a) Réagir sans sur-réagir :
Je viens d’apprendre à l’instant par une mère de famille que le lycée privé (…de foi) de son fils va rendre obligatoire en classe le visionnage du film « Pride » (2014) de Matthew Warchus (qui vient de sortir au cinéma en France depuis le 17 septembre 2014). Je l’ai vu en avant-première il y a deux semaines. À la base, je ne comptais pas en faire une critique (j’ai juste fait le relevé des codes de mon Dico que j’y identifiais). Mais là, le contexte m’y oblige. On ne peut pas laisser faire ça.
(Vous comprenez maintenant à quoi ça sert que j’aille voir mes films de merde ? ;-))
Alors bien sûr, je vais éviter de faire un article trop long (parce que déjà, je n’ai pas trop le temps ; et puis parce que l’idée, c’est de ne pas vous embrouiller avec trop d’infos). Je vais aussi éviter de la jouer dans l’alarmisme disproportionné à la Civitas quand le film « Tomboy » s’était aussi retrouvé au programme de certaines sorties scolaires (une de mes nièces, en Touraine, avait eu droit à voir « Tomboy » au cinéma : ma sœur et mon beau-frère s’étaient faits, comme tous les autres parents, prendre en otage). Ma mise en garde sera donc concise, pas alarmiste, mais va quand même essayer d’aller droit au but.
Tout d’abord, je commencerai par dire que si ces films de propagande LGBT (car c’est vraiment le mot : ce sont des films de propagande, avec une idéologie bien précise qui est diffusée, à savoir « l’ouverture à toutes les différences sauf à la différence des sexes et à la différence Créateur/créatures ») parviennent à franchir le comité de censure d’établissements scolaires même catholiques, c’est – ça tombe sous le sens – que déjà, ils ne sont ni horribles, ni traumatisants, ni choquants à première vue (ce ne sont pas tous des « Vie d’Adèle », avec 4-5 scènes de « pur » sexe dedans…). Pas besoin, par conséquent, de perdre son calme et de se gendarmer outre mesure. L’opposition ferme et argumentée, l’humour et le dialogue, devraient largement suffire à éteindre ces petits incendies que sont ces intrusions cinématographiques dans le milieu scolaire et qui n’en sont pas moins anodines. Si ces films plaisent à une équipe pédagogique ou à un proviseur, c’est évidemment que leurs messages sont pleins de bons sentiments, que les images, la musique et les histoires d’amitié qu’ils racontent sont un minimum belles et travaillées. Même si je ne les conseille absolument pas à un public jeune (sauf s’ils sont accompagnés de la légende qui va avec, ou de l’étiquette « films de propagande LGBT » qu’ils méritent), même si j’en décèle les nombreuses impostures, ça ne m’empêche pas de continuer à les trouver touchants, parfois captivants, et en général très bien faits (il ne faut pas non plus diaboliser les choses, ni prendre les profs pour des cons ou des gens inconséquents : certains, en proposant ces films, veulent bien faire). Un film de propagande ne peut pas être totalement de mauvaise qualité, car il doit au moins user de formes et de bonnes intentions qui font oublier aux spectateurs qu’il est un film de propagande. Ce que je veux dire par là, c’est que même si la démarche pédagogique ne se justifie pas, elle s’explique parfois très bien et a des sincérités que le film LGBT actuel, autrement plus vraisemblable et sensible que « La Cage aux folles », aide objectivement à porter. On ne peut pas le nier.
Alors si on cherche bien, qu’est-ce qui peut bien motiver une équipe de profs à amener des élèves voir un film comme « Pride » ? Je doute que ce soit pour en faire une étude critique avec mon Dictionnaire en main, auquel cas la démarche pourrait à la rigueur être géniale ^^ (… car un film pareil, s’il est décrypté correctement, aide au développement du sens critique des élèves et à l’identification des techniques de lavage de cerveaux et de propagande développées par de nombreux systèmes totalitaires d’hier et d’aujourd’hui). Mais à moins d’un miracle ou d’interroger l’initiateur du projet, je ne me fais pas trop d’illusions. Je pense que l’objectif d’un prof qui a trouvé ce film beau et touchant, et qui veut le faire voir à ses élèves de lycée, c’est tout simplement : le souci de faire connaître une page de l’histoire de l’Angleterre des années 1980 sous Margaret Thatcher (« objectif culturel » : gros LOL), le souci de donner aux élèves le goût de l’engagement politique et des actions de solidarité, le souci de proposer un film drôle, bon enfant, original, convivial, un poil « subversif » dans sa thématique, le souci de la transmission de « valeurs » telles que le respect, l’ouverture, la tolérance, l’égalité, la solidarité, l’accueil des différences, la diversité… tous ces concepts humanistes qui sont merveilleux s’ils sont connectés au Réel (c’est-à-dire à la différence des sexes et la différence Créateur/créatures) et qui deviennent de la grosse merde idéologique et même tyrannique de la pensée unique libérale libertaire dès que la différence des sexes et Dieu sont virés des messages… ce qui est exactement le cas du film « Pride » !
b) Message de fond du film : « La différence des sexes peut être expulsée en identité et en Amour : c’est pas grave »
Voyons voir d’un peu plus près pourquoi « Pride » rentre tout-à-fait dans la catégorie des « œuvres culturelles de propagande ».
En gros, le message de ce film,
1 – c’est de montrer que l’éjection de la différence des sexes (la différence qui nous a fait naître, celle qui nous aide à nous aimer nous-mêmes tels que nous sommes et à aimer vraiment les autres, à nous donner pleinement à eux) est banale et merveilleuse à la fois (ce qui est faux et violent : sans la différence des sexes, nous ne sommes plus humains, nous n’existons pas, et nous aimons moins)
2 – c’est de montrer que l’homosexualité et l’hétérosexualité sont de vraies identités (ce qui est également faux et anti-Droits de l’Homme : nous sommes homme ou femme, et Enfants de Dieu, point barre ; nous ne sommes pas que des animaux et nous ne pouvons pas être définis uniquement par notre orientation sexuelle du moment – aussi durable et fixée soit-elle parfois -, par nos pulsions ou nos fantasmes sexuels ou nos sentiments ou les personnes qui nous attirent sexuellement ou notre pratique génitale ; en clair, nous ne sommes pas des bites ni des vagins sur pattes ! Les personnes homosexuelles existent, parfois de manière transitoire, et « les » homos ainsi que « les » hétéros, ça n’existe pas !)
3 – c’est de montrer que l’« amour » homosexuel est possible, extraordinaire et équivalent à l’amour entre l’homme et la femme (ce qui est également faux : l’amour vrai, c’est l’accueil de la différence des sexes, qu’on soit marié ou célibataire consacré). Dans le film « Pride », d’ailleurs, quasiment tous les personnages présentés comme « hétéros » finissent par faire leur coming out homo ! Même parmi les papys et les mamies ! C’est vraiment un film pro-homosexualité et pro-hétérosexualité… mais qui en revanche laisse de côté l’amour entre l’homme et la femme… d’où sa gravité).
Ce message filmique global reposant sur la discrimination de la différence des sexes est objectivement violent. Mais cette violence, diffuse à plein d’endroits dans le film (j’y reviendrai plus en détail tout de suite après), n’est pas flagrante car d’autres différences moins fondatrices que la différence des sexes sont chantées et sont censées la faire oublier : je pense d’une part à la différence des espaces (illustrée dans le film par la rencontre émouvante et exotique du milieu ouvrier et du milieu homo que tout semble opposer, illustrée par le mélange improbable entre le monde citadin londonien et le monde provincial gallois, illustrée par la description de l’engagement politique et associatif des personnages, illustrée par de nombreux actes de solidarité concrets, illustrée par le rappel d’événements dramatiques comme l’arrivée du Sida ou le rejet homophobe des parents, qui forcément touchent notre corde sensible, etc.) ; je pense également à la différence des générations (illustrée dans le film par la vie des familles et les réconciliations/conflits qui s’y vivent, par le melting pot amusant entre les jeunes et les vieux retraités, etc.) ; je pense enfin un peu à la différence des sexes (car même si elle n’est pas célébrée dans la conjugalité femme-homme ni dans le célibat consacré – voire elle est carrément rejetée dans l’homosexualité et partiellement rejetée dans la bisexualité hétérosexuelle -, elle reste quand même un peu défendue par la célébration d’amitiés touchantes tout au long du film). Ceci étant dit, qui s’attaque à la différence des sexes finit aussi par s’attaquer à la différence des espaces et à la différence des générations à un moment ou un autre, vu que les 3 composent le même Réel. Donc nous allons voir maintenant comme ces exclusions des différences fondatrices de l’humain, faites paradoxalement au nom de l’accueil des différences, se traduisent concrètement dans le film « Pride ».
c) Comment se traduit concrètement l’expulsion de la différence des sexes dans ce film ?
Je souligne pour commencer un détail très important : qu’en dépit des apparences et de ses intentions, « Pride » n’est pas un film sur l’homosexualité, et encore moins sur la vie de couple homo (qu’on ne voit jamais, d’ailleurs). Il est tout au plus un film sur le coming out, c’est-à-dire l’annonce et les débuts de la visibilité sociale de l’étiquette identitaire et amoureuse « l’homosexuel »… et a fortiori ce coming out est à peine filmé, ou alors il est filmé de manière très manichéenne et victimisante. « Pride » n’affronte jamais la problématique de l’homosexualité concrètement, sur la durée et en termes de pratique amoureuse. Il est juste un portrait des soubresauts de l’attrait homo-érotique qui peut exister à l’adolescence, de l’excitation des débuts du militantisme LGBT et de la découverte de l’engagement politique pour une cause qui commence à faire la Une des médias parce qu’elle bénéficie de la compassion mondiale pour le dommageable Sida. C’est important de le garder en tête : « Pride » a totalement aplati, déproblématisé l’homosexualité. Par exemple, les histoires d’« amour » homo dans le film sont zappées (on comprend que Joe, le jeune « Rastignac » de l’histoire, a été dépucelé par un mec le soir du bal, mais on n’en saura pas plus ; on comprend que Mark, le leader de l’asso LGBT, est un coureur de pantalons qui n’arrive pas à construire une relation et qui enchaîne les mecs au point d’attraper le Sida ; on voit que la vie et l’entente de l’unique « couple » homo du film, formé par Geth le libraire et par Jonathan, ne sont pas du tout filmées ; dans ce film, l’amour homo est réduit à une expérience ponctuelle en état d’ébriété, comme on en a l’illustration avec la femme d’Alan qui vire sa cuti avec Stephany, un soir d’ivresse, juste pour « vivre cette expérience sensuelle inédite »). Donc les profs qui voudraient, par le biais du visionnage de ce film, encourager leurs élèves à connaître l’homosexualité, déculpabiliser des jeunes qui se cherchent sexuellement, favoriser des « coming out », une meilleure acceptation des personnes homosexuelles, et permettre une plus grande ouverture d’esprit à leur classe, se fouteraient le doigt dans l’œil bien profond : ce film ne parle absolument pas d’homosexualité. Il extériorise le thème d’une part sur le contexte géopolitique dramatisé de grèves ouvrières des années 1980 (= la fermeture d’une mine de charbon au Pays de Galles), sur fond de lutte des classes et de lutte contre la pauvreté (en filigrane est dénoncée la soi-disant « dictature » anti-pauvres et « homophobe » de Margaret Thatcher, femme politique qui est textuellement traitée de « salope » dans le film) ; d’autre part, il extériorise et travestit le problème de l’homosexualité sur l’amitié (comme si amour et amitié pouvaient être mises exactement sur le même plan…) ou sur la famille (comme si la famille et l’« amour » homo étaient la même chose : il y a énormément d’incestuel dans ce film, même si le réalisateur Matthew Warshus serait estomaqué de l’apprendre).
Cette tentative de mélange des genres de relations humaines (amour-amitié, amour-famille, amour-solidarité) n’a pour but que de nous embrouiller l’esprit par un chantage aux sentiments. Ni plus ni moins. Dans la tête du spectateur, il se voit mal dénoncer les incohérences du scénario, ou la violence de l’homosexualité, puisque celle-ci est enrobée de camaraderie, de multiculturalité, de solidarité, de combat contre le « fascisme » thatchérien, de violons, de trompettes, de fous rires, de larmes (face à ce qui nous est présenté comme de « terribles injustices »), de couleurs arc-en-ciel, de rebondissements supposément spectaculaires (les prises de parole des héros homos ou hétéros sont soit totalement catastrophiques, soit d’immenses succès nourris d’applaudissements dithyrambiques : super réaliste, on y croit…),.
Mais réveillons-nous. « Pride » fait passer les militants homosexuels pour des héros super courageux… alors que concrètement, le milieu homosexuel de cette époque était déjà un baisodrome, et que ces militants ont instrumentalisé la misère des mineurs gallois pour se victimiser eux-mêmes et pour donner à la lutte pour les droits LGBT une teinte révolutionnaire, solidaire, universelle, qui aurait occulté les conséquences de leur propre pratique amoureuse. Tout le film « Pride » repose sur une falsification historique. Je n’ai jamais vu un tel succès et une telle euphorie pour le discours homosexuel dans le monde ouvrier réel, et encore moins dans le monde homosexuel réel. Je n’ai jamais vu une telle camaraderie dans le milieu associatif LGBT (l’amitié a très peu de place dans les cercles relationnels homos puisqu’elle est très vite sclérosée par la drague). Je n’ai jamais vu d’amours solides et joyeuses dans l’homosexualité. Je n’ai jamais vu le milieu ouvrier célébrer l’homosexualité comme dans « Pride » (plutôt le contraire !). Je n’ai jamais vu de bals hétéros-homos ni de Gay Pride finir en triomphe et grandes pompes comme c’est montré dans le film. Et pourtant, croyez-moi, ce n’est pas faute d’avoir assisté à bon nombre de Gay Pride, de m’être engagé dans bon nombre d’associations LGBT. Ce film est un tissu de mensonges, de fantasmes concrétisés uniquement sur pellicule, et de falsifications historiques. La réalité du monde homosexuel, ce n’est pas ça, et c’est même beaucoup moins rose. Il y a, je trouve, une violence, dans ce genre de films, à traiter sur le mode de la légèreté humoristique et de l’esthétisme émotionnel euphorique, des réalités qui non seulement ne sont pas poétiques, mais qui en plus sont révoltantes et violentes (la violence des relations homosexuelles, la souffrance et l’insatisfaction qu’elles font vivre, les vols et les viols et les nombreuses atteintes à l’amitié dans le « milieu homo », la brutalité de la drague, les infidélités très nombreuses entre personnes homos, les actes d’homophobie perpétrés exclusivement entre personnes homosexuelles, la perte de joie dans le mode de vie homosexuel, etc. etc.). L’enfer est pavé de bonnes intentions : on le sait déjà, mais je préfère le répéter plus que jamais pour le film « Pride », au cas où certains oublieraient ce que vivent vraiment les personnes homosexuelles, y compris celles qu’on croit heureuses, stables, en couple et « hors milieu ».
Derrière la guimauve dégoulinante et imparable que nous sert « Pride » se trouve en réalité l’idéologie sentimentaliste et anti-naturaliste LGBT qui stipule que le corps sexué n’a que peu d’importance, que tous les hommes-pères sont au pire des cons et des bébés lâches au mieux des homos refoulés, que nous serions tous des anges asexués libres d’aimer qui nous voulons à partir du moment où nous obéirions à nos sentiments et à notre ressenti individuel. À travers ce type de films, on nous laisse croire (à tort) que la débauche de sensations – et de leurs mises en scène – va pallier à l’éjection de la différence des sexes, éjection qui reste pourtant objectivement violente puisque la différence des sexes est le socle de notre existence à tous et, si elle est librement accueillie, le roc qui nous permet d’aimer au mieux, pleinement et durablement, et de respecter les amitiés même entre personnes de même sexe.
Comme je l’avais déjà expliqué l’été dernier à propos d’un autre film, « Au premier regard » de Daniel Ribeiro (un film similaire à « Pride » quant à sa force de frappe : très mignon, très bien fait, vraisemblable, traitant du lien entre handicap et homosexualité, un petit bijou de propagande qui pourrait d’ailleurs tout à fait faire l’objet idéal d’une sortie scolaire aux yeux d’une équipe pédagogique un peu « gay friendly »), il y a une forme de malhonnêteté intellectuelle à mêler à l’homosexualité des sujets graves comme la pauvreté. Car même si je suis le premier à dire qu’il y a un lien entre ces thématiques, je me bats pour que ce lien-là ne soit ni causalisé, ni défendu, ni idéalisé, ni utilisé pour justifier l’homosexualité sous forme d’identité ou d’amour, car cela reviendrait à justifier la souffrance et le mal. Et ça, éthiquement, ce n’est pas humain ! Y compris si, par cette tentative de victimisation-essentialisation de l’homosexualité, on prétend vouloir le bien des personnes qu’on victimise/transforme en espèce (« les » homos ; « les » hétéros ; « les » mineurs ; « les » victimes ; etc.).
Ce qui est très gênant dans « Pride », parce que l’analogie entre les deux me parait totalement abusive, c’est que l’homosexualité est mise sur le même plan que la pauvreté matérielle et sociale des mineurs. Implicitement, Matthew Warchus laisse entendre que l’amour homosexuel serait aussi fort et légitime que la pauvreté (et les tentatives solidaires pour soi-disant l’éradiquer). C’est totalement méconnaître le point de vue des pauvres réels sur l’homosexualité. C’est totalement méconnaître la misère sexuelle qui sévit au sein du « milieu homo », et qui est le reflet de la misère sexuelle vécue en milieu ouvrier ou pauvre.
Projeter sur les personnes prolétaires des fantasmes d’hommes homosexuels petits-bourgeois (et qui plus est, des fantasmes inhumains, car rejeter la différence des sexes qui nous a fait tous naître, relève de l’inhumanité angéliste), c’est malhonnête, c’est mal les connaître ELLES, c’est utiliser leur pauvreté à des fins romantico-individualistes, c’est exploiter la fragilité des plus faibles. Cette jalousie maquillée en « solidarité universelle » est très bien illustrée par les propos de Mark, le jeune chef de l’association LGBT du film « Pride » voyant dans un article de journal relatant les répressions policières que subissent les mineurs gallois du pain béni pour redorer le blason de la cause homosexuelle : « Ils s’en prennent à ces pauv’ gars plutôt qu’à nous ! » ; « On a subi les mêmes épreuves que vous. » ; « Je ne sais pas à quoi ça rime de défendre les droits gays, mais je le fais pour les autres. » ; « On écrit l’Histoire. Gays et hétéros ensemble ! » ; « Solidarité pour toujours ! Solidarité pour toujours ! » (sur l’air de « God Saves The Queen »). Sérieusement : ce « Touche pas à mon ouvrier ! » LGBT, on dirait l’agressif et sincère « Touche pas à mon pote ! » de S.O.S. RACISME, le « Touche pas à mon Sidéen ou à mon Homo ! » de S.O.S. Homophobie et du Refuge, le « Touche pas à mon Pape, touche pas à MON homo, touche pas à mon Chrétien d’Irak ! » de Frigide Barjot, le « Touche pas à mon enfant ! » de la Manif Pour Tous. Personnellement, je trouve cela choquant et honteux. Il n’y a qu’un seul personnage dans le film qui se rend compte de cette instrumentalisation, de ce violent « mélange des genres » et de l’arrivisme de ce groupe de 10 militants LGBT venu du jour au lendemain annexer son village gallois à des fins purement idéologiques : c’est Maureen. Et comme par hasard, ce témoin gênant est filmé comme « LA Méchante hétérosexuelle » de l’histoire, la femme frustrée et rigide, mal mariée. Elle est décrédibilisée et homophobisée puisque sa dénonciation est montrée comme un phénomène totalement isolé, minoritaire et arbitraire (or, je doute que, hors des salles de cinéma, ce soit le cas dans le vrai monde réel des travailleurs ; et je peux vous assurer que non seulement cette gêne n’est pas homophobe mais que de surcroît elle est humaine !).
Je comprends bien que l’innocence, la simplicité et la fragilité des mineurs (une réalité apparemment subie : d’ailleurs, dans le film, on nous montre que beaucoup de ces travailleurs n’ont pas eu la chance de faire des études… ni des thèses gays friendly féministes LOL… à l’exception de Sian, la « mère-courage » hétéro-gay-friendly qui intègrera une université à la toute fin de l’intrigue) confère du naturel, de l’empathie, de l’émotion, de la tendresse et du courage à l’homosexualité. Or l’homosexualité, on ne sait pas si elle est subie ou non. On ne sait pas si c’est un fait de nature ou de culture. Comme la pauvreté matérielle et culturelle, elle est bien le signe d’une anomalie (une personne ne fuit pas la différence des sexes sans raisons ; et une personne ne devient pas pauvre s’il n’y a pas eu à l’origine une erreur dans la répartition des richesses au sein de l’Humanité). Mais l’homosexualité touche à l’identité sexuée, à la génitalité et à la sexualité bien plus profondément que la précarité des travailleurs, qui eux ne remettent pas en cause la différence des sexes ni la sexualité. Donc moralement et concrètement, c’est difficile de mettre sur le même plan le monde ouvrier et l’homosexualité. La pauvreté possède une innocence (parce que la plupart du temps elle s’impose à la personne qui le porte) que l’homosexualité n’a pas (certaines homosexualités sont des choix, voire des mauvaises actions). L’homosexualité est tout sauf innocente : le rejet de la différence des sexes qu’elle illustre est signe de souffrances et, si celles-ci ne sont pas identifiées, moteur de violences.
Il y a derrière cette analogie compassionnelle entre homosexualité et lutte des classes une volonté de mettre la pratique homosexuelle à l’abri de la responsabilité, de l’analyse, de la liberté, du jugement, et d’entourer l’homosexualité du doux manteau de la solidarité. Car qui, humainement, peut être contre l’existence des pauvres ou en faveur d’un système politique qui les broie ? À travers cette réalité de la misère matérielle et de la relation d’amitié avec la personne pauvre, Matthew Warchus a la malhonnêteté de nourrir deux amalgames fâcheux : d’une part l’amalgame entre l’amitié et l’amour (qui sont pourtant des réalités relationnelles bien distinctes) ou entre la sexualité et la politique, et d’autre part l’amalgame entre la personne et le désir/l’amour/la pratique homosexuels qu’elle peut vivre (or une personne humaine ne se définit par le désir sexuel qu’elle ressent, ni par l’acte sexuel qu’elle pose, ni par le « couple » homosexuel qu’elle composerait).
Il n’est pas juste qu’un film comme « Pride » instrumentalise la pureté des nécessiteux ou des vieux syndicalistes, l’empathie face à la fragilité qu’est la précarité matérielle et intellectuelle, pour justifier d’un amour ambigu (= le « couple » homo) qui, contrairement à la pauvreté, n’est pas un fait physique : il n’existe pas de corps homosexuel (alors qu’il existe un misère concrète). L’homosexualité est prioritairement un fait désirant, bien avant de se manifester par une réalité corporelle.
Comme les films de blacksplotation (qui n’hésitent pas à marier le Gay Power au Black Power, l’anti-homophobie à l’anti-racisme, pour servir leurs propres intérêts), on peut constater actuellement que certains réalisateurs pro-gays surfent sur la vague victimiaire de la crise économique actuelle pour donner corps à leurs propres fantasmes amoureux.
La juxtaposition cinématographique d’un mal et de l’homosexualité est une recette qui marche de plus en plus car elle repose sur un chantage aux sentiments et des réalités humaines douloureuses qu’il est extrêmement difficile de cautionner. Tout comme le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure exploitait la difficulté du coming out pour justifier le « couple » homo, tout comme le film « Les Joies de la famille » (2008) d’Ella Lemhagen exploitait le malheur de l’orphelin pour justifier la « beauté » de l’adoption « homoparentale », tout comme le film « Beautiful Thing » (1996) d’Hettie MacDonald exploitait le malheur de la précarité et du chômage pour dépeindre une idylle amoureuse homosexuelle, tout comme le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears exploitait le malheur de la xénophobie pour justifier la force de l’« amour » homo, tout comme le film « Loin du Paradis » (2002) de Todd Haynes exploitait le malheur du racisme pour justifier la « véracité » de l’« identité homosexuelle », tout comme le films « Love ! Valour ! Compassion ! » (1997) de Joe Mantello exploitait sincèrement le malheur du Sida pour justifier les « couples » homos, tout comme le film « Tom Boy » (2011) de Céline Sciamma exploitait le « malheur » de l’adolescence et de sa soi-disant « cruauté » pour justifier la schizophrénie transidentitaire d’une adolescente, tout comme le film « Comme les autres » (2008) de Vincent Garenq exploitait le malheur de la stérilité pour justifier la Gestation Pour Autrui (= les mères porteuses), tout comme le téléfilm « Un Amour à taire » (2005) de Christian Faure exploitait le malheur de la guerre pour justifier la force de l’histoire d’« amour » homo, tout comme le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald exploitait le malheur de la vieillesse et de la mort pour prouver la beauté du « couple » homo, tout comme le film « Harvey Milk » (2008) de Gus Van Sant exploitait le malheur de l’homicide et de la folie meurtrière pour justifier le courage du militantisme LGBT, tout comme le film « I Love You Phillip Morris » (2009) de Glenn Ficarra exploitait le malheur de la prison pour démontrer la puissance de l’amour entre deux hommes, tout comme le film « Week-end » (2011) d’Andrew Haigh exploitait le désespoir amoureux pour justifier la « beauté » des « plans cul », tout comme le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2005) d’Ang Lee exploitait le malheur de l’homophobie intériorisée pour rappeler l’urgence du coming out, le film « Pride » utilise également la misère du monde ouvrier et les maladresses parfois violentes d’un monde hétéro découvrant l’existence des personnes homosexuelles, pour nous faire signer aveuglément le certificat d’« amour » décerné à la relation entre deux personnes de même sexe. Désolé, mais chez moi, ça ne prend pas.
La Méchante Maureen Barry
Clou du spectacle et du chantage aux sentiments : Matthew Warchus a mis en place dans son film une méthode très classique pour redorer le blason de l’homosexualité à peu de frais : la composition de la caricature des « hétéros ». C’est une astuce très répandue actuellement : pour neutraliser les critiques sur l’« amour » homosexuel, beaucoup de réalisateurs homosexuels ou gays friendly extériorisent systématiquement les problèmes des « couples » homos sur cette espèce cinématographique odieuse que composent « les hétérosexuels »… Et nous avons de sacrés spécimens de « beaufs hétéros » dans « Pride ». Deux catégories manichéennes, pourrait-on dire : d’un côté les « hétéros qui resteront homophobes à jamais » (genre Maureen, genre les parents de Joe, genre Jason – le frère de Joe -, genre les bourgeois qui tiennent des pancartes « Brûlez en enfers » à la première Gay Pride du début du film, genre Margaret Thatcher, cette « salope », genre les pavés anonymes et insultants brisant la vitrine du local-librairie LGBT, etc.) ; et puis de l’autre côté les « hétéros homophobes repentis… et ‘ouverts’ (puisqu’ils sont en réalité homosexuels ou au moins convertis à la gay friendly attitude) » : je pense par exemple à Carl (le jeune qui roule les mécaniques et qui finira par tendre la main à ses frères étrangers homosexuels), à Sian (la fille à pédés énergique et boulote, qui défendra bec et ongles la cause homo quand elle intègrera l’Université), à Martin (le syndicaliste brutalement gay friendly), à Dai (le père de famille un peu lettré, grand orateur… de cabaret), à Cliff (le vieil hétéro qui finira par révéler son homosexualité après tant d’années de secret et de refoulement), à Hefina (l’hétérote agressivement gay friendly et qui se révèlera lesbienne à la toute fin du film : elle et Cliff sont d’ailleurs mis en avant sur l’affiche de « Pride », alors que, comme par hasard, ce faux couple hétéro – pléonasme – est en réalité composé d’un gay et d’une lesbienne déguisés en hétéros), la mère de Geth (catholique, « homophobe », et qui « s’ouvrira » in extremis à la fin), la vieille mamie Gwen (qui fait sa crise d’ado et son bain de jouvence à 80 balais, et qui joue la miraculée de Lourdes au contact de ses nouvelles amies lesbiennes : « Vous m’avez ouvert les yeux, les filles. » conclura-t-elle, les yeux pleins de larmes, à la fin de l’histoire), l’un des fils homophobes de Maureen-la-Méchante (qui assistera à la Gay Pride londonienne finale). Grâce à ces monstrueux « hétéros homophobes » (mais « vieux cons » si mignons et si touchants quand ils se convertissent à LEURS idées LGBT…), les cinéastes pro-gays font passer les limites et les fragilités des « couples » homos réels pour un processus purement circonstanciel et extérieur : si les unions homosexuelles n’arrivent pas à perdurer et à satisfaire, ce serait uniquement parce que la société ne les encouragerait pas, et qu’elles seraient empêchées par la cruauté gratuite des Hommes (… et surtout des hommes : les mâââles).
Quand nous voyons des films traitant de l’homosexualité et choisissant pour toile de fond des événements terribles venant détruire une romance ou une identité homosexuelle présentée comme idyllique, nous avons tous envie de dire à la fin de la projection que la spectaculaire catastrophe ou l’agression extérieure rendent les unions homosexuelles, sinon idéales, du moins justifiables, même si dans les faits, ces films sont bien éloignés de la réalité quotidienne des « couples » homosexuels de chair et d’os. Qui peut essayer de comprendre avec un certain détachement les mécanismes de l’homophobie, après avoir vu un tel carnage d’« amour » construit sur pellicule ? Qui peut paraître humain de remettre en cause une image d’Épinal de l’« amour » homosexuel contrebalancée par une violence visuelle assurément percutante, mais ô combien exagérée ? Difficile, par exemple, de ne pas avoir le cœur brisé en voyant sur les écrans le désarroi du mari de Cathy Whitaker dans le film « Loin du Paradis » (2002) de Todd Haynes, homme qui n’arrive résolument pas à réprimer ses penchants homosexuels malgré toute la bonne volonté du monde, ou de ressortir du visionnage du « Secret de Brokeback Mountain » (2006) d’Ang Lee en affirmant la bouche en cœur que l’« amour » homosexuel n’est pas réel et merveilleux, même si nous l’avons vu entravé. Qui peut humainement se réjouir de voir dans le film « Pride » de Matthew Warchus la spoliation (pour reprendre les termes de cette chère Arlette Laguillier) des droits des mineurs, la répression policière, la maltraitance des villageois au chômage et crevant de froid en hiver sans chauffage, le rejet d’un adolescent homo par sa famille bourgeoise hétérosexiste ? Personne ! Vraiment personne !
Mais, je vous le demande, est-ce que l’Amour ne se manifeste que dans les cas extrêmes où la liberté humaine se rapproche de la nullité ? À travers de tels films, les réalisateurs homosexuels sont plutôt en train d’enfermer l’Amour et l’identité humaine dans un cadre déterministe et fataliste. Ils valident par un regard orienté vers des situations particulièrement dramatiques une vision de l’existence humaine et de l’Amour très négative. Ils énoncent que l’Homme n’est que rarement libre et heureux, et que c’est cela sa vérité d’amour et d’identité. Comment peuvent-ils espérer ensuite que leur défense du désir homosexuel apparaisse aux yeux de la société comme aimante ?
Dernière image du film : le délire, les lendemains qui chantent…
Il semble paradoxal de prouver l’Amour par son contraire. Face à ce nouveau type de « films choc » (qui, soit dit en passant, dans leur formule, ne s’opposent pas aux comédies sentimentales et enjouées de l’homosexualité), nous sommes pris entre l’extrême compassion et la méfiance de l’émotionnel, si bien travaillé par le cinéma. Au fond, la révolte et l’empathie ne sont que des effets recherchés par ceux qui créent le mythe du couple télégénique homosexuel heureux, ou de l’homosexuel assumé et émancipé post-coming out, pour masquer la réalité d’une union beaucoup moins rose dans les faits. Ils universalisent, en quelque sorte, un méfait opéré sur un personnage télévisuel homosexuel vivant un scénario-catastrophe, pour ensuite justifier leurs utopies personnelles et des revendications concernant la communauté gay très discutables dans la réalité concrète. L’injustice filmée ne laisse pas de marbre, c’est sûr. Mais il y a une sorte de malhonnêteté intellectuelle à traiter de l’homosexualité avec d’autres thèmes qui lui sont liés mais non de manière causale (par exemple la folie meurtrière des camps de concentration, le déferlement incontrôlé de l’homophobie dans certains milieux sociaux culturellement pauvres, une agressivité familiale exacerbée, l’émergence inopinée du Sida, le handicap, etc.). Malhonnêteté rehaussée par sa prétention (hypocrite) au réalisme et à la biographie. C’est particulièrement visible dans le film « Pride » puisque celui-ci se veut « historique », basé sur des événements réels et des personnes ayant réellement existé. En réalité, comme je le disais un peu plus haut, ce film n’est absolument pas réaliste. Il est tellement noyé de poncifs manichéens et d’intentions militantes et sentimentalistes pro-LGBT qu’il régurgite l’hypocrisie de ses nombreux et inconscients anachronismes. La sincérité n’est pas la Vérité. Et ce n’est pas en reconstituant un passé avec des références télévisuelles, des reportages-télé, des coupures de journaux ou des bribes de clins d’œil musicaux « d’époque » (les chanteurs « New Wave » et punk de la légendaire Great Britain Eighties : Sylvester, Bronski Beat, Bananarama, Franckie Goes To Hollywood, etc.) que Matthew Warchus est parvenu à masquer qu’il a projeté sur le passé et aussi sur le présent ses propres fantasmes amoureux et militants, fantasmes pour le coup mégalomaniaques et finalement dépressifs (car OUI, finir son film par des images d’une Marche des Fiertés 1985 triomphante et ensoleillée avec Big Ben en décor, c’est du pur folklore et du pur mensonge ; OUI, finir son film en tressant une couronne de lauriers à Mark Ashton, le jeune et beau leader LGBT mort du Sida à l’âge de 26 ans – comme si l’héroïsme pouvait se résumer à mourir jeune du Sida et pour n’importe quelle cause politique minoritaire -, c’est de la pure dépression). Le pire, c’est que je crois que cette volonté naturaliste du réalisateur est sincère et qu’il ne s’est même pas rendu compte qu’il manipule le Réel et le public par l’émotionnel.
Mark se jetant sur les « bads news »
Ne nous laissons donc pas déborder par nos émotions : écoutons la Réalité, qui est bien meilleure conseillère. En effet, comme humainement et éthiquement nous ne pouvons pas cautionner la haine et le mépris, nous sommes encouragés à signer sans réfléchir à des versions idylliques et victimisantes de l’« amour » homosexuel. On se réveille. Le couple homosexuel n’est pas le couple homosexuel cinématographique. La communion fraternelle vécue entre personnes homos (parfois concrète et porteuse d’une chaleur amicale réelle, d’un vrai pouvoir d’actions associatives de solidarité) n’est pas le couple homo. C’est con de le dire mais c’est vrai. Ne confondons pas l’amitié avec l’amour, la solidarité avec l’amour conjugal, la sincérité de nos bonnes intentions avec la Vérité (on peut vouloir le bien sans le faire), les films avec la Réalité, l’euphorie (adulescente) avec la vraie joie.
L’homosexualité, c’est « génial »
Pour conclure, je finirai cet article en vous mettant en garde sur la signifiance du titre du film « Pride ». Contrairement au mot « fierté » en français, il recouvre en anglais, exactement comme en espagnol, le double sens de « fierté » et d’« orgueil », double sens qu’on perd en français. Nous pouvons nous appuyer sur cette polysémie anglo-saxonne et hispano pour comprendre que malgré les bonnes intentions, la Fierté homosexuelle est un orgueil déguisé. Et le film « Pride » pue l’orgueil qui nous regarde avec des étoiles et des cœurs rainbow dans les yeux. Un vrai lavage de cerveaux sincère. Alors au nom de nos enfants, au nom du respect que vous nous devez à nous les personnes homosexuelles, s’il vous plaît, n’y succombez pas (même si nous ne savons pas vous le demander).
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