane Rose Marie) ; « Si vous aimez le show, vous brûlerez en enfer avec nous. » (la voix-off du spectacle musical Adam et Steeve, dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Je me croyais délivré de l’enfer de la famille et le voici reconstruit sur les terrains de mes vices ! » (Pédé, le héros homosexuel de la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Mercredi matin, c’était comme le jour du Jugement dernier. On avait tous peur. Le Paradis. L’Enfer. Pas de purgatoire. » (Omar, le héros homosexuel du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 40) ; « À nous le Marais et ses marécages ! » (Stéphanie dans la pièce À plein régime (2008) de François Rimbau) ; « Ce n’était pour aucun des deux jumeaux Hypnos ni Thanatos que j’étais descendu dans cet Enfer. » (le protagoniste parlant de ses ballades le long des « quais obscurs et des parkings déserts », dans la nouvelle « Au musée » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 107) ; « Qui peut dire dans cet enfer ce qu’on attend de nous ? » (cf. la chanson « À quoi je sers ? » de Mylène Farmer) ; « Je me trouve en ce moment dans l’enfer des folles, deux étages en dessous de la place de l’Opéra. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 126) ; « Cette soirée est un enfer. » (Didier, le héros homo à l’intérieur d’une boîte gay, dans la pièce Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé) ; « Il [Emmanuel] me disait avoir connu par eux [les homosexuels] l’enfer brûlant du mépris porté sur soi. » (Vincent Garbo dans le roman éponyme (2010) de Quentin Lamotta, p. 172) ; « Y’a des party, poum poum, dans les clubs en bas, des gigolos pressés qui se lèchent les bras, des enfants fous qui jouent mais ne pardonnent pas, des femmes enlacées qui se parlent tout bas. Mais y’a des gens qui sont stricts, des chats noirs qui miaulent, des crocodiles en bas. Mais y’a des gens qui sont stricts, des perroquets qui volent, des pingouins en papier mâché. » (cf. la chanson « Des gens stricts » du groupe Animo) ; « J’ai traîné dans les boîtes jusqu’au petit matin, et à chaque fois je suis rentré ivre mort, défoncé jusqu’à la moelle, couvert de coups de martinet, inondé d’urine jusqu’aux chaussettes, mais seul, toujours seul, doctoresse ! » (L. dans la pièce Le Frigo (1983), p. 24) ; « Je n’avais été en tout et pour tout, dans ma vie, que trois fois dans un sauna masculin, et j’en étais ressorti très déprimé. » (Éric, le narrateur homosexuel du roman L’Amant de mon père (2000) d’Albert Russo, p. 92) ; « Sur les marches qui mènent aux chiottes de la gare du Nord, je rencontre H. Il a un air triste, sa tête retenue sur ses deux mains emballées dans deux gros gants de ski, assis sur les marches. Je passe deux fois devant lui. Une première fois en allant aux pissotières. De l’ouverture à la fermeture de la gare, il y a des hommes, de tous âges, de toutes origines qui se branlent lamentablement, debout, dans l’odeur de pisse et de foutre, en matant en coin les bites des autres. On dirait des puceaux, aussi fébriles que surexcités. Venir ici me désespère autant que ça me réjouit. » (Mike, le narrateur homosexuel du roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 59) ; « Onze mille vierges sous acide lysergique consolent des malabars tendus et mélancoliques. Fille de joie me fixe de ses yeux verts. Des claques ??? Jusqu’à l’Hôtel de l’Enfer. » (cf. la chanson « Onze mille vierges » d’Étienne Daho) ; « Je marche dans Babel et dans ses dédales. » (Pierre Fatus dans son one-man-show L’Arme de fraternité massive !, 2015) ; « Depuis trois mois, c’est l’enfer. Herbert est violent, armé, totalement imprévisible. » (Fabien à propos de son attitude avec son amant Herbert, dans la pièce Le Cheval bleu se promène sur l’horizon, deux fois (2015) de Philippe Cassand) ; « Tu devrais rentrer chez toi. C’est pas un endroit pour toi. » (Serge rencontrant pour la première fois son jeune amant Victor dans un parc parisien plein de prédateurs, dans le téléfilm Fiertés (2018) de Philippe Faucon, diffusé sur Arte en mai 2018) ; « Chaque jour vers l’enfer nous descendons d’un pas, sans horreur, à travers des ténèbres qui puent. Ainsi qu’un débauché pauvre qui baise et mange le sein martyrisé d’une antique catin, nous volons au passage un plaisir clandestin. » (c.f. la chanson « Au lecteur » de Mylène Farmer, reprenant Charles Baudelaire) ; « Une fois que tu seras là-dedans, tu verras à quel point c’est triste et moche. » (un client homo plus âgé du club The Boys s’adressant à Nathan, le héros homosexuel qu’il va entraîner dans un guet-apens pour le tuer, dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier) ; etc.

 

Par exemple, le film « Esos Dos » (2012) de Javier de la Torre dépeint les bas-fonds d’une maison close homosexuelle où l’ambiance est très malsaine : les backroom sont peintes avec un fond rouge, on entend des ricanements, on y voit des prostitués claquemurés dans leur cellule et entourés d’une drôle de cour des miracles monstrueuse. Dans le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs, on nous montre l’ambiance détestable de la fête hétéro-gay de l’appartement du couple Ted/Roberto, où George est contraint de s’héberger. Dans le film « Toute première fois » (2015) de Noémie Saglio et Maxime Govare, Jérémie, le héros homo qui ne s’était jamais posé la question de remettre en cause son homosexualité, avoue qu’il a une « vie bien cadrée » dans son quotidien homosexuel. Dans l’épisode 4 de la saison 3 de la série Black Mirror (« San Junipero »), Kelly, l’héroïne lesbienne, se rend dans une boîte appelée « Quajmire » qui est l’antre des enfers.

 

Javier de la Torre dans sa prison dorée, rouge et plumée

Javier de la Torre dans sa prison dorée, rouge et plumée


 

Même s’il vit une expérience qu’il décrit comme un enfer, le héros homosexuel s’auto-persuade que cette impression est agréable, voire paradisiaque (il « l’a voulu », se dit-il) : « Les autres penseront que vous connaissez l’enfer. Mais ils ne sauront jamais que l’enfer est doux. » (le narrateur homosexuel du roman N’oubliez pas de vivre (2004) de Thibaut de Saint Pol, p. 70) ; « Pour nous, ça avait la couleur de l’amour – mais j’avoue que si j’avais été hétéro, ça aurait largement ressemblé à la fin de toute intelligence et à la couleur de l’enfer. » (Doumi décrivant les années 1980, dans le roman La Meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, pp. 35-36) ; « Il avait eu l’impression de marcher au milieu de colonnes et de soldats d’un temps ancestral, vers une arène. C’était violent, ça faisait mal, mais il y avait déjà le plaisir de penser que ce serait peut-être bon ensuite, un peu plus loin. » (Doumi au Palace, op. cit., p. 36) ; « Toi et moi on sait repérer les mecs bien. Pas comme toutes ces folles qui cherchent à baiser. » (Romain, le compagnon d’Alexis, s’adressant à Laurent qui sort en secret avec Alexis, dans le film « L’Art de la fugue » (2014) de Brice Cauvin) ; etc.

 

En général, son déni le met dans un état d’amnésique ou de zombie, qui ne lui fait plus distinguer le Réel du fantasme : « Il entrait dans un monde improbable, à mi-chemin entre fantasme et réalité. » (Adrien, le héros homosexuel du roman Par d’autres chemins (2009) d’Hugues Pouyé, p. 29) ; « Je suis un garçon sensible et réfléchi. En grandissant, je ne me suis jamais affranchi de ces nuits de veille au douloureux vague à l’âme. J’ai compris bien trop tard que j’étais une femme. Je me suis fait belle, belle, belle, pour aller les voir. Je remercie toute l’équipe de la Gare Saint-Lazare. » (cf. la chanson « Coming Out » d’Alexis HK)

 

Très souvent, la fête homosexuelle annonce une catastrophe ou une descente aux Enfers surprenante (cf. je vous renvoie au code « Humour-poignard » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels). Par exemple, dans le film « Poltergay » (2006) d’Éric Lavaine, la bande de morts-vivants hantant la maison de Marc et Emma a péri dans une boîte gay qui a brûlé dans les années 1970. Dans la nouvelle « Virginia Woolf a encore frappé » (1983) de Copi, le meurtre du barman a lieu un soir d’orgie, lors d’un « bal macabre » (p. 83) dans une backroom d’une boîte homo de Pigalle. Dans le roman La Vie est un tango (1979), toujours de Copi, le carnaval est précisément le moment du viol : « Je vois que, tandis que le pauvre Silberman est assassiné dans les rotatives, à l’étage de la direction on ne pense qu’au carnaval. » (pp. 75-76) ; « Silvano fut réveillé en sursaut par le bruit des pétards et le vacarme dans la rue. […] Il se dirigea vers son bureau pour chercher un revolver […]. Des gamins déguisés arrivaient de la rue avec des serpentins et des tambours. […] L’intrusion des enfants ne prédisait rien de bon. (idem, pp. 170-171) ; « Serais-je en enfer, se demanda-t-il. À bien y penser il était bien possible qu’il fût mort depuis plusieurs jours. […] Les enfants de la rue, depuis que le carnaval avait commencé, ressemblaient de plus en plus à des démons. (idem, p. 174) ; « Il se dit : cette année, le carnaval devient sérieux. » (idem, p. 175)

 

Dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, le sauna Continental-Opéra est le théâtre d’une explosion dramatique des chaudières en plein bal masqué : « C’est mardi, mais c’est mardi gras. Aujourd’hui, les folles du Continental sont permises de se travestir, elles vont et viennent sans arrêt des galeries Lafayette qui se trouvent tout près, ce soir il y a un grand bal autour de la piscine. » Même scénario dans la pièce La Tour de la Défense (1981) : « Au deuxième et dernier acte de La Tour de la Défense de Copi, un hélicoptère s’écrase sur la tour voisine, et déclenche un incendie généralisé. Le carnaval se termine dans les flammes. » (cf. l’article « Copi de bonne fois » de René Solis, dans le journal Libération du 4 avril 2005) Dans le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, l’enfer gay derrière le carnaval, le viol le soir de fête homosexuelle, est bien décrit par l’un des héros gay, Bjorn : « Ma vie. Quand je suis parti de la rue, avec Jan, j’ai pensé que je n’y retournerais plus jamais. Je sais maintenant que certains endroits sont encore pires. Comme celui où je me trouve en ce moment avec des gens qui organisent l’enfer, qui en vivent. Gays ou pas. Prostitution, violence, hôtels et drogue sans doute. Cette nuit dans la pénombre, j’ai compris que d’autres ici faisaient le métier de tout diriger à leur profit. Que derrière la Gay Pride de Sydney il y avait un trafic d’ecstasy, de médicaments, de produits dérivés. Il y avait du marketing et du sex-business. Avec beaucoup de dollars à la clé. […] Je sais maintenant que Jan est mêlé à tout ça et qu’ils sont en train de s’entre-tuer à quelques semaines seulement de la grande parade sur Oxford Street, du défilé du ‘Mardi gras’. » (pp. 167-168) Dans le film « Poltergay » (2006) d’Éric Lavaine, la bande de joyeux drilles homos surexcités est en réalité composée de clients homosexuels qui ont tous péri dans l’incendie d’une boîte gay disco dans les années 1970.

 
 

b) Le panier de crabes aux pinces roses :

Les héros homosexuels des fictions emploient la fantasmagorie de l’enfer pour parler de leurs relations amicales et amoureuses homosexuelles parce que, visiblement, celles-ci sont compliquées et douloureuses : cf. le film « Je vois déjà le titre » (1999) de Martial Fougeron, la poésie « Oda A Walt Whitman » (1940) de Federico García Lorca, le film « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve, le film « Œdipe (N + 1) » (2001) d’Éric Rognard, le film « Mysterious Skin » (2004) de Gregg Araki, le film « L’Ange bleu » (1930) de Josef von Sternberg, le roman El Giocondo (1970) de Francisco Umbral, le roman Las Locas De Postín (1919) d’Álvaro Retana (avec le cercle de langues de vipères homosexuelles), le film « Our Betters » (1933) de George Cukor (avec les personnages sophistiqués très gossip girls), etc.

 

À les entendre, le « milieu homosexuel » est un véritable panier de crabes ! : « Je te parle de ma communauté qui me déçoit. » (Océane Rose-Marie dans son one-woman-show Chaton violents, 2015) ; « Ce milieu gay c’est tellement pourri. Tellement de convoitises. » (Laurent Spielvogel imitant le gay quarantenaire du sud, dans son one-man-show Les Bijoux de famille, 2015) ; « Il n’y a pas de paradis homosexuel, ou bien, s’il y en a un, attendez-vous à y trouver quelques lois sauvages ! » (Éric dans le roman Le Loup (1972) de Marie-Claire Blais) ; « Je payais en toute hâte, empochai mon ticket et me jetai sur les portes du théâtre sans regarder vers la queue où, j’en étais convaincu, une dizaine d’homosexuels – dont un prêtre –, plus méchants les uns que les autres, riaient de ma déconvenue. » (le narrateur homo à l’opéra, dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 35) ; « La plupart déambulaient par bandes, comme autant de sectes à l’intérieur de la secte. […]  Il régnait dans ce lieu une certaine agressivité de chacun envers tous les autres, à l’exception de ceux qui s’inséraient exactement dans votre archétype. » (le narrateur homo décrivant une boîte gay, dans le roman Gaieté parisienne (1996) de Benoît Duteurtre, pp. 56-57) ; « Je ne vois que des méchantes, le nez en l’air, méprisantes. » (un homo parlant des « clones » du Marais, dans la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy) ; « Les bars gays sont des prisons aussi. » (un des personnages homosexuels de la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand) ; « Devant la porte des chiottes, j’écarte une bande de jeunes androgynes pour passer, l’un d’eux dit ‘Mais c’est pas possible, ils ont ouvert les portes du zoo de Vincennes pour laisser s’échapper ces monstres ?’ Ses copines rient. » (Mike, le héros homo du roman Des chiens (2012) de Mike Nietomertz, p. 102) ; « Ô, mon Dieu, que quelqu’un vienne à mon secours, s’il vous plaît ! Les travelos me trucident ! » (Lou, l’héroïne lesbienne de la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi, p. 323) ; « Est-ce que tu sors avec une bande de tantes ? J’aurais pu deviner que ça allait arriver. Tes fantasmes paranoïaques d’arrestation et d’accident ont été le premier symptôme. » (Myrma Minkoff s’adressant à son ami gay Ignatius dans le roman La Conjuration des Imbéciles (1981) de John Kennedy Toole, p. 414) ; « Vous, les travestis troupières, vous venez nous faire la guerre à nous, pédés pacifistes, nous traitant de jeunes filles tristes quand tout ce que nous cherchons, c’est simplement un garçon (si c’est possible un artiste) idéaliste, simple et bon qui reste garder la maison quand nous faisons secrétaires ! Vous voulez nous effrayer, affublées de vos perruques, habillées comme des perruches. […] Les jardins du Sacré-Cœur sont bien gardés par les flics ! Vous ne me faites pas peur ! » (Pédé, le héros homo s’adressant aux travestis, dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Les rendez-vous entre gays sur internet, c’est toujours un peu craignos. » (Katya s’adressant à Anton, son ami homosexuel, dans le film « Stand » (2015) de Jonathan Taïeb) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H., Matthieu décrit les foudres de venin qui s’abattent sur lui, de la part de son entourage homo formé de « langues de pute », suite à sa rupture amoureuse avec Jonathan : « Ou quand l’Empire contre-attaque… » Dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus, Jonathan, l’un des héros homos, avoue que le « public le plus difficile » qu’il a rencontré, après le « milieu homo », c’est « celui des cabarets ». Dans la pièce Confessions d’un vampire sud-africain (2011) de Jann Halexander, Pretorius, le vampire homosexuel dit qu’il voit autour de lui « des bandes de gamins qui ne l’aiment pas ». Dans son one-man-show Elle est pas belle ma vie ! (2012), Samuel Laroque dit qu’il est un concentré de bêtise et de superficialité : « Le Marais, c’est un peu comme une grande ferme où y’a de la dinde en batterie. » Les « Maraisiennes » sont présentées comme des clients obsessionnels des salles de sport, des acheteurs de sac à main, des consommateurs de Smart-phone, des gens déprimants (« Bonsoir mes amis dépressifs ! » s’exclame la parodie de Mylène Farmer face à son public gay), etc. Pire que cela ! Les habitants du « milieu », en plus d’être cons, seraient méchants, un repère de violeurs (Laroque dit sa trouille d’être piégé par le GHB, la « drogue du violeur », en boîtes homos) : « Je n’y vais plus. J’en ai marre des boîtes. » (idem) ; « Les homos, c’est pas de la tarte non plus. Y’a pas plus intolérant qu’un homo dans le milieu. » (idem) ; « Bon vous savez quoi ? Être homo, c’est pas toujours gai. » (idem)

 

Dans le one-man-show Les Gays pour les nuls (2016) d’Arnaud Chandeclair, le narrateur homosexuel raconte comment lui et ses amis homos se parlent mal, même si au départ ça semble être un code culturel : « On a beaucoup d’ironie sur nous-mêmes. » ; « Qu’est-ce que tu fous, connasse ? » ; « T’as dormi où, p’tite salope ? » ; etc.
 

Dans le film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo, les héros homosexuels, militants d’Act-Up, ne peuvent pas se supporter. Ils détestent « les folles de la Gay Pride » sous prétexte que ce seraient elles « qui les détestent ». Et entre eux, c’est la militance plus que l’amitié qui les unis. D’ailleurs, quand Thibault, le leader du mouvement, va à l’hôpital rendre visite à son pote Sean, cloué au lit par le VIH, il lui demande : « On s’aime pas beaucoup mais on est quand même des amis, non ? », avant que Sean ne lui réponde par la négative, dans un silence interrompu par une demande encore plus glaçante : « Je préfèrerais que tu t’en ailles. » Le portrait pourtant idyllique que nous montre ce docu-fiction sur Act-Up ne fait, à son insu, que comme la désigner comme un nid de vipères, où les coups bas, la colère, la sale ambiance, les trahisons, et les fausses amitiés, prédominent.
 

Dans son roman très autobiographique Le Bal des folles (1977), Copi décrit « cette hystérie propre aux groupes de travestis », en ne s’excluant pas du lot : « On se gifle pour un mouchoir, on se casse la gueule pour un client (ne vont-ils pas jusqu’à tuer ?). Elles ont toutes des couteaux au cran d’arrêt dans leurs sacs. » (p. 34) Dans le film « Morrer Como Um Homen » (« Mourir comme un homme », 2009) de João Pedro Rodrigues, on nous montre les coups bas et la cruauté mesquine entre travestis, qui se piquent les perruques, s’insultent de plein de noms d’oiseaux, juste avant leur show (une vraie parodie sérieuse d’un concours de reines de beauté qui tourne au drame et à la concurrence adolescente !). Dans le film « A Family Affair » (2003) d’Helen Lesnick, le groupe d’amies lesbiennes de Rachel, l’héroïne lesbienne, est représenté sous la forme d’un jury impitoyable… surtout quand elle ose leur présenter sa nouvelle conquête. Dans le film « Orange et Pamplemousse » (1997) de Martial Fougeron est filmée la discrimination dans le « milieu » et les déceptions des recherches « réseaux » par téléphone ou Internet. Dans la pièce Un Barbu sur le net (2007) de Louis Julien, Eugène dresse le portrait de « ce monde homosexuel où, dit-il, il n’a jamais connu la plénitude ». Dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar, le « milieu homosexuel » est qualifié de « marché ».

 

Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, le groupe de potes gays qui se retrouve ensemble le temps d’une sauterie passe son temps à se tirer dans les pattes : par exemple, Alan est follophobe par rapport à Emory le gay efféminé (« Je n’aime pas sa façon de parler, ça me tape sur les nerfs. » Il finit par le frapper de « Pédale ! ») ; Emory méprise l’inculture de Tex, le beau gosse gigolo décervelé (« Elle est cruche et n’y connaît rien à l’art ! ») et chope des maladies vénériennes presque à chaque fois qu’il se rend épisodiquement dans les saunas (« Vous avez plus de chance que moi. Quand je ne me fais pas arrêter, mon client a une maladie vénérienne. ») ; Michael rumine son complexe physique de ne pas être un top model ajusté aux canons de beauté de la communauté LGBTLes pédés sont pires que les femmes. À 30 ans, ils pensent que c’est fini. Il n’y a pas que la beauté ! ») ; quant à Michael, le maître de cérémonie de cette soirée machiavélique, il maltraite tous ses invités par un jeu qui leur révèlera la vacuité de leurs histoires d’amour homo.

 

Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Nicolas, Rudolf et Gabriel sont à la fois des potes gays inséparables et de véritables ennemis : ils se piquent leurs amants entre eux, s’empoisonnent la vie, se suivent et se fuient en Autriche. « On n’a plus vingt ans. Moi, j’ai changé. Pas vous ! C’est pas Paris que je fuis : c’est vous ! » dira Rudolf dans un coup de colère.

 

Les personnages homosexuels sont souvent extrêmement sectaires entre eux, envers les « folles », les personnes travesties, transsexuelles, lesbiennes, âgées, jeunes, séropositives, et surtout les individus homosexuels étiquetés « homophobes », autrement dit les « bisexuels », ceux qui viennent leur révéler que l’homosexualité est prioritairement une réalité mythique, non-figée : « Ennemi public n°1 : les bis. » (la comédienne lesbienne Chriss Lag dans le spectacle de scène ouverte Côté Filles au 3ème Festigay du Théâtre Côté Cour de Paris, en avril 2009) ; « Nés condamnés, nous nous condamnons tous. Isolés, nous nous isolons. » (le héros homosexuel du roman Portrait de Julien devant la fenêtre (1979) d’Yves Navarre, p. 121) ; « Quand ils sont jeunes, ils n’ont rien à raconter. Tu dois t’emmerder. » (un « ami » s’adressant à Matthieu à propos du jeune amant de ce dernier, Jonathan, dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H.) ; « Ouais, évidemment, les vieux ça me dégoûte. » (Mike, le narrateur homosexuel, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 38) ; « J’en veux beaucoup aux jeunes de votre génération d’être plus beaux que nous. » (Jacques s’adressant à son amant Arthur, dans le film « Plaire, aimer et courir vite » (2018) de Christophe Honoré) ; « Qui est l’ancêtre ? » (un jeune homo du dortoir, qui rappelle méchamment à Zach qu’il est « trop vieux » parce qu’il a 35 ans, dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza) ; « Maintenant, c’est de la merde, Paris ressemble à un musée pour vieux cons fachos, avec des gays (il prononce ‘géïzes’) qui tètent du petit lait électronique avec des airs ingénus et qui se branlent devant Xtube. Des petits moutons. On a transformé une armée de pédés rebelles qui dérangeaient le modèle hétéro en gays, c’est-à-dire en tarlouzes de droite incapables de réfléchir plus loin que le bout de leur bite. » (Simon le héros homosexuel, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 23-24) ; « J’ai autre chose à faire que de traîner avec des gamins. » (Jonathan, homosexuel, ne voulant pas collaborer au départ avec les jeunes militants LGBT, dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus) ; etc. Par exemple, dans le film « L.A. Zombie » (2010) de Bruce LaBruce, on ne voit que des crimes homophobes opérés entre homos. Dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz (p. 30), les héros homosexuels présentent même la communauté homosexuelle comme une « fausse démocratie » (p. 30). Dans le film « Cruising » (« La Chasse », 1980) de William Friedkin, toute une série de meurtres est effectuée par un psychopathe… qui se révèle homosexuel). Dans le film « La Forme de l’eau » (« The Shape of Water », 2018) de Guillermo del Toro, Giles, le personnage homo âgé, tente de draguer le jeune barman du resto qu’il fréquente. Mais lorsque ce dernier s’en rend compte, il le lourde comme une vieille merde. Dans le film « L’Inconnu du lac » (2012) d’Alain Guiraudie, une série de meurtre entache un lieu de drague homo… et on découvre que ce sont les « vacanciers » homosexuels eux-mêmes qui s’entretuent, s’épient jalousement, et se couvrent pour garder un espoir de coucher ensemble. L’inspecteur chargé de l’enquête s’étonne de l’insensibilité et du manque de fraternité entre les homos : « C’est un petit monde. Vous devez tous vous connaître, non ? […] Que l’un des vôtres se soient fait assassiner, ça ne vous émeut pas plus que ça ??? Vous avez une drôle de façon de vous aimez… » dira-t-il à Franck.

 

Dans le « milieu homosexuel » semble régner la « démocratie de l’indifférence mutuelle » : « Ici, personne ne te demande de compte. » (une réplique du téléfilm « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve) Les homosexuels ont du mal à se mélanger entre eux, comme c’est le cas des lesbiennes fictionnelles avec les homos : « Elles venaient moins pour draguer que les gars et avaient plutôt tendance à rester entre elles, en petits couples propres qui savent bien se tenir. Quelques-unes, plus âgées, se mêlaient aux groupes d’hommes, fraternisaient volontiers et payaient des tournées accueillies avec force cris de joie, mais elles étaient plutôt rares. » (Jean-Marc décrivant les lesbiennes du bar Macho Person, dans le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, p. 171) ; « En tout cas ils [les homos] ne sont jamais venus voir mes pièces. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 16) Dans le roman La Conjuration des imbéciles (1981) de John Kennedy Toole, dès qu’Ignatius essaie de fédérer les homos pour créer pour eux un parti politique, il se fait lyncher. Dans le film « Plaire, aimer et courir vite » (2018) de Christophe Honoré, lorsque Jacques apprend que son amant Arthur compte se rendre à une réunion publique d’Act-Up, il prend peur : « Je ne veux pas qu’on lui fasse du mal. » (Jacques) « Que veux-tu qu’ils lui fassent du mal à Act-Up ? » s’étonne son pote Mathieu.

 

L’orientation sexuelle et la pulsions étant les dénominateurs communs de la communauté homosexuelle, il est logique que les rapports relationnels qui s’instaurent entre les communautaires soient majoritairement de consommation, intéressés et violents : « Tu dois comprendre que le sexe est très important pour une lesbienne. » (Peyton à sa copine Elena, dans le film « Elena » (2011) de Nicole Conn). C’est généralement déprimant pour le héros homosexuel de voir que, dès que lui et ses frères d’orientation sexuelle s’adonnent factuellement à leur désir homosexuel, ils se renvoient un pathétique reflet d’obsédés sexuels. « Les pédés sur le net ne pensent qu’au cul. » (l’un des héros homos de la pièce Copains navrants (2011) de Patrick Hernandez) Ce n’est pas ce qu’ils seraient dans un autre cadre amoureux et communautaire, certainement. Et c’est bien cela qui les attristent le plus : d’être complices de leur propre damnation.

 

Parfois, le « milieu homosexuel » sera le bouc-émissaire diabolisé du héros homosexuel, le lieu où il déversera sa culpabilité inavouée de mal agir amoureusement, son homophobie intériorisée/son homosexualité : « Le milieu, c’est pas mon style ! » (Benoît dans la pièce Bonjour ivresse ! (2010) de Franck Le Hen) ; « Privés de toute dignité sociale, de toute charte sociale établie pour la conduite de l’homme, de la camaraderie qui, par droit divin, devrait être le propre de toute créature qui vit et respire, rejetés de tous, en proie dès leur plus tendre enfance à une incessante persécution, ils étaient maintenant plus avilis encore que ne le croyaient leurs ennemis, et plus désespérés que toute la lie de la création. Car, puisque tout ce qui, à nombre d’entre eux, avait semblé beau, une émotion belle, désintéressée, et noble parfois, avait été couvert de honte, traité d’impureté et de vilenie, ils s’étaient graduellement abaissés au niveau auquel le monde plaçait leurs émotions. Et regardant avec horreur ces hommes saturés de boisson, intoxiqués de drogue, comme s’ils l’étaient en trop grand nombre, Stephen sentit que quelque chose de terrifiant planait dans cette malheureuse salle de chez Alec, terrifiant parce que s’il y avait un Dieu, sa colère devait s’élever contre une telle injustice. Leur lot était plus pitoyable encore que le sien et l’humanité avait sûrement à en répondre. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), p. 564)

 

Je vous renvoie avec insistance sur les chapitres « Dictateur gay » et « Armée gay » du code « Homosexuels psychorigides » du Dictionnaire des Codes homosexuels, et notamment sur le lobby LGBT qui veut bisexualiser/asexualiser/sentimentaliser la Planète.

 
 

c) L’arc-en-ciel, spectre de la lumière noire :

Pièce "Under A Rainbow Flag" de Leo Schwartz

Pièce « Under A Rainbow Flag » de Leo Schwartz


 

Vous n’êtes pas sans ignorer que l’arc-en-ciel à 6 couleurs est devenu le symbole de la communauté homosexuelle. Et comme pour illustrer que, à l’instar du fameux adage, « l’enfer est pavé de bonnes intentions », la couleur noire se mêle souvent à l’arc-en-ciel dans les créations homosexuelles, tel un spectre de la lumière blanche inversé : cf. l’essai La Prochaine fois, le feu (1963) de James Baldwin (avec la citation ouvrant le livre : « Dieu donna à Noé le signe d’un arc-en-ciel : il est fini le temps de l’eau, s’approche celui du feu… »), le film « Osama » (2003) de Sedigh Barmak (dans ce film, le changement de sexe se fait en passant sous l’arc-en-ciel), le film « Hedwig And The Angry Inch » (2001) de John Cameron Mitchell (avec les bonbons multicolores apportés par le militaire noir, au milieu des ruines), le film « Vivir De Negro » (« Vivre dans le noir », 2010) d’Alejo Flah, la chanson « Lisa » de Jeanne Mas (« Je lui dirai des mots sensuels, passion nouée d’un arc-en-ciel, le provoquer par mes erreurs, le suffoquer de ma douceur. »), le roman Les Couleurs de la nuit (2010) de Stéphane Lambert, le roman Harlem Quartet (1978) de James Baldwin (Hall décrit son téléphone noir et l’arc-en-ciel qui en surgit), etc.

 

Il arrive que certains personnages homosexuels présentent le « milieu homosexuel » comme un arc-en-ciel annonciateur/signe d’orage infernal : « J’ai heurté, savez-vous, d’incroyables Florides / Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux / D’hommes ! Des arc-en-ciel tendus comme des brides / Sous l’horizon des mers, à des glauques troupeaux ! / J’ai vu fermenter les marais énormes, nasses / Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan ! / Des écroulements d’eaux au milieu des bonaces/Et les lointains vers les gouffres cataractant ! » (Arthur Rimbaud, « Le Bateau ivre » (1869-1872), p. 87) ; « Hier soir j’étais sorti de mon œuf… Je crois bien que c’était un œuf, alors ils m’ont dit : tu iras à la guerre ! […]  Moi, la guerre, je n’en connaissais rien. Je ne savais même pas où ça se passait ! […]  Alors je me suis mis à voler. J’y prends un plaisir fou […]  moi je planais comme un dingue. […]  Mais cette vie-là ça m’a fatigué vite. Je commence à m’arrêter de plus en plus souvent, dès que je vois une branche de libre. Et j’y trouve des gens qui me ressemblent, des camarades qui ont des muscles meurtris à force de voyager. Et je reste avec eux, piailler, sautiller, changer de branche quand le temps nous le concède. Alors il pleut souvent. Nos plumes deviennent grises. Alors, peu à peu, je viens chez vous. » (Copi, La Journée d’une rêveuse, 1968) ; « Je ne l’ai pas reconnu parce qu’il avait enfilé un tee-shirt noir orné d’un arc-en-ciel. » (Ashe, l’un des personnages homosexuels du roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 17) ; « Il y a un arc-en-ciel dans chaque nuage. » (le prof de bio Monsieur Hendricks, dans l’épisode 8 de la saison 1 de la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud, la société sans différence des sexes, où les rapports humains sont entièrement homosexualisés, est un univers insupportable, sans goût, où tout est blanc ou noir (la tonalité duelle de couleurs est parfois cassée par des éclats multicolores de peinture), où la machine a pris le pas sur l’humain : tous les personnages sont des robots s’exploitant les uns les autres. Dans la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez, c’est au moment où Suki et Kanojo descendent toutes les deux dans la cave de la maison de Juna, et que la première se presse contre la seconde (« J’ai peur du noir!!! ») que précisément Kanojo conseille à Suki de « penser à un troupeau de licornes qui descend d’un arc-en-ciel ». Dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa), Phil, le héros homo raconte le vide existentiel qu’il expérimente du fait de ne pas connaître son père biologique. Il lui donne les couleurs de l’arc-en-ciel : « Et aujourd’hui ? C’est normal de ne rien savoir sur notre père, le mystérieux numéro 3 de la liste. Pour moi, ça restait un vide étrange. Un trou noir. Comme si le vide en moi prenait des couleurs. »
 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Les Enfers marais-cageux :

Aussi étonnant que cela puisse paraître, beaucoup de personnes homosexuelles réelles reprennent à leur compte la menace que d’autres personnes homosexuelles refoulées avant elles avaient prononcé avant elles. Par exemple, dans le docu-fiction Le Projet Laramie (2012) de Moisés Kaufman, le révérend Phelps, pasteur protestant évangélique, soutient que « les homos vont tous finir en enfer ».

 

Même s’il s’agit bien évidemment d’un langage métaphorique (difficile de se représenter l’enfer, c’est-à-dire l’absence de Bien), il n’est pas rare que le « milieu homosexuel » soit décrit par les personnes homosexuelles – y compris celles qui se définissent « athées » – comme un enfer : « J’ai vu l’enfer en direct. » (Thomas, homosexuel, parlant de ses expériences homosexuelles, dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) ; « L’enfer ne nous fait pas peur, le paradis non plus. » (Pascal Sevran, Le Privilège des jonquilles, Journal IV (2006), p. 102) ; « Après ça [une aventure génitale avec le beau-frère], je dégringole assez rapidement. Il a réveillé quelque chose en moi. Je commence à me promener dans les parcs la nuit. Ma descente aux enfers, elle commence là. Mon estime de moi tombe à zéro. » (Justin, 34 ans, abusé dès l’âge de 4 ans par son père, son oncle, et son frère aîné, cité dans l’essai Ça arrive aussi aux garçons (2008) de Michel Dorais, p. 250) ; « J’ai beaucoup de mal pour aller dans des milieux exclusivement féminins, parce qu’il y a une espèce de brutalité dans laquelle je ne me reconnais pas. […] Ce que je ressens dans ces milieux-là parfois, c’est qu’on reproduit, tu as des femmes qui reproduisent des comportements masculins que j’exècre totalement, dans la manière de draguer principalement, c’est ça. Je trouve que c’est vulgaire, pour moi ça casse l’image de l’amour que j’ai pour les femmes. […] Ce qui me gêne c’est la contradiction, pour moi, entre une revendication de l’amour des femmes et cette vulgarité, qui pour moi n’est qu’une reproduction de ce qui se passe chez les hétéros. » (Catherine, femme lesbienne de 32 ans, dans l’essai Se dire lesbienne (2010) de Natacha Chetcuti, pp. 58-59) ; « On est confronté dans ces lieux de drague, hélas, à de multiples formes de violence. On y croise des gens bizarres ou des demi-fous et il faut être sur ses gardes. Et surtout on s’expose à être l’objet d’agressions physiques par des voyous ou bien à des fréquents contrôles d’identité par la police, qui y pratique un véritable harcèlement. Cela a-t-il changé ? J’en doute. » (Didier Éribon, Retour à Reims (2010), p. 219) ; « Le sauna de la Kleiststrasse hier soir : une expérience du dégoût. Dégoût pour les corps, dégoût pour le lieu, dégoût pour les pratiques (l’homme qui se promène avec un cockring, l’écran vidéo qui projette un fist-fucking, un autre homme allongé sur une natte qui ronfle comme si c’était le plaisir qui le faisait râler). Ma serviette ne cesse de tomber de ma taille, T. va chier et je l’attends longtemps à la porte, j’ouvre la porte et j’aperçois ses pieds nus qui dépassent de l’autre porte. Il me dit d’aller dans la salle du hammam qui est un dédale carrelé blanc devenu totalement opaque par la vapeur. Je me cogne à quelques corps, et j’ai soudain peur de ne plus pouvoir sortir, je tends mes mains en avant. (L’aisance, l’indifférence de T. dans tous ces endroits.) » (Hervé Guibert, Le Mausolée des amants (2001), p. 91) ; « Ce contexte dénué de tout raffinement […]  C’est là que je compris que cette recherche d’extrême était vaine. » (Gaël-Laurent décrivant un sex-club, dans son autobiographie Recto/Verso (2007), p. 191) ; « Je n’ai connu que des enfers rougeoyants, des êtres torturés par les flammes de la rage, embrasés d’envie, avides, dévorateurs. » (Cathy Bernheim, L’Amour presque parfait (2003), p. 180) ; « La dictature de l’apparence, […] inévitable chez les pédés ? » (Anne Delabre, Didier Roth-Bettoni, Le Cinéma français et l’homosexualité (2008), p. 97) ; « Je suis passé par bien des angoisses, bien des enfers. J’ai connu la peur et la terrible solitude, les faux amis que sont les tranquillisants et les stupéfiants, la prison de la dépression et de la Maison de la Santé. » (Yves Saint-Laurent dans le documentaire « Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé : l’Amour fou » (2010) de Pierre Thoretton) ; « Dans un tract politique nazi du 16 septembre 1919, on pouvait lire ce slogan : ‘L’Allemagne est en train de devenir une ‘maison chaude’ pour les fantasmes et l’excitation sexuelle.’Cette formule correspondait à une réalité certaine. Des touristes du monde entier venaient à Berlin, parce qu’elle était surnommé ‘Sin City’… On pouvait même trouver des filles de 10-11 ans portant des habits de bébés qui se promenaient de minuit à l’aube en concurrence avec des blondes luxuriantes, nues dans leurs manteaux de fourrures. Ou avec des garçons habillés en poupées, poudrés, les yeux faits, et du rouge aux lèvres. Pas moins de deux mille prostitués mâles sillonnaient les rues de Berlin, tous listés par la police. » (Philippe Simonnot parlant de la libéralisation des mœurs dans la ville nazie berlinoise des années 1920-30, dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 31) ; « Le Stonewall était un endroit sale et sordide. C’était comme une décharge. Mais c’était chez nous. » (Jim Fouratt, client homosexuel régulier décrivant l’établissement gay du Stonewall Inn de New York, dans le documentaire « Lesbiennes, gays et trans : une histoire de combats » (2019) de Benoît Masocco) ; etc.

 

Certains intellectuels homosexuels nous mettent en garde contre le formatage imposé par la culture marchande homosexuelle, et notamment Internet. « Vivre dans un monde où tout le monde est pareil, c’est un enfer ! » (Jean-Paul Montanari parlant du Marais, dans le documentaire « Bleu, Blanc, Rose » (2002) d’Yves Jeuland) Je vous renvoie au documentaire « Gay et pas froid aux yeux » (1997) de Rosa von Praunheim. Un peu avant sa mort, Jean Genet projette d’écrire un livre sur l’homosexualité intitulé L’Enfer. Dans l’émission Culture et dépendances, diffusée sur la chaîne France 3 le 9 juin 2004, l’écrivaine lesbienne Nina Bouraoui décrit son roman Poupée Bella (2004) comme « une descente dans l’enfer des filles».

 

Dans le docu-fiction « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari, lors de la séquence du concert SM, les coïts ressemblent à des scènes de torture. Le réalisateur en personne, quand il a été interviewé au Forum des Images de Paris au 17e Festival Chéries-Chéris 2011, nous a déclaré textuellement n’avoir ajouté aucune mise en scène à ces images des bas-fonds de New York : il a filmé tel quel ce qu’il définit comme une « reconstitution des enfers » (des hommes avec des masques de diable ou des têtes de morts, cris et actes de tortures sado-maso). Il a avoué également que parmi tous les figurants du film, il ne restait plus que trois survivants…

 

En général, l’une des premières étapes qu’une personne homosexuelle doit passer quand elle rentre dans le « milieu », c’est l’abandon de ses idéaux profonds (et parfois même de la foi) pour ne penser qu’à son petit « bien-être » : « Mes amis m’ont aidé à briser mes contradictions et à rejeter l’idée de Dieu. Je me rappelle d’une phrase prononcée par l’un d’entre eux, qui m’a encouragé à vivre pleinement. » (José Pascual cité dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 144) ; « J’ai d’abord erré dans ces lieux sombres, ma serviette à la main, je suis passé devant les cabines et j’ai vu des hommes allongés, offerts comme sur un étal de marché. Chacun pouvait choisir le garçon qui lui plaisait. Parfois, bien que la cabine fût plongée dans le noir, je distinguais plusieurs corps agglutinés. À priori, j’aurais dit que mon rêve se réalisait sous mes yeux, mais en fait j’ai très mal vécu cette première incursion dans l’univers homosexuel. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), p. 44) ; « Ses pulsions et ses désirs aplanis, il vécut totalement hors du circuit qui avait tant abîmé sa vie auparavant. » (Prologue à l’essai d’Henry Creyx, Propos décousus, propos à coudre et propos à découdre d’un chrétien homosexuel (2005), p. 9) ; etc. En fin de compte, on nous demande de lâcher notre paradis (notre virginité, notre liberté, notre joie, notre innocence).

 

Même s’il vit une expérience qu’il décrit comme un enfer, l’individu homosexuel s’auto-persuade souvent que cette impression est agréable, voire paradisiaque (il « l’a voulu », se dit-il). La nullité, ce n’est pas toujours révoltant. En général, son déni le met dans un état d’amnésique ou de zombie, qui ne lui fait plus distinguer le Réel du fantasme : « On ne respirait pas, il s’y vivait une fantaisie sexuelle presque irréelle. Une ambiance onirique que je compare avec l’atmosphère de certaines séquences de « Huit et demi » de Fellini. » (Fernando Maldonado évoquant le cinéma Carretas de Madrid, dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 139)

 

Dans son excellent essai Festivus festivus : Conversations avec Élisabeth Lévy (2005), le philosophe Philippe Muray évoque l’existence des « sectes homosexuelles » (p. 51), où ceux qui s’y enferment s’auto-persuadent qu’ils sont tous à l’extérieur. « L’enfer se hait lui-même. » disait Bernanos.

 

Il est à noter aussi que beaucoup de personnes homos trouvent leur compte dans la diabolisation du « milieu homo ». Elles l’entretiennent allègrement toutes seules… même si elles auront tendance à dire ensuite qu’elle vient uniquement des « méchants hétéros homophobes » ! Moi, par exemple, j’ai plus de plaisir à me dire « du milieu », à me balader dans le Marais, et à m’intéresser à la culture homosexuelle qu’elles ! Leur transformation du « milieu homosexuel » en enfer (qu’il ne serait jamais si on le voulait vraiment !) est un moyen pour elles de se victimiser sans se remettre en question, de se placer en outsider irresponsables, pour continuer à agir exactement comme elles agiraient à l’intérieur, mais sans assumer leurs actes concrets de débauche. Quand elles agissent mal ou font de mauvaises rencontres amoureuses, elles mettent cela sur le compte de la « superficialité d’Internet ou de Facebook ou des chats », sur la soi-disant « tendance des gays à mettre le sexe bien avant les sentiments »… alors que dans les faits, ce sont justement la sincérité et les sentiments qui sont moteurs de libertinage ! et ce sont elles qui, en actes, rentrent complètement dans le jeu de l’amour consommateur ! Oui, la supposée « superficialité » d’Internet, des saunas, de Facebook, des boîtes gay, a très très bon dos !

 
 

b) Le panier de crabes aux pinces roses :

INFERNAL transphobie

 

Pourquoi les individus homosexuels emploient-ils une image si diabolisée et si catastrophique de leur propre maison… alors même qu’à d’autres moments, ils s’obstineront à en dresser un portrait totalement idyllique ? Certainement parce qu’ils ne se sentent pas à leur place, ni aimés, ni comblés par leurs relations amicales et amoureuses homosexuelles qui, visiblement, sont compliquées et douloureuses. « Après les petites annonces et les saunas, j’ai fini par m’aventurer dans le quartier gay de Paris, le Marais, toujours dans l’espoir de LA rencontre. J’ai vite déchanté. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), p. 48) ; « Le monde gay m’effraie : trop stéréotypé ? Trop âgé ? Trop fermé ? Comment l’appréhender ? Mes débuts, c’est sur le net que je les ai faits. Mes premières erreurs aussi. Caché derrière un pseudonyme, on se croit tout permis, on s’invente des envies, une vie, et on oublie la sienne. On est happé par cette apparente convivialité, à mille lieues de la réalité, mais, malgré tout, on s’y plaît, on s’y réfugie, on y jouit et on s’y confie. C’était plus fort que moi, je ne vivais plus que pour ça. J’ai tout pris au pied de la lettre, et je me suis retrouvé à Paris pour y rencontrer un mec que je ne connaissais pas. Après plusieurs mois d’amour virtuel, je voulais que ça continue dans la vie réelle. Ce n’est que plus tard que je me suis rendu compte de ma stupidité et du fait que cette histoire ne pourrait jamais marcher. D’ailleurs, c’est ce qui s’est passé. J’y ai trop cru, alors que l’homme n’en voulait que pour mon cul. Il a négligé mon innocence au profit de sa complaisance. Après un début passionnel, la chute a été rude. Le retour à la réalité, brutal et cinglant. Maintenant, j’ai compris. J’essaie d’oublier. Je suis entre deux âges et je ne sais pas trop sur quel pied danser. Je sors de plus en plus dans le milieu gay (boîtes, bars, vernissage) : je préfère aller directement sur le terrain, je suis curieux et j’aime explorer ce monde d’adultes, mais jamais je n’ose aborder, sans doute par peur du rejet ou d’être jugé. Même si l’envie d’un homme se fait de plus en plus pressante, je préfère me préserver, aussi bien physiquement que psychologiquement. » (Cédric, un jeune homosexuel grenoblois de 18 ans, dans la revue Têtu, 2002) ; « La solidarité y est fréquente ; encore plus l’égoïsme, la jalousie, l’hostilité, la trahison. » (Roger Peyrefitte parlant du « milieu homosexuel » et cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 253) ; « Quiconque a passé une nuit dans un bain gay sait qu’il s’agit (ou s’agissait) de l’un des environnements les plus cruellement rigides, hiérarchisés et compétitifs qui se puissent imaginer. Vos allures, vos muscles, votre système pileux, la taille de votre queue et la forme de votre cul déterminaient exactement la façon dont vous alliez trouver le bonheur durant ces quelques heures, et le rejet, généralement accompagné de deux ou trois mots tout au plus, pouvait être cinglant, sans aucune de ces civilités hypocrites avec lesquelles nous évitons les indésirables dans le monde extérieur. » (Léo Barsani, cité dans l’essai Le Rose et le Brun (2015) de Philippe Simonnot, pp. 269-270) ; « Il y a toujours du chantage entre nous. C’est très très répandu. Ça se passe par des lettres ou des téléphones. Y’a mon premier ami que j’ai perdu de cette manière, d’ailleurs. Il s’est suicidé. À cause d’un chantage, oui. » (Frank, témoin homosexuel suisse, dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta) ; etc.

 

À les entendre, le « milieu homosexuel » est un véritable panier de crabes ! « La dictature de la majorité n’est pas plus enviable que la dictature des minorités. » (Frédéric Martel, Le Rose et le Noir (1996), p. 713) ; « Je me butais à dire que j’étais rejeté par ce même milieu, tout en le fréquentant assidument. Je savais que je me contredisais. Pire, j’avais tendance à me positionner en victime vis-à-vis à d’eux. […] On se haïssait. On se scrutait en chiens de faïence. Ainsi allaient nos humeurs. […] Des liens de rivalité et de dépendance, des uns par rapport aux autres, s’installèrent par la suite. Nous étions en fait des assoiffés du renouveau et du sexe, même si nos mœurs nous obligeaient à une pseudo convivialité. » (Berthrand Nguyen Matoko, racontant ses soirées « délire » déguisées avec ses potes homos, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), p. 141) ; etc. Et personnellement, sans vouloir noircir excessivement le tableau (puisque je suis un fervent défenseur de la culture et de la communauté homosexuelles ; et que la croyance en la « communauté homo » m’a servi de bon prétexte pour faire de très belles rencontres amicales… et ce n’est pas fini !), je ne démentirai pas cette mauvaise réputation.

 

Quand je repense par exemple à la sale ambiance (faussement « déconne ») que j’ai vécue pendant 2 années dans l’équipe de chroniqueurs de l’émission Homo Micro sur Radio Paris Plurielle, de la maltraitance verbale (en plus de la bêtise et de l’intolérance aux pensées différentes) qu’on m’a fait subir, j’ai à la fois envie de sourire et de gerber. Pauvres auditeurs (si jamais il y en a…) !

 

Force est de reconnaître que les personnes homosexuelles sont souvent extrêmement sectaires entre elles, envers les « folles », les personnes travesties, transsexuelles, lesbiennes, âgées, jeunes, séropositives, et surtout les individus homosexuels étiquetés « homophobes », autrement dit les « bisexuels », ceux qui viennent leur révéler que l’homosexualité est prioritairement une réalité mythique, non-figée : « J’avais eu à faire avec assez de pédés égocentriques, paranoïaques et destructeurs. » (Frédéric Mitterrand, La Mauvaise Vie (2005), p. 275) ; « Je me suis mis à marcher derrière Bruno comme quand on suit aveuglément l’amour, pour trouver au comptoir un centimètre carré disponible. Lumières paralysantes, la musique hurlait pour couvrir la rumeur générale qui s’amplifiait alors que, les bières se vidaient. Hommes enlacés, bouche à bouche, sexe à sexe, ils se déchaînaient pour un soir en libérant toutes leurs pulsions, le temps de vivre leurs désirs. Les plus âgés, relativement plus calmes, ‘des aventuriers de l’âge perdu’, comme les appelait Bruno, qualification qui me déplaisait fortement, lorgnaient sans doute vers le passé déchu qui s’écoulait à la vitesse des perfusions. Tandis que je m’insurgeais contre cette discrimination, Bruno m’expliquera plus tard que, attirance physique oblige, le fossé des générations dans le milieu a plus qu’un sens, il a un corps. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 133) ; « En ce qui concerne les discriminations, malheureusement il en existe au sein même du Mouvement homosexuel, tout du moins dans le secteur des hommes, qui est celui que je connais le mieux. Il existe une grave discrimination sur l’âge. […] Une autre discrimination existe en raison de l’apparence physique. » (Armand de Fluvià, cité dans l’ouvrage collectif Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, p. 84) ; « Les coulisses de ces Barnum du vice ne sont pas des paradis. C’est plutôt à l’enfer que ressemble Sodome et, entre les entrées et les sorties des vedettes, éclatent des drames compliqués et grinçants. On se bat – en femmes, naturellement : on déchire la robe neuve de son ennemie intime, quand on ne la coupe pas au rasoir. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 37) ; « Nous autres, les goudous à cent pour cent, c’est à ça qu’on est bonnes, elles viennent se faire baisouiller un moment, et tout à coup, elles reprennent leurs esprits et elles nous proposent d’être leurs amies ! […] Ces femmes nous méprisent. Elles se servent de nous quand elles sont en manque et le premier argument leur suffit pour tirer l’échelle quand elles ont eu ce qu’elles voulaient. » (Paula Dumont parlant des femmes hétérosexuelles infiltrant leur « milieu », dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 123) ; « Tout à coup, sans transition, Michel Foucault se mit à rire : ‘Elle est complètement folle !’ Un frisson me parcourut l’échine : mes oreilles venaient d’entendre pour la première fois ce elle qui était un féminin de la langue secrète de l’Enfer et ce folle, terme usité dans cette société infernale dont Foucault nous laissait entendre qu’il était un initié. » (Paul Veyne, Et dans l’éternité, je ne m’ennuierai pas (2014), pp. 63-64) ; etc.

 

Par exemple, le documentaire « The Gift » (2005) de Louise Hogarth fait état d’un rejet massif des personnes homosexuelles sidéennes au sein du « milieu homosexuel ». Le film biographique « Girl » (2018) de Lukas Dhont nous montre la descente aux enfers de Lara/Victor, garçon trans M to F de 16 ans, qui se met en étau entre le monde totalitaire de la danse classique et le monde non moins totalitaire de la transition de sexe. De son vivant, le photographe nord-américain « Mapplethorpe a souffert de ne pas trouver chez les gays eux-mêmes un accueil plus chaleureux. » (Lionel Povert, Dictionnaire gay (1994), p. 322) À titre d’exemple, le traitement lamentable réservé à l’association française Arcadie (créée en 1954 et dissoute en 1982), pourtant pionnière en France des droits de la communauté homosexuelle actuelle, montre combien grande est l’intolérance et l’ingratitude dans le « milieu homosexuel » (cf. le dossier « En terre d’Arcadie », entretien avec André Baudry de Christian Gendron, dans la revue Triangul’Ère 6 de Christophe Gendron, décembre 2006, pp. 112-145).

 

Parfois, dans un élan nostalgique, certains individus homosexuels idéalisent les premiers temps de la communauté homosexuelle pour mieux se lamenter sur l’inhumanité du « ghetto gay » marchand actuel. Or des vétérans comme Denis Daniel nous dressent un portrait peu reluisant du « milieu homosexuel d’antan », où la consommation mutuelle entre amants était instituée autrement, mais tout aussi présente : « ‘ – Salut ! C’était pas mal, sais-tu ! Et tu la boucles, compris ?’ Pas de doute, en ce temps-là, dans le milieu on savait vivre !!! » (Denis Daniel, Mon théâtre à corps perdu (2006), p. 71)

 

En voulant fuir à tout prix les règles et les interdits sociaux au nom de leur liberté de conscience, la plupart des personnes homosexuelles adoptent un code moral privé tout aussi rigide, voire plus rigide que les règles de vie édictées par la société « hétéro » rejetée. « Une permissivité trop grande amène le sujet à renforcer les interdits internes devant l’absence d’interdits externes. » (Xavier Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne (1985), p. 175) ; « Pauvres femmes, pauvres goudous, chacune dans votre loin, au mieux avec votre chère et tendre, au pire seule et désespérée, ce n’est pas demain la veille que vous comprendrez que la sororité est vitale pour les goudous encore plus que pour les hétérottes. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 221) ; « Le monde gay n’est pas parfait, ni saint, de la même manière que le monde hétérosexuel n’est ni parfait ni saint. […] Il y a beaucoup de poubelle, dedans comme dehors… » (cf. l’article « Doce Días De Febrero » de José Mantero, dans l’essai Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, pp. 192-194)

 

L’orientation sexuelle et la pulsions étant les dénominateurs communs de la communauté homosexuelle, il est logique que les rapports relationnels qui s’instaurent entre les communautaires soient majoritairement de consommation, intéressés, compulsifs et violents : « Comment le caractère particulièrement ségrégatif d’une telle communauté, fondée sur la seule particularité de sa jouissance sexuelle, ne saute-t-il pas immédiatement aux yeux des démocrates ? » (Jean-Pierre Winter, Homoparenté (2010), p. 111) C’est généralement déprimant pour l’individu homosexuel de voir que, dès que lui et ses frères d’orientation sexuelle s’adonnent factuellement à leur désir homosexuel, ils se renvoient un pathétique reflet d’obsédés sexuels. « Le grand plaisir du débauché, c’est d’entraîner à la débauche. » (André Gide à Oscar Wilde, au lendemain d’une promenade dans les quartiers « spéciaux » d’Alger) Ce n’est pas ce qu’ils seraient dans un autre cadre amoureux et communautaire, certainement. Et c’est bien cela qui les attristent le plus : d’être complices de leur propre damnation.

 

Un jour, en 2003, Bernard, un ami angevin, m’avait confié par mail l’enfer qu’il vivait dans sa vie homosexuelle, plus terrible encore que l’enfer folklorique des dessins animés, parce qu’il était « librement » consenti : « C’est dur pour moi : je suis un affectif et la solitude me pèse… et puis les années sont là malgré tout. En 2 ans, je n’ai jamais réussi à construire une relation d’amour. Que de tentatives, d’espoir vains, d’illusions et de désillusions ! et ce soir je vais rentrer seul… En fait, je n’aime pas aller au Cargo [ancien bar LGBT d’Angers]. L’ambiance festive me plait et parler ‘homo’ m’est utile, mais le côté pathétique des homos me déprime. Je me sens totalement en décalage, perdu dans tout ça, noyé dans cette souffrance sous-jacente. J’ai juste envie de bonheur, de rire, de plaisir partagé, de douceur. Je connais trop la solitude, et même quand j’étais en couple je vivais seul. Parfois c’était pire qu’aujourd’hui. »

 

Les communautaires homosexuels ne se contentent pas de fermer les portes de l’enfer de leurs pratiques sexuelles : ils veulent l’étendre au reste du monde, en cherchant (pour les plus extrémistes) à homosexualiser la Planète entière, et à bisexualiser/asexualiser tous les êtres humains (pour les encore plus extrémistes et les plus bobos d’entre eux). Je vous renvoie avec insistance sur les chapitres « Dictateur gay » et « Armée gay » du code « Homosexuels psychorigides » du Dictionnaire des Codes homosexuels, et notamment sur le lobby LGBT.

 

Entre elles, même les personnalités homosexuelles médiatiques et « assumées », peuvent s’écharper comme jamais. C’est ce qui s’est passé lors de l’émission On n’est pas couchés de Laurent Ruquier diffusée le 20 octobre 2018 sur la chaîne France 2, pendant laquelle Muriel Robin, Marc-Olivier Fogiel et Laurent Ruquier (je ne compte même pas Christine Angot) se sont ligués contre le jeune chroniqueur homo Charles Consigny, à propos d’un désaccord sur la GPA (Gestation Pour Autrui). La scène est d’une violence homophobe gay friendly difficilement soutenable.
 
 

c) L’arc-en-ciel, spectre de la lumière noire :

Le noir de l’arc-en-ciel homosexuel est à lui seul allégorisé par l’actrice-chanteuse nord-américaine Judy Garland, qui a incarné la petite Dorothée du film gay friendly « Le Magicien d’Oz » (1939) de Victor Fleming, dans lequel elle chanta le fameux « Over The Rainbow » : celle qui a donné naissance au mouvement gay contemporain (on dit que sa mort, le 27 juin 1969, à Manhattan, a été à l’origine des révoltes de Stonewall), et qui lui a donné son symbole, l’arc-en-ciel, a eu une vie particulièrement noire et tourmentée (divorce, déprime, suicide…).

 

Pour la Gay Pride parisienne de 2018, place du Châtelet, un immense écriteau « Rainbow is the new black » (traduction officielle : « L’arc-en-ciel est la nouvelle coolitude »)… clin d’oeil aussi à la série nord-américaine Orange is the new black


 

Le Rainbow Flag homosexuel, devenu depuis les années 1980, le symbole de la communauté homosexuelle, et censé défendre la joie et la beauté de la diversité, est plutôt un spectre de la lumière noire, puisque la diversité en question ressemble à une uniformité bien terne et sombre : « Je pense que derrière tout ce carnaval se cache une grande violence. » (Madeleine dans l’autobiographie Folies-Fantômes (1997) d’Alfredo Arias, p. 266) ; « Contre les préjugés, ceux des autres mais aussi les nôtres, brandissons notre arc-en-ciel et combattons l’obscurantisme dans la salle obscure ! » (Antoine Quet dans le catalogue du 19e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013, p. 9) ; « L’arc-en-ciel, éternelle déclaration d’amour de l’infini à notre terre de violence. » (Julien Green, L’Arc-en-ciel, Journal 1981-1984, 17 janvier 1981, p. 15) ; « La plupart du temps, je dessinais des représentations de l’Enfer que je rapportais à la maison pour que ma mère les admire. J’avais développé une technique formidable pour dessiner l’Enfer : coloriez une feuille de papier en faisant des blocs de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, puis prenez un pastel noir et recouvrez les couleurs. Ensuite, prenez une épingle et faites des dessins sur le papier. Les couleurs apparaissent là où le noir a été gratté. Spectaculaire et efficace. Surtout pour les âmes perdues. » (Jeanette Winterson, lesbienne, dans son autobiographie Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, 2011, p. 71) ; etc. Le noir est la couleur du caméléon multicolore homosexuel, comme l’illustrent les propos de Frédéric Sanchez : « Le costume noir, c’est mon uniforme, j’aime le côté strict. Le besoin d’être neutre, de pouvoir passer d’un milieu à un autre. » (cf. l’article « Frédéric Sanchez, illustrateur sonore », sur le site www.e-llico.com, consulté en juin 2005). Le choix du Rainbow Flag m’apparaît particulièrement judicieux et signifiant dans la mesure où l’arc-en-ciel a toujours été annonciateur/signe d’orage… tout comme la communauté homosexuelle. Je vous renvoie notamment au fond ténébriste que prennent certaines affiches, pourtant très pro-gay, d’Élisabeth Ohlson Wallin, au choix du titre de l’excellent essai Le Rose et le Noir (1996) de Frédéric Martel.

 

L’arc-en-ciel homosexuel broie du noir et cache souvent des pratiques et des réalités dramatiques. Par exemple, en France, le collectif associatif Arc-en-ciel s’occupe des rebus de la société, des personnes seules ou qui sont séropositives : l’arc-en-ciel est ici un cache-misère. Personne, en entendant le nom de cette association, ne peut deviner à quoi elle est destinée. Par ailleurs, dans le documentaire « Homo et alors ?!? » (2015) de Peter Gehardt, l’arc-en-ciel gay en papier mâché s’enflamme et se laisse peu à peu noircir par la cendre. Tout un symbole !

 

Documentaire "Homo et alors?!?" de Peter Gerardt

Documentaire « Homo et alors?!? » de Peter Gerardt


 

Le Rainbow gay justifie des pratiques mercantiles autour de l’amour (prostitution, drague, tourisme sexuel, etc.) et de la filiation (Gender, PMA, GPA, « mariage gay », etc.) qui sont inadmissibles : « Je suis né dans une famille black, blanc et rainbow. » (Patrick Blosch, témoignant de son homosexualité et du « faire famille homoparentale » à travers l’adoption d’enfants, lors du débat public « Toutes et tous citoyen-ne-s engagé-e-s », le samedi 10 octobre 2009, à la Salle des Fêtes de la Mairie du XIème arrondissement de Paris).

 

Tweet du 10 juin 2020


 
Clichés télébristes pro-LGBT d'Élisabeth Ohlson Wallin

Clichés télébristes pro-LGBT d’Élisabeth Ohlson Wallin


 
 

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Code n°140 – Pédophilie

Pédophilie

Pédophilie

 

 


(Et le premier crétin qui me sort que, parce que je parle du lien de coïncidence entre homosexualité et pédophilie, j’assimilerais toutes les personnes homosexuelles aux pédophiles, ou que je jouerais inconsciemment le jeu des homophobes en déterrant un vieil amalgame, il s’en prend une ^^…)

 
 

NOTICE EXPLICATIVE

Oui. Vous avez bien entendu. Le mot qui sert à construire des monstres humains dont on ne veut rien savoir est lâché ! « PÉDOPHILE » Alors tout le monde est prêt à se déboucher les oreilles ? Je vous propose, pour une fois, de stopper l’hémorragie de la diabolisation d’un désir présent – à différents degrés – en tout être humain, y compris les femmes, et de nous poser pour réfléchir sur le malaise SOCIAL que disent les actes pédophiles, sans tomber dans l’écueil de stigmatiser des exceptions de bourreaux pour se soulager la conscience et surtout ne jamais s’identifier à eux. Je crois que le désir pédophile est humain, et même par les personnes comme moi qui ont conscience de n’être attirées que par des personnes adultes (… voire même carrément plus âgées que moi). La pédophilie dit une violation COLLECTIVE de la différence des générations (cela semble à priori le plus évident ; et cette violation marche dans les deux sens : du côté des plus âgés comme des plus jeunes), et des autres différences du Réel (en arrière-fond : la différence des espaces et la différence des sexes). C’est la raison pour laquelle les liens entre le désir homosexuel – qui rejette systématiquement la différence des sexes, et fréquemment la différence des générations – et le désir pédophile existent. Ces liens non-causaux et non-systématiques font pousser des hauts cris aux personnes homosexuelles qui diabolisent ET le désir pédophile ET leur propre désir homosexuel. Surtout en ces temps où la demande du droit au mariage homo, à l’adoption et à l’homoparentalité, se fait si insistante de leur part. Mais ne nous laissons pas impressionner. Si le cliché de « l’homosexuel pédophile » est visible, c’est bien pour des raisons (plus ou moins justes). Et si la plupart des membres de la communauté homosexuelle se précipitent à le traiter d’« homophobe » d’un air outré et scandalisé, raison de plus pour examiner la part de réel et la part de fantasme qui se cachent derrière l’odieuse étiquette !

 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Éternelle jeunesse », « Violeur homosexuel », « Élève/Prof », « Prostitution », « Poupées », « Petits morveux », « Inceste », « Parodies de mômes », « Curé gay », « Inceste entre frères », « Frère, fils, père, amant, maître, Dieu », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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1 – PETIT « CONDENSÉ »

 

Liens entre

pédophilie et homosexualité ?

 

PÉDOPHILIE 1

Don Bachardy et Christopher Isherwood (en « couple »)


 

Le lien pédophilie-homosexualité offusque beaucoup de personnes homosexuelles parce qu’il existe véritablement, même s’il est difficilement démontrable étant donné qu’il se range du côté des réalités fantasmées, donc des coïncidences et des images. C’est la raison pour laquelle il faut en parler, tout en dénonçant tous les discours qui établissent des rapports de causalité entre homosexualité et pédophilie. Les agressions pédophiles sont majoritairement le fait d’adultes (dits ou qui se disent) hétérosexuels, et il est évident que les personnes homosexuelles ne doivent pas, du fait de leur orientation sexuelle, être tenues à l’écart des structures d’encadrement de l’enfance.

 

Les personnes homosexuelles qui se livrent concrètement à des actes pédophiles sont assez rares. Leur nombre est souvent excessivement grossi par les personnes homosexuelles elles-mêmes. Il est par exemple dommageable de constater, venant d’un certain nombre de jeunes hommes gays, un amalgame quasi-systématique entre âge, homosexualité, et pédophilie : ils ont un peu trop tendance à qualifier de « vieux pervers » toute personne homosexuelle plus âgée qui s’intéresse(rait) à eux.

 

La phobie de la pédophilie concernant l’homosexualité, aussi injustifiée soit-elle, n’est pas pour autant à mépriser entièrement : elle est à analyser pour être combattue, sinon, elle risque de s’actualiser. C’est son rejet systématique, exercé massivement par la communauté homosexuelle et nos sociétés médiatisées, qui montre qu’elle correspond à une certaine réalité désirante, et parfois concrète. Par exemple, un nombre non-négligeable de couples homos se distinguent par un écart d’âge entre les partenaires nettement plus prononcé que chez les couples femme-homme (cf. Alfred Spira, Rapport Spira Bajos, 1992 ; j’aborde aussi largement le sujet des rapports amoureux homosexuels avec un écart prononcé d’âges entre les partenaires, dans les codes « Frère, fils, père, amant, maître, Dieu » et « Inceste (Père et fils homos tous les deux) » sur mon Dictionnaire des Codes homosexuels). Par ailleurs, parmi les personnes homosexuelles qui dénoncent à juste titre l’assimilation causale de la pédophilie à l’homosexualité, il y a beaucoup plus de fervents défenseurs et de pratiquants de la pédophilie qu’on pourrait l’imaginer. Le meilleur exemple de ce paradoxe, c’est Guy Hocquenghem, qui écrivit en 1983 Les Petits Garçons. La réalité du tourisme sexuel dans les pays du Tiers-monde, ou de la prostitution masculine à échelle planétaire, vient confirmer que les liens de coïncidence non-reconnus entre homosexualité et pédophilie peuvent se faire actes.

 

Il n’est pas rare d’entendre certaines personnes homosexuelles invoquer tous les avantages que présente la relation pédophile pour l’adulte et l’enfant (par exemple la rupture de l’isolement et de la solitude, les bienfaits pédagogiques du chaperonnage, la possibilité pour un homme mûr d’échapper à la frustration sexuelle, la relation d’affection « forte » entre l’éraste et l’éromène, l’« expérience » que peut en tirer l’initié juvénile, etc.). Elles reprennent parfois mot pour mot le discours de l’homme pédéraste qui tend toujours à la flatterie de sa victime (« il est très mûr pour son âge »), à la glorification dédramatisante des sentiments au détriment de la reconnaissance de la violence des actes.

 

Le mythe de l’éternelle jeunesse, particulièrement palpable dans le « milieu homosexuel », montre l’élan incertainement et fantasmatiquement incestueux et pédophile du désir homosexuel, quand bien même un certain nombre de personnes homosexuelles sont sûres et certaines de n’être attirées que par des individus mûrs et adultes. Il traduit en négatif une angoisse de la vieillesse. On entend celle-ci exprimée par beaucoup de sujets homosexuels, y compris chez ceux qui n’ont que la vingtaine. Même s’ils savent bien qu’il leur faudra à un moment ou un autre renoncer à finir avec un petit jeune de vingt ans, ils ne se défont pas de cette utopie pour autant. Chaperonner un éphèbe pré-pubère, c’est un moyen détourné de faire le bain de jouvence du Pygmalion, mais aussi de revivre une jeunesse perdue en se substituant aux enfants.

 
 

GRAND DÉTAILLÉ

FICTION

Le personnage homosexuel est attiré sexuellement par les enfants et la jeunesse médiatique :

 

PÉDOPHILIE 2

Film « Les Amitiés particulières » de Jean Delannoy


 

Les créations artistiques traitant d’homosexualité abordent énormément le thème de la pédophilie : cf. le film « Tendres Adolescents » (1980) de Jean-Daniel Cadinot, le film « La Conséquence » (1977) de Wolfgang Petersen, le film « Au Nom du Père » (1972) de Marco Bellocchio, le film « Solamente Nero » (1978) d’Antonio Bido, le film « L’Éveil de Maximo Oliveros » (2005) d’Auraeus Solito, le film « L.I.E. » (2001) de Michael Cuesta, le film « Peur primale » (1996) de Gregory Hoblit, le film « Happiness » (1998) de Todd Solondz, le film « Mystic River » (2004) de Clint Eastwood, le film « The Woodsman » (2004) de Nicole Kassell, le roman The White Cockades ; An Incident Of The Forty-five (1887) de Xavier Mayne, le film « Allemagne Année Zéro » (1948) de Roberto Rossellini, le film « Les 5000 doigts du Docteur T » (1952) de Roy Rowland, le film « If… » (1968) de Lindsay Anderson, le film « Les Amitiés particulières » (1964) de Jean Delannoy, le film « Amours particulières » (1969) de Gérard Trembaciewicz, le film « Bruno, l’enfant du dimanche » (1968) de Louis Grospierre, le roman Nos Plaisirs (1983) de Mathieu Lindon, le film « Short Eyes » (1977) de Robert M. Young, le film « Sapore del Grano » (1986) de Gianni Da Campo, la nouvelle « Le Travesti et le Corbeau » (1983) de Copi, le film « Jeepers Creepers » (« Le Chant du diable », 2000) de Victor Salva, le film « Souffle au cœur » (1971) de Louis Malle (avec le jésuite pédéraste), le film « Fiesta » (1995) de Pierre Boutron (avec le colonel Masagual, un officier franquiste pédéraste), le film « Scout toujours » (1985) de Gérard Jugnot (avec le personnage de Georges), les films « Les Amis » (1971) et « Un Enfant dans la foule » (1975) de Gérard Blain, le roman Sexy (2007) de Joyce Carol Oats (avec la relation entre Darren et Mr Tracy), le film « Naked Blood » (1995) de Hisayasu Satô, le film « Le Jardin des Délices » (1967) de Silvano Agosti, le roman Agostino(1944) d’Alberto Moravia, le film « Agostino » (1962) de Mauro Bolognini, le film « Tommy » (1975) de Ken Russell, le film « Blue Jeans » (1976) d’Hugues Burin des Roziers, le film « Twist » (2004) de Jacob Tierney et Adrienne Stern (avec le monde de la prostitution masculine), le film « Night Corridor » (2003) de Julian Lee, le film « Another Gay Movie » (2006) de Todd Stephens (mettant en scène des adolescents ayant parfois des ébats sexuels avec des adultes), le film « Walk a Crooked Path » (1970) de John Brason, le film « Une si jolie petite plage » (1948) d’Yves Allégret, le film « Boy Culture » (2007) de Q. Allan Brocka (la pédophilie est ici légitimée par la prostitution), le film « Whole New Thing » (2005) d’Amnon Buchbinder, le film « Huit Femmes » (2002) de François Ozon, le film « L’Exécutrice » (1985) de Michel Caputo, le film « Montreal Main » (1974) de Frank Vitale, le roman La Comunión De Los Atletas (1979) de Vicente Molina Foix, le film « La Ville dont le prince est un enfant » (1996) de Christophe Malavoy, le film « L’Île Atlantique » (2005) de Gérard Mordillat, le film « Precious Moments » (2002) de Lars Daniel Krutzkoff Jacobsen, le film « Smukke Dreng » (« Joli Garçon », 1993) de Carsten Sonder, le roman Jeux d’enfance (1930) de Giovanni Comisso, le film « La Classe de Neige » (1997) de Claude Miller, le film « La Vierge des Tueurs » (2000) de Barbet Schroeder, le roman Pasión Y Muerte Del Cura Deusto (1924) d’Augusto d’Halmar, le film « La Tendresse des Loups » (1973) d’Ulli Lommel, le film « Un Printemps sous la neige » (1983) de Daniel Petrie, le film « Charlotte For Ever » (1986) de Serge Gainsbourg, le film « Gossenkind » (1992) de Peter Kern, le film « L’Enfant Miroir » (1990) de Philip Ridley, le film « So Lange Du Hier bist » (2005) de Stefan Westerwelle, le film « Vito E Gli Altri » (1992) d’Antonio Capuano, le film « Pianese Nunzio, 14 Anni A Maggio » (1996) d’Antonio Capuano, le film « Il Sapore Del Grano » (1986) de Gianni Di Campo, le film « Det Forsomte Forar » (1993) de Peter Schröder, le film « Si Te Dicen Que Caí » (1989) de Vicente Aranda, le film « The Lost Son » (1998) de Chris Menges, le film « La Tribu » (1990) d’Yves Boisset, le film « Le Trou » (1960) de Jacques Becker (l’un des quatre détenus, homosexuel, est incarcéré pour détournement de mineurs), le film « Grâce à Dieu » (2019) de François Ozon, etc.

 

Par exemple, dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H., Jonathan propose à son amant Matthieu de regarder le documentaire « Atrocité de la pédophilie en Thaïlande ». Dans la pièce Doris Darling (2012) de Ben Elton, le vieux Douglas drague le jeune Santiago. Dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons (2012), Didier Bénureau chante une relation pédophile entre un homme de 50 ans et une fillette de 14 ans : « Être un vieux pédophile, c’est vraiment pas facile. » Dans le film « Keep The Lights On » (2012) d’Ira Sachs, Erik, le héros homosexuel, a vécu sa première expérience sexuelle à 13 ans. Dans le roman L’Ange impur (2012) de Samy Kossan, Samy a 15 ans quand il se prostitue. Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, après avoir découvert son attraction homosexuelle pour les jeunes délinquants qu’il encadre, Adam se traite lui-même de pédophile. Dans la pièce Un Cœur en herbe (2010) de Christophe et Stéphane Botti, Jacques, l’écrivain quinquagénaire est totalement subjugué par la jeunesse de Mathan, un branleur de 18 ans. Dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, Emma, femme mûre, sort avec Adèle, qui est mineure (au fur et à mesure de l’intrigue, cette dernière passera le cap des 18 ans : ouf, ça devient ainsi une film vachement plus moral, nous sommes sauvés… Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Nicolas, homosexuel à la trentaine bien tassée, se met à draguer un petit jeune autrichien, Michael, au bord d’un lac ; et le lycéen rentre dans le jeu. Le héros homo aime visiblement la chair fraîche car il avait auparavant dragué lourdement un jeune serveur saisonnier du chalet de montagne où il s’était restauré avec ses deux autres amis homos Gabriel et Rudolf. Gabriel, quant à lui, semble attiré par les hommes mûrs (il part à la conquête d’un moniteur de colo hétéro, Andreas), mais pourtant, quand il débarque dans une église pour demander à un vieux prêtre où se trouve le groupe d’enfants d’Andreas, sans d’autres explications, sa réplique laisse entendre qu’il est lui aussi pédophile : « Je cherche des enfants. » Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand met avec l’application Grindr l’homosexualité sur le même plan que la pédophilie : « Grindr pour les gays. Kinder pour les pédophiles. » Dans le one-man-show Au sol et en vol (2014) de Jean-Philippe Janssens, Jeanfi, le steward homo, ironise sur ses origines natales belges en disant qu’elles ont été le terreau de sa conscience d’être homo : « J’viens d’un p’tit village du Nord. Pédophilie, ça vous dit quelque chose ? Moi, au milieu de tout ça, j’ai compris que j’étais très sensible. Trop sensible. » Dans le roman At Swim, Two Boys (Deux garçons, la mer, 2001) de Jamie O’Neill, tous les personnages homosexuels masculins sont émerveillés par la jeunesse et les éphèbes… y compris les adolescents qui tombent amoureux entre eux : « L’amour des enfants lointains… l’amour lointain des enfants rappelle à l’humanité ses origines nobles. » (Mr Mack parlant de Jim, son fils homosexuel) Anthony, l’un des pédérastes « mûrs », dirige d’ailleurs une chorale d’enfants à l’église, et il a été condamné à aux travaux forcés pendant deux ans pour pédérastie sur mineurs. Dans le film « Imitation Game » (2014) de Mortem Tyldum, Alan Turing, le mathématicien homosexuel, est arrêté par la police pour avoir des relations sexuelles avec des mineurs, et notamment un certain Murray qui le cambriole. Dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), le Comte Smokrev, bourgeois homosexuel d’une grande perversité, vénère une sculpture, L’Hermès de Praxitèle, représentant un homme caressant un jeune homme. Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, Tyler, le coloc hétéro de Frankie, le héros homosexuel, couche avec des filles mineures de moins de 17 ans… mais s’autorise presque un écart avec Frankie lors d’une séance-massage. Le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso traite de la prostitution masculine, et pire que ça, de la prostitution juvénile. Davide, le héros homosexuel, n’a que 14 ans, et vend quand même son corps aux hommes. Les prostitués masculins parodient ironiquement la réalité de la pédophilie dans leurs rangs : « On ne touche pas aux petits garçons ! » dira l’un d’entre eux. Dans le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino, Oliver (la trentaine) sort avec Elio, un mineur de 17 ans : « Fais pas l’enfant. Rendez-vous à minuit. » Dans le téléfilm Fiertés (2018) de Philippe Faucon, diffusé sur Arte en mai 2018, Serge sort avec Victor, un mineur… mais ça ne l’empêche pas de prôner l’amour et la maturité de Victor devant le père de ce dernier, Charles, qui le menace de le dénoncer à la police : « Je ne me sers pas de votre fils. » Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, Nathan, le héros homosexuel, fait croire qu’il a été abusé entre l’âge de 10 à 14 ans par un prêtre pédophile de son école primaire catholique. Dans le film « Mon Père » (« Retablo », 2018) d’Álvaro Delgado Aparicio, quand Anatolia, la mère de Secundo, apprend l’homosexualité de son mari Noé, elle pense immédiatement à protéger son fils : « Si tu touches à mon fils, je te tue ! » Dans le film « Ma Vie avec John F. Donovan » (2019) de Xavier Dolan, John ironise lors d’un talk show télévisé sur sa relation épistolaire avec Rupert, un gamin de 10 ans qu’il renie publiquement : « On est faits l’un pour l’autre. »

 

Dans le téléfilm « Les Dix Petits Nègres » (2015) de Sarah Phelps, l’homosexualité est sous-jacente. William Blore, l’inspecteur, a violé dans une cellule de la prison de Dartmoor un prostitué homosexuel, James Stephen Landor, qui faisait le tapin dans les pissotières, et qu’il a fait condamner aux travaux forcés à perpétuité où il a fini ses jours : « Edward Landor était un pédéraste. Plutôt mourir que de m’approcher d’un de ces pervers ! » ; « Il était sans défense. Ce n’était qu’un gamin. »
 

Les pratiques pédophiles ne se limitent pas au monde homosexuel masculin. Les pédophiles lesbiennes ne sont pas à exclure du tableau : cf. le film « Ma Mère préfère les femmes (surtout les jeunes…) » (2001) d’Inés Paris et Daniela Fejerman, le film « Olivia » (1951) de Jacqueline Audry (avec Edwige Feuillère et Simone Simon), le film « Rome, ville ouverte » (1945) de Roberto Rossellini, le film « Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain » (2001) de Jean-Pierre Jeunet (avec la garçonne d’un certain âge, chez qui Amélie sonne à la porte par erreur), et surtout le film « Massacre pour une orgie » (1964) de Jean-Pierre Bastid. « J’avais détourné une mineure de 15 ans qui était mon élève. » (Suzanne en parlant d’Erika, dans le roman Journal de Suzanne (1991) d’Hélène de Monferrand, p. 185) ; « La jeunesse qui rayonne à chaque instant de vous, voilà ce que la Reine aime chez Sidonie. » (cf. une réplique du film « Les Adieux à la Reine » (2012) de Benoît Jacquot) ; « Vous me faites à chaque fois l’effet d’un bain de jouvence. » (la Reine Marie-Antoinette à son amante Madame de Polignac, dans le film « Les Adieux à la Reine » (2012) de Benoît Jacquot) ; « Je donnerais gros pour avoir votre âge. » (Serena Merle louchant sur la jeune Isabelle, dans le film « Portrait de femme » (1996) de Jane Campion) ; « Épousez-moi, mon bonhomme. J’étais dans la chaussure pour enfants. » (Mr Chapiro s’adressant à Vince, dans le film « L’Objet de mon affection » (1998) de Nicholas Hytner) ; etc.

 

Dans le roman The Girl On The Stairs (La Fille dans l’escalier, 2012) de Louise Welsh, le Dr Alban Mann est qualifié par Jane, l’héroïne lesbienne, de « pédophile incestueux » (p. 76)… et les faits donneront raison à Jane car Mann viole sa jeune fille Anna. Cependant, Jane, pourtant en couple avec Petra, rentre exactement dans le même jeu qu’elle dénonce en s’intéressant de trop près à Anna : « Si Maria faisait courir le bruit que Jane était une espèce de prédatrice lesbienne avec un penchant pour les adolescentes, la vie à Berlin pouvait devenir impossible. » (Jane parlant de Maria la prostituée, op. cit., p. 168) Jane est fascinée par la jeune Anna au point de la rêver au pieu avec elle : « Elle rêvait d’Anna. Elles étaient seules dans le noir, les doux cheveux de la fille retombaient sur le visage de Jane. Elle eut l’impression d’être au lit avec elle et se mit à paniquer ; ce n’était pas ce qu’elle voulait, tout allait de travers. Les lèvres de la fille se posèrent sur les siennes et elles s’embrassèrent, la langue d’Anna frémissante et insistante. Jane comprit à nouveau ce qu’elle était en train de faire et tenta de la repousser mais quelque force supérieure les collait l’une à l’autre. Elle sentait le poids du corps de la fille, la douceur de ses seins, et elle se tortilla pour se dégager, tentant désespérément de s’échapper, mais elle avait beau se tourner dans toutes les directions, elle était piégée. Elle repoussa Anna de toutes ses forces, mais sans résultat, elles étaient verrouillées l’une à l’autre, et brusquement Jane comprit ce qui les retenait là. Elles étaient scellées, l’une au-dessus de l’autre, sous le plancher de l’immeuble de derrière. » (p. 222)
 

PÉDOPHILIE 3

Film « La Mauvaise Éducation » de Pedro Almodovar


 

Même si ce n’est pas systématique, le personnage homosexuel a pu être victime d’un viol pédophile dans son enfance : « Il n’avait pas 6 ans qu’il se faisait déjà attrapé par les Arabes du côté de la Huchette. » (Mme Simpson parlant au masculin de sa fille Irina, dans la pièce L’Homosexuel ou la difficulté de s’exprimer (1967) de Copi) ; « J’préfère encore me faire tripoter par un prêtre comme mes copains cathos quand ils vont au caté. » (Laurent Spielvogel à propos du rabbin à qui il va rendre visite, dans son one-man-show Les Bijoux de famille, 2015) ; « L’écrivain qui ne cherchait qu’une aventure amoureuse, ne l’aurait pas regardé deux fois s’il n’avait pas été séduisant. » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, parlant de Goudron, l’écrivain plus âgé que lui et qui a tenté de le pervertir, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 173) ; « Il me tire à lui, je te dis, et je ne peux pas rompre l’emprise qu’il a sur moi. » (Pawel Tarnowski parlant du jeune David qui l’attire, idem, p. 175) ; « ’Tu désires l’abomination.’ Il ne pouvait y croire au début. Lui qui avait souffert des attentions de Goudron se transformait maintenant en Goudron ! Cela ne pouvait pas être vrai. Pourtant, c’était vrai ! » (Pawel Tarnowski parlant de son élan homosexuel pour le jeune David, suite à l’attachement pédophile de Goudron, idem, p. 177) ; « Ce que j’aurais fait à cette époque de ténèbres, d’autres me l’avaient fait. » (Pawel parlant du viol pédophile qu’il a subit par son mentor Goudron, idem, p. 441) ; « C’est très perturbant de découvrir le sexe comme ça. » (Joe, un homme homosexuel obèse, très anxieux et efféminé, qui a été violé par un prêtre à l’adolescence, dans le film « Spotlight » (2016) de Tom McCarthy) ; etc. Dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, R. raconte qu’il s’est fait violer par un certain Laurent, « un fils de pute qui ne voulait pas mourir seul et qui a violé sa jeunesse » (p. 71).  Dans le one-man-show Cet homme va trop loin(2011) de Jérémy Ferrari, le Père Vert, avant de devenir un curé gay et pédophile, a jadis été violé par son père et par ses profs. Dans la B.D. La Chair des pommes (2006) de Freddy Nadolny Poustochkine, le héros homo, en pleine puberté, subit la pression d’un homme pédophile pendant qu’il découvre son homosexualité.

 

PÉDOPHILIE 4

B.D. « Kang » de Copi


 

En général, le personnage homosexuel ne fait pas secret de ses élans sexuels pédophiles. « Il a fini pédophile, comme tous ces pédérastes. » (Gérard en parlant de M. Folaste, dans le one-man-show Ali au pays des merveilles (2011) d’Ali Bougheraba) ; « Et moi, je l’aime, la jeunesse. N’est-ce pas, Jean-Ba ? » (le prêtre s’adressant à son enfant de chœur de 14 ans, dans le spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons (2012) de Didier Bénureau) ; « Je découvris la douceur des regards complices de ces androgynes que sont parfois les adolescents. » (le narrateur homosexuel parlant de ses années collège dans la nouvelle « La Chaudière » (2010) d’Essobal Lenoir, pp. 18-19) ; « Ce que je préfère dans ma vie de chiotte, ce sont ces groupes de potes ados à l’apogée de leur puissance génésique […] C’est tellement excitant de voir ces petits mecs jouir sans vergogne, à côté de ces kyrielles de vieillards lubriques de trente ans. » (« le chiotte » dans la nouvelle « Mémoires d’un chiotte public » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 87) ; « Marilyn possède des instantanés où on me voit embrasser les enfants sur la bouche, dormir enlacé avec eux : elle me fait un chantage. » (le héros homo marié parlant de sa harpie de compagne, dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 77) ; « ‘Si j’osais, pensa M. Fruges, je l’embrasserais. J’adore les enfants. Celui-ci est enfermé en lui-même comme je l’étais à son âge, moi aussi. Il y a un regard d’une profonde admirable, avec, dans l’expression, quelque chose de blessé qui me plaît. » (Emmanuel Fruges face à Georges, 6 ans, dans le roman Si j’étais vous (1947) de Julien Green, p. 153) ; « Il aimait vraiment l’enfance ; c’était même ce qu’il y avait en lui de moins atteint, de moins suspect. Les dimanches de communion, les bons jours, comme on disait encore dans sa famille, alors qu’il s’agenouillait à la sainte table, il cherchait à se placer tout près d’un enfant, s’il y en avait un, afin de lui voler un peu de cet amour surnaturel dont il sentait que le petit être était l’objet inconscient ; et, ce soir, il surveillait du coin de l’œil le garçonnet qui chantonnait tout seul et dont il admirait l’innocence comme un spécialiste reconnaît et apprécie le spécimen parfaitement venu d’une espèce rare. » (Emmanuel Fruges,idem, p. 156) ; « Comme un coup de tonnerre, l’idée éclata dans son cerveau : devenir cet enfant. Il frissonna et fit instinctivement un pas en arrière. Jamais une tentation pareille n’avait fondu sur lui avec une telle violence, et il en éprouva un choc qui faillit le terrasser. Que pouvaient être les triviaux désirs de la chair auprès de cette concupiscence nouvelle ? Ses yeux se fermèrent. ‘On n’a pas le droit’, pensa-t-il. Pendant quelques secondes, il eut l’impression de grands coups portés à l’intérieur de son crâne et il mit les deux mains à ses oreilles. » (idem, p. 157) ; « Berlot, le prof de sport, si soucieux de la propreté des corps qu’il vient jusqu’aux douches donner un coup de main aux plus lents. » (Quentin Lamotta, Vincent Garbo (2010), p. 42) ; « Ton père adorait vraiment nous regarder nager à poil. » (un ami s’adressant à Daniel après le coming out posthume du père de ce dernier, dans le film « Joyeuses Funérailles » (2007) de Franz Oz) ; « Constant est d’un naturel extrêmement probe. […] Cependant, même les hommes dont le sens moral est des plus élevés sont extrêmement sensibles à l’influence des attraits physique d’autrui. L’histoire moderne, pas moins que celle de l’Antiquité, nous offre un grand nombre d’exemples terriblement éprouvants de ce à quoi je fais allusion… » (Gwendolen dans la pièce The Importance To Being Earnest, L’Importance d’être Constant (1895) d’Oscar Wilde) ; etc.

 

Dans la pièce Les Z’Héros de Branville (2009) de Jean-Christophe Moncys, Gérard a un « terrible secret » à révéler : son « attirance pour les jeunes hommes ». Dans le roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson, on entend la figure de Marcel Proust chanter les bienfaits de l’amour des jeunes garçons : « L’amour d’un homme pour une femme ne peut pas se comparer à l’amour de ce même homme pour un adolescent. L’amour pour une femme charrie tellement d’habitudes, de certitudes, de passages obligés qu’il devient rapidement quelque chose d’agréable, certes, mais qu’on maîtrise, qui n’apporte pas de réelle surprise. L’amour pour un adolescent, lui, renferme tous les émerveillements, tous les emportements ; il a cette intensité désespérée, il est menacé d’extinction à tout moment et porté au plus haut, précisément par la grâce. » (pp. 83-84) D’ailleurs, dans ce même roman, Proust vit une histoire amoureuse avec Vincent, un jeune intellectuel de seize ans, tout aussi consentant que lui, mais conscient de l’invisibilité, du confort, et de la supériorité de son statut d’éromène : « C’est plus difficile pour vous que pour moi […] de vous tenir à côté d’un jeune homme de seize ans. » (Vincent s’adressant à Proust, idem, p. 21) ; « Si la syphilis causait autant de ravages que le sida et terrorisait pareillement les pédérastes de la fin du XIXe siècle, des adolescents n’auraient certes pas enfilé de capotes pour jouer à touche-pipi ! » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « De l’usage intempestif du condom dans la pornographie » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 97) ;

 

La relation pédophile devient parfois effective, consommée. Elle sera alors très souvent euphémisée par le terme passe-partout de « couple » ou d’« amour (entre ados) ». Par exemple, dans la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand, Omar, un des personnages homosexuels, a une liaison avec un ado de seize ans. Dans le film « Tras El Cristal » (1985) d’Agustí Villaronga, un pédophile nazi paralysé vit une histoire d’amour avec le jeune infirmier s’occupant de lui. Dans le film « Mort à Venise » (1971) de Luchino Visconti, un jeu de drague ambigu s’instaure entre le vieux musicien Ashenbach (50 ans passés) et le tout jeune et blond Tadzio (14 ans). Le roman Flamand noir (2004) de Bertrand N’Guyen Matoko raconte l’histoire de pédophilie entre un curé et un jeune étudiant noir. Dans le roman Le Livre muet (2007) de Sébastien Doubinsky, le géomètre Alessandro Salomonsen vit une relation homosexuelle avec Stefano, un adolescent de 15 ans. Dans le film « Les Damnés » (1969) de Luchino Visconti, l’icône gay Helmut Berger (interprétant le personnage de Martin Essenbeck) est en réalité un pédophile ; il provoque le suicide par pendaison de la petite Lisa qu’il avait initialement attouchée et couverte de cadeaux : « Lisa, regarde ce que je t’ai apporté. Il te plaît, ce petit cheval ? Tu pourras monter dessus, puisqu’il te plaît, hein ? Il faut le caresser. Caresse-le, Lisa, il est à toi. Tu l’aimes bien ? Tu seras très gentille avec lui. Tu le soigneras bien… parce qu’il t’aime beaucoup. J’assure. » Dans le film « Rose et Noir » (2009) de Gérard Jugnot, au moment où le jeune prince Frédéric de Montmirail monte dans le carrosse de Saint Loup, le comité d’accueil qui lui est réservé par les deux mignons très efféminés Sergio et Myosothis mêle séduction et perversion (« Bonjour mon cœur… »). Dans le roman La Cité des Rats (1979) de Copi, Mimile dit qu’il est allé en taule : « La dernière fois, paraît que j’avais tué un vioque pour lui voler ses sous, la fois d’avant c’était un bambin pour le violer. » (pp. 62-63)

 

Si le personnage homosexuel renonce à la pédophilie, c’est par acquit de conscience. Quitte à en rajouter dans le rejet, il déclare que ça ne l’intéresse et ne le concerne en rien du tout. Mais c’est son mépris trop vite exposé de la jeunesse et du fantasme pédophile qui l’inculpe. « Je m’étais fait l’illusion de retrouver en vous ma propre jeunesse, mais rien en vous ne me séduit. Il y a trente ans, je vous aurais peut-être trouvé désirable, et encore je ne suis pas sûr de cela, et puis vous n’étiez qu’un nouveau-né. » (Cyrille au jeune Journaliste, dans la pièce Une Visite inopportune (1988) de Copi) ; « Je n’allais quand même pas me jeter à la poursuite de jeunes hommes dans la vingtaine, moi qui avais tellement toujours ridiculisé ceux qui sombraient dans le culte de l’éphèbe ! Mais je ne pouvais pas non plus aller contre mes goûts ! » (Jean-Marc dans le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, p. 228) Par exemple, dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, Georges, le père de famille homosexuel, est suspecté officieusement par sa femme Christelle de pédophilie : elle l’empêche d’approcher leurs propres enfants. Il s’en indigne… mais en même temps, il sors avec William, son amant secret qui a l’âge d’être son fils.

 

C’est parfois à travers le traitement fictionnel de l’homoparentalité que surgit en toile de fond le désir pédophile des personnages gays. Par exemple, dans le film « Les Joies de la famille » (2009) d’Ella Lemhagen, Göran tombe sous le charme d’un jeune délinquant au commissariat, avant de découvrir que c’est son futur fils adoptif. Dans la pièce Try (1994) de Dennis Cooper, les deux pères adoptifs homosexuels violent le petit Ziggy. Dans le roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, le couple gay Ben et Michael « homosexualisent » le petit-neveu de 7 ans de Michael, Sumter. Ils prospectent ludiquement sur ses possibles tendances homosexuelles futures (« Tu crois qu’il est des nôtres ? », p. 104). La différence des générations est complètement banalisée et niée : « L’âge n’est pas un problème. » (Michael évoquant la différence d’âge importante avec son amant Ben, idem, p. 34)

 

La présomption de désir pédophile chez le héros homosexuel n’est pas toujours avérée : elle est parfois juste un soupçon pesant sur un bouc émissaire à qui on veut charger la barque. Par exemple, dans le film « Scènes de chasse en Bavière » (1969) de Peter Fleischmann, la Bouchère a peur pour son fils Franz et accuse Abram de pédophilie. Dans le film « Les Joies de la famille » (2009) d’Ella Lemhagen, le jeune Patrik confie à un agent de police ses craintes d’avoir comme « famille d’accueil » un couple de deux « pères » homosexuels : « Si je me fais violer, ce sera de votre faute ! » Dans le film « Une petite zone de turbulence » (2009) d’Alfred Lot Olivier, le personnage de Philippe, hétérosexuel, fait une blague de mauvais goût à son futur beau-frère Matthieu qui s’inquiète de ne pas voir revenir son petit copain de Grèce pour le mariage de sa sœur : « On ne peut toujours le retrouver. On balance une photo sur internet. Ils ont retrouvé un pédophile comme ça ! »

 

PÉDOPHILIE 5

Film « 4h30 » de Royston Tan


 

Le problème du personnage homosexuel réellement pédophile, c’est qu’il ne s’identifie pas forcément comme un pédophile puisqu’en intentions, il ne considère plus l’enfant comme un être différent de lui mais comme un semblable, un individu responsable et aimant, à qui il fait la confiance de le vieillir, l’honneur de le rendre semblable à lui, à qui il peut faire l’amour, tout simplement. On lit parfois chez les héros homosexuels le désir d’aimer les enfants avec un cœur non pas humain, ni même un cœur de maman ou de papa, mais un cœur maternaliste ou paternaliste : « Le vrai problème, ce sont les enfants. La tristesse de ne pas en avoir et de ne pas pouvoir en adopter. J’ai toujours aimé les enfants. Je crois que j’aurais été une assez bonne mère. » (Tim dans le film « De la vie des marionnettes » (1980) d’Ingmar Bergman)

 

La tentation pédophile ne va pas que dans un seul sens (de l’adulte vers l’enfant) : elle peut aussi venir de l’adolescent homosexuel vers l’adulte de qui il veut se faire protéger et éduquer. Il est curieux de voir que certains jeunes homosexuels fictionnels se passionnent pour des personnages pédophiles, de qui ils prétendent se sentir très proches, ou qu’ils reconnaissent comme des jumeaux de désir. « Oui Madame, j’aime les hommes plus vieux. » (Jefferey Jordan dans son one-man-show Jefferey Jordan s’affole, 2015) Par exemple, dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, Cédric lit un roman noir parlant d’un pédophile serial killer. Dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso, la pédophilie vient du jeune homosexuel (Davide, 14 ans) vers ses amants, qu’il entraîne à la chute. Dans le film « Drift » (2002) de Quentin Lee, Léo, à la vingtaine à peine sonnée, avoue à son jeune amant Ryan, qu’il a maintenu une correspondance virtuelle soutenue avec un internaute pédophile qu’il a identifié inconsciemment comme un reflet de lui-même : « J’avais un pote, un gars de 52 ans, rencontré sur Internet, qui vivait en Iowa et qui s’attaquait à son neveu. Et pourtant, je sentais un lien viscéral avec lui… à travers les mots, les e-mails. Je m’enfermais des jours entiers pour communiquer avec lui. »

 

Quand le pas de la relation charnelle est franchie, le jeune amant n’est pas toujours choqué d’entretenir une liaison illicite avec un amant qui a l’âge d’être son père. Il croit qu’en se donnant à corps perdu à l’interdit, il vaincra ses peurs, il fera preuve de courage, il « s’assumera » pleinement en tant qu’homo, il sera initié à l’amour vrai. Par exemple, dans le roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, quand Linde, une femme mûre sortant avec Anamika, une lycéenne qui s’est fait agresser par des hommes dans un bus, est prise de remords par rapport à leur union amoureuse (« Je pense que nous devrions arrêter. Parce que tu es jeune et que je suis vieille. Parce qu’ils t’ont agressée, mais que je suis tout aussi coupable qu’eux. […]C’est à peine si tu as l’âge d’être consentante. C’est du détournement de mineur. », pp. 120-121), l’adolescente s’étonne, rechigne, et refuse la rupture conjugale. Dans le film « Quels adultes savent ! » (2003) de Jonathan Wald, Roy, le jeune héros se jette désespérément dans les bras de Maurice, un homme plus âgé que lui, pour connaître le sacrifice qui lui donnerait accès à ses fantasmes homosexuels de films pornos : après s’être fait dépuceler, il tombe de haut en découvrant qu’il a idéalisé un acte que l’adulte a, pour le coup, bâclé et banalisé.

 

PÉDOPHILE 7

Film « The Blossoming Of Maximo Oliveros » de Auraeus Solito


 

Quand j’écris que même les jeunes héros gays peuvent être pédophiles, et que la pédophilie n’est pas fondamentalement une question d’âge mais bien de désir, je ne plaisante pas du tout. Par exemple, dans la pièce Happy Birthgay Papa ! (2014) de James Cochise et Gloria Heinz, la relation homosexuelle entre Chris et Ruzy, pourtant du même âge, est mise en parallèle avec la relation d’« amour » entre le père de Chris et une petite jeunette : « À 15 ans, c’est tellement mignon, tendre. » dira ce dernier.

 

Il arrive même que le jeune héros homosexuel viole son partenaire plus âgé. Par exemple, dans le roman La Vie est un tango (1979) de Copi, Silberman se fait « bourrer » par son « beau-frère » de 14 ans dans les toilettes le jour de ses fiançailles (p. 48). Dans le film « Ausente » (« Absent », 2011) de Marco Berger, un élève drague son prof. Dans le roman La Cité des Rats (1979) du même auteur, la petite Vidvn suce le sexe de son père Mimile (p. 63). Dans le film « Krámpack » (2000) de Cesc Gay, l’adolescent Dani embrasse Gérard, le romancier quinquagénaire, sur la bouche, à la dérobée, sans que celui-ci s’y attende : « C’était bien ce que tu voulais, non ? M’embrasser ? » ; après un moment d’hésitation face à la violation implicite de l’interdit de l’inceste, l’adulte lui rend alors fougueusement son baiser. Dans le film « Sils Maria » (2014) d’Olivier Assayas, Helena est subjuguée par la « jeunesse » de Sigrid, et cette dernière en profite : leur liaison pousse Helena au suicide. Dans le film « Le Maillot de bain » (2013) de Mathilde Bayle, le jeune Rémi, 10 ans, ressent son premier émoi pour un beau papa de 35 ans, et part à sa conquête. Dans le film « Atomes » (2012) d’Arnaud Dufeys, Hugo, éducateur de 34 ans à l’internat, voit son quotidien perturbé par Jules, un adolescent provocateur qui lui fait du rentre-dedans.

 

La pédophilie peut être aussi une invention créée de toutes pièces par l’éromène qui ne veut soudainement plus assumer son attrait incestueux pour son amant plus âgé. Par exemple, dans la pièce Les Miséreuses (2011) de Christian Dupouy, Jean Valjean se fait suspecter de pédophilie par le jeune adolescent qui au départ avait essayé de le draguer : le chantage à la pédophilie paraît aussi imparable et efficace que le chantage au viol exercé par une femme sur un homme, ou le chantage au racisme d’un Homme de couleur sur un Blanc. Dans le roman Le Garçon sur la colline (1980) de Claude Brami, c’est Pascal, le jeune protagoniste, qui projette des sentiments amoureux non partagés et totalement démesurés sur l’adulte, Pierre.

 

Enfin, la pédophilie peut être réversible ou aller de paire avec l’attrait pour les personnes de son sexe plus âgées. Par exemple, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, Alexandra, femme mariée, drague sa petite voisine de 13 ans (p. 21) ; jadis, quand elle était plus jeune et en pensionnat, elle avait été jadis se réfugier dans le lit d’une grande : « Une nuit, alors que tout le monde dormait, je m’étais levée et, après avoir entrouvert le rideau qui isolait le lit de la surveillante du dortoir, je m’étais glissée sous ses draps. Dans un demi-sommeil, elle me laissa faire. Je me blottis contre elle et commençai des caresses qu’elle ne refusa pas. De son côté, ses mains faisaient de même. J’étais dans un état d’émotion qui ne se pouvait imaginer. Ses doigts se portaient déjà sur mon intime, mais, dès que sa main se posa sur mes seins, à peine plus gros que ceux d’un garçon, elle me dit d’une voix qui, bien qu’étouffée, n’appelait aucune réplique : ‘Non, va-t-en, je ne veux pas, tu es trop petite.’ » (Alexandra, la narratrice lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 225) Dans le film « Le Roi de l’évasion » (2009) d’Alain Guiraudie, Armand, 43 ans, aime normalement les hommes mûrs et les vieux. Mais il a été retrouvé nu dans un bosquet avec la jeune mineure Curly de 16 ans qu’il a violée : c’est ce qui donne à penser au flic qui l’arrête : « Le fait que vous aimiez les vieux m’incite à penser que vous aimez aussi les jeunes filles. »

 

Enfin, le fantasme pédophile ou incestueux compris dans le désir homosexuel se voit à travers la tromperie sur l’âge de certains personnages et sur le flou (volontaire ?) autour de la différence des sexes, flou entretenu dans beaucoup d’oeuvres de fiction homo-érotiques. C’est une récurrence par exemple chez Copi. « C’était une Indienne de 12 ans mais elle avait la poitrine d’une femme de 20 ans. » (Silvano – le héros qui croit avoir 70 ans alors qu’il en a 100 – en parlant de la bonne, dans le roman La Vie est un tango (1979), p. 156) L’inversion de la différence des générations est typiquement calquée sur la démarche et le discours du violeur (« Il est beaucoup plus mûr que les gars de son âge… »).

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 
PÉDOPHILIE causalité pub
 

Même si c’est tabou, un certain nombre de personnes homosexuelles ont été violées dans un contexte de pédophilie et d’adolescence. Et si elles n’ont pas été violées par des humains, elles l’ont au moins été par des images, images qui ont stimulé leurs élans pédophiles ou leur sexualité d’enfant : « Vivant dans ce monde de jeunes garçons, j’ai été initié tout naturellement. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; « Il suffit pour s’en convaincre de regarder un porno gay, certains studios (Hélix par exemple) n’emploie que des jeunes adultes mais aux corps adolescents (pas trop musclés, imberbes, visage ado, coiffure Justin Bieber, beaucoup de scènes où les garçons sont habillés – au début, évidemment – en uniforme de lycéens…) et ces films ont beaucoup de succès dans le milieu homosexuel (je dois avouer en parler en connaissance de cause). » (cf. Robin, un ami homo, dans un mail envoyé en janvier 2014) ; « Ma découverte de la sexualité, c’est d’abord au travers de photos que je l’ai faite. Des photos pornographiques que mon père cachait dans un placard et sur lesquelles j’étais tombé par hasard. Ces photos montraient des couples en train de mimer l’acte sexuel à deux ou à plusieurs : c’est à cause de ces photos que j’ai découvert la masturbation, et pour moi la sexualité s’arrêtait à cela, car je n’ai pas reçu d’éducation sexuelle de mes parents. À l’école, c’étaient les débuts de l’éducation sexuelle et ce n’est pas avec ce que l’on nous disait que j’aurais pu comprendre grand-chose… l’acte homosexuel, par contre, m’était inconnu. C’est lors de vacances scolaires que je l’ai découvert à l’âge de douze ans, avec un homme d’une trentaine d’années… Il m’a proposé de monter dans sa chambre pour me montrer quelque chose. Les choses en question, c’étaient des photos pornographiques que ce monsieur faisait venir de Suède, de Hollande, de tous ces pays qui ont une réputation de mœurs très libérales. Ces photos… il y en avait pour tous les goûts : homosexualité masculine, féminine, enfant en cours de puberté en état d’érection, et même des photos de femmes en train de ‘faire l’amour’ avec des animaux. » (Philippe, homosexuel séropositif, dans son autobiographie L’enfer est à vos portes, 1991) ; « Mon ancien camarade de classe me met sous les yeux deux photos de Janson, cinquième et quatrième, toute la classe. […] Moi, mince, l’air silencieux, innocent d’une innocence évidente. Cela m’a ému, car depuis… Et tout à coup, le visage de Durieu que j’avais oublié et qui m’a arraché un cri : un visage d’ange résolu. Silencieux aussi celui-là, on ne le voyait pas, il disparaissait, je ne pouvais pas m’empêcher de ressentir sa beauté comme une brûlure, une brûlure incompréhensible. Un jour, alors que l’heure avait sonné et que la classe était vide, nous nous sommes trouvés seuls l’un devant l’autre, moi sur l’estrade, lui devant vers moi ce visage sérieux qui me hantait, et tout à coup, avec une douceur qui me fait encore battre le cœur, il prit ma main et y posa ses lèvres. Je la lui laissai tant qu’il voulut et, au bout d’un instant, il la laissa tomber lentement, prit sa gibecière et s’en alla. Pas un mot n’avait été dit dont je me souvienne, mais pendant ce court moment il y eut entre nous une sorte d’adoration l’un pour l’autre, muette et déchirante. Ce fut mon tout premier amour, le plus brûlant peut-être, celui qui me ravagea le cœur pour la première fois, et hier je l’ai ressenti de nouveau devant cette image, j’ai eu de nouveau treize ans, en proie à l’atroce amour dont je ne pouvais rien savoir de ce qu’il voulait dire. » (Julien Green, L’Arc-en-ciel, Journal 1981-1984, avril 1981, pp. 23-24) ; « C’est comme la nécrophilie : c’est un péché. Tout comme l’alcoolisme ou la toxicomanie. L’homosexualité, c’est la même chose. L’homosexualité ne conduit pas seulement à la pédophilie. Mais aussi au meurtre, à la dépression et à la toxicomanie. Les statistiques le prouvent. » (Petras Gražulis, président du groupe politique lituanien d’extrême droite Ordre et Justice, dans le documentaire « Homo et alors ?!? » (2015) de Peter Gehardt) ; etc. Par exemple, dans le roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, Ednar, le héros, vit trois viols pédophiles avant de se dire homosexuel à l’âge adulte : « J’avais peut-être eu tort de lui avoir caché tous mes maux y compris mes agressions pédophiles. » (Ednar par rapport à sa mère, dans le roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 94) C’est ce qui est vraiment arrivé à l’auteur. Dans le documentaire « Vivant ! » (2014) de Vincent Boujon, Mateo, homosexuel et séropositif, raconte qu’il a été violé à l’âge de 15 ans, dans un bar gay, par « un type qui avait mis une saloperie dans son verre ». Il avoue que sur le coup qu’il ne se souvenait plus de rien.

 

PÉDOPHILIE 8

Oscar Wilde dans un cabaret de Paris (dessin par Jean Matet)


 

Les personnes à la fois homosexuelles et pédophiles ont de tout temps existé. En voici quelques exemples connus : Gilles de Rays, le criminel Haarmann d’Hanovre, Roger Peyrefitte, Michael Jackson, Henri de Montherlant, Jean Delannoy, Benjamin Britten, Luchino Visconti, Pier Paolo Pasolini, René Schérer, Justin Fashanu, Mariano Ramírez, Álvaro Retana, Antonio de Hoyos, Jacques Fersen, Horation Alger, James Rennie, Terrence Patrick Bean, le Dr John Money, etc. Michel Caignet fut poursuivi en 1997 dans une affaire de diffusion de films pornographiques pédophiles. John Baptist von Schweitzer séduit un garçon de 14 ans. L’acteur nord-américain Kevin Spacey, homosexuel, a harcelé un enfant de 14 ans. Même si le phénomène ne prend pas une ampleur démesurée (« Dans le monde des homosexuels, les pédérastes sont d’affreux malades dont les cas sont fort rares. » déclare Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 93), il n’est pas non plus isolé ou à ignorer. Par exemple, le romancier britannique Oscar Wilde couchait avec des mineurs. Le pasteur nord-américain Eddie Long est homosexuel et pédophile. L’écrivain français Tony Duvert dévoile son obsession pour les enfants dans tous ses romans ; il est d’ailleurs un pédophile notoire. Dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, Jean-Luc, jeune homme de 27 ans, témoigne de son parcours homosexuel tumultueux : il enchaîne les partenaires de tous les âges, et raconte même qu’il fut surpris avec un gamin de 12 ans. Dans l’autobiographie Folies-Fantômes (1997) d’Alfredo Arias, Jacques, le vieux couturier, a pour modèle et amant le jeune cadet de 16 ans, Pedro : « Il s’immobilisa, interloqué devant cette nudité inattendue. ‘C’est un rêve. C’est un ange descendu sur terre’, soupira le vieux couturier. » (p. 261) Les poésies de Luis Cernuda chantent les charmes des jeunes adolescents. Le juriste néerlandais Edward Brongersma est pédophile : il a même écrit un livre sur le sujet, La Pédophilie (1959-1964), où il explique que la pédophilie basée sur le « consentement » est tolérable. Guy Hocquenghem rédige Les Petits Garçons (1983) pour justifier la pédophilie. Yukio Mishima se met à défendre la pédérastie présente dans la tradition samouraï. André Gide plaide en faveur de la pédérastie dans son essai Corydon (1924), et tente de faire valoir qu’il existe des « pédérastes normaux », autrement dit non-efféminés. Dans les Jardins de Rome, il se livre sans complexe à des actes pédophiles en disant qu’il n’a rien à faire de la morale : « Mon Prix Nobel me couvre… » (André Gide cité par Marcel Jouhandeau dans l’émission « Apostrophe », Antenne 2, le 22 décembre 1978) En 1949, Pier Paolo Pasolini, à l’âge de 27 ans, est impliqué dans une affaire de détournement de mineurs avec 3 élèves. Dans son « Domaine des Esprits » où il habitait, le chanteur homo Charles Trénet accueillait des mineurs pour des surprises-parties sexuelles. Il a été pris en flagrant délit avec 4 jeunes Allemands de 19-20 ans. Il fut condamné à la prison pour attentat aux mœurs, à Aix (France). Jadis, le fou chantant avait vécu ce qu’il a fait subir ensuite aux plus jeunes : en 1928, à Perpignan, à 15 ans, il rencontra Albert Bausil, 50 ans, poète, comédien, directeur de journal, personnalité incontournable du Roussillon, qui est devenu son Pygmalion ; entre l’homme et l’enfant s’est noué une relation amoureuse, qui devint sexuelle (Selon Jean Edouard Barbe, dans sa préface du Coq catalan, Charlet Trénet rencontre Alfred Bausil en 1926, ils avaient donc 13 et 55 ans). Je vous renvoie également à cet article.

 

Selon Karl Heinrich Ulrichs (1825-1895), « l’Uraniste a droit à une satisfaction de ses désirs sexuels naturels et comme cela ne peut se faire qu’avec l’autorisation d’un jeune homme, cette autorisation, dans de telles conditions, non seulement est un acte moralement permissible, mais il peut être aussi un acte de charité chrétienne, et même, sous certaines circonstances, un devoir. Ulrichs va jusqu’à comparer la situation du garçon sollicité par l’Uraniste à celle d’une femme esseulée qui donne naissance à un enfant avec l’aide de deux soldats rencontrés en chemin qui, fortuitement, lui servent de sages-femmes. La pauvre a été contrainte d’exposer sa nudité la plus intime à leurs yeux. De la même façon, Ulrichs en est sûr, même si le jeune partenaire de l’Uraniste éprouve une aversion instinctuelle à l’encontre de la relation homosexuelle, il reconnaît par la raison que la pulsion amoureuse de l’Uraniste est innée, et qu’elle doit aboutir. En cette circonstance, on plaidera l’absence de péché et la pureté. » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), pp. 86-87) ; « Il faut se rendre compte que l’amour des jeunes garçons à cette époque n’était pas le tabou absolu qu’il est devenu aujourd’hui. Deux personnages de la haute société, Elisar von Kuppfer et Eduard von Mayer (1872-1960), avaient bâti une philosophie et un style de vie basés sur l’esthétique pédérastique. Dans le ‘Paradis de Minusio’, situé à Locarno, en Suisse, quatre-vingts-quatre éphèbes nus s’exhibaient dans des poses variées au sein du Sanctuarium Artis Elisarion. » (idem, p. 160) ; etc.
 

La pédophilie n’est pas nécessairement la rencontre d’un adulte et d’un enfant. Elle peut tout à faite être la rencontre de deux adolescents vivant la génitalité qui n’est pas de leur âge. « C’est pendant mon adolescence que j’ai vécu les ‘mauvaises habitudes’. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) Par exemple, Charles Trénet a été trouvé nu quand il avait 15 ans, en train de s’amuser avec son camarade Max Barnes dans un jardin de l’Hôtel Mustafa Ier.
 

PÉDOPHILIE 9

Karol Szymanowski et Boris Kochno


 

Certaines personnes homosexuelles ont ouvertement parlé de leurs fantasmes pédophiles : « Moi, en filmant, je suis un pervers polymorphe ! Je veux me mettre dans la peau et le désir de l’homme qui aime les petites filles… » (François Ozon, dans l’article « La Vérité des Corps » de Philippe Rouyer et Claire Vassé, sur la revue Positif, n°521/522, juillet/août 2004, p. 42) ; « Naturellement, comme la plupart des hommes, je suis attiré par les jeunes mâles adolescents. » (Gore Vidal, Palimpseste – Mémoires (1995), p. 55) ; « Un jour, le démon de midi ou de onze heures entre en jeu, un gamin parle et c’est le scandale, plus ou moins vite étouffé : ‘M. Un-Tel, le coiffeur (ou l’antiquaire) de la Place-aux-Huiles… Qui aurait cru ça ? … Si gentil… si doux… Surpris avec un petit garçon de douze ans !’ … et papati… et patata… » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, racontant sa propre expérience pédophile, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 103) ; « J’ai un faible pour les jeunes garçons. » (Peter Gehardt, ironique, dans son documentaire « Homo et alors ?!? », 2015) ; etc.

 

L’auteur colombien Fernando Vallejo a d’ailleurs parfaitement compris la correspondance étroite qui existe entre différence des sexes (et donc sa violation : l’homosexualité) et différence des générations (et sa violation : la pédophilie), quand il s’amuse à détourner dans un jeu de mots l’adjectif « bisexuel » : « Je suis bisexuel : j’aime les mecs et les enfants… »

 

Dans l’iconographie homo-érotique, la représentation de la pédophilie saute aux yeux. Les dessins pornographiques de Roger Payne mettent fréquemment en scène des ébats sexuels entre des hommes mûrs et des adolescents. Concernant le shota japonais, c’est un genre de mangas représentant des gamins de 10 ans – montrés comme consentants et conscients de ce qu’ils font – dans des scènes homosexuelles avec des adultes : cette réalité de la pédophilie homosexuelle est occultée par les traductions, mais sur les dessins, on voit bien que les personnages n’ont pas plus de 13 ans.

 

Dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz, qui retrace différents parcours de personnes homosexuelles, on apprend par exemple que Pierrot le papy fermier homosexuel a vécu sa première relation homo à 12 ans avec un homme de 40 ans : ils se sont caressés mutuellement ; Christian, le dandy homosexuel quinquagénaire dit avoir aimé toucher (chez les Jésuites) le sexe des hommes plus âgés que lui ; Thérèse, femme lesbienne de 70 ans, vit une « passion » destructrice avec Emmanuelle, de 27 ans de moins qu’elle.

 

Par ailleurs, le tourisme sexuel de par le monde est un phénomène réel et peu publicitaire pour les personnes homosexuelles, parce qu’on peut compter dans leurs rangs un certain nombre de clients pédophiles : « En Algérie, en Tunisie, la pédérastie est de pratique courante. Les jeunes cireurs maures se prostituent aux citadins. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 150)

 

PÉDOPHILIE 10

André Gide


 

Alors comment s’arrange la communauté homosexuelle pour cacher ou ignorer ce qui se passe en son sein à ce sujet ? C’est très simple : en général, elle joue l’offusquée ou l’amoureuse tolérante. La violence de la pédophilie est amortie par les bons sentiments, par une idéalisation des amitiés d’adolescence. L’homme pédophile, adulte comme pré-pubère, invoque, pour justifier l’acte pédosexuel, la beauté des sentiments, la tendresse, l’éducation, l’ouverture au monde, la protection, l’expérience, le don de soi, etc. C’est comme si l’éraste ( = l’adulte) et l’éromène ( = le jeune) ne formaient, en désir, qu’une seule et même personne, un homme-enfant fantasmatique : l’un parle à la place de l’autre, se vieillit et se rajeunit tout à la fois. « Encore une fois, on peut faire confiance à l’enfant pour dire si oui ou non il a subi une violence. » (Michel Foucault, « La Loi de la pudeur », 4 avril 1978, cité dans le recueil  Dits et Écrits II, 1976-1988 (2001), p. 776) Dans l’essai Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas (p. 85), Armand de Fluvià souligne une différence – importante pour lui, même si en vérité elle est peu évidente… – entre la pédophilie (que par ailleurs il condamne et qu’il différencie de la « pédérastie », uniquement applicable au contexte de la Grèce antique) et l’éphébophilie (il trouve qu’un enfant de 14 ans amoureux d’un adulte, s’il est sûr de ses sentiments et de sa sexualité, est tout à fait libre de se mettre en couple avec un homme mûr attiré par « sa grâce juvénile »). L’acte pédophile englobe aussi deux adolescents qui vivent ensemble une expérience génitale à un âge où le don entier des corps est prématuré et violent, y compris s’il est vécu dans l’innocence de la gravité de l’acte.

 

PÉDOPHILIE 11

 

De fil en aiguille, c’est ainsi qu’on se retrouve parfois avec d’anciennes victimes d’inceste ou d’actes pédophiles qui, une fois adultes, ratifient l’« amour homosexuel » comme elles ratifieraient l’« amour pédophile », et partent même à la recherche de petits jeunes, en reproduisant l’ancien viol presque à l’identique. Souvent, l’homme pédophile est une ancienne victime de pédophilie : « Comment lui dire ce que j’avais en moi. Il était si jeune, je ne voulais pas lui faire ce qu’on m’avait fait. Inscrire le doute. Pourtant je le désirais. Je perdais pieds, haletant d’envie d’aimer. » (Gaël-Laurent Tilium au sujet de son amant Sébastien, dans son autobiographie Recto/Verso (2007), p. 161) ; « Nous fîmes un détour par le collège de son enfance. […] Nous fûmes reçus par le proviseur qui se souvenait de Didier et qui nous permit de visiter l’internat. Je vis qu’il voulait surtout me montrer le dortoir. Des dizaines de petits lits blancs étaient alignés dans une immense salle sombre. Il me désigna le sien puis la petite chambre du surveillant, près de la porte. Il fit des allusions à ce qui se passait la nuit dans ces dortoirs. Je compris alors, sans qu’il le dise clairement, qu’il avait subi ici la même chose que moi. Mais étrangement, il était enjoué et avait l’air de trouver que c’était un bon souvenir. » (Christophe Tison parlant de Didier, l’homme qui a abusé de lui, dans son autobiographie Il m’aimait (2004) de Christophe Tison, p. 59) Par exemple, Aleister Crowley, abusé dans sa jeunesse par un ecclésiastique de Trinity College, va, dès sa sortie de Cambridge, publier un recueil de poésies érotiques, White Stains (Taches blanches, 1898), dans lequel il fait l’apologie de la pédophilie. La transformation mentale de l’abus pédophile en amour vrai ou anodin est un mécanisme souvent mis en œuvre dans la volonté d’effacement de la violence. « Avant, je ne voyais pas tellement ce qui m’était arrivé comme un abus. Je voyais ça comme une relation homosexuelle entre un adulte et un enfant. C’est récent que je perçois qu’il pouvait y avoir un abus là-dedans, même s’il n’y a pas eu de violence. Moi, j’étais plus ou moins consentant. » (Denis, 31 ans, victime d’abus à l’âge de 8 ans, et qui a ensuite abusé de son petit cousin une fois arrivé à l’âge adulte, cité dans l’essai Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, p. 163) On entend parfois ce genre de défense de la pédophilie de la part de certaines personnes homosexuelles : il faudrait permettre aux hommes pédérastes de laisser libre cours à leur désir pédophile car « l’absence de toute sexualité conduit beaucoup plus aux abus sexuels » (Hugo sur le site http://homophobie.free.fr, consulté en octobre 2003).

 

Alors j’entends d’ici certaines personnes homosexuelles ou gays friendly s’insurger de me voir souligner ce qui pour eux ne sont que des « exceptions », et me rétorquer que la grande majorité des personnes homosexuelles se savent exclusivement attirées par des adultes voire des hommes très mûrs. Par exemple, Jean-Louis Bory (professeur de littérature de métier) disait en boutade que ce ne n’étaient pas ses élèves qui devaient craindre ses avances, mais plutôt les pères de ses élèves ! Je pourrais le plagier dans les termes, étant moi aussi prof, et attiré par les papas. J’ai, pour ma part, la « chance » que mon homosexualité ne m’oriente que vers les hommes de mon âge, et surtout plus âgés que moi : jamais je n’ai été tenté par un de mes étudiants lycéens. Y compris mes élèves de terminale ne me paraissent pas assez cuits… 😉 Cependant, j’ai l’honnêteté de reconnaître que même moi, le gars attiré exclusivement par les hommes de minimum 30 ans, je suis cependant habité, de par mon désir homosexuel, par un élan pédophile, car à mon sens, je pourrais flatter (et j’ai déjà flatté par le passé) des hommes mûrs pédophiles et subjugués par ma jeunesse. Je crois également que l’homme pédophile n’est pas pédophile tout seul, que la pédophilie est une relation et un acte ; non des personnes clairement identifiables, avec un âge et un sexe précis. L’attraction pour les hommes plus âgés que moi a quelque chose du désir incestueux ou « inversement pédophile », si je puis dire. Et cette tendance pédophile qui me pousse vers les hommes mûrs s’inversera logiquement dès que je prendrai de l’âge.

 

Quand je tombe sur certains passages de l’autobiographie d’Eddy Bellegueule (qui a vécu un acte à la fois pédophile et homosexuel avec ses cousins, à un âge – 10 ans – qui l’inscrit dans l’âge mineur), je me dis que ça ne fait pas l’ombre d’un doute que le désir pédophile et le désir d’hommes mûrs s’entrecroisent : « Pendant que mon cousin prenait possession de mon corps, Bruno faisait de même avec Fabien, à quelques centimètres de nous. Je sentais l’odeur des corps nus et j’aurais voulu rendre palpable cette odeur, pouvoir la manger pour la rendre plus réelle. J’aurais voulu qu’elle soit un poison qui m’aurait enivré et fait disparaître, avec comme ultime souvenir celui de l’odeur de ces corps, déjà marqués par leur classe sociale, laissant déjà apparaître sous une peau fine et laiteuse d’enfants leur musculature d’adultes en devenir, aussi développée à force d’aider les pères à couper et stocker le bois, à force d’activité physique, des parties de football interminables et recommencées chaque jour. » (Eddy Bellegueule dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 153)

 

Parce que cela arrange tout le monde, on a tendance socialement à dérelationnaliser la pédophilie, à la cantonner uniquement du côté des personnes adultes. Certes, celles-ci sont censées être plus conscientes de leurs actes, plus libres, plus responsables, que les mineurs avec qui elles vivent une relation sexuelle et sentimentale. Mais ne perdons pas de vue qu’une personne mineure est, dans une moindre mesure, dotée de désir et de liberté aussi ; c’est un être libre en devenir. On ne comprendra véritablement la pédophilie que si on ne la réduit pas à une personne en particulier, qu’on n’en fait pas une ligne blanche traçant un trait bien net départageant les victimes éternelles d’un côté et les bourreaux éternels de l’autre, que si on l’envisage comme une relation, que si on en parle comme un désir universel non-systématiquement acté. Il est à ce titre fascinant de voir comment, sous couvert d’amour homosexuel, la victime et le bourreau d’un acte pédophile se font imparfaitement miroir, et répondent au même désir. Je prends soin de dire que cet écho existe mais n’est pas systématique (en d’autres termes, je ne justifie absolument pas le discours qui laisse entendre que l’enfant serait aussi pervers que l’adulte qui l’entraîne dans la pédophilie, et que, « quelque part » il l’aurait inconsciemment « bien cherché »). Cependant, reconnaître à la victime d’abus pédophiles sa capacité à reproduire ou non à l’âge adulte ces mêmes abus, c’est finalement défendre sa liberté, son évolution, et briser toute chaîne de déterminismes en ce qui la concerne. Plus on enferme une personne blessée sexuellement dans son enfance en éternelle victime, plus on l’encourage à devenir plus tard bourreau sans qu’elle ne s’en rende compte.

 

Le viol pédophile n’est pas unilatéral. Comme il est une relation impliquant deux individus, il peut être cultivé aussi par les personnes qu’on désigne et qui s’auto-désignent comme « victimes », ou comme « jeunes ». « À l’âge de 15 ans, se souvient Karl Heinrich Ulrichs (1825-1895), il eut sa première éjaculation nocturne. À cet âge, il aurait été séduit par un homme de trente ans. Il était très attiré par des soldats de 20 à 22 ans, dont il faisait le portrait en secret, ce qui suffisait à l’enflammer. Selon lui, l’homosexualité était prédominante dans l’armée allemande. » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 79) ; Clairement, je connais certains mineurs qui viennent « chercher » les adultes, qui les encouragent à la luxure, qui réveillent en eux des penchants pédophiles. « Ma première relation sexuelle, je l’ai eue, je devais avoir 15-16 ans, j’étais plus jeune. Il y avait une dame comme vous, que ma mère avait fait venir. Elle préparait une maîtrise d’espagnol et d’anglais et ma mère m’avait fait donner des cours particuliers par cette fille, elle s’appelait Dorothée. Elle était lesbienne. J’étais attirée par elle, mais j’étais attirée aussi par une collègue de ma mère, mais je me méfiais comme de la peste des gens qui la fréquentaient, parce que j’avais peur qu’elle me fasse chanter, qu’ils disent : ‘Je vais le dire à ta mère, etc.’ Avec Dorothée, ça a pu être possible, car j’étais en terrain de confiance, je savais que si ma mère l’avait su, elle aurait eu les pires ennuis, elle aurait pu être attaquée pour détournement de mineure. C’est surtout aussi ce qui m’a mise en confiance, parce que si elle en parlait, elle pouvait se mettre en danger. » (Viviane, femme lesbienne de 38 ans, dans l’essai Se dire lesbienne : Vie de couple, sexualité, représentation de soi (2010) de Natacha Chetcuti, p. 63) Quoi qu’il en soit, même si l’adulte peut être en général jugé plus sévèrement à cause d’actes de pédophilie, il n’en reste pas moins que les torts seront toujours partagés entre l’adolescent et l’adulte. Parce que tout être humain est libre, qu’il peut évoluer, et qu’il n’est pas indéfiniment victime.

 

Nous ne devrions pas négliger la place qu’occupent la pornographie d’une part, et les rapports sexuels entre adolescents d’autre part, dans l’encouragement à la pédophilie homosexuelle, au lieu de mener une chasse aux sorcières en aval, du côté des adultes. J’ai reçu récemment un mail d’un ami pédo-psychiatre qui allait dans ce sens : « J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer des pédophiles adultes. Je dois avouer avec regret et tristesse que les rares cas qu’il m’a été donné de rencontrer m’ont paru tout à fait irrécupérables tant le désir chez eux était envahissant et au delà de toute ressource thérapeutique, fut-elle chimique.Par contre, il m’a été donné de rencontrer à de nombreuses reprises des adolescents ayant abusé de plus jeunes. Parmi ces derniers, très peu avaient été eux-mêmes abusés. Tous avaient conscience d’avoir transgressé un interdit. Une très large majorité avait abusé d’un enfant du même sexe. Souvent dans l’entourage familial, dans 2 cas il s’agissait de demi-frères issus du père (alors que la fratrie matri-linéaire avait été respectée). Un accès précoce à la pornographie avait presque toujours été le facteur favorisant du passage à l’acte. Concernant les victimes (et au risque d’en faire hurler certains) je rejoindrais l’avis d’un certains nombre de psychanalystes leur sentiment vis à vis de l’abuseur était presque toujours ambivalent, le plateau de la balance pouvant pencher du côté d’une recherche active de répétition de l’acte auprès de l’abuseur). Il va de soi que l’ambivalence est fonction du lien affectif préalablement établi entre l’auteur et la victime. Certaines victimes m’ont avoué ne pas avoir réellement compris en quoi elles avaient été victimes ou abusées. Ce sont généralement ces dernières qui ont cherché plus tard à reproduire ce qu’elles avaient subi avec d’autres enfants. Pas plus tard que la semaine dernière, un patient que je suis depuis de nombreuses années m’a avoué avec beaucoup de culpabilité qu’après avoir été abusé à l’âge de 6ans par un adolescent dans une institution où il avait été placé (faits révélés à l’entourage d’une façon banalisante et qui n’avait donné lieu à aucune suite), il avait 4 ans plus tard, à l’émergence de sa puberté harcelé un de ses frères ainés et eu pendant plusieurs mois des relations avec ce dernier qui avait fini par y mettre fin. Face à de telles situations, il me semble néanmoins primordial de garder les idées claires vis à vis des patients : même si la victime a pu avoir une part de responsabilité dans les faits, la plus grande part de responsabilité revient toujours au plus âgé, plus averti et théoriquement plus conscient du caractère transgressif de l’acte. J’en viens maintenant à la façon dont cette ambivalence, et parfois cette complaisance de la victime peut être récupérée pour servir de justification au discours pédophile. Il me semble que ce type de discours se fonde sur une conception tout à fait erronée de la liberté de l’autre et en particulier de l’enfant. L’acte libre (qui ne saurait être simplement faire ce que l’on veut) relève d’une volonté pleinement consciente et prête à en assumer pleinement les conséquences (ce que l’on n’est pas en mesure d’attendre d’un enfant ou d’un adolescent dont la maturité affective et psychologique n’est pas suffisante). Pire encore, la réalisation d’un tel acte a fréquemment pour conséquence d’entrainer une dépendance affective ou sexuelle grave qui entraveront pour longtemps sa liberté. »

 

Si l’acte pédophile n’est pas nécessairement source de tentation/séduction pour la grande majorité des personnes homosexuelles (qui savent où elles en sont au niveau de leurs envies et de leurs attirances), il arrive en revanche qu’il soit redouté, ou même qu’il se cristallise en fantasme/peur chez beaucoup d’entre elles.

 

Pour ma part, j’ai rencontré dernièrement un ami homo de soixante ans, bien conservé, qui m’a avoué malicieusement qu’il « avait cette particularité d’aimer les jeunes. » Comme j’étais en train de rédiger cet article que vous lisez à présent, je lui ai demandé de préciser jusqu’à quel âge il était capable de descendre concernant sa recherche amoureuse. Il m’a avoué en riant que « grâce à Dieu », il n’était jamais encore sorti avec des mineurs : « Je ne reproduis pas ce que j’ai vécu dans mon enfance. » (je précise qu’il s’est fait violer à trois reprises dans son enfance, par un adulte différent à chaque fois). Dans son cas, la pédophilie reste donc confinée sur le terrain des fantasmes et des désirs non-actés. Mais je crois qu’elle est quand même présente en lui, de manière larvée. D’ailleurs, sa première expérience homosexuelle, celle qui selon lui reste la plus marquante et la plus indétrônable puisqu’il la qualifie encore d’« amour véritable », cinquante ans après, c’est précisément une expérience pédophile qui remonte à ses 14 ans, avec un autre jeune du même âge.

 

Je l’écris noir sur blanc parce que je l’ai entendu de mes propres oreilles : autant les actes pédophiles sont/ont l’air minoritaires dans la communauté homosexuelle, autant les fantasmes pédophiles sont pour le coup très répandus : « Coco devait avoir cinquante-six ou cinquante-sept ans, mais l’idée d’inceste avec un fils fictif remplissait son imaginaire érotique. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 94) ; « J’ai enseigné pendant quatre ans à des adolescents et aucun ne m’a appelé au secours. Ensuite, j’ai été nommée en École Normale où tous mes élèves étaient majeurs. Mais je me suis souvent demandé ce que j’aurais fait si j’avais été sollicitée par des collégiens ou des lycéens à la dérive, voire désespérés. » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), p. 97) Lors de ses émissions radiophoniques « Homo Micro » sur RFPP, l’animateur Brahim Naït-Balk fait souvent allusion à sa préférence sexuelle pour les jeunes éphèbes, même si sa morale personnelle réprime l’aveu d’élans pédophiles : « J’ai l’impression que pour moi le temps s’est arrêté à l’adolescence. Aujourd’hui, j’ai 45 ans et je suis systématiquement séduit par des très jeunes hommes d’environ une vingtaine d’années, comme si moi-même j’étais resté fixé à cet âge-là. » (pp. 47-48) écrit-il dans son autobiographie Un Homo dans la Cité (2009) ; « Étant donné qu’il m’arrivait de m’occuper d’enfants, j’étais obsédé par la crainte qu’ils me soupçonnent de pédophilie. C’était absurde, mais je ne pouvais m’empêcher d’y penser. » (idem, p. 65) ; « Pour compliquer davantage ma vie, il se trouve que je ne suis attiré que par les hommes beaucoup plus jeunes que moi. Dès qu’ils ont dépassé 25 ans, ils ne me plaisent plus. » (idem, p. 110) ; etc.

 

On peut mettre du côté du fantasme pédophile toutes les démarches actuelles de la communauté homosexuelle pour baisser l’âge de la majorité sexuelle, ses appels pressants aux coming out d’adolescents encore indéterminés dans leur orientation sexuelle (sous prétexte de prévention des suicides). Quand nous applaudissons à l’homosexualité des jeunes enfants et que nous leur facilitons l’accès au monde de la génitalité qui n’est pas encore le leur, nous cautionnons d’une certaine manière la pédophilie, que nous le voulions ou non. Je vous renvoie à la campagne visant à diffuser le dessin-animé pro-gay « Le Baiser de la Lune » (2010) de Sébastien Watel dans les écoles primaires en France ; aux vidéos circulant sur internet de jeunes ados nord-américains qui se sont suicidés, qu’on présente comme des « gays confirmés » et des martyrs de « l’homophobie » (exemple : Jamey Rodemeyer, 14 ans), ainsi qu’à la campagne « It Gets Better » aux USA ; aux articles « Le Petit Garçon qui voulait se déguiser en Daphné de Scoubidou » sur le numéro de Yagg du 8 novembre 2010 et « Angleterre : Transsexuel à 12 ans » sur l’Aleloo Magazine du 25 septembre 2011.

 

PÉDOPHILIE 12

Film « Teorema » de Luchino Visconti


 

Les personnes homosexuelles jouent et rient souvent de ce lien entre homosexualité et pédophilie, même si elles se montrent extrêmement susceptibles et agressives dès qu’il est traité par d’autres personnes qu’elles. Elles seules se donnent le droit d’en rire ; et il faut qu’il soit échangé sous cape, en comité restreint. Par exemple, dans le film « ¿ Qué He Hecho Yo Para Merecer Esto ? » (1984) de Pedro Almodóvar, la scène de la consultation chez le dentiste pédophile (célibataire, sans enfant, particulièrement complaisant avec Miguel, le jeune fils de Gloria) est savoureuse et explicite. On en rit d’autant plus qu’elle est l’œuvre d’un cinéaste homosexuel. Mais elle pourrait être jugée « homophobe » si elle venait d’un créateur non-homosexuel. Les caricatures d’homosexuels pédophiles fictionnels sont régulièrement créées et imitées par les membres de la communauté homosexuelle pour faire diversion sur leurs fantasmes pédophiles existants. Mais ont-ils conscience qu’ils donnent des bâtons pour se faire battre ? À l’évidence, non. L’auto-parodie, mâtinée de militance agressive, ne fait que confirmer le nature pédophile des désirs homosexuel et hétérosexuel.

 

Par exemple, le chanteur homosexuel Nicolas Bacchus se définit lui-même ironiquement comme un pédophile (cf. l’article « Identité Nationale : Une Chanson francophobe écrite par un pédophile »). Sur son blog, il causalise le lien entre homosexualité et pédophilie pour mieux attribuer cette caricature aux « homophobes » non-homosexuels (alors que c’est quand même lui qui la fait !), et noyer le poisson de la pédophilie homosexuelle en soutenant de manière assurée que « les » homosexuels ne sont ni plus ni moins pédophiles que les autres : « Il y a ce fameux fantasme du couple de pédés pédophiles qui ‘enfile’ sa progéniture. Le gamin ou la gamine atterrissant chez un couple homosexuel risque de tomber sur des détraqués. Le risque sans doute existe. Comme il existe pour n’importe quel enfant d’avoir un père pédophile et une mère complice. C’est triste à dire, mais les homosexuels sont des hétérosexuels comme les autres. » Je ne suis d’accord qu’avec sa dernière phrase ; et cependant, je ne dis certainement pas que le risque de passage à l’acte pédophile soit le même pour tout être humain. Bien au contraire. Je postule que ce risque est plus fort chez les personnes à sexualité blessée : autrement dit les individus homosexuels ET les individus hétéros-bisexuels (ne formant qu’une seule et même personne, au final) ; pas les personnes non-hétérosexuelles et non-homosexuelles.

 

PÉDOPHILIE 13

Film « Mysterious Skin » de Gregg Araki


 

Ce sont les personnes homosexuelles qui font elles-mêmes implicitement le lien de causalité entre homosexualité et pédophilie… pour ensuite dire que ce sont ceux qui ont identifié leur manège qui ont l’esprit mal tourné. Par exemple, je suis allé voir dernièrement la comédie musicale « Chantons dans le placard » (2011) de Michel Heim, qui retrace un panorama des chansons françaises parlant de manière plus ou moins voilée d’homosexualité ; et une place spéciale a été consacrée à la chanson de Guy Béart « Le Monsieur et le Jeune Homme », louant in extremis la beauté de la relation père-fils : l’ambiguïté homosexuelle a été cultivée quasiment jusqu’au bout, ET par l’auteur, ET par les comédiens homosexuels qui ont repris sa chanson (« Un monsieur aimait un jeune homme. Surtout, ne nous affolons pas : regardons autour de nous comme chaque amour va son propre pas. […]. Un monsieur aimait un jeune homme. Cela n’a rien que de banal. Les habitués des hippodromes font des folies pour un cheval. Ai-je dit qu’ils vivaient ensemble, ensemble une même maison ? […] Un monsieur aimait un jeune homme. Méprisant toute précaution ils allaient dans les vélodromes : le vélo, c’était leur passion. […] Un monsieur aimait un jeune homme, il lui payait tous ses cahiers. Le monsieur était économe, le jeune était écolier. Il lui payait aussi ses livres, lui donnait parfois quelque argent. […] Un monsieur aimait un jeune homme, ils marchaient la main dans la main […]. Ils échangèrent un baiser. Où croyez-vous que nous en sommes ? Jusqu’où nous conduisent nos pas ? Un monsieur aimait un jeune homme. Il est si doux d’être papa ! ») Il est donc bluffant de voir une nouvelle fois l’origine de l’homophobie. Car elle provient des personnes qui se disent attaquées par les clichés qu’elles créent et qu’elles diabolisent.

 

Minitel

Planche « Minitel » dans la B.D. « Le Monde fantastique des gays » de Copi

 

Pour conclure, je tiens à souligner que les personnes homosexuelles âgées n’ont pas le monopole du ressenti du désir pédophile. Tout récemment, j’ai eu l’occasion de lier amitié avec un garçon de mon âge, homosexuel, et qui m’a révélé qu’il était malgré lui attiré par des mineurs. Grâce à son humour, à sa distance par rapport à l’homosexualité (il ne la pratique plus et essaie de vivre la continence), j’ai pu comprendre que pédophilie et personne équilibrée pouvait très bien se marier ensemble… même si j’imagine que leur alliance ne se fait pas sans combat ! J’admire les personnes pédophiles qui ne passent pas à l’acte.

 
 

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Code n°146 – « Plus que naturel » (sous-code : Extra-terrestre)

Plus que naturel

« Plus que naturel »

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

J’vois pas où est le problème. C’est la nature ! C’est pas un choix !

 

Le désir homosexuel : naturel ou contre-nature ? inné ou acquis ? normal ou anormal ? bon ou mauvais ? Aucun des huit ! Juste « ni le meilleur ni le plus vrai ». Juste sur-naturel (en intentions) ET anti-naturel (dans les actes).

Vidéo-clip de la chanson « You Make Me Feel (Mighty Real)! » de Sylvester (important pour comprendre ce code)

 
 

Le naturel trafiqué et intentionnel

 

Depuis un certain temps déjà, les opposants au « couple » homosexuel disent que ce type d’amour est mauvais parce qu’il serait « contre-nature » ? Mais de quelle nature parlent-ils ? De la grande (humanisante, incarnée mais aussi divinement humaine) ou de la petite (les ressentis corporels, les sens, certains comportements animaliers) ? S’il s’agit de la petite nature humaine, ou même de la Nature en tant qu’environnement biophysique, on peut dire que le désir homosexuel semble naturel puisqu’en général il s’impose assez tôt et de manière évidente à la personne qui le ressent, qu’il n’est a priori pas un choix, qu’il peut être senti très tôt par un assez grand nombre d’individus humains (les adolescents en priorité), et que l’acte homosexuel est pratiqué par bien des espèces animales (même si, dans le cas des animaux, plus qu’un désir, il s’agit d’un instinct, d’une pulsion non libre). Cependant, c’est d’une part quand on reconnaît la spécificité et la grandeur des Hommes par rapport au reste des autres animaux, et d’autre part qu’on voit d’où est né le désir homosexuel (c’est-à-dire des images déréalisées, du copiage des hommes-objets et des femmes-objets) et vers quels artifices et attaques du corps il conduit, qu’on constate que l’homosexualité est à la fois négativement naturelle – la Nature non domptée par l’Homme est un désordre, le règne de la pulsion – et contre-naturelle dans le sens où elle a tendance à s’inspirer de la grande Nature (l’Amour) pour La détourner à des fins artistico-scientifico-amoureuses réifiantes. C’est pourquoi j’ai pour habitude de dire que, même si au final le désir homosexuel, l’amour homosexuel, et les actes homosexuels sont plus anti-naturels que naturels, ils sont en intentions surnaturels, « plus que naturels ». Ils sont en partie naturalisés par la sincérité. D’ailleurs, en écoutant les personnes homosexuelles elles-mêmes définir leur identité homo ou leur(s) amour(s), on entend qu’elles emploient souvent les périphrases superlatives « très naturel » ou « plus que naturel ». Cette naturalisation incomplète du désir homosexuel par le sentiment, l’art, certaines lois juridiques, la science (je dis incomplète car le désir homosexuel, tout profondément ancré qu’il soit, ne définit pas une personne dans son entier ; et un duo homosexuel reconnu par certaines législations comme une famille n’en devient pas pour autant procréatif ; et une personne qui se fait opérer pour changer de sexe ne gomme pas complètement sa sexuation ; et beaucoup de « couples » homosexuels qui disent s’aimer « pour de vrai », naturellement et librement, ne s’aiment pas complètement. On pourrait multiplier à foison les exemples) fait que je ne trouve les actes homosexuels ni naturels, ni totalement contre-nature, ni normaux, ni anormaux, ni banals. Ils tendent vers la violence parce qu’ils s’éloignent de la Nature et de la Réalité, non de Les fuir sciemment, mais de Les fuir en Les sacralisant. Le désir homosexuel rêve de s’accaparer la Nature pour Lui dérober sa place, pour devenir Elle. Même si, au final, les actes homosexuels attaquent concrètement la Nature, on constate le paradoxe suivant : les personnes homosexuelles sont en général folles de Nature. Et c’est cette folie qui devient anti-naturelle : adorer à l’excès, ce n’est pas aimer.

 

Dans son article « Les Structures de péché », dans l’ouvrage collectif Les Attaques du démon contre l’Église (2009), le Père Samuel est très clair : même s’il décrit les actes peccamineux comme destructeurs de la Nature dans les faits, il leur reconnaît quand même leurs intentions écolos et pro-Nature : « Au lieu de devenir comme des dieux par la grâce, c’est vouloir être comme des dieux à partir d’une exaltation de la Nature. » (p.70) C’est parce que les personnes homosexuelles idolâtrent la Nature – parce qu’elles en ont peur et en sont jalouse – que bien souvent elles posent des actes contre-Nature.

 

Quand je parle de violence ou de viol de la Nature par l’homosexualité, je me base sur ce que les personnes homosexuelles disent elles-mêmes. Pour que leur désir homosexuel devienne Réalité et acquiert la force d’amour ou d’identité qu’il n’a pas pleinement, beaucoup d’entre elles pensent qu’il leur faut forcer la Nature pour en « extraire ce toujours-plus de réalité », comme l’écrivent Deleuze et Guattari dans leur Anti-Œdipe (1973), la violenter un peu. Christophe Honoré, dans son Livre pour enfants (2005), parle même de « profaner le réel ».

 

Film "Aime et fais ce que tu veux" de Malgorzata Szumowska

Film « Aime et fais ce que tu veux » de Malgorzata Szumowska


 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Amoureux », « Bobo », « Médecines parallèles », « Planeur », « Maquillage », « Animaux empaillés », « Jardins synthétiques », « « Je suis différent ! » », « Ennemi de la Nature », « Magicien », « Substitut d’identité », « Homosexualité, vérité télévisuelle ? », à la partie « Désir homosexuel considéré comme un dieu » du code « Désir désordonné », à la partie « Accident » du code « Passion pour les catastrophes », à la partie « Futurisme » du code « Fresques historiques », et à la partie « Paradoxe du libertin » du code « Liaisons dangereuses », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

 

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FICTION

 

a) Je suis surnaturel et mon désir homosexuel est tout-puissant, plus que naturel :

 

Vidéo-clip de la chanson "Si j'avais au moins" de Mylène Farmer

Vidéo-clip de la chanson « Si j’avais au moins » de Mylène Farmer


 

Il est très souvent fait référence au naturel et au « plus que naturel » dans les créations homo-érotiques : cf. le film « Lo Más Natural » (1990) de Josefina Molina, le roman Des gens (extra) ordinaires (1983) de Joanna Russ, le film « A Very Natural Thing » (« Une chose très naturelle », 1974) de Christopher Larkin, la chanson « You Make Me Feel Mighty Real » de Sylvester (reprise par Jimmy Somerville des Bronski Beat), la chanson « S.U.R.N.A.T.U.R.E.L. » de Peter Kitsch, le film « Twee Vrouwen » (« Deux fois femme », 1985) de George Sluizer, le film « Une vie normale » (1996) d’Angela Pope, le film « Normal Love » (1963) de Jack Smith, le roman Gaieté parisienne (1996) de Benoît Duteurtre (avec la reconstitution pseudo « champêtre » de l’Auvergne pour la Fête de la Batteuse), le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus (avec le chapitre intitulé « Seconde nature »), le film « The Natural History Of Parking Lots » (1990) d’Everett Lewis, le film « The Normal Heart » (2013) de Ryan Murphy (avec Brad Pitt), le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant (où on entend la chanson de Sylvester), etc.

 

On assiste régulièrement à une personnification mélancolico-esthétisante de la Nature. Le héros homo/bobo se met à faire parler les choses, les éléments naturels, les objets, comme les mamies qui s’expriment à la place de leurs plantes vertes ou de leurs chiens : « Autour de vous, le bourg défile à toute vitesse. Tu fixes les tours de brique et de silex du château de Dieppe. On dirait qu’elles te disent au revoir. » (Félix, le héros homo du roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 23) ; « Autour de toi, la nature prend des notes. » (idem, p. 100) La Nature est envisagée comme un miroir narcissique embellissant vers lequel il est possible de s’abandonner, comme un amant gémellaire qui comprend tout (extase panthéiste bobo…) : « Je vais comme les gens de rien vers le destin. […] une brindille dans le vent, une goutte d’eau dans l’océan. » (cf. la chanson « Boulevard des Rêves » de Stéphane Corbin) Le héros homosexuel se confond même avec Elle (ou plutôt avec l’image qu’il s’En fait) ; « Moi, mon rêve, ce serait un mec proche de la Nature. » (François, le héros homo du one-man-show Hétéro-kit (2011) de Yann Mercanton). Dans le film « Vita et Virginia » (2019) de Chanya Button, Virginia Woolf écrit en 1929 une autobiographie, Orlando, où elle dit que les deux choses essentielles bien supérieures à l’Amour sont « les chiens et la Nature ».

 

Le héros homosexuel a tendance à confondre « sa » nature propre – qui peut très souvent se réduire à un ressenti d’auto-persuasion, être le fruit de ses fantasmes – avec « la » Nature, objective et mystérieuse, en particulier dès qu’il s’agit de son désir homosexuel : « Lutter contre ma nature, c’est ça qui serait contre-nature. » (un des protagonistes homosexuels de la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel) ; « À chacun sa nature. » (cf. la chanson « Je suis gay » de Samy Messaoud) ; « On y est pour rien Bryan, on est nés comme ça, on n’a pas choisi. » (Kévin s’adressant à son amant Bryan, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 323). Un jugement moral est généralement apposé à la naturalisation et à l’essentialisation arbitraire de l’homosexualité : « Je t’aime. Tu es plus normal que n’importe quel salaud assis autour de cette table. » (la mère de Ben à son fils homo, dans le film « The Family Stone », « Esprit de famille » (2005), de Thomas Bezucha) ; « Je suis aussi réel que vous. » (Danny s’adressant à Zach dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza) ; « Des mecs qui se font des pipes, qui s’enfilent, qui partouzent. C’est pas choquant, c’est la nature. » (Francis, le héros homosexuel du film « Le Fils préféré » (1993) de Nicole Garcia) Dans le film « Jagdszenen Aus Niederbayern » (« Scènes de chasse en Bavière », 1968) de Peter Fleischmann, quand Rovo, l’un des deux héros homos, demande à sa mère ce que c’est qu’une « pédale », elle lui répond : « C’est les premières tomates. »

 

Le désir homosexuel est posé par comme une évidence chimique ET surnaturelle. Avec l’idée que l’amour aurait réuni deux âmes jumelles sans que celles-ci n’y puissent rien : cf. le film « Elena » (2010) de Nicole Conn, le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza, la chanson « Les Fleurs de l’interdit » d’Étienne Daho, etc. Dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch (2015), en jouant avec l’homophobie avec les homosapiens, Fabien, le héros homosexuel, dit que les homos sont plus originels au genre humain que les hétéros : « Vous avez déjà entendu parler des hétérosapiens ? Non. Nous sommes donc à l’origine de l’Humanité, nous les homosapiens. »

 

Certains héros homos se prennent pour les héritiers naturels d’une puissance/espèce surnaturelle. « Le paysan du Cantal rencontre même des extra-terrestres : ‘Oh ! un Noir ?!’ ; ‘Oh ! un Arabe ?!’ ; ‘Aaaah !!!, un pédé ?!?’ J’avais l’impression, moi aussi, d’être un extra-terrestre. » (Jefferey Jordan dans son one-man-show Jefferey Jordan s’affole, 2015) Par exemple, on entend dans leur discours la croyance en un « sixième sens » homosexuel. « Tu viens d’ailleurs, c’est évident ! » (Bryan s’adressant à son amant Kévin, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 212) ; « Est-ce que tout le monde est gay ? Est-ce que je suis dans la Quatrième Dimension ??? » (Emily, la femme bafouée, dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz) ; etc.

 

Ce n’est pas un hasard si la thématique des extra-terrestres est couramment traitée dans les fictions homo-érotiques (parfois même, il arrive qu’ils soient identifiés explicitement comme homosexuels) : cf. la pièce Le Gang des Potiches (dans laquelle Nina, l’héroïne lesbienne, est comparée à E.T. l’extra-terrestre), le film « Œdipe N + 1 » (2001) d’Éric Rognard, le film « Bug » (2002) d’Arnault Labaronne, le film « Hey, Happy ! » (2001) de Noam Gonick, le film « Le Cas d’O » (2003) d’Olivier Ciappa, le film « L’Attaque de la Moussaka géante » (1999) de P. H. Koutras, le film « I Married A Monster From Outer Space » (1958) de Gene Fowler Jr (avec l’extra-terrestre gay), le film « Choujue Dengchang » (2001) de Cui Zi’en, le roman La Cité des Rats (1979) de Copi (avec la Reine des Rats qui possède des pouvoirs surnaturels), le film « ¿Qué He Hecho Yo Para Merecer Esto ? » (« Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? », 1984) de Pedro Almodóvar (avec la gamine qui commande aux ascenseurs et qui crée des catastrophes à distance), la chanson « Extraterrestre » de Philippe Katherine et Arielle Dombasle, le film « Les deux martiennes » (2006) d’Yvette Neliaz, la B.D. Pressions & Impressions (2007) de Didier Eberlé (Martial, le héros homophobe, compare les homos à des extra-terrestres), la pièce La Nuit de Madame Lucienne (1986) de Copi (racontant une aventure intergalactique), le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza, etc. « À moins d’être enlevée par des extra-terrestres, je me demande ce que je viens faire dans ce trou ! » (Carole, l’héroïne lesbienne perdue en campagne, dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini) Par exemple, dans le film « Codependent Lesbian Space Alien Seeks Same » (« Extraterrestre lesbienne codépendante cherche de même », 2011) de Madeleine Olnek, nous suivons les aventures, les mésaventures et les expériences de trois femmes extraterrestres venues de la planète Zots, envoyées en mission sur Terre pour se débarrasser des émotions romantiques qui sont considérées comme toxiques sur leur planète). Dans la pièce Soixante Degrés (2016) de Jean Franco et Jérôme Paza, Rémi, le héros homosexuel, écoute sa radio portative et un flash-infos parlant furtivement des extra-terrestres. Dans le one-(wo)-man show Désespérément fabuleuses : One Travelo And Schizo Show (2013) du travesti M to F David Forgit, Mémé Huguette a tout de l’androgyne immatériel asexué/sursexué : elle se décrit d’ailleurs comme une « sorcière », une « extra-terrestre » (« E.T. »), capable de passer d’un corps à l’autre (« N’oubliez jamais ça : En chacun de nous sommeille une mémé comme moi. ») : « Je suis bisexuelle. Bisexuée. Je porte les deux sexes. J’ai été envoyée par des extra-terrestres. » Dans le film « Le Cinquième Élement » (1997) de Luc Besson, le personnage de Leeloo représente bien l’extra-terrestre mutique, fantasque et efféminé, suggérant l’homosexualité. Dans certains films (comme « Kaboom » (2010) de Gregg Araki, ou encore le film « L’Homme qui venait d’ailleurs » (1976) de Nicolas Roeg, le vidéo-clip de la chanson « Thriller » de Michael Jackson, etc.), le héros homosexuel se retrouve dans le lit d’un amant extra-terrestre qui lui veut du mal : « C’est génial. J’ai encore jamais fait l’amour avec un martien ! » (le client du bar, Vincent, s’adressant à Steeve, son futur assassin, dans le film « Cruising », « La Chasse » (1980) de William Friedkin). Dans le film « Ma Vie avec John F. Donovan » (2019) de Xavier Dolan, Rupert, le jeune héros homo de 10 ans, est maltraité à l’école. Ses camarades (notamment Cédric) lui disent qu’il vient de la « planète gay ». Dans l’épisode 3 de la saison 1 de la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, l’Inquisiteur extraterrestre de la B.D. de Lily fait son coming out : « ‘Je suis gay !’ dit l’Inquisiteur. »

 

Le héros homosexuel a tendance à proclamer fièrement son originalité, son identité homosexuelle « plus que normale ». Ce « Je suis plus que normal » répond en réalité à un « Je suis anormal » qui l’a précédé : « Je suis différente de toi, de toutes les autres filles. J’suis pas normal. » (Tania l’héroïne lesbienne de la pièce Ma double vie (2009) de Stéphane Mitchell) ; « Tout le monde sait que je ne suis pas normal ! » (« L. » dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi) ; « Adolphe Blanc était l’anormal le plus normal de tous les hommes. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), p. 458) ; « Et si ce qu’il faut, c’est que tu sois originale, je m’arrangerai pour que tu puisses l’être. » (Amy qui veut bien jouer à la lesbienne avec sa meilleure amie Karma pour lui faire plaisir et lui faire gagner de la popularité dans leur lycée, dans la série Faking It (2014) de Dana Min Goodman et Julia Wolov, l’épisode 1 « Couple d’amies » de la saison 1) ; etc. Par exemple, dans le film « Freeheld » (« Free Love », 2015) de Peter Sollett, le militant homosexuel Steven Goldstein prononce avec provocation son prénom en soulignant « avec un V majuscule comme Very Gay !« . Le trop-plein d’assurance cache en général chez le protagoniste homosensible un trop-peu de confiance en soi.

 

Dans les fictions, la surcharge de nature conférée au désir homosexuel le désigne bizarrement comme un élan artificiel. D’ailleurs, excès et homosexualité sont souvent mariés dans les superlatifs : « C’est encore moi. C’est encore plus moi. » (le héros homosexuel en parlant de son coming out, dans le film « Komma Ut », « Coming Out » (2011) de Jerry Carlsson) ; « C’était tellement naturel ! » (Florence en parlant de sa première relation sexuelle lesbienne, dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) ; « Ça me semblait contre-nature. Mais au fond, ça ne l’était pas du tout. » (Leopold, le héros homosexuel racontant sa première expérience homo, dans la pièce Gouttes dans l’océan (1997) de Rainer Werner Fassbinder) ; « Michael […] Ce garçon superhomosexuel est tombé dans le piège des femmes. » (la voix narrative du roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 142) ; « Avec un mec, c’est chaque fois la première fois… Encore plus. » (Franck, le héros homosexuel de la pièce Mon Amour (2009) d’Emmanuel Adely) ; « C’était un amour plus pur que ce que j’avais vécu avant. » (Jules, le héros homosexuel parlant de sa relation avec Quentin, qui succède à ses aventures hétérosexuelles, dans la pièce Les Sex Friends de Quentin (2013) de Cyrille Étourneau) ; « Le futur sera bien plus que parfait. » (cf. la chanson « Réévolution » d’Étienne Daho) ; « Je ne crois pas à l’union permanente entre un homme et une femme. […] Déboulonnons cet idéal d’amour et de mariage. Voyons plus grand. Je crois en une relation supplémentaire, parfaite, entre un homme et une femme. Supplémentaire au mariage. » (Alan Bates dans le film « Love » (1969) de Ken Russell) ; « Au-delà du sexe et des lois, je t’aime. […] Au-delà de ce qu’on nomme Nature, je t’aime. » (Lord Enrique dans le roman Contradanza (1977) de Francisco Ors, cité dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 283)

 
 

b) Une seconde nature, travaillée par l’art, la science, le sentiment, la spiritualité :

Élie Kakou en attachée de presse

Élie Kakou en attachée de presse


 

Dans le discours de beaucoup de créateurs homosexuels, plus une chose ou une personne devient artificielle, plus on lui décerne la Palme du Plus que Naturel : « Sa beauté indiscutable se passait de l’intelligence. L’élégance avec laquelle elle portait un corsage entièrement brodé de diamants sous une hermine et une toque en plumes d’oiseau de paradis pour monter les escaliers de l’Opéra, la faisait paraître d’un naturel parfait chez les figurants de la jet society. » (la description de Maria-José, le personnage transsexuel M to F de la nouvelle « Le Travesti et le Corbeau » (1983) de Copi, p. 32) ; « Chez moi, tout est naturel. » (un homme passé par le billot et le bistouri des chirurgiens esthétiques, dans le one-man-show Changez d’air (2011) de Philippe Mistral) ; « Moi c’est naturel. » (l’attachée de presse en parlant de sa teinture de cheveux, dans le spectacle comique Élie Kakou au Point Virgule (1992) d’Élie Kakou) ; « Le Hairspray, c’est moi ! » (Corny Collins, le présentateur efféminé vantant les mérites de la marque de brumisateurs et de laque pour les cheveux, dans la comédie musicale Hairspray (2011) de John Waters) ; « Merci la régie, je remercie mon metteur en scène et mon chirurgien esthétique… Ah ben non, vous ne pensez pas qu’on est aussi superbe au naturel quand même… » (Lise dans la pièce La Fesse cachée (2010) de Jérémy Patinier) ; « Jessica, je crois qu’elle est un petit peu trop féminine à mon goût. » (Jean-Louis par rapport à son meilleur ami trans M to F Jessica, dans la pièce Y a comme un X (2012) de David Sauvage) ; etc. Dans la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy, la plage virtuelle qu’est « Paris Plage » est présentée comme LE lieu gay par excellence. Dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud, le docteur Blaise Poppyx, homosexuel, va implanter des faux pectoraux et des poils sur le fiancé de Gatal. Plus tard, le Père 1 apprend au fiancé de son fils à concevoir par clonage une souris pour faire ensuite de même avec un humain.

 

Dans le one-man-show Gérard, comme le prénom (2011) de Laurent Gérard, le héros homosexuel évoque ses multiples séances d’UV (« Évidemment, ça fait bronzage naturel. »), le bleaching de ses dents, ses visites précoces chez les relookeurs (« À 18 ans, j’allais me faire des soins en institut de beauté. »), son addiction à la salle de muscu, le fait qu’il se fasse blondir, l’artillerie de ses crèmes de nuit, etc. Tout cela vise à prouver son homosexualité latente refoulée.

 

Dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini, la Nature est mise en avant, et dès le départ. Et paradoxalement, c’est le voyage de Delphine, l’héroïne campagnarde, à Paris pour vivre son homosexualité au grand jour, qui fait dire à Antoine, un compagnon d’enfance et de terroir de Delphine : « T’as changé. Tu fais plus femme. »
 

Dans le film « Todo Sobre Mi Madre » (« Tout sur ma mère », 1998) de Pedro Almodóvar, Agrado, le personnage transsexuel M to F, au moment de se présenter à un public venu voir une pièce de théâtre annulée, se montre sous toutes ses coutures, passant en revue les multiples parties de son corps qui ont été modifiées à prix d’or par la chirurgie esthétique : « En plus d’être agréable, je suis TRÈS authentique. » Il conclut ironiquement/désespérément son exposé sur les avantages indéniables de la nature intentionnelle, par une phrase très Walt Disney « L’important, c’est de croire fort en ses rêves, et ils se réaliseront » : « Une personne est d’autant plus authentique qu’elle ressemble à ce qu’elle a toujours rêvé d’être intensément. »

 

Surtout chez les personnages travestis ou transsexuels, on passe, par rapport à l’objet de désir (= la femme-objet ; ou l’homme-objet), de la comparaison, à l’identification, pour finir par un dépassement-substitution (de la différence des sexes par exemple, de la réalité de la sexuation, de l’amour) : « Je suis comme une femme. Je suis une femme. Je suis mieux qu’une femme. » (Frédéric Longbois, le travesti M to F du film « La Chatte à deux têtes » (2002) de Jacques Nolot) ; « Je suis plus fille que tu ne peux l’imaginer ! » (Dadou, l’héroïne lesbienne de la pièce Qui aime bien trahit bien ! (2008) de Vincent Delboy) ; « Soyez plus que vous n’étiez. Vous n’en serez que plus homme. » (Lady Macbeth s’adressant à son mari, dans la pièce Macbeth (1623) de William Shakespeare) ; « Ahhh… la femme… elle ne sait pas ce que c’est que d’être La Femme ! » (Michael, un des personnages homosexuels du one-man-show Comme son nom l’indique (2008) de Laurent Lafitte) ; « Chéri, je suis plus homme que tu ne l’as jamais été et plus femme que celles que tu auras jamais. » (Antonio Fargas dans le film « Car Wash » (1976) de Michael Schultz) Un surpassement – enthousiasmant en théorie mais peu réaliste et humble – du genre humain est imposé : « Il ne sera pas un homme ! Il ne sera fille ni garçon ! Je le sais, il est la somme de toutes les additions ! » (Lou parlant de son bébé arrivant au monde, dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; etc.

 

Film "Huit femmes" de François Ozon

Film « Huit femmes » de François Ozon


 

On nous donne à croire que par l’art, le maquillage, le sentiment, ou la science, la Nature va être dépassée, sublimée, « plus Elle-même qu’Elle-même » : « Nous ne subissons pas la Nature. Nous l’avons transcendée. » (Julien, le héros homosexuel de la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener) ; « Il n’y a pas à dire, Jioseppe [le sculpteur] a vraiment un don, qui lui permet d’aller au-delà même de la représentation vraie, pour toucher l’idéal. » (Jean-Philippe Vest, Le Musée des amours lointaines (2008), p. 10) ; « Il ne se considère pas comme un simple imitateur de nature. » (idem, p. 11) ; « C’est à ce moment de l’histoire de l’humanité [l’époque de Dibutades, la Grèce Antique] que nous sommes passés d’un art purement imitateur de la nature à l’art tel que vous l’avez connu depuis, celui qui transcende cette même nature. » (idem, p. 368) Par exemple, dans la pièce Un Lit pour trois (2010) d’Ivan Tournel et Mylène Chaouat, Catherine, l’héroïne lesbienne, travaille sur des matières déformables.

 

Selon certains « créateurs du Réel » homosexuels, l’art permettrait l’émergence du « plus que naturel », c’est-à-dire qu’il produirait une solution chimique qui mêlerait d’une manière indiscernable et « puissante » le complètement faux et le totalement vrai (comme l’illustre ce dialogue de l’Acte 1 de la pièce Parano : N’ayez pas peur, ce n’est que du théâtre (2011) de Jérémy Patinier) :

 

Personnage 1 – « Tout est faux, mon costume, mes cheveux (montre sa perruque), mon accent, ma voix, tout est travaillé, ce n’est pas vrai…

Personnage 2 – Si.

Personnage 1 – Ah bon ?

Personnage 2 – C’est vrai, tout est vrai, parce que la fiction c’est une forme de vérité. »

 
 

Sur le terrain des sentiments, on assiste au même procédé : sont mises en avant les sincérités émotionnelles des amants homosexuels fictionnels, sont scénarisées leurs résistances à la faisabilité de leur « couple » (des exigences d’amour que l’on voit rarement dans la réalité concrète entre personnes homosexuelles réelles), pour prouver une authenticité d’amour, pour montrer que les personnes homosexuelles ne sont pas des « filles faciles », que l’amour homo est plus fort que toutes les adversités, que les sentiments commandent au Réel : « Excuse-moi. J’peux pas te donner c’que tu veux. Pas ici… pas comme ça… » (Benjamin refusant d’embrasser et de coucher avec Vincent le premier soir, dans le téléfilm « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve) ; « J’veux pas. Pas ici. Pas comme ça. » (Cédric se dérobant à Laurent dans le film « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure)

 
 

c) Un dépassement transcendant/violent de la Nature (au nom du naturel pourtant !) est effectué :

Certains personnages homosexuels construisent sous nos yeux la nature humaine, comme si celle-ci était faite en papier mâché : « Le vieil ami Tarzan a tout juste fini de se construire un enfant avec un bon tronc d’arbre, des lianes, un singe et des feuilles en matière plastique collées ensemble une à une. » (Copi, Un Livre blanc (2002), p. 102) Mais le résultat de cette prétention à la création de la Nature est souvent raté, puisqu’évidemment, ils ne sont pas Dieu. Par exemple, dans le film « On ne choisit pas sa famille » (2011) de Christian Clavier, l’histoire d’homoparentalité commence comme par hasard par la teinture de César (Christian Clavier justement) qui est « trop rouge » parce qu’il est sorti précipitamment de chez le coiffeur. Dans le film « Gun Hill Road » (2011) de Rashaad Ernesto Green, Michael se pique aux hormones pour prendre une apparence naturelle de femme… mais sa vie sentimentale et familiale se révèle un désastre.

 

Le héros homosexuel n’est pas réellement au service de la Nature qu’il adore. Il prétend la mettre sous verre pour la fuir ET la posséder totalitairement : « Depuis longtemps, Jason n’était plus capable d’apprécier le spectacle de la nature pour lui-même. En bon dandy féru de décadence, et ayant entretenu son raffinement avec le soin maniaque que l’on prend à s’occuper d’un bonzaï, il était saturé de culture. Un flot de références picturales ou littéraires venait faire écran à toute impression spontanée, et spécifier la teneur même de son émotion. C’est ainsi que la mer, à l’horizon, lui parut avoir revêtu son plus beau bleu Klein. […] La transparence de l’air lui rappela quelque ciel italien de Corot. Quant aux hortensias qui exhibaient avec une joyeuse fierté leurs gros pompons roses, bleus et mauves, ils semblaient sortis du costume d’Arlequin d’une fête galante de Nicolas Lancret. » (Jason, le héros homosexuel du roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 31) ; « Dans son obsession du contrôle il avait besoin de prévoir l’imprévisible jusque dans ses moindres détails. » (idem, p. 77)

 

Une prestidigitation de Nature s’opère. Pendant que ses compagnons ont le dos tourné, le héros homosexuel prend le naturel, le trafique à sa façon pour lui enlever toutes les aspérités qui gênent ses propres fantasmes de toute-puissance ; puis la nouvelle Nature est remise sur l’étalage, comme si de rien n’était. Et gare à ceux qui détecteraient la contrefaçon et qui par conséquent identifieraient son orgueil de s’être pris pour Dieu ! En toute logique, le naturel nouvellement proposé s’annonce à coup d’injonctions et d’impératifs… « Liberté des corps, égalité des sexes (c’est moi qui prend la mesure), fraternité et sonorité ! Soyez vous-même, réveillez vos sens ! Ne dites jamais la première chose qui vous vient par la tête, c’est toujours de la fatalité, un réflexe… Soyez naturel, dites la deuxième ! Vous verrez, la deuxième chose qui vous vient à l’esprit, c’est souvent, le corps… » (la « folle » militante dans la pièce La Fesse cachée (2010) de Jérémy Patinier) ; « On n’est jamais trop pédé ! » (Benjamin, homosexuel, dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit) ; etc.

 

Le danger de défendre une nature « plus que naturelle » ou un amour « plus que naturel », c’est bien sûr l’éloignement du Réel. Je prendrai l’exemple de l’amour lesbien entre Stephen et Mary relaté par Marguerite Radclyffe Hall dans son roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) pour essayer de me faire comprendre. On lit chez les protagonistes une obsession pour la Nature : « Elles menaient une vie naturelle, une vie qui leur semblait à elles parfaitement naturelle. » (Stephen, l’héroïne lesbienne, et sa compagne Mary, p. 393) ; « Elle leur semblait étrange, et pourtant toute naturelle, cette ardente et nouvelle réalisation, qui comportait quelque chose de magnifique et d’insistant, dépassant presque le cycle de leur volonté. Leur amour apparaissait à Mary et à Stephen comme quelque chose d’aussi primitif que la Nature elle-même. » (idem, p. 411) ; « Elles semblaient regarder droit dans les yeux un amour transformé… un amour surnaturel, désincarné. » (p. 422) Plus tard dans le roman, le « couple » lesbien déchante d’avoir défier la vraie Nature : « Dans des relations telles que celles de Mary et de Stephen, la Nature doit payer le prix de ses expériences. » (p. 441) On se rend compte que la recherche de naturel chez Stephen a pour origine un refus d’elle-même et de sa nature sexuée, ainsi que la jalousie : « Stephen détestait Roger Antrim, et cette aversion s’augmentait d’un sentiment d’envie des plus humiliants. Car, en dépit de ses imperfections, elle enviait au jeune Roger ses lourds et forts brodequins, ses cheveux ras et sa veste d’Eton ; elle lui enviait son droit de grimper aux arbres, de jouer au cricket et au football : son droit d’être parfaitement naturel ; elle lui enviait par-dessus tout son admirable conviction qu’être un garçon constituait, dans la vie, un privilège. » (Stephen, idem, p. 63)

 

La « Nature » récupérée/taillée par le personnage homo n’est pas si naturelle, apaisante, et innocente que cela : « Je me demande si on ne déforme pas la réalité pour lui faire dire ce qu’elle n’est pas. » (Tom s’adressant à son amant Bryan par rapport à leur relation, dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis) ; « Il a une beauté naturelle peu naturelle. » (Harold par rapport au jeune et beau Tex, dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin) ; « C’était la première fois qu’Ednar faisait l’amour ; enfin un ‘câlin.’ Quoi de plus naturel pour un jeune homme de seize ans, si le prétendant n’était pas un copain de son âge rencontré par hasard un soir sur la plage ! Mais voilà, une fois ce premier ‘rapport sexuel’ consommé, il lui procura plus de dégoût que de plaisir. » (Jean-Claude Janvier-Modeste, Un Fils différent (2011), p. 19) Le détournement de Nature à travers la création d’une hyper-Nature peut même être la source de grands tourments et frustrations… puisque quoi de pire que de courir après un amour immatériel, qui ne s’incarne pas pleinement, et qui ne se laisse pas toucher ?

 

On découvre dans certaines fictions homo-érotiques que l’invocation excessive de la Nature – et dans le même mouvement la sacralisation de la « nature » homosexuelle – cache en réalité une violation de Celle-ci et de l’Homme (cf. le film « Geniune Rape » (1987) d’Hisayasu Sato). « De tout temps, j’ai toujours eu envie d’avouer mon homosexualité, mais je ne trouvais pas d’explications pour dire pourquoi j’étais homosexuel. Je suis homosexuel, cela ne se justifie pas, et c’est très bien ainsi. D’ailleurs, on ne s’excuse pas de ce qu’on est naturellement. » (Ednar, le héros homosexuel ayant subi dans son enfance trois viols pédophiles, dans le roman semi-autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 116) ; « À cet instant, je compris que ma nature ‘romantique’ me porterait naturellement à toutes les cruautés et que, de toutes celles qui existaient, contrairement à ce que l’on pensait, elle était parmi les plus redoutables, puisqu’en exagérant tout de sentiments elle rendait l’être humain capable de passer du plus grand des attachements à la plus grande indifférence. » (Alexandra, la narratrice lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 50) ; « Il me semblait maintenant que toute transgression des règles habituelles pouvait rendre en plaisir ce qu’elle avait volé au naturel. » (idem, p. 110) ; etc. Par exemple, dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa ? (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, Géraldine, la bourgeoise « maquillée comme une voiture volée », reproche à sa belle-sœur Vanessa de « se laisser aller question féminité » : « À force d’être naturelle, on en oublie sa féminité. »

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Je suis surnaturel et mon désir homosexuel est tout-puissant, plus que naturel :

Il est souvent fait référence au naturel et au « plus que naturel » dans les discours des militants homosexuels : je vous renvoie au documentaire « Enough Man » (2004) de Luke Woodward. Beaucoup de réseaux sociaux LGBT ou de noms associatifs vont dans le sens de l’essentialisation superlative (donc identitaire et amoureuse) du désir homosexuel : cf. le programme Ipergay , les titres-bidon des associations inventées par Xavier Bongibault (« Plus gay sans mariage », « Gays pour la vie »), etc. Si on refait un bon en arrière dans le temps, on peut penser, sous l’Allemagne nazie, au mouvement Wandervogel et « leur proximité authentique avec la nature » (Philippe Simonnot, Le Rose et le Brun (2015), p. 134), le « Naturprozess » dont parle Hans Blüher.

 

Les personnes homosexuelles ont tendance à confondre « leur » nature propre – qui peut très souvent se réduire à un ressenti d’auto-persuasion, être le fruit de leurs fantasmes – avec « la » Nature, objective et mystérieuse, en particulier dès qu’il s’agit de leur désir homosexuel. « Tout individu doit jouir de sa vérité, de sa nature, de sa liberté. » (Jean-Louis Bory au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 6 mai 1976) ; « J’ai décidé de vivre selon ma nature. » (Édith, femme lesbienne suisse, dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta) ; « En 2005, Christine Bakke fait pour la première fois l’amour avec une femme : ‘C’était sa première fois à elle aussi, ce que j’ai trouvé très beau. Il n’y avait aucune attente, c’état naturel, ça coulait de source.’ » (Christine Bakke, ex-ex-lesbienne, interviewée à Denver, dans le Colorado, fin 2018, dans l’essai Dieu est amour (2019) de Jean-Loup Adénor et Timothée de Rauglaudre, Éd. Flammarion, Paris, p. 84) ; etc. Par exemple, dans le documentaire Les Règles du Vatican (2007) d’Alessandro Avellis, Alfredo Ormando, un homme homo qui s’est immolé par le feu en 1998 sur la place Saint Pierre au Vatican, a rédigé juste avant sa mort un récit testamentaire dans lequel il présente son homosexualité comme un fruit de la Nature. Toujours dans ce même reportage, le père Franco Barbero soutient que l’homosexualité est un « amour normalissime ». Dans l’émission Zone interdite spéciale « Être fille ou garçon, le dilemme des transgenres » diffusée le 12 novembre 2017 sur la chaîne M6, Jackie, homme M to F initialement appelé Jacques, prétend, après son opération chirurgicale, « se sentir plus femme ».

 

Dans le documentaire « Une Vie ordinaire ou mes questions sur l’homosexualité » (2002), Hervine, une femme lesbienne de 30 ans, s’adresse de manière gentiment provocatrice à Serge Moati, le réalisateur, en ces termes : « Dans mon enveloppe charnelle, je ne suis certes pas homme, mais qui dit qu’à l’intérieur de moi et dans ma tête, je ne suis pas plus homme que toi ? » Non seulement les personnes homosexuelles font passer la réalité fantasmée pour une réalité positive, mais en plus, elles postulent que cette nouvelle réalité est plus réelle que la Réalité-même. Dans une émission Ça se discute consacrée à l’homosexualité féminine (diffusée en 2004 sur la chaîne France 2), Annie-Paule, une femme lesbienne, narre sa première rencontre génitale lesbienne (on y retrouve cette idée de surréalité) : « Au départ, on a peur. Comment ça va se passer… Et puis finalement, ça se fait tout seul. C’est naturel. C’est même peut-être plus naturel. » C’est leur recherche de l’« extraréel » (formule que j’emprunte à un ami romancier) qui dit que beaucoup de personnes homosexuelles souhaitent quitter la Réalité, paradoxalement au nom de sa recherche. C’est la raison pour laquelle elles présentent souvent la Nature comme une terrible ennemie, tout en ne jurant que par Elle. Tout, selon elles, doit devenir culturel, donc inventé, évolutif, relatif ; et paradoxalement elles considèrent qu’une chose est mauvaise parce qu’elle est culturelle et qu’elle manquerait de Nature.

 

Un certain nombre d’individus homosexuels ont coutume d’annoncer leur désir homosexuel comme un fait établi, qui ne se discute pas, que la Nature leur aurait imposée, au-delà même de leurs propres intentions et des calculs de la pensée. C’est pour cela que ce serait un « plus que désir » : il aurait supplanté tous les autres désirs (la conscience de l’enfant, la mémoire des souvenirs, la perception nette de son homosexualité, l’attraction sexuelle, la connaissance de l’amour adulte, etc.) : « Être gay est ce qu’il y a de plus naturel. » (cf. l’article « Doce Días De Febrero » de José Mantero, dans l’essai collectif Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, p. 190) ; « Bien sûr que c’est naturel. » (Irène, une femme lesbienne de 65 ans jadis mariée avec un homme, dans le documentaire « Homos, la haine » (2014) d’Éric Guéret et Philippe Besson, diffusé sur la chaîne France 2 le 9 décembre 2014) ; « Comment une vie bascule à travers une main qui s’aventure… Je suis devenue une vraie femme. » (Thérèse par rapport à sa toute première fois lesbienne, où une ancienne camarade de classe dévergondée l’a dépucelée, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; « L’homosexualité, c’est tout à fait naturel, c’est normal. » (Robert, le coiffeur homo de Ménie Grégoire dans le film documentaire Ménie Grégoire : Une Voix sur les ondes (2007) de Marie-Christine Gambart et Sophie Garnier) ; « Ça devrait pas être un monde idéal. Ça devrait être un monde naturel ! » (Marie-Paule Belle rêvant d’un monde où l’homosexualité ne pose pas problème, dans l’émission Dans les yeux d’Olivier, « Les Femmes entre elles », d’Olivier Delacroix et Mathieu Duboscq, diffusée sur la chaîne France 2, le 12 avril 2011) ; « Depuis que je suis avec Sybille, il y a quelque chose qui a changé pour moi. Je ne sais pas comment dire, il y a quelque chose de naturel. » (Élodie, femme lesbienne de 46 ans, dans l’essai Se dire lesbienne : Vie de couple, sexualité, représentation de soi (2010) de Natacha Chetcuti, p. 61) ; « Ici les femmes sont debout, parfois perdues, bousculées par la vie, mais toujours au cœur des films. Ces lesbiennes existent pour et par elles-mêmes. Elles ne servent pas de faire-valoir à un autre personnage, elles ne questionnent pas leur orientation sexuelle, elles sont femmes, elles sont lesbiennes mais ça ne suffit pas à faire un film, et c’est cet au-delà, ce plus, cet autre chose qui m’a plu. » (Marie Labory, dans le catalogue du 19e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013, p. 10) ; « C’est la nature qui veut les choses. » (Pierrot, le papy fermier comparant son homosexualité à ses animaux d’élevage pour la justifier, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; « C’est inscrit dans mes gènes. » (Thérèse, femme lesbienne de 70 ans, idem) ; « Qui est-ce qui vous a dit qu’il y avait une différence d’âges ? » (Xavier, 67 ans, en « couple » avec Guillaume, 30 ans, dans le documentaire « Cet homme-là (est un mille-feuilles) » (2011) de Patricia Mortagne) ; « Je ne me suis jamais senti contre-nature. Je ne me suis jamais senti si naturellement naturel. » (Luca s’adressant à son copain Gustav, dans le documentaire « Homophobie à l’Italienne » (2007) de Gustav Hofer et Luca Ragazzi) ; etc.

 

Certaines personnes homosexuelles vont jusqu’à dire qu’elles ont un « corps homosexuel », ou bien qu’elles font partie d’une race à part de l’Humanité : « Je n’avais pas choisi, ni le don de la foi, ni mon homosexualité. Mais je pouvais choisir de vivre sereinement, de manière libre et responsable, ma démarche chrétienne dans mon corps d’homosexuel. » (Jean-Michel Dunand, Libre : De la honte à la lumière (2011), p. 114) Dans leur course à l’essentialisation et à la normalisation de leur désir homosexuel pour se rassurer de ne pas être anormales, il arrive qu’elles se prennent pour les héritières naturelles d’une puissance/espèce surnaturelle. Par exemple, on entend dans leur discours la croyance en un « sixième sens » homosexuel. « Je pense que l’homosexualité, ça développe l’intelligence. Non pas qu’on soit plus intelligents que les autres. Mais on est plus sensibles. » (Françoise, une femme lesbienne, dans l’émission Dans les yeux d’Olivier, « Les Femmes entre elles », d’Olivier Delacroix et Mathieu Duboscq, sur la chaîne France 2, le 12 avril 2011) Certaines s’identifient même à des extra-terrestres ou à des anges (cf. le code « Se prendre pour Dieu » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels). « C’était la comète de Haley du gay. » (Dan Savage, homosexuel, par rapport à Liberace, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Out » (2014) de Maxime Donzel) Par exemple, dans les années 1980, le dramaturge Copi arrive sur scène complètement nu et peint en vert comme un martien dans Loretta Strong. En 1969, le chanteur bisexuel David Bowie se met dans la peau d’un cosmonaute, le Major Tom, qui ne veut plus revenir sur Terre, et qui va se transformer en Ziggy Stardust, une rock star psychédélique, un flamboyant alien. Et pour l’identification homosexuelle, ce personnage a fixé des homosexualités : « Adolescent, je suis allé à un concert de David Bowie. Et ça a été une expérience fascinante. J’avais reçu une éducation très stricte. Je ne connaissais pas d’homos. C’était un monde totalement nouveau. Pour moi, David Bowie était un alien qui représentait une forme de liberté. » (Steve Blame, homosexuel, interviewé dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte)

 

Pourquoi cette tendance homosexuelle à proclamer fièrement son originalité, son identité plus que normale ? Je crois que ce « Je suis plus que normal » répond en réalité à un « Je suis anormal » qui l’a précédé : « Puisque la normalité exige que le masculin soit attiré par le féminin, et puisque ce n’était pas mon cas, j’en concluais que je souffrais d’une mystérieuse maladie. » (Brahim Naït-Balk,Un Homo dans la cité (2009), p. 15) ; « Comme personne ne me ressemblait autour de moi, comme je n’avais aucun repère, j’ignorais tout de l’homosexualité et j’ignorais que je l’étais. Je me croyais anormal, malade. » (idem, p. 91) ; « La musique d’Amanda Lear m’a aidé à accepter mon aberration. Je me disais que la chanson d’Amanda Lear ‘Follow Me’ est peut-être plus aberrante que ce que j’éprouve. En ce sens, elle m’a beaucoup aidé et ça m’a rendu plus fort. J’avais tous les disques d’Amanda Lear. Je les connaissais par cœur. Et ça a vraiment renforcé ma confiance en moi. » (Hape Kerbeling définissant son désir homosexuel comme une « aberration », interviewé dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) ; etc. Le trop-plein d’assurance cache en général un trop-peu de confiance en soi, une croyance absurde en son anormalité.

 

Bien des personnes homosexuelles se comparent au monde animal, NON LIBRE par définition, pour justifier d’une identité naturelle et d’un amour humain LIBRE ; voilà bien là une réelle contradiction ! Certains chercheurs pro-gays sentimentalisent la faune en projetant sur elle leurs rêves déshumanisants qu’ils veulent imposer ensuite à l’être humain. On peut penser à la fréquente comparaison des Hommes homosexuels aux singes bonobos, au traitement de l’« homosexualité » dans le monde animal par André Gide dans Corydon (1920), aux travaux de Jean-Pierre Otte, ainsi qu’au documentaire « L’Homosexualité animale » (2001) de Bertrand Loyer. Par exemple, en 2006, au Musée d’Histoire naturelle d’Oslo (Norvège), a été montrée une exposition de plus de 1000 espèces d’animaux ayant des comportements soi-disant « homosexuels ». Dans ses écrits du milieu des années 1870, Karl Heinrich Ulrichs (1825-1895) insiste sur le « », de l’homosexualité parmi les animaux, particulièrement chez les coléoptères. « La pénétration anale n’est pas une offense à la nature, à la loi morale ou à l’honneur d’un homme, si la nature a besoin d’elle précisément. » : « Selon ce raisonnement, la nature est souveraine. Dieu ou la nature ont implanté dans le cœur de certains hommes l’amour anal d’autres hommes ; il doit être satisfait ! » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 89)

 

Et l’opinion publique, pour leur faire plaisir, va de leur sens en affirmant que leur désir homosexuel n’est certainement pas un choix (alors qu’au fond, on n’en sait trop rien…) : « L’homosexualité est quelque chose de physique. […] Il me semble que l’homosexualité est avant tout une réalité biologique. » (Christine Boutin interrogée dans l’ouvrage Christine Boutin, Henry Chapier, Franck Chaumont : Les homosexuels font-ils encore peur ? (2010) de Xavier Rinaldi, pp. 21-22) ; « Chez les animaux, l’homosexualité, ça se passe beaucoup. » (un agriculteur interrogé au Salon de l’Agriculture à propos de l’homosexualité, dans le documentaire « Des filles entre elles » (2010) de Jeanne Broyon et Anne Gintzburger)

 

La naturalisation du désir homosexuel n’est pas sans risque : même si elle est minorisante et ne se dit pas toujours en termes dangereusement universalisants, elle est non seulement exercée par les membres de la communauté homosexuelle souhaitant faire des individus homosexuels une espèce à protéger, mais aussi par leurs opposants, voulant pour le coup détruire et corriger « l’espèce protégée ». « Hétérosexuels et homosexuels sont des mots barbares, des qualificatifs dont se parent et s’accablent des hommes mutilés qu’on apprend ou qui s’apprennent à réprimer des envies parfaitement naturelles. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; « Vivant dans ce monde de jeunes garçons, j’ai été initié tout naturellement. » (idem) ; « Combien d’hétérosexuels ont fait des expériences homosexuelles dans leur vie ! Ça prouve que c’est une expression tout à fait naturelle de la sexualité. » (idem) Ce retour de bâton homophobe – effet-miroir pervers de la théorie inversante et gay-friendly du « Troisième Sexe » – est par exemple visible dans l’essai (retiré à la vente) 700 millions de GEIS (2010) de Chekib Tijani. Ce « chercheur » développe de manière prétendument scientifique « la notion de Genre Endogène Inversé » dans le but de l’éradiquer : « Quand il y a non-concordance entre sexe anatomique et sexe psychologique au sein d’un même individu, il y a inversion identitaire. Inversion parce que sexe psychologique et sexe anatomique sont l’inverse l’un de l’autre. » (p. 13)

 
 

b) La Minute difficile :

Beaucoup de personnes homosexuelles revendiquent l’existence d’une seconde nature, supposée plus authentique que la Nature « classique ». Cette hyperréalité sincérisée a souvent un lien avec l’excès, l’artifice. Dans le discours de beaucoup de créateurs homosexuels, plus une chose ou une personne devient superficielle, plus on lui décerne la Palme du Naturel : « Les choses sont toujours plus intéressantes quand on exagère. » (Celia la conservatrice de musée s’adressant à Bertrand, dans le docu-fiction « Le Dos rouge » (2015) d’Antoine Barraud) ; « La seule différence entre les surréalistes et moi est que je suis surréaliste. » (Jean Cocteau) ; « Elle [l’actrice Lola Sola] était championne de natation. Une fille au physique exceptionnel. Imaginez un peu. Elle a commencé à nager à dix ans. Des jambes incroyables. Et surtout une poitrine naturelle d’une générosité… rarement vue. Quand elle a été championne, on voyait partout des photos d’elle. Le metteur en scène Carlos Sanchez a eu l’idée, en voyant ces clichés, de transformer la nageuse en sex-symbol. Et on peut dire qu’il a gagné son pari. Maintenant, elle est doublement championne : de natation et de sex-appeal. » (Fernando dans l’autobiographie Folies-Fantômes (1997) d’Alfredo Arias, p. 250) ; « C’était un bel homme, James. Pourquoi ça n’aurait pas été une belle femme ? » (la narratrice transgenre F to M se met dans la peau de James, une femme qui s’est fait passée pour un homme toute sa vie, dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems) ; etc.

 

Les membres de la communauté homosexuelle ont trouvé en la bimbo siliconée la plus charismatique représentante de leur passion pour la nature trafiquée. Surtout en ce qui concerne les hommes travestis ou transsexuels, on passe, par rapport à l’objet de désir (= la femme-objet ; l’homme-objet), de la comparaison, à l’identification, pour finir par un dépassement-substitution (de la différence des sexes par exemple, de la réalité de la sexuation, de l’amour) : « Les transformistes sont plus femme que beaucoup de femmes. » (Alberto Mira, De Sodoma A Chueca (2004), p. 155) Dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, le « désir de paraître plus femme que femme » est présenté comme une caractéristique des personnes transformistes, transgenres, ou transsexuelles (p. 291) ; le « milieu homosexuel » serait peuplé d’« une faune étrange, plus féminine que n’importe quelle assemblée de femmes » (idem, p. 34). Jean Weber à propos du trapéziste Barbette, n’affirmait pas qu’il était une fausse femme, mais au contraire qu’il avait tout d’une « femme absolue ! » (cf. l’essai Folles de France (2008) de Jean-Yves Le Talec, p. 112).

 

En général, les personnes homosexuelles travestissent la Nature par trois moyens : l’art (prioritairement surréaliste, déréalisant), la science, et le sentiment (on peut aller jusqu’à la religiosité). Elles créent une Nature en carton pâte, figée dans l’angélisme ou au contraire l’image d’Épinal de films d’épouvante. Je vous renvoie aux natures mortes du peintre Caravage, notamment.

 


 

La communauté interlope s’intéresse beaucoup aux simulations de Nature. Par exemple, pendant son concert Petits Secrets (2007) au Palais des Glaces de Paris, le chanteur français Christophe Moulin arrose ses plantes au brumisateur. Certaines personnalités homosexuelles ou proches du « milieu gay » (telles que Thierry Le Luron, Charles Trénet, Dalida, Nana Mouskouri, etc.), se sont amusées à participer à la série de publicités Wizard, vantant les mérites des désodorisants d’intérieur censés créer des ambiances « naturelles ». Un certain nombre d’individus homosexuels se prennent pour des créateurs de Nature. Les animaux empaillés des taxidermistes, les bestiaires, ainsi que les jardins synthétiques, sont légion dans la fantasmagorie de la communauté homosexuelle, et renvoient parfois à des pratiques réelles. Sur pellicule, les personnes homosexuelles fournissent la preuve qu’elles ont le pouvoir divin de fabriquer des fleurs : je pense par exemple à Jean Cocteau qui se filmait en marche arrière pour donner l’illusion qu’il construisait lui-même des fleurs de bougainvillier ; dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems, la comédienne transgenre F to M sur scène se fait un pénis avec un préservatif qu’elle rembourre de coton (pénis artificiel surnommé « le paquet »).

 

Elles donnent à croire que par l’art, les médias, le maquillage, le sentiment, ou la science, la Nature va être dépassée, sublimée, libérée de la souffrance et de la mort, va devenir en quelque sorte « plus Elle-même qu’Elle-même ». Ce n’est plus Elle qui inspirera l’art, ni l’art qui sera au service de la Nature. On assiste à une inversion des valeurs. Maintenant, selon la formule consacrée par l’écrivain britannique Oscar Wilde, c’est « la nature qui imite l’art ». Par exemple, le romancier français Mathieu Riboulet, invité le 28 mars 2011 à l’émission Homo Micro de Radio Paris Plurielle, parle de « l’usage choisi de la Nature » qu’il opère dans son écriture.

 

C’est la raison pour laquelle, dans les films homosexuels, on voit souvent des scènes de teinture de cheveux ou de maquillage, comme si leurs réalisateurs filmaient parodiquement leur prétention à la création de la Nature pour mieux la voiler. Par exemple, dans le film expérimental « Autoportrait aux trois filles » (2009) de Nicolas Pleskof, le chevauchement et le va-et-vient entre l’artifice et la Nature est manifeste (cf. la scène où le soleil, en fondu enchaîné, laisse place à la lumière d’une lampe). La machine et la nature primitive incivilisée commandent au Réel et à l’être humain (c’est le « primitivisme assisté par la cybernétique » dont parle Philippe Muray dans Festivus festivus : Conversations avec Élisabeth Lévy (2005), p. 14).

 

Film "La Vie d'Adèle" d'Abdellatif Kechiche

Film « La Vie d’Adèle » d’Abdellatif Kechiche


 

Actuellement, on retrouve ce goût de la nature forcée, sincérisée, faussement improvisée, dans le charme minimaliste des docu-fictions bobos. Et en effet, qu’est-ce qu’être bobo si ce n’est vouer un culte maladif à la simplicité, au naturel, à l’authentique ? si ce n’est se prendre pour un dieu innocent, qui créerait du génie et de la Nature par accident, sans le désirer, sans liberté ? Beaucoup de réalisateurs homosexuels ou gay friendly actuels cherchent à donner aux amours homosexuelles qu’ils dépeignent sur nos grands écrans de cinéma la puissance de la Nature. Il y a énormément de films à thématique homosexuelle servis à la sauce National Geographic, et il me sera difficile de les lister avec exhaustivité tellement ils sont à présent monnaie courante. En voici quelques exemples : le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2006) d’Ang Lee, le film « Les filles du botaniste » (2006) de Daï Sijie, le film « Lilting » (« La Délicatesse », 2014) de Hong Khaou, le film « And Then Came Summer » (2001) de Jeff London, le film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré, le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure, le film « Ander » (2009) de Roberto Castón (une ode à la beauté du Pays basque), le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha (en pleine montagne autrichienne)etc. Le film « Jongens » (« Boys », 2013) de Mischa Kamp chante la Nature tout le temps. Et c’est en surprenant des faons en pleine forêt que Marc et Sieger s’embrassent. Dans la série bal d’émotions sensorielles pour servir de cadre à la relation homo et prouver qu’elle est « belle et naturelle » (et que cela se passe de commentaire…), on trouve des productions artistiques telles que le film « L’Homme de sa vie » (2006) de Zabou Breitman, qui commence précisément par des plans fixes de Nature, des arrêts sur image façon jolies cartes postales provençales, le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz, le documentaire « Cet homme-là (est un mille-feuilles) » (2011) de Patricia Mortagne (très bucolique), le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, ou encore le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, où les deux amants Lukasz et Adam se cherchent dans un champ de maïs en poussant des cris d’animaux, comme pour prouver que leur accouplement est drôle, original et naturel. Du côté clichés maritimes bucoliques latino-américains, berçant les spectateurs aux sons des vagues de la mer, ce sont les films « Contracorriente » (2011) de Javier Fuentes-León, ou bien « Como Esquecer » (« Comment t’oublier ? », 2010) de Malu de Martino (avec ses plans de fleurs filmées de près, la séquence du coït lesbien Helena/Julia sur fond sonore « dépouillé » de bruits de la mer, la promenade Fahrenheit d’Helena sur le ponton face à l’océan, etc.) qui pourraient remporter la palme de l’émotion sentimentaliste homosexuelle travaillée par la photo et le cinéma. Dans le film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta, on va jusqu’au paradoxe de nous noyer d’images de Nature pour nous convaincre qu’une relation amoureuse pourtant virtuelle à 90% arrive tout de même à être concrète et authentique, comme si la débauche d’estampes de Nature suffisait à innocenter l’artifice et à combler le fossé béant qui sépare les deux internautes. D’ailleurs, concrètement, Denis, le héros homosexuel, passe son temps à donner aux objets « l’humanité » de ses fantasmes narcissiques : par exemple, il voit des visages partout, même dans les tapisseries fleuries de sa chambre ; il fait de l’eau de toilettes Sauvage portée par son amant un trait de caractère de celui-ci ; il fige la Nature en nous montrant en gros plan une collection de papillons ; etc.

 

Dans les films top-bobos de Christophe Honoré, on retrouve ces jeux de caméras naturalistes (… et si peu naturels tellement ils veulent prouver la maladresse et l’improvisation !) : son film « Homme au bain » (2010) en fournit un parfait exemple, avec le mélange systématisé rétro/post-modernité (certaines séquences sont filmées par téléphone portable : effet « Nouvelle Vague » avant-gardiste des Temps Modernes…), la fusion iconographique Nature/ville (exemple : les petits oiseaux perdus en plein New York) esthétisée comme une dérive existentielle magnifique, etc.

 

Dans son film « La Vide d’Adèle » (2013), Abdellatif Kechiche joue à fond sur le quotidien, le côté « ressenti », « tranche de vie » prise sur le vif. Le « couple » lesbien est toujours filmé dans des cadres bucoliques (parcs, jardins, mer, etc.). Ce film se veut un bal de sensations « Nature et Découverte » : Je me ressens fumer, manger, respirer. Je me masturbe verbalement, sensiblement. Je touche les peaux, les toiles (« C’est ce qu’il y a de meilleur : la texture. » affirme Emma, la « peintre-philosophe » ; « Tu veux toucher ? » (Liz, la femme lesbienne enceinte avec son ventre rond, et présentant la maternité comme une « sensation »). J’écoute la Nature, le vent dans les arbres. Je raconte mon bien-être. C’est du carpe diem et de l’hédonisme de bas étage : « On est bien, là, hein ? » sussure Emma étendue dans l’herbe. « Un peu trop, même… » lui répond Adèle. Le but caché de ce film est de nous prouver que la différence des sexes n’est pas importante pour vivre et incarner l’amour, et de saturer ce mensonge de sensations. Tous les bruitages (l’eau des canalisations dans les toilettes, le chant des oiseaux, les effleurements de peau, la salive des baisers échangés) sont décuplés… pour emprisonner le spectateur dans le ressenti ou l’émotionnel, et donc finalement pour prouver de manière naturaliste et « sobre » à la fois, que l’amour homo est « naturel ». Il n’y a d’ailleurs pas de musique de fond dans le film (sauf pour les moments officiels de chansons, où là le réalisateur se fait plaisir en transformant son film en grand vidéo-clip).

 

Certains artistes homosexuels, par auto-parodie ou dans un objectif plus sérieux d’esthétisme, s’amusent à distordre la réalité, en représentant par exemple de faux ralentis ou des images accélérées, comme pour se moquer de la vanité de leurs sentiments (je pense aux ralentis tragi-comiques de la comédie musicale Se Dice De Mí En Buenos Aires (2010) de Stéphan Druet, tournant en dérision l’effusion des passions amoureuses, au vidéo-clip « Lonely Lisa » de Mylène Farmer, etc.)… ou pire, au final : pour immortaliser, naturaliser, et justifier cette vanité !

 

On retrouve ce goût de la programmation du hasard et des accidents dans les techniques artistiques employées par certains artistes homosexuels : l’écriture automatique (Virginia Woolf, Marcel Proust, Paul Verlaine, Néstor Perlongher, etc.), le happening des artistes pop (Gilbert and George, Andy Warhol, Marcel Duchamp, etc.), les documentaires-fictions (Jean Cocteau, Thom Fitzgerald, Louise Hogarth, Douglas McGrath, Louis Dupont, etc.), les reconstitutions de coulisses théâtrales (par exemple, dans la comédie musicale HAIR (2011) de Gérôme Ragni et James Rado, le public arrive dans la salle où la troupe de théâtre serait soi-disant en pleine répétition ; C’est le même cas de figure dans certaines pièces de Jérémy Patinier, comme on peut le voir par exemple à travers les premières didascalies de « l’Acte zéro » qui ouvrent la pièce Parano : N’ayez pas peur, ce n’est que du théâtre (2011) : « La comédienne est déjà sur scène, il n’y a pas de limite entre le public et elle. Mais elle ne prête pas attention à elle. On a l’impression d’être dans les coulisses plus que dans le public. » ; Lors de la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar, les nombreuses mises en abyme – façon « journal intime spontané » ou « interviews imprévues » – rendent floue la frontière entre fiction et réalité, pour rajouter du pathos et de la crédibilité aux histoires d’amour homosexuelles pourtant foireuses et alambiquées ; Dans les pièces de théâtre contemporain traitant actuellement du sujet homosexuel/bisexuel, il est maintenant extrêmement rare que les intrigues sensuelles – je n’ose même plus dire « amoureuses » – ne soient pas entrecoupées de séquences-vidéo naturalistes, d’images Internet très actuelles ou carrément vintage : les nouvelles technologies multimédias au service du semi-mensonge amoureux).

 

On constate que certains réalisateurs pro-gays usent des techniques réalistes du documentaire (plans mal cadrés, caméra hésitante, simulation d’interview-vérité façon « micro-trottoir », etc.) pour créer un authenticité travaillée, un « plus que naturel » : cf. le film « Scandaleusement célèbre » (2007) de Douglas McGrath, le film « Ma vraie vie à Rouen » (2002) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, le docu-fiction « Beefcake » (1998) de Thom Fitzgerald, le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier, le film « Visage écrit » (1995) de Daniel Schmid, le film « Luc ou la part des choses » (1982) de Michel Audy, le faux documentaire « Mockumentary » (2005) de Jo Sol, le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant (où les images d’archives se mélangent l’air de rien à une intrigue amoureuse « légèrement » romancée), le docu-fiction « Le Deuxième Commencement » (2012) d’André Schneider (avec des témoignages intercalés), le film « Hooks To The Left » (2006) de Todd Verow (filmé sur un téléphone cellulaire), le film « Elena » (2010) de Nicole Conn (avec des interviews intercalées à la fiction de couples homos ou présentés comme « hétéros »), la pièce-reportage Le Projet Laramie (2012) de Moisés Kaufman, etc.

 

Ce travestissement falsificateur du Naturel (et de l’Amour) avait déjà été annoncé sous le nom de « Minute difficile » par Jean Cocteau (cf. le documentaire « La Villa Santo Sospir » (1949) de Jean Cocteau : « Ce sera alors la minute difficile… »). Le poète français nous mettait en effet en garde contre la dangereuse programmation du hasard orchestrée par les médias et la science techniciste (actuellement, la publicité, les journaux à scandale, les jeux vidéo, les Journaux Télévisés, et même le succès de Facebook, nous fournissent d’excellentes illustrations de cette société de « l’immédiateté d’anticipation » qui veut s’imposer à nos réalités et à nos natures profondes…) : on crée ce que l’on craint/attend en feignant de n’avoir rien contrôlé, en se plaçant en spectateurs impuissants de catastrophes annoncées, ou en amoureux dépassés par des amours totalitaires. L’abus des mutations technologiques ne favorise ni le respect de la Nature écologique ni de la liberté humaine, même si le « plus que naturel » qu’il crée peut avoir les effets euphorisants et apaisants des drogues.

 

Dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), l’écrivain Abdellah Taïa raconte comment le cinéma a naturalisé ses pulsions les plus dégradantes au point de les lui faire admettre comme normales et belles : « Sur le chemin, un cinéma populaire, Royal El-Guidida, s’est présenté devant moi. Sans réfléchir j’ai acheté un billet et j’y suis entré célébrer ma nouvelle vie, au milieu d’une salle remplie d’hommes de tous âges qui se donnaient les uns aux autres sans complexe, sans se cacher, non loin des agents de police qui surveillaient l’entrée. Retrouver ma première religion. Mon rêve de toujours. Le cinéma par la peau. La transgression naturelle. Les corps dans l’intensité sexuelle. Des va-et-vient entre la salle immense avec orchestre et balcon et les toilettes. Un film. Deux films. Des stars. Adil Imam. Yousra. Nour Cherif. Leïla Eloui. » (pp. 98-99)

 

Film "Donne-moi la main" de Pascal Alex-Vincent

Film « Donne-moi la main » de Pascal Alex-Vincent


 

Concernant la création de surnaturel, les membres de la communauté homosexuelle se choisissent une béquille tout aussi efficace que la science ou l’art : la sincérité (et dans les faits, la sensiblerie). Le procédé de travestissement de la Nature est le même : on enrobe la pulsion de sentiments, de poésie, de naturel, de peinture verte et rose, de feuillages, de silence, et ainsi, elle passerait incognito ! « Je voulais d’abord une balade érotique et champêtre à la gloire du corps humain. » (le réalisateur français Pascal-Alex Vincent à propos de son film « Donne-moi la main » (2009), cité dans l’essai Le Cinéma français et l’homosexualité (2008) d’Anne Delabre et Didier Roth-Bettoni, p. 170) ; « Je voulais faire un film qui ne pose même pas la question de l’homosexualité. Je voulais montrer une homosexualité épanouie, sans surenchère, naturelle. » (le cinéaste Sébastien Lifshitz à propos de son film « Presque rien » (1999), idem, p. 231)

 

Par exemple, l’écrivain japonais Yukio Mishima rêve que le romantisme soit plus réel que le réalisme. On entrevoit très bien dans ses lettres le viol de Nature que va impliquer la concrétisation de ses rêves de midinette : « À partir du moment où l’on marie romantisme et mécanisme, il est enfin possible, à n’importe quelle époque, de rivaliser avec le réalisme. […] Le romantisme, lorsque l’expression se tarit, court fatalement le risque de s’orienter vers un classicisme qui se grise lui-même. Pour éviter ce risque, il est nécessaire, grâce à un ‘mécanisme’ impitoyable, de le stimuler de façon brutale. Bref, l’objectif n’est pas de concrétiser avec réalisme et objectivité, dans une œuvre, les impulsions intérieures, mais de les réduire à l’état d’éléments intérieurs, d’éléments inorganiques pour ensuite les disposer, les ordonner de façon mécanique. Il s’agit de cristalliser ces impulsions intérieures en une succession de formes momentanées, pour les recomposer artificiellement, en dehors des contraintes temporelles et spatiales. On peut trouver, dans cette méthodologie de la recomposition, une force incomparable, capable de tenir tête au réalisme. Car il y a quelque chose qui dépasse le domaine de l’expression. Tendre vers l’artifice, n’est-ce pas chez l’homme l’ambition la plus pure, la moins mensongère ? Et celle-ci n’est-elle pas bien plus fermement ancrée dans la nature humaine que la simple volonté de recréer la réalité ? Bref, le ‘romantisme mécaniste’ ne serait-il pas plus réel que le réalisme ? » (Yukio Mishima, Correspondance 1945-1970 (1997), pp. 44-46)

 

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que, du point de vue strictement intentionnel, même dans la parodie ou la destruction de Nature, la démarche des violeurs de Nature, de mariage, de différence des sexes, de famille, de Culture, ou de Vérité, est très sérieuse, se veut naturelle. « C’est d’ailleurs toute l’habileté du lobby gay : déconstruire le mariage pour le vider de son sens et le réinventer à partir d’un nouveau concept. » (Élizabeth Montfort, Le Genre démasqué (2011), p. 67) Par exemple, quand les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence (vous savez, ces fausses religieuses ultra-maquillées lors des Gay Pride et faisant de la prévention Sida) s’entendent dire qu’elles sont une caricature méprisante du clergé catholique, beaucoup d’entre « elles » s’insurgent très sincèrement : « On n’est pas une parodie de bonnes sœurs ! On est des sœurs ! Point. » ; « Nous sommes profondément sérieux. » (cf. le documentaire « Et ta sœur ! » (2011) de Sylvie Leroy et Nicolas Barachin) Comme la séparation entre comédie et Réalité, entre fiction et Réel, est volontairement/inconsciemment effacée, l’inversion sera élue Nature profonde de l’Humanité.

 

En amour, le bobo homosexuel essaie de se convaincre que pour lui et son compagnon amoureux, l’artifice sera miraculeusement naturel… même s’il aura parfois l’honnêteté/l’orgueil de reconnaître qu’il restera artificiel pour « les autres ». Tellement obnubilé qu’il est par la création de Nature, il met sur un piédestal le concept de « première fois ». Il fait semblant de se surprendre lui-même, d’être naturel : « C’est la première fois que ça m’arrive… » ; « T’es la première personne avec qui je le fais » ; « Tout ça, je l’ai dit à très peu de personne. » ; etc. Il donne à la vie en général la couleur du fantasme (et inconsciemment de la peur). Paradoxalement, il interprète ses pulsions intérieures comme la manifestation d’un processus physico-psychologique qu’il ne peut maîtriser (l’amour serait une subtile solution chimique, un échange de phéromones ; cf. le code « Médecines parallèles » de mon Dictionnaire de Codes homosexuels), mais aussi comme des signes surnaturels d’une Nature toute-puissante qui soumet et impose (par exemple, il analyse ce qu’il appelle « hasard » comme un destin ; sa superstition lui fait adorer la numérologie, les dates, la correspondance des prénoms, les coups de foudre, etc.).

 

Sur le terrain des réalités fantasmées que sont les personnes homosexuelles, l’amour homosexuel, et la « famille » homoparentale, la sincérité donne l’illusion du raccord entre rêve et Réalité, de la réconciliation entre sentiments et Amour vrai. « En fait, c’est normal. À part qu’il y a deux femmes. Mais à part ça, y’a rien qui change. » (Francesca à propos d’Olga, sa maman lesbienne qui l’a eu par PMA avec sa compagne, dans le documentaire « Homos, et alors ? » de Florence d’Arthuy de l’émission Tel Quel, sur la chaîne France 4, le 14 mai 2012) Pourtant, la connexion avec la Nature et le Réel se fait par le biais de comparaisons abusives et de simulations sincères de joies inénarrables (c’est logique : « l’inénarrable » en question ne vient pas que d’un débordement émotionnel ; il provient surtout du mensonge de la situation concrète) : « C’est tellement beau que ça en devient irréel. » (Francine à la maternité, parlant de « ses » jumelles qu’elle aurait eues avec sa compagne Karen, dans le documentaire « Des filles entre elles » (2010) de Jeanne Broyon et Anne Gintzburger) ; « Mon fils, je l’aime comme si je l’avais fait. » (Jeanne en parlant du fils de sa compagne, idem). Mais la Nature et l’Amour ne sont plus tellement là…

 
 

c) Un dépassement transcendant/violent de la Nature (au nom du naturel pourtant !) est effectué :

Je dis que l’« amour » homosexuel est plus contre-nature que naturel… non parce que les personnes homosexuelles seraient clairement anti-Nature, mais au contraire parce qu’elles adorent la Nature, qu’elles L’aiment un peu trop pour L’aimer vraiment, avec une juste distance. La pratique homosexuelle, pourrait-on dire, est sur ET anti-naturelle. Dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, Bayle emploie un néologisme tout à fait pertinent pour définir les actes homosexuels : il parle du « péché sur-contre-nature » (p. 134) Avec le désir homosexuel, sans aller jusqu’à parler de « péché mortel » (puisque ledit péché nécessite la liberté), on se situe en effet à la lisière entre l’anti-naturel et le surnaturel.

 

Dans les faits, il y a un danger à vouloir d’une nature « plus que naturelle » (… donc, au final, hétérosexuelle : la redondance de l’altérité – présente dans le terme « hétérosexualité », qui dit deux fois « autre » – illustre à elle seule que la Nature est forcée à travers l’hétérosexualité, puis l’homosexualité). Par exemple, les arguments libertaires et écologistes, en apparence louables, peuvent parfois cacher dans les faits des actions beaucoup moins belles : on peut penser à la pratique du « naturisme » chez certains membres de la communauté homosexuelle, présentée comme un retour radical à la Nature (… la nature humaine en réalité), et qui développe et couvre des réseaux de prostitution ; etc. Dans un autre registre similaire, la défense d’une « nature masculine ou/et féminine » encourage des futures personnes transsexuelles à la mutilation chirurgicale.

 

Le danger de défendre une nature plus que naturelle ou un amour plus que naturel, c’est l’éloignement du Réel, à travers le vol ou le viol principalement. Il s’agit, selon les termes de Christophe Honoré dans son autobiographie Le Livre pour enfants (2005) de « profaner le réel. » (p. 139), d’« extraire ce toujours-plus de réalité » comme l’écrivent Deleuze et Guattari dans leur Anti-Œdipe (1973), de forcer le Réel à être plus qu’Il n’est… quitte à virer dans la superficialité, la schizophrénie, la perversion et la violence (pourvu qu’il y ait un « plus » !) « La perversion produit un plus : je suis plus sensible, plus perceptif, plus loquace, mieux distrait, etc. et dans ce plus vient se loger la différence. » (cf. l’article « La Déesse H » de Roland Barthes, dans son autobiographie Roland Barthes par Roland Barthes (1975), p. 66) ; « Le schizophrène est le plus proche du cœur battant de la réalité, à un point intense qui se confond avec la production du réel. […] La simulation, il faut l’entendre comme l’identification. Ce point où la copie cesse d’être une copie pour devenir le Réel et son artifice. » (Gilles Deleuze, Félix Guattari, L’Anti-Œdipe (1972/1973), p. 104) Par exemple, dans sa préface au roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1979) de Manuel Puig, Albert Bensoussan est décrit comme « le romancier de l’authentique par le factice » (p. 6). Beaucoup d’activistes LGBT tentent de déformer le Réel à coup de slogans égalitaristes sans consistance : « Le sens de ce mariage, c’est que c’est une loi qui consacre l’Égalité des Droits. C’est une avancée naturelle. […] J’espère que la loi ira le plus loin possible. » (Nicolas Gougain par rapport au mariage gay, dans l’émission Mots croisés d’Yves Calvi, sur le thème « Homos, mariés et parents ? », diffusée sur la chaîne France 2, le 17 septembre 2012) ; « Allons jusqu’au bout de l’égalité ! » (cf. le slogan de la Gay Pride 2013 à Paris) ; etc.

 

La jonction entre le souhait d’être à tout prix franc et naturel et le secret désir de fuir le Réel et la beauté de l’Homme se résout presque systématiquement dans la violence, comme l’illustrent les propos de Susan Sontag concernant l’« art vivant et spontané » que seraient les happenings, genre du théâtre contemporain très apprécié des artistes LGBT (d’Alfred Jarry au performer Steven Cohen) : « Ce qui doit nous frapper le plus dans les Happenings c’est la façon dont le spectacle maltraite (car c’est le terme) le spectateur. Le spectacle semble tout entier conçu pour se moquer et abuser du public. Des acteurs aspergent d’eau l’auditoire, lancent dans sa direction de menues piécettes ou de la poudre à éternuer. […] On ne s’efforce nullement de complaire au désir habituel du spectateur de bien voir ce qui peut se passer. » (cf. l’article « Les Happenings : Art des confrontations radicales » (1968) de Susan Sontag, p. 404) ; « Dans les Happenings, le bouc émissaire, c’est le public. » (idem, p. 420) ; « Le ‘Happening’ touche le spectateur en l’entourant d’une trame d’éléments de surprise, asymétriques, sans péripétie et sans dénouement ; il s’agit là de l’irrationalité du rêve, plutôt que de la logique habituelle de l’art. Les ‘Happenings’, comme les rêves, ignorent la notions du temps. N’utilisant ni l’intrigue, ni la chaîne rationnelle du discours, ils ne connaissent pas le passé. Comme l’indique leur dénomination – Happenings (choses qui arrivent) – tout s’y passe dans le présent. » (idem, p. 406) ; « Il n’est pas exact cependant (comme le supposent certains amateurs de ce genre de spectacle) que les Happenings soient un jeu d’improvisation. Ils sont répétés avec soin pendant une période qui peut varier d’une semaine à un mois, bien que les notations écrites soient alors réduites au minimum : l’indication des jeux de scènes et des objets matériels à utiliser tient en général en une page. Les acteurs inventent et mettent eux-mêmes au point, au cours des répétitions, la substance de ce qui sera présenté au public. » (idem, p. 407) ; « Les éléments matériels, objets mous ou résistants, propres ou sales, utilisés selon leur nature, prennent, dans le Happening, une importance primordiale. Ce souci d’utilisation de la matière, qui fait que le Happening tient de l’art de la peinture, au moins autant que de celui du théâtre, apparaît encore dans une certaine façon de traiter les personnages comme des objets plutôt que comme des êtres individualisés. Souvent l’acteur est affublé de masques, de linceuls, d’enveloppes de carton, de toiles d’emballages, qui accentuent cette analogie entre l’acteur et l’objet matériel. » (idem, p. 408) ; « L’art, ainsi compris, est à l’évidence agressif. Agressivité à l’égard du conformisme présumé de son public, et à l’égard du milieu social lui-même. Par sa technique des oppositions flagrantes, le surréalisme cherche, sur la sensibilité, l’effet de choc. » (idem, p. 412) ; « C’est dans l’œuvre d’Antonin Artaud que l’on trouvera les meilleurs exemples de la technique surréaliste de l’épouvante. » (p. 416) ; « Mais le rêve, ce n’est pas seulement, pour Artaud, la poésie et la fantaisie, c’est aussi la violence, la folie, le cauchemar. C’est en fonction de ces apports, en relation avec le rêve, qu’Artaud a cherché à définir son théâtre de la cruauté dans deux manifestes qui portent ce titre. ‘Le théâtre ne pourra redevenir lui-même c’est-à-dire constituer un moyen d’illusion vrai qu’en fournissant au spectateur des précipités véridiques de rêve, où son goût du crime, ses obsessions érotiques, sa sauvagerie, ses chimères, son sens utopique de la vie et des choses, son cannibalisme même, se débondent, sur un plan non pas supposé et illusoire, mais intérieur… Le théâtre, comme les rêves, est sanguinaire et inhumain. » (Antonin Artaud, Le Théâtre et son double (1938), op. cit., pp. 416-417) ; « La technique de l’épouvante des surréalistes retrouve la source du meilleur comique : le sentiment d’invulnérabilité du personnage. L’absence de réactions émotionnelles profondes est l’élément essentiel de la comédie. Si nous pouvions rire de bon cœur au spectacle de scènes pénibles et grotesques, c’est que les personnes auxquelles de telles choses arrivent ne semblent pas en être profondément touchées. Peu importe que le public les voie gesticuler, et crier, et invoquer le ciel en se plaignant de leurs malheurs, il sait bien que tout cela demeure superficiel. » (p. 418)

 

Dans son essai Mythologies (1957) – traitant, comme son nom l’indique, du pouvoir des mythes –, Roland Barthes montre à son insu que le désir homosexuel encourage les êtres humains qui veulent l’actualiser à posséder la Nature pour La travestir, La faire leur, et se faire passer pour Elle. « Une prestidigitation s’est opérée, qui a retourné le réel, l’a vidé d’histoire et l’a rempli de nature. » (p. 230) ; « Du point de vue éthique, ce qu’il y a de gênant dans le mythe, c’est précisément que sa forme est motivée. […] L’écœurant dans le mythe, c’est le recours à cette fausse nature, c’est le luxe des formes significatives, comme dans ces objets qui décorent leur utilité d’une apparence naturelle. La volonté d’alourdir la signification de toute caution de la nature provoque une sorte de nausée : le mythe est trop riche, et ce qu’il a en trop, c’est précisément sa motivation. […] Éthiquement, il y a une sorte de bassesse à jouer sur les deux tableaux. » (idem, p. 212)

 

Pendant que la société a le dos tourné, les personnes homosexuelles désirant concrétiser leur désir homosexuel sous forme d’identité ou d’amour « essentiels » prennent le naturel, le trafiquent à leur façon pour lui enlever toutes les aspérités qui gênent leurs propres fantasmes de toute-puissance ; puis la « Nature » nouvellement formée est remise sur l’étalage, comme si de rien n’était. « J’accepte complètement ma nature. » (Barbara, un homme transsexuel M to F, dans le documentaire « Woubi Chéri » (1998) de Philip Brooks et Laurent Bocahut) Et gare à ceux qui détecteraient la contrefaçon et qui par conséquent identifieraient leur orgueil de s’être prises pour Dieu !

 

Lors de sa conférence « La Théorie du Genre dans les manuels scolaires : comprendre et discerner » au Collège des Bernardins (à Paris, le 6 décembre 2011), Michel Boyancé explique bien que le climat fortement anti-naturaliste de nos sociétés occidentales, que les philosophes du Gender soutiennent actuellement en tant que modèle de structuration sociétale et amoureuse, résulte d’une volonté de « se libérer de la Nature par le droit et par la science ». Il entre dans les détails en démontrant que le rapport à la Nature de ces « apprentis sorciers de la sexualité » est paradoxal : avant de se débarrasser d’Elle, ils s’En inspirent pour produire un artificiel qui Lui ressemble.

 

Le résultat obtenu n’est pas uniquement contre-naturel, comme le pensent les détracteurs de l’homosexualité qui disent que l’homosexualité est « contre-nature ». Les personnes homosexuelles le revendiquent comme sur-naturel, « plus que réel ». C’est pourquoi elles peuvent en même temps défendre que l’homosexualité est très « naturelle » et prendre conscience que « c’est une interprétation fausse de la Nature » (pour citer l’écrivain Marcel Jouhandeau dans l’émission Apostrophe du 22 décembre 1978, sur la chaîne Antenne 2).

 

« Ma compagne, Sandrine, a 34 ans et elle ne veut plus attendre pour avoir un enfant. Moi, je n’envisageais pas vraiment d’être mère. Je décide alors de prendre ma caméra pour suivre ce parcours, notre parcours vers un enfant désiré mais aussi, pour moi, un chemin vers une maternité particulière qui ne m’a jamais semblé ‘naturelle’. Comment allons-nous faire ? Nos proches s’interrogent et nous aussi. Nous avons choisi l’insémination artificielle à l’étranger. Nous allons donc voyager, espérer et je vais profiter de ce temps pour trouver ma place de mère, car je vais devenir mère… sans porter notre enfant. » (Florence Mary dans son documentaire « Les Carpes remontent les fleuves avec courage et persévérance », 2012)

 

Dernièrement, j’ai entendu un exemple signifiant de la mise en scène mensongère de Nature qui est en train de se produire à travers le phénomène particulier des « familles homoparentales ». En effet, lors de sa conférence « L’Homoparentalité aux USA » (tenue à Sciences Po Paris, le 7 décembre 2011), Darren Rosemblum, professeur en droit, et « père » (avec son « mari ») d’une petite fille née en Gestation Pour Autrui (GPA) en 2009, s’est exprimé en faveur de l’homoparentalité et au nom de la Science pour détourner la Nature : « Je soutiens une interprétation de la biologie. » a-t-il dit explicitement. Même s’il puisait abondamment dans le jargon statistique et universitaire pour soutenir sa démarche et asseoir sa légitimité, ses arguments étaient finalement très sentimentalistes et peu réalistes ; son discours, truffé de non-dits. Par exemple, il a caché à l’assistance qui était le vrai père biologique de sa fille, entre son partenaire et lui : il n’a pas terminé sa phrase « Un de nous est le père biologique de Mélina… » et a vite esquivé le sujet. Quand j’ai pris soin de demander à Darren Rosemblum, pendant le temps des questions, pourquoi, lors de son exposé, il n’avait pas voulu nous dire explicitement qui était le père biologique de Mélina, il s’est obstiné à nous cacher la vérité et n’a jamais craché le morceau. Et dans l’hypothèse qu’il puisse un jour avoir à dévoiler à sa fille l’identité de son vrai père, je l’ai senti peu emballé à l’idée de révéler ce que la « Nature » avait fait d’elle, comme s’il cherchait à retarder au maximum l’aveu fatidique de la Réalité, pour cultiver jusqu’au bout l’illusion que son couple est bien formé de deux « vrais papas » et non d’un seul père biologique. Le comble dans cette histoire, c’est qu’initialement, les deux amants souhaitaient déjà ignorer lequel des deux avait finalement fécondé l’ovule qui a donné naissance à leur fille. C’est par une bourde d’un médecin qui s’occupait de leur dossier qu’ils ont su accidentellement ce qu’ils se forçaient ignorer (car eux-mêmes voulaient s’auto-persuader de leur mensonge anthropologique !… Jusqu’où peut aller la sincérité dans sa perversion dénégatrice, quand même…). Ce qui est tordu, c’est que dans ce cas précis, on est confronté une nouvelle fois à un déni de la Nature au nom de la préservation de la Nature. Rosemblum, en effet, présente son projet d’homoparentalité comme une tentative de « désexuer la parentalité », pour ensuite montrer la parentalité artificiellement reconstituée comme plus naturelle que naturelle, comme aussi forte et belle qu’une parentalité traditionnelle ! Quel fascinant tour de passe-passe, quelle incroyable malversation…

 

Enfin, ce projet pro-gay de surnaturaliser l’homosexualité peut aller jusqu’à l’homophobie. Car rendre le désir homosexuel très naturel, c’est aussi lui demander d’être banal, et donc fatalement le nier à travers la promotion d’une hétérosexualité qui ne doit pas non plus être dite. Par exemple, Gustav Jäger (1832-1917) distinguait homosexuels actifs et passifs. Le passif est le féminin, l’actif masculin et même hyper-viril et comme tel, il est même plus masculin que l’homme « normal », c’est-à-dire hétérosexuel. » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 169) Le « plus que naturel » se transforme donc très vite en déni d’homosexualité. C’est un danger que voient très peu de promoteurs relativistes indifférents à l’homosexualité, mais qui est pourtant réel : « J’ose espérer à l’avenir qu’on ne parlera plus d’orientation sexuelle, que ça deviendra juste un fait naturel. » (une femme trentenaire lesbienne dans le documentaire « Coming In » (2015) de Marlies Demeulandre)
 
 

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Code n°171 – Tomber amoureux d’un personnage de fiction ou du leader de la classe

Tomber amoureux

Tomber amoureux d’un personnage de fiction ou du leader de la classe

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

L’idolâtrie jalouse et sentimentale pour l’acteur convoité ou le Don Juan des cours de récré

 

Quand on voit toutes les fois (quasi toutes) où l’homosexualité est apparue rien qu’à cause de la vue d’un acteur excitant, ou par complexe/admiration jalouse par rapport au beau gosse du lycée, plutôt qu’elle serait venue par le Réel ou par un être de chair et de sang aimant (même si, après, bien évidemment, l’icône du bellâtre cinématographique a pu être projetée sur des personnes réelles proches), on se dit : « Si l’homosexualité ne repose principalement que sur ce stimulus de merde là, elle est ballote, quand même ! »

 

C’est peu de dire que les personnes homosexuelles aiment les images : littéralement, elles les adorent ! Ce n’est pas de l’amour, mais bien de l’adoration. Quelque chose de possessif, d’inconscient, d’hypnotique, de « ravissant » (dans tous les sens du terme !). La caractéristique de ces images qui ôtent aux sujets homosexuels leur désir sexuel et leur liberté, c’est que même si elles peuvent être portées ou incarnées par des êtres humains de chair et de sang, elles sont quand même éloignées/éloignantes du Réel, retouchées, sublimées/déformées par les spots, les montages, le souvenir.

 

Sur les écrans et dans les fictions littéraires, rares sont les protagonistes homosexuels qui ne sont pas tombés amoureux d’un personnage de fiction, un bel acteur, une grande chanteuse, ou un être humain connu dans l’enfance et qui attire à lui un grand nombre de regards, genre le meilleur élève de la classe, le Don Juan sur qui toute l’attention se concentre. Ils disent eux-mêmes maintenir « des relations très intimes avec leur magnétoscope » (l’ami gay de Charlie dans le film « Urbania » (2004) de Jon Shear) et tomber amoureux des figurines de leurs livres, de leur télévision et de leurs magazines.

 

Ça n’arrive pas qu’au cinéma. Parfois, ça arrive par le cinéma au réel, et aux individus homosexuels bien existants ! Il semblerait que ce sont prioritairement les icônes cinématographiques qui ont fait l’effet d’électrochoc du désir homosexuel. Beaucoup de personnes homosexuelles ont voulu coucher avec l’archétype de la beauté défini par leur époque et les médias… même les moins midinettes d’entre elles. L’homosexualité masculine, par exemple, a souvent émergé d’un sentiment de non-conformité par rapport à l’image masculine imposée par les médias, d’une peur fondée avant tout sur certaines images faussées de l’homme réel : « J’avais l’impression que d’être homosexuel faisait de moi un sous-homme. C’est pour ça que j’ai longtemps été mal parce que je courais après une espèce d’image masculine, qui est un archétype social, mais qui n’est pas une réalité en définitive. Je courais après ça… et moi, je suis pas comme ça. » (Olivier, témoin homosexuel interviewé dans l’émission « Une Vie ordinaire ou mes questions sur l’homosexualité » (2002) de Serge Moati) La même chose semble s’être produite pour l’homosexualité féminine : la comparaison excessive à la femme-objet a certainement été décisive. « Je n’étais pas bien belle. Je n’étais pas une pin-up. J’étais toujours un peu rondouillarde… » (Micheline, femme lesbienne citée dans l’essai L’Homosexualité dans tous ses états (2007) de Pierre Verdrager, p. 50) L’homosexualité est le nom donné à une crainte d’incarner une anormalité sexuelle personnifiée. Elle procède très certainement d’une peur d’être un adulte, un homme, une femme, un individu unique, différent et libre, de côtoyer le mystère de l’autre et son propre mystère, d’aimer et d’être aimé, d’être vivant ou objet. Le désir homosexuel paraît être motivé à la fois par un éloignement du Réel (donc le devenir-objet, la mort), et surtout la peur d’être unique (donc la jalousie et la non-acceptation de soi).

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Télévore et Cinévore », « Homosexualité, vérité télévisuelle ? », « Super-héros », « Défense du tyran », « Fan de feuilletons », « Élève/Prof », « Don Juan », « Musique comme instrument de torture », « Bergère », « Éternelle jeunesse », « Actrice-Traîtresse », « Pygmalion », « Couple homosexuel enfermé dans un cinéma », « Substitut d’identité », « Peinture », « Chevauchement de la fiction sur la Réalité », « Amant modèle photographique », « Amant narcissique », « Solitude », à la partie « Fixette sur un amant perdu et déifié » du code « Clonage », à la partie « Grands Hommes » du code « Défense du tyran », et à la partie « Nécrophagie » du code « Cannibalisme », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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FICTION

 

a) Acteur, mon amour :

Opéra-Rock La Légende de Jimmy de Michel Berger

Opéra-Rock La Légende de Jimmy de Michel Berger


 

Dans les fictions traitant d’homosexualité, le héros homosexuel tombe souvent amoureux d’un être de papier, d’un chanteur, ou d’un acteur (même si intellectuellement, il se rend compte de sa chimère) : cf. le film « Dottie Gets Spanked » (1993) de Todd Haynes, le film « Emporte-moi » (1998) de Léa Pool, le film « Irma Vep » (1996) d’Olivier Assayas, la chanson « Corto » de David Jean, la B.D. Journal (1) (1996) de Fabrice Neaud, la chanson « La Fan de sa vie » de Zazie, le vidéo-clip de la chanson « Outta Love », le film « Toto Che Visse Due Volte » (« Toto qui vécut deux fois », 1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresto (dans le rapport de Fefe à Pietrino), le film « Les Amours imaginaires » (2010) de Xavier Dolan (avec Francis, le héros homo portant une photo de James Dean dans sa main), etc.

 

« Bobby la science, c’était mon premier vrai p’tit copain. » (Hugo parlant d’un personnage de revue scientifique d’adolescence à son futur amant Patrick, dans le téléfilm « Un Noël d’Enfer » – « The Christmas Setup » – (2020) de Pat Mills) ; « Je n’ai pas encore aimé – j’ai failli mourir d’amour quand Marlon Brando s’est déchiré le t-shirt sale en hurlant : ‘Stella ! Stella !’ et j’ai eu une flambée pour Burst Lancaster dans ‘Trapeze’, mais je n’ai pas encore vraiment aimé – et je me demande souvent, sourcils froncés et le trac au cœur, quand ça va se déclencher, où est-ce que je serai, avec qui ce sera et comment ça va se passer… » (le narrateur homosexuel dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 18) ; « C’est beau de sublimer, mais je commence à être pas mal vieux pour rêver que Jean Besré se meurt d’amour pour moi ou que Guy Provost m’enterre sous des tonnes de fleurs coupées parmi les plus rares et les plus odorantes. Ce petit théâtre ne suffit pas à remplir ma vie ni à combler mon besoin d’amour. » (idem, p. 19) ; « Comment j’ai su que j’étais gay ? Par exemple, je faisais sans arrêt le même rêve avec Daniel Radcliffe. » (Simon s’adressant à son amant Bram, dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti) ; « Moi, j’ai compris que j’aimais les mecs en regardant ‘Games of Thrones’. Je kiffais grave John Snow. » (Bram à Simon, idem) ; « Je suis déçu : t’es pas Ryan Gosling… » (Victor, le héros gay, ironique, s’adressant à son amant Raul qu’il désir beaucoup, dans le film « Plus on est de fous », « Donde caben dos » (2021) de Paco Caballero) ; etc.

 

C’est en général cet acteur qui lui apprend qu’il est homo : « Nous commencerons par cet acteur pornographique. Ça commence toujours par là… » (Samuel Ganes dans son one-man-show Petit cours d’éducation sexuelle, 2009) ; « Je l’ai aimé. C’était une grande vedette de cinéma. […] Tant qu’il y a de la pellicule, y’a de l’espoir. J’la manipule tous les soirs. » (Charlène Duval, le comédien travesti M to F parlant d’un de ses amants, dans son one-(wo)men-show Charlène Duval… entre copines, 2011) ; « Je suis sorti avec un chanteur… et il travaille à Disney maintenant. » (Matthieu dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H.) ; « C’est pas facile, le plaisir. Apprivoiser ton corps glacé. » (cf. la chanson « Que mon cœur lâche » de Mylène Farmer) ; « Merci La Redoute et Les 3 Suisses ! » (Nathalie, lesbienne, en train de se branler avec son gode, dans le one-woman-show Wonderfolle Show (2012) de Nathalie Rhéa) ; « Vous me faites penser aux gens qui regardent des photos d’art de modèles nus en ayant la gaule. Tous ces gens qui n’ont pas encore compris que l’art ne servait pas à bander lamentablement. » (Polly, l’héroïne lesbienne s’adressant à ses deux potes homos Mike et Simon, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 36) ; « Le grand secret de ta vie… Le seul homme que t’as aimé en photo : Rudolph Valentino. » (Charlène Duval, le travesti M to F, dans son one-(wo)man-show Charlène Duval… entre copines, 2011) ; « J’adore Mimi Mathy. Elle a tout d’une grande. […] J’adore Jean-Paul Belmondo. » (le coiffeur homosexuel du one-man-show Gérard comme le prénom (2011) de Laurent Gérard) ; « Bois-Rouge respire le fin d’un monde et ce n’est pas fait pour me déplaire. On y oscille entre un aujourd’hui naufragé et un hier mythique ou pour le moins littéraire dont vous êtes à mes yeux le personnage central. » (Émilie s’adressant à son amante Gabrielle, dans le roman Je vous écris comme je vous aime (2006) d’Élisabeth Brami, p. 143) ; « C’est ce jour-là que j’ai rencontré le premier amour de ma vie, il s’appelait David Bowie. Sa musique a changé ma vie. Moi j’ai changé mon nom pour lui. » (cf. « La Chanson de Ziggy » de Marie-Jeanne et Ziggy, dans l’opéra-rock Starmania de Michel) ; « Quand Brad Pitt est rentré, j’me suis transformé en gonzesse. » (un des comédiens parlant de l’acteur Brad Pitt débarquant dans un bar où il se trouvait, dans le spectacle « stand-up » Desperate Housemen (2010) de Stéphane Murat) ; « Depuis que je t’ai vu sur scène, j’en avais le souffle coupé. » (Un spectateur faisant sa déclaration en chanson à Paul, dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Faudrait pas me pousser pour me marier avec KD Lang. » (Stella, une des héroïnes lesbiennes du film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald) ; « J’ai passé une nuit de folie, les garçons ! Faut que je vous raconte ! Anna l’actrice, elle s’appelle Anna et pas Vanessa, elle est folle ! » (Polly, l’héroïne lesbienne du roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 34) ; « On se parle par écrans interposés. » (Daniel s’adressant à son amant-internaute adoré, Luther, qui vit à l’autre bout du planisphère, dans le film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « The Fluffer » (2001), Sean, étudiant en cinéma, tombe amoureux d’une star du porno gay. Dans le film « La Parade » (2011) de Srdjan Dragojevic, tous les personnages, homos ou hétéros, fantasment sur le film « Ben-Hur » : « Charlton Heston est trop craquant… » s’extasie Mirko, l’amant de Radmilo. Dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson, Stéphane, romancier célèbre, et Stéphane, celui qui fut son jeune amant, racontent leur première rencontre : Vincent accompagnait un ami qui venait faire signer son livre auprès de Stéphane à une séance de dédicaces. Dans le film « Strangers On A Train » (« L’Inconnu du Nord-Express », 1951) d’Alfred Hitchcock, Bruno tombe amoureux du fameux joueur de tennis Guy Haines qu’il rencontre dans un train. Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, Adam, le prêtre homo, danse la valse, complètement bourré, avec le portrait de Benoît XVI, son pape chéri qu’il est sur le point de tromper. Dans le film « Victor, Victoria » (1982) de Blake Edwards, King succombe au charme de Victor quand il le/la voit interpréter la chanson « The Jazz Hot » sur scène. Dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, la voix narrative tombe amoureuse de Mathilde, une star de la chanson. Dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, « M. », un des héros homos, dit « qu’il est amoureux d’Audrey Hepburn, l’actrice de ‘Breakfast At Tiffany’s » et « fan de Lio » (p. 39). Dans le one-man-show Hétéro-Kit (2011) de Yann Mercanton, Claude regarde avec envie à la TV le patineur artistique. Dans le film « Amour et mort à Long Island » (1996) de Richard Kwietniowski, un romancier s’amourache d’un jeune acteur qu’il va poursuivre. Dans le film « Lust » (2000) de Dag Johan Haugerud, l’un des deux amants avoue à son copain que durant son enfance, il est tombé amoureux du personnage fantastique « le Mounime » dans le livre de contes qu’ils sont en train de feuilleter amoureusement. Dans le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier, Loïc tombe amoureux d’un joueur de football, Rui, dont il a seulement vu la photo dans le journal. Dans la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia, Patou, un des « ex » de Bernard, adorait le chanteur Étienne Daho. Dans la pièce Une Souris verte (2008) de Douglas Carter Bea, Alex s’amourache de la star Mitchell Green. Dans le film « Comme un frère » (2005) de Bernard Alapetite et Cyril Legann, Sébastien change de nom et se fait appeler Zack en référence à un héros de série télé qu’il a adulé dans son adolescence (Zack de Sauvez par le Gong). Dans la pièce Jerk (2008) de Dennis Cooper, Dean est amoureux de Luc Alphin, un comédien de la série Flipper le Dauphin. Dans le film « F. est un salaud » (1998) de Marcel Gisler, Beni, un adolescent, vit une histoire d’amour avec Fugi, un chanteur de rock. Dans son one-woman-show La Lesbienne invisible (2009), Océane Rose Marie dit en plaisantant qu’elle a eu le coup de cœur pour Hélène Rolles, l’héroïne de la série Hélène et les garçons. Dans la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim, Sébastien est attiré par Filip du groupe des 2BE3, et par ailleurs, appelle son petit copain « J.R. » (= Jean-René), comme le personnage de Dallas ; quant à Marcy, sa meilleure amie lesbienne, elle tombe amoureuse d’Anne-Lise, l’ex-Miss-Tee-Shirt-Mouillé de son camping de vacances. Dans le film « Backstage » (2005) d’Emmanuelle Bercot, on observe une réelle fascination de la part de Lucie pour la chanteuse de variétés Lauren Waks. Même processus dans le film « Le Rôle de sa vie » (2004) de François Favrat, dans lequel Claire Rocher, pigiste dans la mode, rencontre Élisabeth Becker, une actrice connue dont elle devient l’assistante personnelle. Dans le film « Saisir sa chance » (2006) de Russell P. Marleau, Chance, le héros homosexuel, dit avoir eu son premier émoi homosexuel à 4 ans, quand sa mère l’a amené voir le ballet Casse-Noisette (1892) de Tchaïkovski, et qu’il a été fasciné par le danseur. Dans la pièce Carla Forever (2012) de Samira Afaifal et Yannick Schiavone, Kévin, le héros homosexuel, a des posters de 2BE3 au mur de sa chambre d’adolescent. Dans le film « Week-End » (2012) d’Andrew Haigh, Glenn avoue qu’adolescent, il « se branlait » devant son poste de télévisuel face à l’acteur Rupert Graves. Dans le film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras, Dany, le héros homosexuel post-pubère, est attiré par les hommes poilus et matures : il commence à se masturber avec des photos d’hommes dans les magazines. Dans le film « Fotostar » (2004) de Michèle Andina, Konrad travaille dans un magasin de développement de photos, et « flashe » sur un inconnu posant sur l’une d’elles, qu’il va chercher à draguer (… déjà, au tout début de l’histoire, on l’avait vu, « se rincer l’œil » devant des photos de magazines de lutteurs olympiques qu’il matait dans les cabinets, en cachette…). Dans le film « Néa » (1976) de Nelly Kaplan, la jeune Sibylle Ashby passe son temps à consulter ou à lire des ouvrages érotiques qu’elle vole dans la librairie genevoise d’Axel Thorpe. Dans le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald, Stella, l’un des deux héroïnes lesbiennes, regarde régulièrement des films pornos lesbiens pour s’exciter toute seule. Dans le film « Sils Maria » (2014) d’Olivier Assayas, Maria découvre sa partenaire de scène Jo-Ann (avec qui elle doit jouer une liaison lesbienne) à travers internet et le cinéma, et ça vire à l’obsession par écrans interposés. Jo-Ann produit la même fascination chez Valentine, l’assistante de Maria, qui est fan de la jeune actrice depuis bien plus longtemps encore que sa patronne. Dans la pièce Happy Birthgay Papa ! (2014) de James Cochise et Gloria Heinz, Chris, le blond, tombe amoureux d’une star du football, Ruzy Dagneau, joueur noir. Dans le téléfilm « Just Like A Woman » (2015) de Rachid Bouchareb, Mona, l’héroïne lesbienne, s’entraîne à danser la danse orientale devant une danseuse du ventre, Samia Kamaal (la plus grande danseuse d’Égypte), diffusée à la télé. Dans la pièce Et Dieu créa les fans (2016) de Jacky Goupil, Arnaud, le fan de Johnny Hallyday, regrette que son chanteur-fétiche ne s’offre à lui comme il le voudrait : « Avec Johnny, je suis pas sûr que je pourrais avoir des relations sexuelles. » Dans le film « Ma Vie avec John F. Donovan » (2019) de Xavier Dolan, Rupert, héros homo de 10 ans, anglais, maintient avec John F. Donovan, un acteur de série B nord-américain, trentenaire homosexuel, une relation épistolaire passionnelle à distance pendant 5 années. Rupert idolâtre sa star fétiche, et regarde tous les épisodes de la série (Hellsome High) où joue John, vit sa vie par procuration à travers lui : « C’était mon seul lien avec la vie dont je rêvais. ». Ils échangent une centaine de lettres… et John finit par trahir le garçonnet pour que son homosexualité ne soit pas dévoilée au grand jour. Suite à ce « drame », Rupert déchire tous les posters de son acteur vedette qu’il avait accrochés dans sa chambre.

 

Film "House Of Boys" de Jean-Claude Schlim

Film « House Of Boys » de Jean-Claude Schlim


 

Le référent fantasmatique, le prisme à travers lequel le héros homosexuel envisage les personnes réelles qui l’entourent, et notamment son partenaire amoureux, est en général une créature mythique, littéraire, télévisuelle : « J’avais lu La Citadelle de A.J. Cronin, qui décrivait l’héroïne sous les traits d’une femme particulièrement belle. J’imaginai un moment que c’était elle. » (Anamika face à Linde, sa future amante, dans le roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, p. 10) ; « Mourad [l’un des deux héros homosexuels] finit par s’emparer d’un mensuel culturiste acheté à la gare, cacha la tête d’un modèle herculéen et s’efforça de la remplacer imaginairement par celle de Jason. » (Christophe Bigot, L’Hystéricon (2010), p. 244) ; « J’ai adoré les photos de vacances que tu m’as envoyées. Les poissons que tu as capturés sont énormes ! On distingue ton torse à travers le vêtement mouillé : tu deviens un une homme charmant. Si tu as d’autres photos après une baignade nudiste… je suis preneur ! » (Randall s’adressant à Ernest, le copain de son fils, dans le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 235) ; « Tu ressemblais à un acteur de bollywood. » (un des protagonistes homos à son amant, dans la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy) ; « Ronit était là. Telle qu’Esti en avait gardé le souvenir, et plus encore. Dès le premier coup d’œil, on voyait qu’elle ne vivait plus ici ; elle ressemblait à une fleur exotique qui aurait poussé de façon inopinée entre les pavés. Rose et somptueuse, elle était habillée comme les femmes des magazines ou sur les affiches. » (Ronit, l’héroïne lesbienne observant goulûment son amante Esti, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 85) ; « Il y a entre eux [Denis et son amant Luther] une intimité sensuelle comparable, à la relation entre un spectateur et son chanteur. » (la voix-off du film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta) ; etc. Par exemple, dans la nouvelle « Au musée » (2010) d’Essobal Lenoir, le narrateur homosexuel rencontre un joli garçon pendant qu’il visite Le Louvre, et s’imagine qu’il « baise » avec lui comme s’il copulait avec un des personnages du tableau qu’ils observent : « J’entrepris de comparer ostensiblement la paire de fesses de marbre noir du Cupidon qui patinait Psyché à celle de jean noir du garçon figé par l’admiration. » (p. 108)

 

La passion violente pour l’homme-objet ou la femme-objet hétérosexuel(-le) a tout l’air d’une idolâtrie, une traversée de miroir qui rend amnésique : « Alors je l’ai vu. J’en avais entendu parler à la télévision comme tout le monde et j’avais suivi ses exploits. Il est apparu. […] Écran noir. Plus rien ne passe. C’est comme si le stade s’était habillé d’un voile noir mais un peu transparent. » (le narrateur homosexuel du roman Comment j’ai couché avec Roger Federer (2012) de Philippe Roi, p. 4) Elle est proche du fanatisme, de la folie, de la fusion-rupture, car bien évidemment, elle instaure un rapport relationnel inégalitaire dominé/dominant. Par exemple, dans la pièce Carla Forever (2012) de Samira Afaifal et Yannick Schiavone, Angelo, l’un des héros homos refoulés, après sa tentative de kidnapping de Carla Bruni dont il dit être amoureux, manque de peu d’être interné dans un hôpital psychiatrique, et est activement recherché par la police. Dans l’incipit de la pièce En ballotage (2012) de Benoît Masocco, Georges regarde à la télévision son « mec » Édouard faire sa campagne électorale, en le critiquant sévèrement comme s’il était un spectateur lambda, parce qu’il n’épouse pas du tout les mêmes opinions politiques que lui (… mais le public n’apprend qu’après-coup la nature amoureuse, ou plutôt passionnelle, de leur relation… une relation vouée à l’échec).

 

Parfois, l’homme télévisuel occupe une place plus importante dans le cœur du héros homosexuel que l’amant réel : « Je te préviens : le home-cinéma, c’est moi qui me le garde. » (Claude à son copain François, au moment de leur rupture, dans le one-man-show Hétéro-Kit (2011) de Yann Mercanton) ; « C’était comme au cinéma. C’était au bord de la plage. C’est alors qu’il m’est apparu. Un petit air de Ryan Goslin… avec le corps d’Élie Sémoun. » (Benjamin racontant sa première rencontre avec Arnaud, à qui il a fait volontairement un croche-patte, dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit) ; etc.

 
 

b) Le beau gosse du lycée :

Je vous renvoie également à la partie « Grands Hommes » du code « Défense du tyran » dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Vidéo-clip de la chanson "Popular" de Nada Surf

Vidéo-clip de la chanson « Popular » de Nada Surf


 

Dans le même registre, mais à une échelle un peu plus accessible, le héros homosexuel se choisit un autre écran humain sur lequel projeter ses fantasmes sexuels naissants. En général, l’heureux élu est le garçon le plus populaire du lycée, celui qui a toutes les filles à ses pieds, qui est super bon en sport, qui a tous les copains qu’il veut, bref, l’homme qui représente la « coolitude » hétérosexuelle la plus naturelle : cf. le film « To Play Or To Die » (1990) de Frank Krom, le film « Little Black Boot » (2004) de Colette Burson, le film « Almost Normal » (2005) de Marc Moody, le film « Get Real » (« Comme un garçon », 1998) de Simon Shore, le vidéo-clip de la chanson « Popular » du groupe Nada Surf, le film « Le Grand Alibi » (2007) de Pascal Bonitzer, le film « Winter Kept Us Warm » (1965) de David Secter, le film « Oi ! Warning ! » (1999) de Dominik et Benjamin Reding, le film « Venner For Altid » (« Amis pour toujours », 1986) de Stefan Christian Henszelman, la pièce Missing (2008) de Nick Hamm, etc.

 

C’est quand même assez flagrant comme dans beaucoup de cas fictionnels, les réalisateurs ou les romanciers projettent leurs fantasmes inassouvis et adolescents de midinette se faisant courtiser par l’inaccessible Don Juan de leur lycée d’adolescence. Par exemple, dans le téléfilm « Un Noël d’Enfer » – « The Christmas Setup » – (2020) de Pat Mills, Hugo, le héros gay adulte, retrouve Patrick un ancien camarade de lycée (de 2 ans son aîné) dont il tombe amoureux : « Il est toujours aussi mignon. Voire encore plus qu’avant. Tout le monde adorait Patrick. En plus d’être super intelligent, il était ultra populaire et sûr de lui. Les profs disaient qu’ils seraient président. » (Hugo). ans le roman Journal de Suzanne (1991) d’Hélène de Monferrand, Suzanne tombe amoureuse de la fille la plus convoitée du lycée, Jacqueline : « Elle était populaire et n’avait évidemment pas besoin de moi. » (p. 37) Dans le téléfilm « Clara cet été-là » (2003) de Patrick Grandperret, Clara, l’héroïne lesbienne, scotche sur Sonia, une jeune chanteuse bisexuelle qui prépare un disque et qui a un franc succès avec les garçons : « Attends, Sonia, elle peut pas être lesbienne. Elle est trop belle. Tous les garçons, ils craquent sur elle. […] T’as une de ces cotes avec les mecs, toi. » Dans le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro, Léo tombe sous le charme du beau Gabriel, le beau gosse du lycée : « Le nouveau est super mignon. » (Giovanna, la « fille à pédés » s’adressant à son meilleur ami homo Léo) Au début de la pièce Entre vos murs (2008) de Samuel Ganes, Hitler tombe amoureux du premier de la classe, Ludwig. Dans le spectacle de marionnettes L’Histoire du canard qui voulait pas qu’on le traite de dinde (2008) de Philippe Robin-Volclair, Ernest a le béguin pour Raoul, le Don Juan de son école. Dans le roman Cosmétique de l’ennemi (2001) d’Amélie Nothomb, Texor, à 7 ans, est fasciné par Franck, le garçon le plus beau de sa classe. Dans le roman J’apprends l’allemand (1998) de Denis Lachaud, Ernst tombe amoureux de la photo de son correspondant allemand Rolf avant de le rencontrer en vrai. Dans le film « La Robe du soir » (2010) de Myriam Aziza, la jeune Juliette, secrètement amoureuse de sa prof de français, est jalouse du Don Juan de son collège, le bel Antoine : elle a peur qu’il lui fasse concurrence. Dans le film « Basket et Maths » (2007) de Rodolphe Marconi, Jérôme tombe amoureux de Cédric, le leader de la classe. Dans le roman Avec Bastien (2010) de Mathieu Riboulet, Bastien tombe amoureux à 8 ans de Nicolas, un de ses camarades de classe, qui disparaît peu après dans un accident de voiture. Dans le film « Cappuccino » (2010) de Tamer Ruggli, Jérémie s’éprend de Damien, le leader de sa classe, et s’imagine, parce que celui-ci accepte de se faire sucer par lui, que c’est le « grand amour ». Dans le film « Contra-corriente » (2011 de Javier Fuentes-León, Santiago craque totalement pour son amant Miguel qu’il voit diriger une célébration funéraire, et qu’il photographie de loin : « Tu avais tout d’un leader ! » Dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons (2012), Didier Bénureau se dit, dans son adolescence, captivé par « Pierre et Stanislas, les premiers de la classe ». Dans le film « Les Garçons et Guillaume, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne, Guillaume, le héros bisexuel, essuie son premier râteau avec Jeremy, le beau gosse de sa High School en Angleterre, qu’il a cru aimer et qu’il a attendu comme une femme attend un homme. Dans le film « Naissance des pieuvres » (2007) de Céline Sciamma, Marie est fascinée par Floriane, le capitaine de l’équipe de natation synchronisée… et sa future amante. Dans la série Faking It (2014) de Dana Min Goodman et Julia Wolov, Amy et Karma essaient absolument d’être populaires dans leur lycée en faisant courir la rumeur qu’elles sont lesbiennes. Dans le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, Charlène tombe amoureuse de Sarah, la Don Juane du lycée. Dans son one-man-show Les Bijoux de famille (2015), la langue de Laurent Spielvogel, le héros homosexuel, est fasciné par un camarade de lycée, le beau Stanislas : « Il est super chic. » Dans le film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo, lors d’une intervention en milieu scolaire de l’association Act-Up, un élève de terminale, sans doute homo en herbe, flashe sur le beau Nathan, militant venu faire de la prévention. Dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa, Phil, le héros homo, voit débarquer (au ralenti) le beau Nicholas dans sa salle de classe, et c’est tout de suite le coup de foudre. Dans la série et téléfilm It’s a Sin (2021) de Russell T. Davies), Ritchie tombe amoureux de Ash, le beau gosse musclé de la fac.

 
Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, tous les héros de la bande de potes gays évoquent en fin de soirée leur premier grand coup de cœur homosexuel. Emory, par exemple, a vécu sa plus forte (et plus décevante) histoire d’amour au collège, quand il est tombé en amour pour un élève plus âgé que lui, Peter : « Il est absolument beau. » dit-il, les yeux fixés dans le vide ; « Je l’ai aimé dès que mes yeux se sont posés sur lui. J’étais au collège et lui au lycée. […] Peter était fiancé à cette conne de Loraine, dont la mère était une vraie salope. »

 

Dans le one-man-show Jefferey Jordan s’affole (2015) de Jefferey Jordan, le héros homosexuel dit qu’il s’est lié d’amitié à l’école avec un certain Julien, un gars avec qui il a vécu ses premières expériences sexuelles dans les cabinets de toilettes (ils se sont comparés les zizis), et qui ressemblait au chanteur Steeven du groupe de Boys Band Alliage. Jefferey dit être attiré toujours par le même type d’hommes : des grands blonds aux yeux bleus. Et Julien correspond à cet archétype, même s’il est africain : « Un Africain blond aux yeux bleus, c’est bizarre, je vous l’accorde. »
 

« Je lui montrais comment faire une explication pour le bac en français. On avait un groupement de textes tiré des Fleurs du mal. Quand je relisais avec lui Parfum exotique, j’avais des frissons des pieds à la tête. J’avais l’impression que ça parlait de lui, de nous. » (Mourad, l’un des personnages homosexuels, parlant d’Esteban, un camarade de classe, dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 339) ; « Je suis sûr qu’adolescent, tu étais élu élève le plus populaire. » (Denis en extase devant son amant Luther, dans le film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta) ; « À 17 ans, j’me rendais pas compte. J’le trouvais beau, brillant, talentueux, intelligent. J’crois qu’on était toutes amoureuses de lui. » (Sandrine, pourtant lesbienne, parlant de Raphaël, dans l’épisode 261 de la série Demain Nous Appartient, diffusé sur TF1 le 3 août 2018) ; « C’était le plus beau mec de la ville. » (Sandrine Lazzari, pourtant lesbienne, se justifiant d’être tombée amoureuse de son amour de jeunesse Guillaume, dans l’épisode 509 de la série Demain Nous Appartient, diffusé le 17 juillet 2019 sur TF1) ; etc.

 

En remontant le fil d’Ariane, on découvre que c’est souvent la comparaison auto-dévalorisante aux autres et surrévaluante par rapport à une exception d’entre eux, qui construit la fascination idolâtre du héros homosexuel. Par exemple, dans le roman Papa a tort (1999) de Frédéric Huet, Julien tombe amoureux de son voisin de pupitre, le bel et sculptural Antoine : « J’ai remarqué qu’Antoine, il est beaucoup plus musclé que moi. […] Il est drôlement bien foutu. » Dans la pièce Hors-Piste aux Maldives (2011) d’Éric Delcourt, Francis, le personnage homosexuel, avoue, tout admiratif, à Tom, un ancien ami d’enfance du club de foot qu’ils fréquentaient ensemble, qu’il était à l’époque déjà amoureux de lui : « Avec ton âme de leader… »

 

À la base, c’est la jalousie qui explique l’adulation pour le chef de la classe. Par exemple, dans le film « Romeos » (2011) de Sabine Bernardi, Lukas, l’héroïne trans F to M, tombe amoureuse de Fabio, le beau gosse le plus populaire du lycée ; mais cet amour n’est en réalité qu’un désir de fusion égoïste : « Je suis jaloux de sa dégaine ! » Dans le one-man-show Gérard comme le prénom (2011) de Laurent Gérard, Laurent scotche complètement sur Patrick, l’homme le mieux « gaulé » de sa salle de sport, parce qu’il rêve de fusionner avec lui : « Envie de lui… envie de lui ressembler, tout simplement. » Dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, Omar tombe amoureux de Khalid, le meilleur élève de la classe, qui aura le privilège de rencontrer le Roi Hassan II du Maroc à sa place (c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il assassinera son amant plus tard).

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Acteur, mon amour :

Dans les fictions traitant d’homosexualité, le héros homosexuel tombe souvent amoureux d’un être de papier, d’un chanteur, ou d’un acteur. Je vous renvoie aux documentaires « Amoureuse de Greta Garbo » (2000) de Lena Einhorn, « Jodie : An Icon » (1996) de Pratibha Parmar, aux nombreux calendriers des Dieux du Stade achetés par un public LGBT, aux couvertures de la presse gay, à « l’excitation de groupies attardées » des journalistes de Têtu pour les beaux gosses de la planète (David Beyckam, Enrique Iglesias, Brad Pitt, George Clooney, etc.) et pour les coming out surprise des célébrités (Zakary Quinto, Jim Parsons, Ricky Martin, Jodie Foster, M. Pokora, etc.). Par exemple, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, Omar, le personnage homosexuel, est amoureusement fasciné par le Roi Hassan II du Maroc qu’il voit à la télé… ce qui se trouve être une réalité autobiographique de l’auteur lui-même. Dans l’émission Ça se discute consacrée le 18 février 2004 à l’homosexualité féminine, Sophie dit être amoureuse de Céline Dion. Le film « Scandaleusement célèbre » (2007) de Douglas McGrath retrace l’histoire vraie de Truman Capote qui, en lisant les journaux, tomba amoureux d’un serial killer. Dans son autobiographie Folies-Fantômes (1997), Alfredo Arias raconte comment son ami Ernestino aime admirer la musculature des sportifs.

 

Je connais dans mon entourage énormément d’amis homosexuels qui ont vécu leurs premiers émois homosexuels par le biais d’un mannequin, d’un acteur, d’un beau chanteur, ou d’un sportif. Par exemple, une de mes amies me dit qu’elle a su qu’elle était lesbienne en regardant la patineuse Katarina Witt.

 

« Je fantasme souvent sur des gars… souvent inaccessibles. […] Je tombe amoureux des hétéros et des stars (ex : M. Pokora depuis son nouvel album et depuis que je suis ses interviews). » (Galopeur, internaute s’exprimant sur le site Doctissimo, le 11 mai 2008) ; « L’impact de la fiction sur un jeune homosexuel, il est colossal. C’est rompre la solitude. Et celui qui n’a que le film homo pour s’identifier, il partage ce secret. Et ce secret, c’est un personnage de fiction. » (Céline Sciamma, réalisatrice lesbienne, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Out » (2014) de Maxime Donzel) ; « Ce garçon est Cinéma. » (Christophe Honoré, parlant d’un acteur dont il est amoureux, dans son autobiographie Le Livre pour enfants (2005), p. 97) ; « J’aime vous lire à peu près comme on aime un amant. […] J’ai voulu vous écrire quand je suis tombé amoureux de Stéphane, le vôtre, en lisant La Vie sans lui. » (cf. un extrait d’une lettre de Florian, un fan lecteur de Pascal Sevran, dans l’autobiographie de ce dernier, Le Privilège des jonquilles, Journal IV (2006), p. 85) ; « Quand on regarde une série, on se dit : ‘Celle-là, elle est mignonne…’, ‘Celle-là, elle est mignonne…’, etc. » (Fanny, une femme lesbienne s’exprimant dans l’émission Dans les yeux d’Olivier, « Les Femmes entre elles » d’Olivier Delacroix et Mathieu Duboscq, diffusée sur la chaîne France 2, le 12 avril 2011) ; « Un beau jour, mon regard croisa celui d’un garçon qui ne cessait de cocher, je ne sais quoi, dans son journal. […] Tantôt souriant, tantôt faisant la moue, ses mimiques très drôles lui donnaient cette familiarité, si sympathique, des personnages de bandes dessinées. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 99) ; etc.

 

Dans l’équipe de chroniqueurs de l’émission Homo Micro, sur Radio Paris Plurielle, Fabien, le spécialiste de la « Chronique Santé », avoue qu’il a flashé très jeune sur l’acteur de la série L’Homme de l’Atlantique, Patrick Duffy.

 

Patrick Duffy

Patrick Duffy


 

Les sentiments pour un acteur ou une actrice de cinéma pointe souvent en toile de fond une jalousie et une schizophrénie mal gérées : « J’étais en adoration devant un animateur d’Europe 1, Jean-Louis Lafont, dont la voix et l’allure d’éternel adolescent me ravissaient. Je collectionnais les autocollants avec sa photo et passais tout mon argent de poche en achat de 45 tours. Europe 1 réalisait certaines de ses émissions en direct dans différentes villes de France, le fameux ‘Podium’. En prévision de son passage dans notre région, je me préparais donc à cet événement en endossant le rôle de sa femme imaginaire dans mes jeux. J’avais choisi un prénom de fée : je m’appelais Viviane Lafont. » (Jean-Michel Dunand, Libre : De la honte à la lumière (2011), p. 29) ; « À l’adolescence, j’ai commencé à regarder les films autrement. Je craquais pour les acteurs, mais au lieu de m’imaginer vivre une histoire très romantique avec eux, je m’imaginais dans leur peau, je m’imaginais eux. C’est un peu bizarre, mais je pense quand même que c’était bien du craquage adolescent. » (Isabelle dans son article « Tom Boy à l’affiche »); etc.

 

Dans son autobiographie Prélude à une vie heureuse (2004), le bel Alexandre Delmar avoue être tombé amoureux du personnage d’Esteban dans le dessin animé franco-japonais Les Mystérieuses Cités d’Or : « Oui, on peut trouver un personnage de dessin animé infiniment beau ! Absolument ! Je ne trouve pas ce concept du tout surprenant. » Puis il le compare à l’acteur principal d’une série nord-américaine de son adolescence : « Bon, d’accord, je dois quand même reconnaître qu’il n’est pas aussi beau qu’un garçon de mon âge qui joue dans une autre série, Sauvés par le Gong, et qui répond au doux prénom de Zach. Tout me plaît chez lui. De la tête aux pieds, sans la moindre exception. Sa coupe de cheveux, sa blondeur, son visage fin, son teint hâlé, son look décontracté, sa popularité, son succès auprès des filles… Je voudrais tellement lui ressembler, même un tout petit peu. Mais il approche de la perfection faite ‘garçon’, ou du moins de l’image que je peux m’en faire, que je ne vois pas comment je pourrais lui arriver à la cheville. » (pp. 13-14) À l’âge adulte, Alexandre Delmar continue à se faire des films avec des acteurs de ses fictions : « Je tombe littéralement amoureux d’un acteur de film prénommé Johan et son image hante chacune de mes nuits. » (idem, p. 110)

 

En règle générale, cela vexe un peu les membres de la communauté homosexuelle de découvrir que leur premier émoi sexuel est d’abord télévisuel et non réel… car quoi de plus naïf, adolescent, et immature, que de prêter des sentiments à une idole de papier, à un écran de télé, ou à un chanteur inaccessible ? Quoi de plus obsessionnel, schizophrénique, et pathétique que de projeter sincèrement sur de beaux acteurs retouchés de partout ses propres fantasmes d’homosexualité (… pour, la plupart du temps, ne pas assumer la sienne…) ?

 

Dans mon parcours personnel, je peux attester que mon désir homosexuel n’est pas venu d’abord pour une personne de mon entourage réel (mon frère, mon grand-frère, mon père, mon cousin, un prof, un camarade de classe, un ami de la famille, que sais-je encore), mais m’a été annoncé par des êtres plus lisses : les illustrations de la Grèce Antique par le dessinateur homosexuel Roger Payne sur des livres pédagogiques, les catalogues par correspondance La Redoute ou Les 3 Suisses, les manuels de biologie du collège ou les livres d’éducation sexuelle de la maison, des acteurs – pas forcément dénudés d’ailleurs – des séries télévisées et des films que je regardais : Sean Connery, Alex Corretja, Pete Sempras, Alec Baldwin, les hommes des films de la Movida espagnole. Ce n’était même pas des images érotiques à proprement parler. Il suffit d’un bout de bras, d’une chemise échancrée, d’un beau visage, d’une publicité suggestive, un bidou qui dépasse, etc., pour que le charme agisse. Par conséquent, nul besoin de partir en croisade contre le porno, de traquer la moindre nudité, ou de s’offusquer des hommes-objets s’affichant en slip sur les affiches publicitaires urbaines ; pas de quoi jeter un voile pudique sur les photos de Gay Pride, les couvertures de Têtu, et d’enfermer ses enfants chez soi. Certes, plus les corps perdent de leur intimité, plus ils appellent à la pulsion homosexuelle, poétiquement appelée « sentiment » ou « amour ». Mais je crois qu’elle arrive aussi par des voies très innocentes, anodines, et belles.

 

Sean Connery

Sean Connery


 
 

b) Le beau gosse du lycée :

Pour pallier à un effondrement identitaire, à un manque d’assurance et de confiance en soi, ou plus fondamentalement à un complexe de vivre, certaines personnalités – qui se révèleront parfois homosexuelles à l’âge adulte –, choisissent de s’identifier à des supers-héros télévisuels, ou bien à des personnes de leur entourage (scolaire) présentées extérieurement comme fortes (fortes par la beauté, l’intellect, le charisme, la séduction, la direction, les attributs sexuels et physiques, etc.) : ce fut le cas de Yukio Mishima, d’Arturo Arnalte, et de tant d’autres. « Je crois bien me souvenir d’avoir envié, en mon for intérieur, ceux de mes camarades qui connaissaient des jeunes filles. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 78) ; « On a tous été traumatisés, à des degrés divers, par les cours de foot au collège. Ce moment cruel où les plus populaires de la classe, de gros beaufs hétéros que vous aimiez en secret, choisissaient un à un les membres de leur équipe, et durant lequel, évidemment, ils vous choisissaient en dernier… » (cf. la revue Têtu, n°127, novembre 2007, p. 107) ; « Il me fascinait et j’aspirais à lui ressembler. Et je me suis mis à parler, moi aussi, de Godard, dont je n’avais rien vu, et de Beckett, dont je n’avais rien lu. Il était évidemment bon élève et ne manquait jamais une occasion d’afficher une distance dilettante avec le monde scolaire. » (Didier Éribon, Retour à Reims (2010), p. 175) ; « En sixième, j’ai oublié mademoiselle Levreau pour tomber amoureuse de la première de la classe, moi qui n’étais que deuxième, une certaine Marie-Joëlle. » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), p. 47) ; « Déjà j’adorais Gabrielle, quand j’étais jeune, parce qu’elle était super brillante, brillante à l’école, brillante partout j’adorais Gabrielle. » (Catherine, femme lesbienne de 32 ans, s’exprimant dans l’essai Se dire lesbienne : Vie de couple, sexualité, représentation de soi (2010) de Natacha Chetcuti, p. 58) ; « J’ai été traité de fille très jeune (6/8 ans) par un beau-frère assez tyrannique, avec le recul je m’aperçois que je ne m’en suis jamais vraiment remis… tout du moins ma construction en tant qu’homme a été très compliqué, j’ai toujours eu du mal à me sentir viril (pour résumer)… et avec du recul, je me rend compte que j’ai passé mon enfance à essayé de copier les mimique des gars que j’admirais (le profil hétéro, chef de bande, bagarreur, sportif, drôle, avec du succès avec les filles). Même si je ne suis pas devenu comme eux, j’essayai du moins de me faire accepter par eux, je voulais, en fait, être eux (en lisant les 1ères page de Confession d’un Masque de Mishima, j’ai vu que c’était le cas de certains homos)… Malgré tout cela, je ne me sentais jamais légitime dans ma virilité, toujours mal dans ma peau, et un peu escroc sur les bords… » (cf. le mail d’un de amis homosexuels, de 23 ans, qui m’a écrit en novembre 2011) ; « Je sens pourtant que Charles-Henri tend à m’échapper. Il s’amuse bien mieux avec les autres garçons, ceux qui font du sport eux aussi, depuis toujours, qui font de la musique, comme lui, qui parlent sûrement mieux des filles. C’est un combat pour garder son amitié. » (Eddy Bellegueule dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 219) ; « C’est pour un ami de collège que j’ai éprouvé le premier sentiment. » (un témoin homo suisse dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta) ; « Quelqu’un me plaît dans ma classe. Il est l’un des seuls à avoir pris ma défense face aux hyènes moqueuse qui déversent leur fiel sous le préau et dans la cour. Il s’appelle Fabien, je l’admire… Un peu mon héros. Il est fort en foot. Il a un joli sourire qui s’ouvre sur les dents du bonheur et le visage criblé de taches de rousseur. Il rigole tout le temps. C’est la première fois qu’un garçon est gentil avec moi. Grâce à lui, de la catégorie ‘innocente victime’, je passe à celle de petit favori du garçon le plus populaire de la classe. Lui, il me défend, il me protège. Il leur dit d’arrêter. Alors forcément, mon coeur lui est acquis ! » (c.f. l’autobiographie Fils à papa(s) (2021) de Christophe Beaugrand, Éd. Broché, Paris, p. 20) ; etc.

 

J’ai connu dans mon entourage amical homosexuel des hommes qui, à l’école primaire ou dans leur enfance, m’ont avoué qu’ils avaient fortement admiré les chefs de bande de la cour. En filigrane derrière les sentiments, on peut lire une rivalité et une jalousie mal gérées : « Ayant cherché à comprendre vers la quarantaine ce qui pourrait être à l’origine de mon désir homosexuel – et éclairé alors, ou peut-être dirigé, par les pistes que donnait René Girard dans Des choses cachées depuis la fondation du monde – j’ai pensé repérer, en relisant mon histoire, un premier symptôme vers 8/10 ans dans une relation de rivalité dont l’objet était le ‘prestige intellectuel’ d’être le premier de la classe (bien que je sois loin d’être un intellectuel – je suis agriculteur – j’ai eu une scolarité facile, notamment à l’école primaire), et que le rival est devenu malignement objet du désir, pas encore réellement sexuel à cet âge, mais cela en avait l’avant-goût. Cette année-là donc, un autre Philippe me grillait la première place, et ma jalousie fut telle que j’en faisais ma tête de turc et ma victime allant jusqu’à des gestes obscènes sur sa personne. Tout de suite après – ou bien l’année suivante ? – je découvrais qu’il était mon meilleur et seul ami, bien que je doute aujourd’hui que la réciproque ait été vraie. Nous nous sommes perdus de vue, âgés de 12 ans, dans la dislocation de notre société (nous sommes des Français d’Algérie). Je l’ai revu 10 ans plus tard à l’occasion d’un mariage, et compris alors qu’il avait été mon premier amour. Tous mes désirs de garçons par la suite dans la pré-adolescence, l’adolescence et le début de l’âge adulte ont suivi le même schéma. Innommés d’abord, j’ai compris assez tard, vers 18 ans, qu’ils étaient un désir homosexuel exclusif. Mon hypothèse est-elle loufoque, ou avez-vous également rencontré ce type de construction ? » (cf. un mail d’un ami que j’ai reçu en décembre 2012)

 

Pour ma part, je dois avouer très franchement que je ne suis jamais tombé d’un camarade de classe ni même été attiré par les garçons populaires de mon lycée… mis à part peut-être une fascination pour un certain Bertrand, en terminale, mais je ne rêvais pas de lui la nuit pour autant, et n’avais pas de photo de lui cachée dans mon cahier de textes ^^.

 
 

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Je suis autant homosexuel que gay !

Je suis autant HOMOSEXUEL que GAY. Hypocrisie si je soutenais le contraire! Le désir homosexuel existe en moi ; et je fais partie d’une communauté humaine de par l’existence de ce désir, communauté qui s’appelle la communauté homosexuelle. J’assume les deux ! Les personnes homosexuelles qui se disent « homosexuelles et surtout pas gay » (c’est-à-dire la grande majorité des personnes homosexuelles puisque quasiment toutes se définissent « hors-milieu »… même si à de rares moments, leur snobisme « dark & camp » leur fera dire, porte-cigarette à la main, qu’elles sont quand même fières d’être « des pédés ») se servent de leur mépris de l’homosexualité visible pour se justifier de pratiquer l’homosexualité de manière invisible, discrète, pudique et soi-disant « plus chaste » que dans le « ghetto marchand et stéréotypé du Marais ». Ainsi, ils ne remettent pas en cause pour eux-mêmes la pratique homosexuelle, mais au contraire, ils l’altérisent, l’extériorisent avec agacement, ils en font hypocritement une question d’image déconnectée du réel et totalement distancée d’eux-mêmes… alors que bien entendu, leurs actes homosexuels existent et sont bien concrets (ce ne sont pas les autres qui les posent à leur place!)! En somme, ils font de l’amour et de la sexualité une affaire strictement privée, alors que bien entendu, ce n’est pas ça. Ils construisent une citadelle (avec digi-codes et caméras partout) autour de l’homosexualité, démarche d’autant plus homophobe qu’elle prend la forme invisible du respect-indifférence/du respect indifférencié, du confort bourgeois.