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Code n°41 – Curé gay

curé gay

Curé gay

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Montgomery Clift dans le film "La Loi du silence" d'Alfred Hitchcock

Montgomery Clift dans le film « La Loi du silence » d’Alfred Hitchcock


 

Les Oiseaux qui se cachent pour vomir, version gay… Avant que certains cathos se choquent ou que certains anti-cathos sautent de joie, je tiens à préciser que ce code va traiter du cliché du prêtre ou de la religieuse représenté(e) dans les fictions traitant d’homosexualité, comme « gay » (ou « lesbienne »). Je parle bien des clichés de l’homosexualité, pas d’abord de la réalité improbable de ces clichés (merci de bien comprendre le fonctionnement de mon Dictionnaire en lisant le mode d’emploi, avant de me faire dire ce que je ne dis pas ou de prendre au pied de la lettre les codes).

 

J’ai pour habitude de dire qu’il n’y a pas de cliché sans feu… et que, donc, s’il y a dans les fictions parlant d’homosexualité autant de prêtres homosexuels refoulés, pervers et pédophiles, et de bonnes sœurs lesbiennes frustrées, c’est qu’il y a un fond de vérité. Et pourtant… le cliché du « curé gay » fait presque exception à la règle !

 

Jésus porte le péché du monde sans être pour autant pêcheur. Il est donc logique que nos prêtres, qui ont revêtu le Christ, subissent le même sort que Lui. Ça ne veut pas dire que l’accusation d’homosexualité soit avérée pour eux, mais bien qu’ils sont habités par le Christ… et pour le coup, plus attaqués par le démon !

 

La délirante présomption d’homosexualité des prêtres (ou, ce qui revient au même, d’homophobie intériorisée) était déjà une accusation et une manœuvre courante des Nazis pour discréditer l’Église et ses serviteurs : « J’estime qu’il y a dans les couvents 90 ou 95 ou 100% d’homosexuels. […] Nous prouverons que l’Église, tant au niveau de ses dirigeants que de ses prêtres, constitue dans sa majeure partie une association érotique d’hommes, qui terrorise l’humanité depuis mille huit cents ans. » (Heinrich Himmler dans son discours du 18 février 1937, cité dans l’essai Le Triangle rose (1988) de Jean Boisson, p. 73)

 

Photomontage "Benetton" du Pape Benoit XVI collé aux lèvres de l'imam Mohamed Ahmed al-Tayeb

Photomontage « Benetton » du Pape Benoit XVI collé aux lèvres de l’imam Mohamed Ahmed al-Tayeb


 

J’en ai rencontrés, des prêtres homosexuels. Et même un nombre plus important que je n’aurais pu imaginer, j’avoue. Cependant, ma vision du phénomène n’est d’une part pas très représentative de l’ensemble du Clergé (car mon statut médiatique de « Catho homo » m’expose évidemment plus à recevoir prioritairement les confidences des curés touchés par l’homosexualité), et d’autre part, les prêtres homos restent une minorité (et de toute façon, la question de leur orientation sexuelle se pose à peine une fois passée leur ordination puisqu’ils font vœu de continence, qu’ils se sentent homos ou attirés par l’autre sexe ; ce qui pose uniquement problème, c’est quand ils passent à l’acte).

 

CURÉ GAY Panorama

 

Seule la réalité de terrain nous permet de comprendre que, de par leur recherche de pureté (recherche souvent fructueuse et épanouissante, quoi qu’en disent les médias qui prennent leurs mythes pornographiques pour des réalités), les célibataires consacrés attisent les sarcasmes et les jalousies, et que le clergé n’est pas – même au tiers, comme on l’entend parfois, comme qu’il s’agissait d’une statistique avérée – un « repère d’homosexuels ». En revanche, à l’extérieur de l’Église, on observe beaucoup de fascination mêlée de rancœur, de la part des personnes homos qui se rêvent « religieuses à la place des religieux », car les prêtres, par leur choix de vie radical, les renvoient forcément à leur inconstance et à leur détournement de l’Idéal d’Amour. Par conséquent, elles projettent souvent sur eux leurs propres fantasmes libertins de saints ratés.

 
 

N.B. : Je vous également aux codes « Attraction pour la « foi » », « Se prendre pour Dieu », « Putain béatifiée », « Pédophilie », « Viol », « Homosexuels psychorigides », « Homosexuel homophobe » et « Blasphème », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

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FICTION

 

Le personnage homosexuel est un prêtre ou une religieuse :

 

Toile de Fernando Botero

Toile de Fernando Botero


 

Les curés gays ou les nonnes lesbiennes sont très nombreux dans les œuvres artistiques homosexuelles. J’ai dressé une liste non-exhaustive : cf. le film « Entre Tinieblas » (« Dans les ténèbres », 1983) de Pedro Almodóvar (avec la Mère supérieure lesbienne), la pièce La Belle et la Bière (2010) d’Emmanuel Pallas, le film « La Mala Educación » (« La mauvaise éducation », 2003) de Pedro Almodóvar, la B.D. Muchacho (2006) d’Emmanuel Lepage (avec Gabriel de la Serna, séminariste homo), le film « Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot » (1965) de Jacques Rivette, le film « Lilies, les Feluettes » (1996) de John Greyson (avec l’évêque homosexuel), la pièce Dépression très nerveuse (2008) d’Augustin d’Ollone (avec le prêtre gay et pédophile), le film « La Vie est un long fleuve tranquille » (1988) d’Étienne Chatiliez (avec Patrick Bouchitey en curé efféminé chantant « Jésus revient »), le film « The Devil’s Playground » (1976) de Fred Schepisi, le film « Les Loups de Kromer » (2003) de Will Gould (avec les dernières images du film montrant la queue de loup – signe d’homosexualité dans l’histoire – dépassant de la soutane du prêtre homophobe qui s’éloigne sur le chemin…), le film « Au nom du Père » (1972) de Marco Bellocchio, le roman L’Agneau carnivore (1975) d’Agustín Gómez Arcos, le film « The Boys Of St Vincent » (1992) de John N. Smith (avec les frères de l’orphelinat St Vincent), le film « Another Gay Movie » (2006) de Todd Stephens, le film « In The House Of Brede » (1975) de George Schaefer, le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude (avec le pasteur Elvström), le film « La Cage aux Folles II » (1981) d’Édouard Molinaro, le film « La Nonne et les sept Pécheresses » (1972) de Sergio Garrone, le film « C.R.A.Z.Y. » (2005) de Jean-Marc Vallée, la pièce Les deux pieds dans le bonheur (2008) de Géraldine Therre et Erwin Zirmi (avec le vicaire homo), le roman inachevé La Religieuse (1780) de Denis Diderot (avec les prêtres homosexuels chez le Comte de Mirabeau), le film « La Pire de toutes » (1990) de Maria Luisa Bemerg, le film « Mais ne nous délivrez pas du mal » (1970) de Joël Séria, la pièce Jeffrey (1993) de Paul Rudnick, le roman Ser Gay No Es Un Pecado (1994) d’Óscar Hermes Villordo, la pièce Les Longues Vacances de Salazar (1997) de Manuel Martínez Medeiro (avec le cardinal Cerise, homosexuel frustré voulant revivre ses premiers homosexuels de pensionnat avec le dictateur Salazar), le film « Les jours et les nuits de China Blue » (1984) de Ken Russell, le film « Les Amitiés particulières » (1964) de Jean Delannoy (avec le père de Trennes, homosexuel refoulé), le film « Pianese Nunzio, 14 Anni A Maggio » (1996) d’Antonio Capuano (avec le père Alonso), le roman El Ángel descuidado (1965) d’Eduardo Mendicutti, le roman Los Nietos De San Ignacio (1916) de Joaquín Belda, le film « Le Nom de la Rose » (1986) de Jean-Jacques Annaud, le film « Conan le Barbare » (1981) de John Milius, le roman A.M.D.G. (1910) de Pérez de Ayala, le film « Butterfly » (2004) de Yan Yan Mak, le film « Couvent de la Bête sacrée » (1974) de Norifumi Suzuki (Mayumi, jeune femme libérée, décide de rentrer dans les ordres), le film « Extramuros » (1985) de Miguel Picazo, le film « Manuel Y Clemente » (1985) de Javier Palmero, le roman Pasión Y Muerte Del Cura Deusto (1924) d’Augusto d’Halmar, le film « Le Canardeur » (1974) de Michael Cimino, le roman Extramuros (1978) de Jesús Fernández, le film « Le Narcisse noir » (1947) de Michael Powell-Emeric Pressburger, le film « If… » (1968) de Lindsay Anderson, le film « Fantasmes » (1967) de Stanley Donen, le film « Jeunes filles au couvent » (1972) d’Eberhard Schroeder, le film « Storia Di Una Monaca Di Clausura » (1973) de Domenico Paolella, le film « Les Religieuses du Saint Archange » (1973) de Domenico Paolella, le film « Flavia la Défroquée » (1974) de Gianfranco Mingozzi, le film « Intérieur d’un couvent » (1976) de Walerian Borowczyk, le film « Lettres d’amour d’une Nonne portugaise » (1976) de Jess Franco, le film « Le Confessionnal » (1995) de Robert Lepage, le film « Wet And Rope » (1979) de Koyu Ohara, le film « Prêtre » (1994) d’Antonia Bird (avec le père Greg), le film « Un Printemps sous la neige » (1983) de Daniel Petrie, le film « Lilies » (1996) de John Greyson, le film « Het Sacrament » (1989) d’Hugo Claus, le film « Sister Emmanuelle » (1981) de Joseph Warren, le film « Quam Mirabilis » (1994) d’Alberto Rondalli, le film « Dominique Suor Sorriso » (2001) de Roger Deutsch, le film « Pecata Minuta » (1998) de Ramón Barea, le film « Les Destinées sentimentales » (1999) d’Olivier Assayas, le film « Split Wide Open » (1999) de Dev Benegal, la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener (avec Pierre le jeune prêtre homosexuel, en couple avec Pierre), la chanson « Ils en sont tous » (1949) de Robert Rocca, le one-man-show Cet homme va trop loin (2011) de Jérémy Ferrari (avec le Père Vert), la pièce Le Gai Mariage (2010) de Gérard Bitton et Michel Munz, la chanson « Jesus Is Gay » de Gaël, le film « Une Chose très naturelle » (2010) de Christophe Larkin (avec David, l’ancien séminariste), le film « Homme au bain » (2010) de Christophe Honoré, la publicité étrangère « Love For All » pour la marque de vêtements Björn Borg (avec les deux prêtres mariés à l’Église par une femme pasteur), la comédie musicale Peep Musical Show (2009) de Franck Jeuffroy (avec le père François), le film « Souffle au cœur » (1971) de Louis Malle (avec le jésuite pédéraste), le film « Toto qui vécut deux fois » (1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresto (avec Fefe, le curé gay), le film « Il y a des jours… et des lunes » (1989) de Claude Lelouch (où Francis Huster joue le rôle d’un prêtre en couple avec un antiquaire), la série Ainsi soient-ils de la chaîne Arte (2012) de David Elkaïm (avec des portraits de cinq séminaristes, très romancés et caricaturaux ; et l’un d’entre eux est évidemment homo), le roman Deux garçons, la mer (2013) de Jamie O’Neill (Jim, l’un des héros homos, se destine à la prêtrise), le film « In The Name Of » (2012) de Malgoska Szumokska (avec Adam, un jeune prêtre engagé et populaire, qui finit par se découvrir homo), la pièce L’Émule du Pape (2013) de Michel Heim (avec Tazzio, l’amant du Pape), le film « No Se Lo Digas A Nadie » (1998) de Francisco Lombardi (avec le prêtre montré comme homosexuel refoulé), l’opéra King Arthur (2009) d’Hervé Niquet (avec les deux moinillons homosexuels), le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer (avec le pasteur Ralph, homophobe et secrètement homosexuel), la pièce Les Feluettes (2015) de Michel Marc Bouchard (avec Monseigneur Bilodeau), le film « Benedetta » (2021) de Paul Verhoeven, etc.

 

Séminaristes « nouvelle génération »

 

Les allusions à l’homosexualité latente des prêtres sont plus ou moins directes : « Un ecclésiastique, un abbé pédalait. Mon Dieu, qu’il pédalait, pédalait bien l’abbé. » (cf. la chanson « L’Abbé à l’harmonium » de Charles Trénet) ; « Les curés, ce sont des hommes comme les autres : des obsédés. » (Nana dans son one-woman-show Nana vend la mèche, 2009) ; « Drag-queen avec moins de paillettes = un curé. » (une réplique du one-man-show Jérôme Commandeur se fait discret (2008) de Jérôme Commandeur) ; « Le pays a été sodomisé par la religion. » (Nasser dans le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears) ; « Je payais en toute hâte, empochai mon ticket et me jetai sur les portes du théâtre sans regarder vers la queue où, j’en étais convaincu, une dizaine d’homosexuels – dont un prêtre –, plus méchants les uns que les autres, riaient de ma déconvenue. » (le narrateur homosexuel à l’opéra, dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 35) ; « J’préfère encore me faire tripoter par un prêtre comme mes copains cathos quand ils vont au caté. » (Laurent Spielvogel à propos du rabbin à qui il va rendre visite, dans son one-man-show Les Bijoux de famille, 2015) ; etc.
 

Par exemple, dans le roman At Swim, Two Boys (Deux garçons, la mer, 2001) de Jamie O’Neill, Jim, le jeune adolescent homosexuel, s’est fait attouché par un prêtre, le frère Pocycarpe (ce dernier lui a déboutonné sa chemise et caressé le torse). Cet abus donne raison aux suspicions anticléricales émises par Doyler, l’amant de Jim : « Ces curetons, c’est tous des pervers et des frustrés. Attention aux curés de tous les côtés ! ». Dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa ? (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, Géraldine, la femme de Nicolas le héros homosexuel, sort des propos hyper homophobes, et soupçonne Mgr Lanu le prêtre qui doit présider l’enterrement du père de Nicolas, d’être homosexuel : « Je pense qu’il est un peu huhuhu. C’est un pédé, quoi ! » Nicolas fait des jeux de mots salaces entre le nom de famille Lanu et l’anus, bien entendu. Dans son one-man-show Bon à marier (2015), Jérémy Lorca hallucine, avec l’application I-phone GrindR, de découvrir des homos partout autour de lui : « J’étais pas habitué, moi ! Je viens du Nord-pas-de-calais. À part le curé, y’avait personne ! » Dans le film « Tout mais pas ça » (« Se Dio vuole », 2015) d’Edoardo Falcone, Andrea, veut devenir prêtre, mais n’ose pas encore le dire à ses parents. Tommaso, son père anticlérical, voit Andrea partir en mobylette avec son pote Furio, et s’imagine déjà qu’ils couchent ensemble… alors qu’ils ne font que se rendre à des réunions d’enseignement chrétien animées par un prêtre. La prêtrise est mise sur le même plan que le coming out.

 

Cette réputation est parfois confirmée par le personnage homosexuel lui-même. « Ton père est différent des autres pères. » (le père travesti M to F, ancien curé et ancien évêque de Bruxelles, faisant son coming out à son fils Peter et parlant de lui à la troisième personne, dans le spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons (2012) de Didier Bénureau ; il veut fonder l’Association des Travestis Évêques Belges, l’ATEB) On retrouve quelques héros homosexuels religieux vivant en couple homo, ou bien fréquentant les lieux de drague homosexuelle tels que les saunas ou les parcs. Par exemple, dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, lors d’un de leurs premiers dîners, Pierre Bergé compare son futur amant Yves Saint-Laurent à un prêtre pour le dragouiller : « Quand vous êtes venus saluer [à la fin du défilé Dior], vous aviez l’air d’un séminariste. »… ce à quoi Yves lui fait cet aveu : « Je suis passé chez les curés, oui. » Dans le roman Par d’autres chemins (2009) d’Hugues Pouyé, Adrien, séminariste, se voit dans une situation et dans des actions qui ne lui ressemblent pas : « Et Adrien était là aussi [sur la Place Dauphine, lieu de prostitution]. Adrien faisait comme eux. Il était l’un d’eux. Il en éprouvait de la honte. Comment lui, le prêtre, pouvait-il être impliqué dans ce vil commerce des corps, côtoyer ces êtres en manque de chair, se mettre en chasse comme eux ? » (p. 27) Le personnage homosexuel fige l’acte schizophrénique en question esthétique pour ne pas agir selon sa conscience. Dans la pièce Le Gai Mariage (2010) de Gérard Bitton et Michel Munz, le père d’Henri est prêtre. Et à la fin de la pièce, Edmond se marie avec le père Gilbert.

 

Dessin "Klostertraum" (1952) de Clovis Trouille (le bien nommé...)

Dessin « Klostertraum » (1952) de Clovis Trouille (le bien nommé…)


 

L’homosexualité de l’ecclésiastique est parfois une projection fantasmatique du héros/de l’auteur gay. « Le président se faisait sodomiser par le pape de l’Argentine. » (la voix narrative du roman L’Uruguayen (1972) de Copi, p. 56) ; « Un prêtre sur trois en est. » (Julien dans la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener) ; « Si les jeunes imitaient leurs profs homos, il y aurait davantage de bonnes sœurs. » (Harvey Milk dans le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant) ; « Mais entrez donc Monseigneur. Toujours toujours, tu t’y frottes… typique. » (cf. la chanson « Bouchon rue de Liège » du Beau Claude) ; « Y’a deux semaines, j’ai postulé pour rentrer dans les ordres. » (Jarry dans son one-man-show Atypique, 2017); etc. Par exemple, dans la pièce Le Bossu de Notre-Dame (2010) d’Olivier Solivérès, le méchant Frollo est homosexualisé et comparé à Blanche-Neige. Dans le film « Madre Amadísima » (2010) de Pilar Tavora, l’un des personnages s’adresse à la photo du pape Benoît XVI en le suspectant d’être affilié à plein d’homos dans ses proches collaborateurs. Dans la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel, les papes sont tous féminisés : les comédiens nous parlent de « la Jean-Paul II, la Pie XII, la Paul VI, la Benoît XVI ». Dans la pièce Bang, Bang (2009) des Lascars Gays, le pape Benoît XVI est transformé en gay. Dans son one-man-show Anthony Kavanagh fait son coming out (2010), Kavanagh compare le pape à une « vieille drag-queen ». Dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems, lorsque la narratrice transgenre F to M se travestit en moine ermite, « un samedi soir, la veille de Pâques » ; et elle évoque « la Papesse Jeanne ». Dans les fictions traitant d’homosexualité, même Jésus est transformé en pédale : « Oh je n’ai fait que prendre exemple sur Jésus… mais si vous voyez… Jésus (elle mime une folle sur la croix – mime les clous, la couronne, la chaleur) » (Lise dans la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « Plus tard, Jésus-Christ est crucifié. Il aimait beaucoup les hommes. » (une phrase de la B.D. de Cuneo, dans la revue Triangul’Ère1 (1999) de Christophe Gendron, p. 130).

 

Dans le film « Pédale douce » (1996) de Gabriel Aghion, dans la boîte gay Chez Eva, Adrien, le héros homo, pour se débarrasser d’Alexandre (l’hétérosexuel), fait croire à son pote sadomasochiste Bibiche que ce dernier est un « ex-séminariste grand amateur de flagellation » pour qu’il le maltraite physiquement… ce qui excite Bibiche encore plus. Et un peu plus tard, Fripounet, l’un des serveurs homos de la boîte, se montre aussi très entreprenant avec un prêtre puisqu’il n’hésite pas à le toucher. Il fantasme également sur le Christ : « Qu’il est beau, ce Jésus… ».
 

Parfois même, le personnage homosexuel est à l’origine de l’acte homosexuel du prêtre. Dans le roman Vincent Garbo (2010) de Quentin Lamotta, par exemple, c’est le héros gay lui-même qui, juste pour braver l’interdit de la profanation, va pervertir un curé et le faire basculer dans l’homosexualité, en attribuant ensuite son acte aux séminaires : « Qu’est-ce qu’on leur apprend, bon Dieu, dans les écoles à curés ? […] Ce pauvre type s’est défroqué ! » (p. 134) On voit bien, à travers ce roman, que les curés en question sont en réalité des hommes homosexuels déguisés en curés pour s’amuser/faire scandale, et porter à confusion sur la véritable identité des prêtres. D’ailleurs, Vincent Garbot, une fois son infamie opérée, vole sa soutane au pauvre curé rongé de culpabilité, et la porte avec complaisance et narcissisme, comme un trophée : « Il faut dire que le noir de l’habit boutonné jusqu’au col me va comme un gant. » (idem, p. 135) Autre exemple : dans le film « Marguerite » (2015) de Xavier Giannoli, deux hommes barbus déguisés en nonnes fréquentent le cabaret anar de Kyril. Dans le docu-fiction « Christine de Suède : une reine libre » (2013) de Wilfried Hauke, la Reine Christine, pseudo « lesbienne », a une liaison avec le cardinal Azzolino.

 

Film "Les Amitiés particulières" de Jean Delannoy

Film « Les Amitiés particulières » de Jean Delannoy


 

L’image caricaturale du curé pédé peut répondre à un fantasme (d’amour ou/et de viol) projeté : « Moi, c’que je veux, c’est violer le curé ! » (Camille dans la chanson finale du one-woman-show Vierge et rebelle (2008) de Camille Broquet) ; « Voilà la bonne sœur… ! » (Emory, homosexuel très efféminé, se moquant d’Alan, le héros homosexuel refoulé, dans le film « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « La religieuse était pleine de vie et, bien qu’elle ne fût pas jolie, je fus attirée par elle. […] J’étais insensiblement attirée et sous le charme de la sœur. […] Je concentrai mon esprit sur les pensées choquantes qui me traversaient l’esprit. Je l’imaginais déshabillée et en situation de me donner ce que j’aurais voulu d’elle sur l’instant. […] J’avais souvent pensé que dans les couvents, parmi ces femmes enfermées, certaines devaient entre elles trouver un peu de satisfaction… » (Alexandra, la narratrice lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, pp. 221-223) ; « Était-elle en train de flirter ? […] Ils remontèrent le chemin blottis l’un contre l’autre comme des jeunes mariés hésitants. » (Jane, l’héroïne lesbienne à propos du jeune père Walter, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 48) ; etc. Dans le film « Le Cavalier noir » (1960) de Roy Baker, un prêtre s’oppose aux agissements d’un bandit de grand chemin qui sème la terreur sur son passage… et ce bandit tombe justement amoureux de son bienfaiteur en habit.

 

L’homosexualisation de l’homme clérical qui est en chemin de pureté est souvent le fruit d’une vexation féminine ou d’une jalousie homosexuelle de ne pas parvenir à le séduire ou à l’égaler. Pour faire fléchir un prêtre, certains personnages homosexuels vont prêcher le faux pour savoir le vrai : « Peut-être que t’es pédé d’ailleurs… » Par exemple, dans le film « La Mante religieuse » (2014) de Natalie Saracco, Jézabel, l’héroïne bisexuelle, traite de « pédé » le beau père David dont elle est amoureuse, par jalousie et test, parce qu’il se refuse à elle.

 

En général, le sacerdoce n’est pas considéré par le héros homosexuel comme une vie, un engagement, une intériorité ouverte sur l’extérieur, mais uniquement comme un déguisement, une apparence, une extériorité tournée vers un égocentrisme, un bout de tissu : « Wanda passa son bras autour de la taille de Mary et elles s’éloignèrent en glissant, couple incongru, l’une vêtue aussi sombrement qu’un prêtre, l’autre dans sa robe de soirée de flou chiffon bleu. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), p. 489) Dans la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand, Omar se surnomme « Sœur Omar de la Perpétuelle Indulgence ». La parodie de religion, ce ne sont pas les prêtres réels, mais les personnages homosexuels eux-mêmes. Par exemple, dans la pièce L’Opération du Saint-Esprit (2007) de Michel Heim, Dieu est un bourgeois aristo homosexuel, Jésus une grande folle, Marie un travesti, et l’Esprit Saint le désir homosexuel.

 

On lit souvent chez le personnage homosexuel se prenant pour un curé un fantasme de sainteté inversé. Il cherche le salut et la pureté dans la perdition. L’homosexualité pratiquée lui apparaît comme une forme de sainteté inédite, originelle. Il rentre au bordel comme il rentrerait au couvent. « Pietro s’est décidé à changer définitivement de sexe, il veut devenir carmélite. » (la voix narrative dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 146) Par exemple, dans la pièce Hétéro-Kit (2011) de Yann Mercanton, l’une des salles du sauna où se rend le protagoniste homo est appelée « la Chapelle Fistine » (jeu de mots entre le fist-fucking et la fameuse Chapelle Sixtine au Vatican). Dans le roman La Cité des Rats (1979) de Copi, les ecclésiastiques sont en réalité des imposteurs homosexuels déguisés en curés, « les folles habillées en abbesses » (p. 113) : « Mimile se souleva la soutane et nous montra son postérieur. » (p. 115) ; « Mimile vint nous rejoindre dans le lit de l’archevêque pour coucher avec nous. » (Gouri, p. 95) Tout cela sont des mises en scène libertines volontairement blasphématoires, peu réalistes, mais voulues authentiques, y compris dans la dérision et le sarcasme. « Je veux faire le prêtre. Je veux être une traînée ! » (Paul, héros homo chantant dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso)

 

Le personnage homosexuel, vexé d’avoir mal répondu à sa vocation à la sainteté, se venge sur les prêtres réels de son entourage. Pourtant, il se sentait originellement « appelé ». « Savais-tu qu’avant de devenir médecin, j’avais résolu d’entrer dans les ordres ? » (Randall dans le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 235) Dans son one-man-show Ali au pays des merveilles (2011), Mr Folaste, qui voulait initialement devenir jésuite, « a fini pédophile, comme tous ces pédérastes ». Dans le one-man-show Jefferey Jordan s’affole (2015) de Jefferey Jordan, le héros homosexuel commence son spectacle par une blague sur les prêtres pédophiles qui, dans les magasins de vêtements Kiabi, « rentrent dans du 8 ans »… même si au départ, il annonce qu’il ne le fera pas : « Je ne ferai pas de vannes vulgaires sur les prêtres. »

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

Autobiographie "Confidences dérangeantes d'un homme d'Église" de William Nasarre

Autobiographie de William Nasarre


 

Dans les faits, les prêtres « homosexuels pratiquants » ne manquent pas. Parmi les cas les plus connus, on retrouve André Baudry (ancien séminariste et fondateur d’Arcadie dans les années 1950 en France), Salvador Guasch, Antonio Roig, Ernesto Jiménez, Antonio Rocco, Vitaliano Della Sala, Franco Barbero (cf. le documentaire Les Règles du Vatican (2007) d’Alessandro Avellis), José Mantero, Hugues Pouyé (prêtre pendant 13 ans), Jean-Michel Dunand, etc. Dans le documentaire « Católicos Gays » de l’émission Conexión Samanta sur Play Cuatro, (2011), une sœur « défroquée », María-José Casillo, témoigne de sa souffrance d’être partie du couvent – et plus largement de l’Église catholique – parce qu’elle a connu l’amour lesbien avec une autre religieuse, et qu’elle a rompu ses vœux. Dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz, Christian, le dandy quinquagénaire homosexuel, dit avoir aimé toucher (chez les Jésuites) le sexe des hommes plus âgés que lui. Dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), Bertrand N’Guyen Matoko raconte comment il s’est fait violer, adolescent, par son confesseur le père Basile.

 

Je vous renvoie également à l’autobiographie Confidences dérangeantes d’un homme d’Église (2006) de William Nasarre, au blog du père Jonathan sur Facebook (itinéraire d’un prêtre qui se dit ouvertement homosexuel, mais qui parle à visage caché), à tous ces films de « nunsploitation » (dont parle l’essayiste Didier Roth-Bettoni) dans lesquels des œuvres cinématographiques lient homosexualité et ordres religieux, au documentaire « Axel von Auerperg » (1973) de Rosa von Praunheim, au documentaire croate « Nuns in your Business ! » (2020) d’Ivana Marinić Kragić, etc.

 

Comme le reconnaît très honnêtement le prêtre catholique Xavier Thévenot, maintenant décédé, mais pionnier de la réflexion ecclésiale en matière d’homosexualité, dans son essai Homosexualités masculines et morale chrétienne (1985), « il n’est pas rare, quoique cela ne soit pas systématique (comme on l’a parfois affirmé), que l’homosexualité soit une des composantes de la prêtrise. » (p. 181) Par ailleurs, dans son essai Je vous appelle amis (2010), le maître de l’Ordre des dominicains Timothy Radcliffe explique qu’il y a parmi ses frères ordonnés un certain nombre d’individus homosexuels, mais que cela ne pose pas de problème ni de distinction fondamentale entre eux étant donné que l’exigence de la continence dans le célibat s’applique à tous, qu’ils soient homos ou non. Et on retrouve un certains nombres de religieux liés de près ou de loin aux associations et aux communautés comme la Fraternité Aelred, l’association David et Jonathan (D&J), le mouvement Devenir Un En Christ (DUEC), la Communion Béthanie, l’association Courage international, etc.

 

le Franciscain Father Mychal F. Judge

le Franciscain Father Mychal F. Judge


 

Certains prêtres ou séminaristes, en vivant une double vie parce qu’ils refusent de concilier leur obéissance à l’Église avec leurs penchants homosexuels, racontent parfois le rêve éveillé (un cauchemar schizophrénique) qu’ils vivent quand ils fréquentent les lieux de drague homosexuelle et qu’ils ne pratiquent pas ce qu’ils savent vrai : « En raison de mes horaires, différents de ceux des frères, j’avais les clés de la porte d’entrée du carmel. Je n’étais pas supposé disparaître le soir après le dîner. Mais je m’en arrogeais discrètement le droit et filais vers les lieux de rendez-vous homosexuels. » (Jean-Michel Dunand, Libre : De la honte à la lumière (2011), p. 49) ; « J’avais solutionné le problème en divisant ma vie en deux parties. Studieux et chaste au séminaire, je me dissipais pendant les vacances scolaires. J’avais découvert que les saunas servaient de lieux de rencontre et je les fréquentais de manière totalement compulsive. » (idem, p. 71)

 

Il est certain que la pratique homosexuelle guette tous les regroupements humains où la différence des sexes est absente ou méprisée/sacralisée, où la tentation de se prendre pour Dieu est fatalement plus forte (cf. je vous renvoie au code « Se prendre pour Dieu » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels), les ordres religieux ne faisant pas exception à la règle. Ce fut le cas des Templiers au XIIe et XIIIe siècles : « Quelque opinion que l’on adopte sur la règle des Templiers et l’innocence primitive de l’Ordre, il n’est pas difficile d’arrêter un jugement sur les désordres de son dernier âge – désordres analogues à ceux des ordres religieux. Les Templiers, jugés, avouèrent leurs mœurs. L’Ordre du Temple fut, sur ordre de Philippe le Bel et du Pape Boniface VIII, anathémisé, aboli et ses membres suppliciés. » (l’historien Jules Michelet, cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 130) L’histoire humaine regorge d’anecdotes démontrant une pratique réelle de l’homosexualité aux séminaires, au sein des couvents et des abbayes. « Dans les couvents [pendant la Renaissance française], on croit trouver des vierges, on tombe sur des lesbiennes. » (Louis-Georges Tin, L’Invention de la Culture hétérosexuelle (2008), p. 115) ; « Le Vatican compte une forte majorité d’homosexuels. Et je vais vous expliquer pourquoi. Dès ses débuts, le christianisme a exclu et fustigé les femmes, condamné la société et milité pour le célibat. » (Uta Ranke-Heinemann dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) ; « Au début, je croyais que ce n’était que des ragots, ces histoires d’orgies dans les locaux du séminaire. Mais la rumeur s’est confirmée. Le sexe était partout. On nous encourageait presque. On nous disait : ‘Si vous êtes homos, de nos jours, ce n’est plus un obstacle pour devenir prêtre’. Je ne m’attendais pas du tout à ça. Les homosexuels étaient sur-représentés. Je dirais qu’ils formaient la moitié des séminaristes, voire un peu plus. » (Daniel Bühling, jeune prêtre défroqué, idem) ; etc.

 

Jean de Prévallier, professeur à l’Académie de Médecine de Paris (1715-1792), a écrit en 1780 des mots fatalistes sur la prêtrise, qui se présentent pourtant sous un jour « objectif » et « scientifique » : « Si l’on examine le chiffre brut des sodomistes que donnent les dossiers de la police, quant à la qualité de l’individu, on est frappé de la prédominance du clergé et de la domesticité. Toutefois, à notre époque, si l’on fait la comparaison entre la quantité des sodomistes de chaque catégorie, et la totalité des individus appartenant à cette catégorie, le clergé prend la première place. Quant à la continence que les moines, les prêtres, les religieux et les religieuses observent soi-disant, en vertu du privilège spécial conféré par les ordres sacrés, il y a longtemps que l’on sait positivement à quoi s’en tenir à cet égard par les désordres scandaleux d’un certain nombre d’entre eux. Il n’y a plus d’illusion possible, car il est avéré et reconnu par les casuistes mêmes que les plus chastes, ne résistant souvent le jour qu’au prix des plus violentes luttes de la chair, sont tourmentés la nuit par des hallucinations lubriques, des rêves libidineux, des images érotiques qui les amènent à des pollutions ou à la masturbation. Leur célibat n’est plus qu’un grossier trompe-l’œil pour les simples et les ignorants, cachant une nécessité indispensable au maintien de sa hiérarchie et de son autorité. Que peuvent faire ces jeunes hommes de vingt à vingt-cinq ans, souvent vigoureux et pleins de vie ? Un jour ou l’autre, contre leur gré dans la plupart des cas, la chair triomphe et le vice de Sodome s’installe en eux, malgré leur désir de rester purs… »

 

Dans son roman-documentaire La Maison battue par les vents (1996), le père Malachi Martin, qui a été un proche du Pape Jean XXIII puis de Paul VI, ouvre la Boîte de Pandore du Vatican et du clergé international : « La Maison des Saints Anges – nom de ce monastère – avait la réputation d’être un havre pour plusieurs membres de l’Ordre ayant une orientation homosexuelle. » (pp. 448-449); « La propagation de l’homosexualité active dans les séminaires d’Amérique du Nord comme dans l’ensemble du clergé. » (Pape Jean-Paul II, p. 370) ; « une homosexualité et une pédophilie cléricales apparemment devenues frénétiques ; les contours d’une profonde crise morale. » (p. 384) ; « Il existe un système de protection mutuelle qui va de la Chancellerie d’O’Cleary jusqu’au Collège des Cardinaux. Et beaucoup de types qui voudraient en sortir n’en ont pas le cran. Un groupe de prêtres homosexuels, vœux rompus, de vocations avortées et de trahison abyssale de la confiance que leurs congrégations avaient placée en eux. Ce club ecclésiastique pratiquant l’homosexualité et la pédophilie comprenait aussi le clergé de haut rang, jusqu’à des évêques auxiliaires et titulaires. Cela fonctionnait comme une mafia cléricale.[…] Innocent ou non, quiconque vendait la mèche était sûr de finir comme lui, isolé et enterré sous une avalanche de contre-accusations. » (Père Michael O’Reilly, p. 466 à 481) ; « Des évêques mutaient continuellement leurs jeunes amants de paroisse en paroisse » (p. 481) ; « nombre croissant d’ecclésiastiques activement homosexuels, de la complicité de certains évêques avec les pratiques en question et de la connivence que montraient vis-à-vis d’elles ceux qui n’y étaient pas directement impliqués. » (p. 484) ; « un réseau plus vaste qu’aucun de nous s’y attendait. » (p. 498) ; « l’homosexualité était un mode de vie ‘parfaitement acceptable’ » (p. 580) ; « Ce qui lui meurtrissait l’âme, c’était la malignité des Dominicains entre eux. D’une manière troublante, ses frères religieux de la Maison des Saints Anges constituaient un groupe d’hommes ayant choisi de vivre ensemble et excluant tout esprit qui leur était étranger. » (p. 472) ; « La documentation montrait que l’activité homosexuelle et le satanisme rituel avaient atteint un niveau organisationnel au sein du clergé américain, mais parce que les mêmes noms et les mêmes lieux revenaient dans chacune des deux séries de données. » (p. 532) ; « connexion de fait entre l’homosexualité pédophile et le satanisme ritualiste au sein du clergé » (p. 533) ; « Il apparaissait tout à coup comme incontestable que l’organisation catholique romaine comprenait désormais – pendant le pontificat de Jean-Paul II en cours – un contingent permanent de clercs qui adoraient Satan et qui aimaient ça, d’évêques et de prêtres qui sodomisaient des jeunes garçons et se sodomisaient entre eux, ainsi que des religieuses qui accomplissaient des ‘Rites noirs’ de la Wicca et qui entretenaient des relations lesbiennes à l’intérieur comme à l’extérieur de la vie conventuelle. […] Non seulement il s’accomplissait des rites et des actions sacrilèges aux Autels du Christ, mais cela se faisait avec la connivence ou, du moins, la permission tacite de certains Cardinaux, archevêques et évêques. La liste des prélats et des prêtres concernés avait de quoi causer un énorme choc à quiconque la découvrait. Au total, ces hommes ne formaient qu’une minorité comprise entre un et dix pour cent du clergé total. Mais parmi cette minorité, nombreux étaient ceux qui occupaient des positions incroyablement élevées par le rang et l’autorité au sein des chancelleries, séminaires et universités. De ces deux faits, le plus crucifiant pour le Pape slave était le pouvoir d’un tel réseau, si disproportionné eu égard au statut minoritaire de la mouvance en question dans les rangs de l’Église. L’influence prépondérante du réseau tenait d’une part aux alliances de ce dernier avec des groupes laïcs extérieurs à la sphère catholique romaine, d’autre part au nombre écrasant de professeurs des séminaires, des universités et des écoles catholiques affichant une opposition ouverte et comme allant de soi aux dogmes et enseignements moraux de l’Église. Mais il existait un troisième fait : C’était ce Souverain Pontife qui avait rendu une telle influence possible. Il avait vu la corruption. Mais sa décision avait été de ne pas excommunier les hérétiques. » (pp. 583-584)
 

Suite à la publication du document de 2005 du pape Benoît XVI (appelant à la prudence concernant les séminaristes qui présentaient des tendances homosexuelles profondément enracinées), j’ai su par exemple qu’aux Philippines, le frère prieur et supérieur d’une communauté religieuse que je connais a vu la moitié des séminaristes faire leur valise ! Et à force de m’entretenir avec certains prêtres et religieux, je sais que dans telle ou telle congrégation religieuse (Frères de saint Jean, Jésuites, Dominicains, etc.), dans tel ou tel média catho (revue, radio… Dans certaines radios en France, 40 % du personnel « en est », je peux l’attester !), dans tel ou tel diocèse, et même au Vatican (où il existe une petite « mafia rose » enserrant le Pape : véridique), la proportion des frères à avoir des tendances homosexuelles se retrouverait, à la louche, dans une fourchette de 1/3 à ½. Cette homosexualité dans le Clergé n’est pas à ignorer, car elle est croissante… même si elle est peu quantifiable et peu révélatrice d’une soi-disant « frustration ou homophobie ou homosexualité refoulée » qui serait générée par le célibat consacré.

 

Si on veut prouver que les prêtres sont aussi des hommes comme les autres, on y arrivera toujours ! Car ils le sont. Tous les Hommes sont pécheurs (… sauf Jésus et Marie). Le plus gênant dans ce discours de l’évidence, c’est que ceux qui se focalisent sur les défaillances des prêtres oublient pour le coup que la majorité d’entre eux sont non seulement humains mais surtout divinisés par le sacrement du sacerdoce, remplis par la grâce et la liberté du don entier de sa personne à Jésus et à son Église. Et là, en effet, c’est la question de la foi en Dieu qui rentre en ligne de compte, et qui fait que les incrédules (emprisonnés par leurs pulsions et jaloux de voir que les prêtres les contrôlent avec succès et joie) s’arrêtent en route, et les confiants continuent le chemin.

 

La mauvaise foi génère des caricatures de curés gays, provenant bien souvent de pseudo « catholiques pratiquants », ou même de prêtres défroqués, froissés de ne pas avoir suivi jusqu’au bout leurs idéaux, ou blessés par des gens d’Église peu charitables : « Le conflit entre Amour et Église, ce sont les évêques et les cardinaux qui l’ont causé, parce qu’ils sont tous des homosexuels refoulés. » (le père Franco Barbero dans le documentaire Les Règles du Vatican (2007) d’Alessandro Avellis) ; « Il y a bien des pédés asociaux, mais souvent ceux-là sont prêtres. » (cf. le blog du chanteur Nicolas Bacchus) ; « Si on faisait des statistiques dans le clergé catholique espagnol, certains diocèses présenteraient un pourcentage élevé d’homosexuels. » (José Mantero, ex-prêtre catholique, cité dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 151) ; « C’est clair : ce sont des concubines notoires. » (Gustav, homosexuel, décrivant cyniquement deux religieuses italiennes qui ont répondu négativement à sa défense du DICO – le PaCS local – lors d’un micro-trottoir, dans le documentaire « Homophobie à l’italienne » (2007) de Gustav Hofer et Luca Ragazzi) ; etc.

 

Certains vont tellement vite à homosexualiser tout le clergé qu’ils en arrivent, parfois avec une sincérité incroyable, à proposer des théories abracadabrantes sur l’homosexualité du Christ (en lien par exemple avec saint Jean, le disciple que Jésus « aimait », ou bien avec l’iconographie ambiguë du baiser de Judas). Par exemple, lors d’une interview publiée le 19 février 2010 dans le magazine Parade, le chanteur homosexuel Elton John affirme que « Jésus était un gay compatissant, super-intelligent ».

 

Il semblerait que beaucoup de personnes homosexuelles, croyantes mais non pratiquantes, et tellement persuadées qu’elles sont des fidèles plus authentiques que les vrais catholiques pratiquants parce qu’elles n’obéiraient pas « bêtement/scolairement » à l’Église comme des grenouilles de bénitier, se soient prises pour leurs propres caricatures : les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence (ces hommes excessivement grimés en nonnes provocatrices lors des Gay Pride) en fournissent un bel exemple. Elles voient leur détournement des préceptes de l’Église comme une inversion révolutionnairement sainte. Parfois, ce sont les hommes homosexuels qui, en se déguisant en prêtres fréquentant les lieux de drague gay, alimentent eux-mêmes l’amalgame entre homosexualité et prêtrise : rappelons par exemple que le philosophe français Roland Barthes allait au club parisien Le Rocambole déguisé en ecclésiastique, juste pour porter préjudice à l’institution vaticane et mal agir en toute impunité. La parodie homosexuelle d’Église peut être très sérieuse, comme nous le constatons avec les hordes de FEMEN (seins nus, affichant des messages anticléricaux, portant le voile) lancée par Caroline Fourest, oubien dans le documentaire « Mamá No Me Lo Dijo » (2003) de Maria Galindo, où l’on voit des femmes lesbiennes déguisées en prêtres, célébrant des messes en plein air sur la place publique, et réclamant le mariage des prêtres ou l’ordination des femmes prêtres pour combattre le supposé « sexisme » de l’Institution vaticane.

 
CURÉ GAY Queen of homophobia
 

C’est par leurs provocations anticléricales collégiennes, ou leurs pastiches sincères de rites cultuels catholiques, qu’une grande majorité des personnes homosexuelles prouve que la perversion et l’obsession sexuelle ne viennent pas d’abord des prêtres mais de ceux qui les jalousent/ignorent/détruisent : « Dans ma prochaine nouvelle, j’me tape des curés dans la grotte de Lourdes ! » (l’écrivain Ron l’Infirmier dans l’émission Homo Micro de la radio RFPP, le 12 février 2007) ; « Évidemment, je ne vois pas le prêtre en charge de ma paroisse venir m’embrasser sur la bouche. Mais alors, qu’il laisse cela à celui qui en aurait envie parce que cela monterait naturellement de son être accordé à cet embrassement. » (Henry Creyx, Propos décousus, propos à coudre et propos à découdre d’un chrétien homosexuel (2005), p. 32) ; etc.

 

Est-il besoin de rappeler que l’idée des prêtres catholiques gays ou du séminaire comme « repaire d’homosexuels » étaient un des arguments fréquemment employés par les Nazis pour pourchasser les personnes homosexuelles et l’Église ? « J’estime qu’il y a dans les couvents 90 ou 95 ou 100% d’homosexuels. […] Nous prouverons que l’Église, tant au niveau de ses dirigeants que de ses prêtres, constitue dans sa majeure partie une association érotique d’hommes, qui terrorise l’humanité depuis mille huit cents ans. » (Heinrich Himmler dans son discours du 18 février 1937, cité dans l’essai Le Triangle rose (1988) de Jean Boisson, p. 73)

 

L’homosexualité attribuée aux curés prouve justement par défaut la ténacité, l’intégrité et la force exceptionnelles de la grande majorité des vrais prêtres. Plus on est dans la Vérité, plus on est attaqués. Et l’homosexualisation de ceux qui sont en chemin de pureté (homosexualisation prenant au départ la forme de la revendication du mariage des prêtres, de la cessation de leur voeu de célibat, ou du sacerdoce des femmes) est souvent le fruit d’une vexation féminine ou d’une jalousie homosexuelle de ne pas parvenir à les séduire ou à les égaler. Pour faire fléchir un prêtre, on va prêcher le faux pour savoir le vrai : « Peut-être que t’es pédé d’ailleurs… »

 

Cela ne veut pas pour autant dire que les hommes d’Église sont parfaits, n’ont pas leurs défaillances, et qu’ils ont tous une sexualité équilibrée. Cependant, ils doivent tendre à la perfection et être exemplaires, car ils sont davantage responsables que des laïcs du salut des autres âmes, ayant été ordonnés pour habiter le Christ. Les prêtres et religieuses, parce qu’ils sont sanctifiés et ont reçus des grâces en abondance, ont moins d’excuses de mal agir. Et il est urgent pour eux, s’ils se sont écartés en actes de leur engagement religieux (en pratiquant des actes homosexuels par exemple), de revenir à la Vérité. Car ils risquent gros : la Vie éternelle. Certains – et j’en connais beaucoup – sont en grand danger, je le dis honnêtement. En danger de mort. L’enfer est peuplé précisément de ces gens-là qui savent mais qui ne font pas, de ces croyants non pratiquants. D’ailleurs, le seul véritable croyant non pratiquant, c’est/c’était le diable.

 

"Coming out" de José Mantero en Espagne

« Coming out » de José Mantero en Espagne


 

Soyons lucides. Depuis ma récente visibilité médiatique en tant que catho homo continent, beaucoup de prêtres, de séminaristes, viennent se confier à moi, me parler de leurs pratiques homosexuelles clandestines (parfois, il arrive aussi qu’ils me draguent !). J’ai même entendu des témoignages d’amis séminaristes, vivant leur homosexualité dans le plus grand secret, alternant les phases de continence avec des moments d’orgie sexuelle sur les lieux de drague, qui m’avouaient qu’à l’intérieur de leur séminaire, certains de leurs camarades sortaient ensemble. Je sais qu’ils ne me mentent pas, car ils m’ont vidé leur sac avec une grande transparence, un véritable attachement à leur Église, et sans volonté de scandale. Tout cela sont des faits. Je n’invente rien de ce que je vous raconte, même si je suis tenu au secret de la « confession », et qu’au-delà de ces révélations, je n’en aime que davantage mon Église et son incarnation humaine. Je sais que malgré leur nombre important, ces prêtres « homos pratiquants » restent une MINORITÉ dans l’Église catholique (en revanche, ce que j’observe de plus en plus, c’est que ce sont les frères de sang des prêtres catholiques qui ont tendance à faire des coming out ! C’est mon cas puisque mon grand frère est prêtre, mais j’ai eu l’occasion de le constater dans la famille de beaucoup de jeunes prêtres ; dans les cas connus, le frère jumeau du cardinal Jean Daniélou). Parfois une minorité puissante, qui exerce des chantages dignes d’une mafia gay (je pense à l’inadmissible groupuscule d’ecclésiastiques homosexuels qui exerce actuellement un petit pouvoir à la Curie romaine). Mais cette réalité d’Église n’enlève rien à la force et l’authenticité du célibat continent de l’ensemble des consacrés. Tout le contraire. L’Église catholique, parce qu’Elle est grande et belle, et qu’Elle est globalement conduite par des hommes et de femmes droits qui font ce qu’ils disent, ne souffrira pas excessivement de ces croyants non pratiquants qui La trahissent. Cependant, c’est pour ces prêtres égarés (et parfois blessés dans leur affectivité, voire malades : eh oui, appelons un chat un chat !) que j’écris ce code : s’ils me lisent, qu’ils se convertissent au plus vite, qu’ils se purifient, qu’ils reviennent en actes à ce qu’ils savent. Calmement, fermement, rapidement, et dans la joie. Le fardeau de la continence concrètement vécue est plus léger que celui de l’intuition non-actée de la vérité de la continence.

 

Lors de son passage à l’émission On n’est pas couché de Laurent Ruquier sur la chaîne France 2 le 1er octobre 2011, la religieuse-sexologue québécoise Marie-Paul Ross disait que ce qui l’a poussée à écrire son essai Je voudrais vous parler d’amour et de sexe (2011), c’était la grande détresse dans le domaine de la sexualité qu’elle avait entrevue au contact de ses compagnons prêtres et moniales. Je me situe dans la même démarche, cette fois sur le sujet spécifique de l’homosexualité. C’est de l’intérieur que l’Église doit se sanctifier et devenir ce qu’Elle est. C’est par les actes – non pas qu’on est sauvés (car l’Amour n’est pas une question de mérite) mais – qu’on trouve le vrai bonheur.

 

Je finirai en proposant une porte de sortie à tous ces prêtres gays « pratiquants » qui se reconnaissent dans la lecture de ce code, qui savent très bien intellectuellement tout ce que j’écris, mais qui n’ont pas de lieu pour en parler. Un ami prêtre catholique solide, d’une discrétion absolue, et d’une profonde écoute, en tombant sur mes lignes, s’est spontanément proposé pour créer une sorte de « Conversion Info Service », et pour accueillir tout prêtre qui aurait besoin de parler avec un véritablement « frère de ministère » (que je ne suis pas ^^). Une seule adresse : jeveuxaimer@live.fr

 
 

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Code n°67 – Faux révolutionnaires (sous-codes : Révolution trahie / Rebelle / L’homo combatif face à l’homo lâche / Anti)

faux rév

Faux révolutionnaires

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

« Je veux faire comme tout le monde, mais à l’envers. » (cf. la chanson « Chemins de croix » du groupe Niagara)

 

Film "Pecadillo" de Royston Tan

Film « Pecadillo » de Royston Tan


 

La révolution homosexuelle n’a pas eu lieu et n’aura pas lieu. Je préfère vous prévenir. Les trois seules révolutions sexuelles – dignes de ce nom – que je connaisse, c’est le jour de la création de la différence des sexes aimante, le jour de la naissance de chacun de nous, et l’existence de Jésus-Christ. Le reste – dont la révolution homosexuelle, qui repose sur une pulsion et un fantasme, je le rappelle – , ce sont des révolutions de bazar, des modes éphémères, des châteaux de cartes, des fascismes ambulants qui se donnent des airs de Mère Teresa. Des chimères.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Faux intellectuels », « Artiste raté », « Défense du tyran », « Homosexuels psychorigides », « Entre-deux-guerres », « Patrons de l’audiovisuel », « Milieu homosexuel paradisiaque », « Mère gay friendly », « Duo totalitaire lesbienne/gay », « Se prendre pour Dieu », « Bobo », « L’homosexuel riche / L’homosexuel pauvre », « Homosexuel homophobe », « Doubles schizophréniques », « Parodies de mômes », à la partie « Je suis un traître » du code « Homosexualité noire et glorieuse », à la partie « Aventurier » du code « Super-héros », à la partie « Le Bien par le mal » du code « Se prendre pour le diable », et au code « Inversion », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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PETIT « CONDENSÉ »

 

Le fantasme de Révolution chez les personnes homosexuelles

1- La révolution souriante

 

Film "Nés en 68" d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau

Film « Nés en 68 » d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau


 

Pour partir en croisade contre leurs ennemis (et surtout contre eux-mêmes !), bon nombre d’individus homosexuels décident de mener une révolution monumentale. Celle-ci va prendre deux principaux visages : une face euphorique, une autre agressive.

 

"Kissing" de Marseille, à l'automne 2012 à Marseille, par deux lycéennes

« Kissing » de Marseille, à l’automne 2012, par deux lycéennes « hétéros »


 

À l’époque de la Guerre froide, se déclarer à la fois révolutionnaire et homosexuel était chose difficilement possible et conseillée. À présent, les media ont réalisé le « rêve » de beaucoup de personnes homosexuelles : l’association des deux termes est devenue quasi obligatoire. Sur nos écrans de télévision et dans la presse, les critiques lèguent souvent aux sujets homosexuels des réputations d’anti-conformistes extraordinaires, de rebelles aux idées osées et à l’humour irrespectueux, d’intellectuels très engagés et ridiculisant les lieux communs du progressisme démocratique. Et le pire, c’est que beaucoup d’entre eux ont fini par croire en leur notoriété. « Moi je suis toujours pour changer les codes, quels qu’ils soient. Je suis contre toutes les institutions bourgeoises, quelles qu’elles soient. Vous savez, je suis né révolutionnaire, je mourrai probablement comme ça. J’ai un peu tété le lait de l’anarchie dans ma jeunesse. J’ai pas cessé de le faire. Je suis contre les discriminations. » (Pierre Bergé, actuel PDG de la revue Têtu, ami de François Mitterrand, et créateur de Yves Saint-Laurent, interviewé dans l’émission Culture et Dépendances sur la chaîne France 3 le 9 juin 2004). Maintenant, ils sont relativement nombreux à se dire ouvertement révolutionnaires. Mieux encore : ils affirment qu’« il y a de fortes chances pour qu’un homosexuel soit parmi les plus révolutionnaires des révolutionnaires » (H. P. Newton, ministre de la défense du Black Panther Party, cité dans l’essai Le Désir homosexuel (1972) de Guy Hocquenghem, p. 173).

 

La communauté homosexuelle magnifie le parcours de ses membres. Selon elle, tous les artistes homosexuels célèbres auraient fait « de brillantes études » (Michel Larivière, Dictionnaire des Homosexuels et Bisexuels célèbres (1997), p. 343), eu une « jeunesse éclatante » (cf. l’article « Oscar Wilde » de Jean-Philippe Renouard, dans le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes (2001) de Didier Éribon, p. 501), et été de preux défenseurs de la démocratie. Elle tresse des couronnes et dresse des listes de personnalités admises au panthéon homosexuel dans des dictionnaires. Elle fait inlassablement les fonds de tiroirs pour trouver ses figures emblématiques dans l’Histoire humaine et reconstituer une Grande Famille homosexuelle. Mais, face à la noirceur de certaines œuvres artistiques ou vies, elle a de quoi s’arracher les cheveux ! « Comment trouver une image positive de l’homosexualité chez des artistes qui n’ont présenté que l’angoisse, la violence, la destruction, le désespoir, la peur ? » (cf. l’article « Francis Bacon » d’Élisabeth Lebovici, op. cit., p. 53) La recherche de l’héroïsme homosexuel n’est pas si évidente que cela… et pour cause : je crois que d’une part, le désir homosexuel pousse davantage les êtres humains à la bassesse qu’à la grandeur, et d’autre part, que « l’homosexuel » n’existe pas. C’est ce qui explique que les historiens gay partent à la chasse aux Grands Hommes « homosexuels » de la Seconde Guerre mondiale non sans une certaine inquiétude : « N’aurions-nous donc, pour cette période terrifiante de l’histoire, que des héros ‘négatifs’ ? » (Jean Le Bitoux, Les Oubliés de la mémoire (2002), p. 225) Ils nous présentent l’excuse de la rareté des témoignages et de l’absence de descendance chez les personnalités homosexuelles de l’époque pour attester de leurs exploits présumés. Par conséquent, ils ne peuvent que supposer des héroïsmes. « On peut formuler l’hypothèse que dans les maquis se trouvent aussi des jeunes dont l’orientation homosexuelle aura hâté l’entrée en clandestinité. […] Si la Résistance favorise l’émancipation de certaines jeunes femmes, on peut supposer que c’est aussi le cas pour certains homosexuels. » (cf. l’article « Résistance » de Corinne Bouchoux, dans le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes (2001) de Didier Éribon, p. 403)

 

Personnellement, j’estime qu’il n’est pas nécessaire de se lancer dans des fouilles pseudo historiques pour prouver qu’il a existé par le passé, non pas « des homosexuels » ni des « personnes homosexuelles », mais des Hommes remarquables (… habités par un désir homosexuel plus ou moins durablement inscrit en eux). En revanche, la recherche désespérée des révolutionnaires visant à prouver par a + b que « les homos » n’étaient vraiment pas du côté des « salauds de fascistes » signale un fait très important : que certaines personnes homosexuelles sont les dernières à devoir encore s’en persuader, aux côtés de la poignée d’indécrottables personnes homophobes. À vouloir fuir à tout prix l’image stigmatisante du « héros homosexuel négatif », elles la justifient bien souvent dans une entreprise de béatification ratée.

 

Certains réalisateurs annoncent des lendemains chantants pour la communauté homosexuelle. Ils croient en une révolution homosexuelle grandiose, exprimée par leurs personnages de fiction. « Après la Révolution, on trouvera toutes le Grand Amour ! » exulte Karen dans le film « Sex Revelations » (1996) de Martha Coolidge. Au niveau associatif, les militants homosexuels présentent souvent la politique comme un champ de bataille « merveilleux » pour leurs victoires législatives futures. Leur principal slogan révolutionnaire repose sur l’idée de progrès. À leurs yeux, tout ce qui rompt avec la tradition est forcément juste et transcendant. Par leur utilisation de l’expression « jouir de ses droits », ils sous-entendent que l’obtention, même infime, de « droits pour les homosexuels » serait absolument géniale, même si, une fois exaucés, ils reportent leurs Everest ailleurs pour au final les bouder tous.

 

FAUX REV Pacs

 

Certains intellectuels homosexuels se plaisent à présenter la communauté homosexuelle comme un mouvement identitaire puissant, une famille ultra-soudée (cf. je vous renvoie au code « Milieu homosexuel paradisiaque » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels). Lassés des productions artistiques au message sinistre qu’ils avaient jadis construites eux-mêmes, ils créent sur papier ou sur pellicule des épopées extraordinaires où tout le monde rigole et applaudit, où les happy end parachèvent l’utopie, où l’homosexualité a forcément le dernier mot. Ils essaient de faire de la révolte de Stonewall une nouvelle prise de la Bastille, le déclenchement d’une révolution homosexuelle prometteuse. Quant aux personnes homosexuelles moins lettrées, elles ont tendance à se persuader qu’elles ne sont elles-mêmes et heureuses qu’entre les quatre murs du « milieu homosexuel ». Ceci est dû en général à l’influence de certains films visant à démontrer que la camaraderie homosexuelle est là à tout instant, que « les homos » sont d’infatigables fêtards, une bande de copains inséparables et toujours prêts à s’épauler dans l’épreuve.

 

Mais la première phrase de Dennis dans le film « Le Club des cœurs brisés » (2000) de Greg Barlanti vient nous ramener les pieds sur terre : « Je ne peux pas me décider à savoir si mes amis sont la meilleure ou la pire chose qui me soit arrivée. » Dans la réalité concrète, nous découvrons que la révolution homosexuelle n’est souvent qu’un joli concept romantique sorti des cerveaux des universitaires queer. Beaucoup de personnes homosexuelles n’aiment pas le collectif : c’est dommage, mais c’est souvent un fait. Les réunir autour de lieux-symboles, d’événements fédérateurs, de personnages emblématiques, de bars, d’associations, a souvent été particulièrement ardu. La majorité des militants associatifs vous le confirmeront, surtout les soirs ingrats de Gay Pride où, exténués, ils se forcent à sourire en disant que « ça a été une fois de plus un succès » alors que la joie est loin d’être dans tous les cœurs. La communauté homosexuelle constitue une famille turbulente dont la cohésion est bien plus une utopie sucrée marketing qu’une réalité. Si les personnes homosexuelles se retrouvent dans le « milieu », ce n’est pas vraiment par choix ni par engagement : elles viennent surtout consommer, trouver chaussure à leur pied, ou bien dans une logique d’adversité plus que d’unité. Même pour l’habitué des établissements gay friendly, l’entourage d’orientation sexuelle ne constituera jamais vraiment une seconde famille.

 

Le chanteur Emmanuel Moire pose un grand Acte de Solidarité contre l'homophobie (... dans son palais doré)

Le chanteur Emmanuel Moire pose un grand Acte de Solidarité contre l’homophobie (… dans son palais doré)


 

Quand les personnes homosexuelles utilisent le terme « révolution », il est en général plus à entendre dans le sens publicitaire de « mode » que d’un point de vue concret. Elles confondent la révolution avec la rébellion, avec l’image artistique qu’elles s’en sont faites. Chez elles, tout devient révolutionnaire à partir du moment où l’image violente ou déréalisante prévaut sur la Réalité. Le traitement du thème révolutionnaire sert presque uniquement de prétexte à filmer le corps musclé de l’homme prolétaire et ne relève pas d’une démarche clairement politique. La préoccupation des personnes homosexuelles pour la révolution est d’abord esthétique. En effet, pour elles, décrire avec passion les actions qu’elles voient, cela revient à les poser réellement. Elles s’imaginent qu’elles changeront le monde à coup de conditionnels, de synesthésies, et de larmes. « J’aimais d’instinct ce monde de la mer, ces hommes qui ne vivaient qu’auprès de la mer, des bateaux. Je voulais de tout mon cœur appartenir à ce monde-là, être en compagnie de ces hommes. Je pressentais que je saurais amarrer les bateaux, répondre à des ordres qu’on gueule, avoir ce visage buriné, ces rides ensoleillées, ces vêtements usés. Les premiers rêves de mon enfance ont été des rêves de marins. […] Je ne suis pas devenu marin. » (Philippe Besson, Son frère (2001), pp. 29-32) Elles préfèrent l’aventurier littéraire et libertin à l’aventurier réel. D’ailleurs, dans les œuvres homosexuelles, le personnage homosexuel est souvent associé à l’esthète bourgeois oisif, mis en opposition avec l’homme d’action communiste, son autre pendant homo-érotique. Dans les deux cas, nous retrouvons les deux visages d’une même révolution désincarnée (Je vous engage à lire mon livre Homosexualité sociale, publié aux éditions l’Harmattan en 2008, et dans lequel j’explicite le concept de révolution autour du pardon, le plus grand acte révolutionnaire qui soit ; ainsi que le code « Bobo » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels).

 
 

2 – Le mirage cynique de la révolution inversante

 

Film "The Raspberry Reich" de Bruce LaBruce

Film « The Raspberry Reich » de Bruce LaBruce


 

Quand la révolution que les sujets homosexuels défendent adopte un sourire qui n’est pas de circonstance, puisqu’il dissimule énormément de drames vécus au sein du « milieu homosexuel » et dans le vécu individuel de ses habitants, elle apparaît dans toute son horreur. Les talk show télévisés actuels, promettant un bonheur parfait aux personnes homosexuelles, correspondent rarement à la réalité, et causent bien des dégâts dans la vie des intervenants gay qui, par narcissisme ou inconscience, ont déballé leur « joie d’être homos/malheur d’être rejetés en tant qu’homos » devant les caméras (il finissent pour la plupart en dépression, abandonnés par leurs amis, séparés de leur compagnon de l’époque, démolis par leur(s) tentative(s) de suicide, etc.). La révolution festive homosexuelle a son cynisme et sa violence. Avant de les lâcher sur la place publique, la communauté homosexuelle dorlote ses porte-drapeaux, les décore, les épile, leur oxygène les cheveux, les place sur un char, leur ordonne d’être reconnaissants et d’arborer un visage de fierté afin de lui faire honneur. Les moins fragiles d’entre eux, ravis d’occuper pendant un quart d’heure le haut de l’affiche et de défendre une utopie collective, deviennent souvent des militants « agressivement heureux d’être gay ». C’est une manière comme une autre pour eux de se venger de leur propre naïveté.

 

Le "kissing" public homo = paradoxal geste d' "amour" agressif et militant

Le « kissing » public homo = paradoxal geste d’ « amour » agressif et militant


 
 

Aux yeux de beaucoup de personnes homosexuelles, la révolution est telle qu’on la leur a montrée dans les spots publicitaires : elle se réduit au silence du poète visionnaire incompris, à la rébellion, à l’anarchisme, au scandale, à la provocation, à l’anticonformisme, à l’irrespect des figures d’autorité, en somme, à tout ce que n’est pas la vraie révolution. La plupart des sujets homosexuels rentrent docilement dans l’archétype du bad boy qui n’existe que parce qu’il dit le « non » de l’enfant de trois ans à sa société. Dans le style faux révolutionnaire homosexuel, nous pouvons rencontrer par exemple le picaresque Oliver Twist du XIXe siècle (cf. le vidéo-clip de la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer), le rebelle underground de la Beat Generation, le loser belle-gueule du rêve américain, le hippie bisexuel Flower Power, le chanteur insolent de la vulgarité punk des années 1980-1990, l’artiste cocaïnomane et pornocrate de la Movida espagnole, l’écrivain cynique voyant dans le retrait social une démarche ultra-subversive, le journaliste barbu homo « anti-milieu » écrivant de temps en temps aux Inrock ou dans Minorités, etc. La révolution dont les intellectuels homosexuels parlent est prioritairement destruction. Guidés par la croyance manichéenne au mythe de la suppression totale du mal, il s’agit pour eux « de rayer, d’effacer l’infamie » (Pierre Bergé dans l’émission Culture et Dépendances, op. cit.) que la communauté homosexuelle aurait subie. L’utopie de l’éradication totale du mal, typique de la dialectique de la conquête chez les idéologies totalitaires, revient souvent dans leur argumentaire.

 

Étant donné que le mal dont ils découvrent que l’Homme est porteur ne peut être détruit par leurs propres efforts, beaucoup d’individus homosexuels vont faire semblant de renoncer à son extermination en proposant une version résignée, mais non moins orgueilleuse, de celle-ci : l’inversion (cf. je vous renvoie au code « Inversion » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels). Ce mot, qui définissait déjà les personnes homosexuelles du début du XXe siècle (on les appelait les « invertis »), remplace actuellement dans les discours celui de révolution : « les homosexuels » (et maintenant « les amoureux » tout court) seraient cette race d’Hommes dont le désir soi-disant révolutionnaire transformerait toute chose. Avec lui, « les choses se prennent à l’envers, par le revers. » (Néstor Perlongher, « La Fuerza del Carnavalismo » (1988), dans le recueil Prosa plebeya (1997), pp. 59-61). L’inversion s’exerce prioritairement sur la sexuation : le révolutionnaire par excellence est l’homme efféminé, le garçon manqué (cf. le dessin animé « Lady Oscar »), ou bien le transgenre/transsexuel. L’inversion carnavalesque homosexuelle consiste en une juxtaposition fusionnelle et imprévisible du féminin et du masculin, du bas et du haut, de ce qui est méprisé et de ce qui est consacré, ou bien en un retour de carte donnant l’illusion du changement de carte ou de la suppression de celle-ci. Beaucoup d’individus homosexuels s’imaginent qu’ils peuvent avoir leur supposé ennemi avec ses armes, en rentrant dans son jeu et en se jouant de lui par la technique de la contrefaçon inversante. Mais dans les faits, leur inversion n’est qu’un pastiche de révolution, qu’un échange de déguisements entre victime et bourreau fictionnels (Pensez par exemple au retournement du fouet de la sentence dans le vidéo-clip de la chanson « Pourvu qu’elles soient douces » de Mylène Farmer, fortement chargé esthétiquement), et non un changement concret d’identités et de réalités. Leur « retournement stratégique » (Michel Foucault, « Non au Sexe Roi », dans Dits et Écrits II (2001), p. 261) n’est pas si « stratégique » qu’ils le disent, puisqu’il est davantage esthétique que réel. En croyant échapper au totalitarisme par l’inversion, beaucoup de personnes homosexuelles ne font qu’imiter ce qu’elles prétendent évincer puisqu’elles auront amorcé leur réaction d’opposition en négatif de la réaction première ou supposée des autres. Dans leur cas, au lieu de « révolution », je parlerais plutôt de copiage inconscient, car excessivement motivé par l’intention de fuir l’objet d’aliénation, fruit la plupart du temps de leurs propres fantasmes. Par exemple, puisque pour certaines, l’interdiction est en soi mauvaise, inversement, elles vont soutenir que tout ce qui est interdit est juste, ou bien qu’il est interdit d’interdire. « Il est bon d’être sale et barbu, de porter des cheveux longs, de ressembler à une fille lorsqu’on est un garçon (et vice versa). Il faut mettre ‘en jeu’, exhiber, transformer et renverser les systèmes qui nous ordonnent paisiblement. » (idem, p. 1061) Mais elles restent ainsi à leur proie tout entières attachées. L’anti-conformisme est souvent un conformisme qui s’ignore, étant donné qu’il se focalise davantage sur sa volonté sincère de détruire que sur l’acte de destruction. Les idéologies de « l’Anti » (l’anti-hétérosexualité, l’anti-homophobie, l’anti-fascisme, etc.), dont la communauté homosexuelle est friande, sont généralement celles de l’idolâtrie, du mimétisme spéculaire dont parle si souvent René Girard. C’est pourquoi la dictature « mol-pensante » (Alain Minc, Épîtres à nos nouveaux Maîtres (2002), p. 98) homosexuelle rejoint souvent la dictature bien-pensante tant haïe, comme l’illustre le révolutionnaire communiste homosexuel Valentín dans le roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1976) de Manuel Puig : « Je… parle beaucoup mais… mais au fond ce qui… continue de me plaire, c’est que… je suis pareil à tous ces fils de pute de réactionnaires qui ont tué mon camarade. Je suis comme eux, tout pareil. » (p. 142)

 
 

3 – La Révolution ratée

 

FAUX REV Spirit of 69

 

Trahies par le surplus de confiance qu’elles font à leurs intentions anti-totalitaristes, beaucoup de personnes homosexuelles découvrent parfois avec effroi qu’elles imitent inconsciemment leurs ennemis – intellectuels, scientifiques, religieux, sociaux, et bourgeois – en cherchant à les fuir pour mieux les déifier. Sans réellement réaliser pourquoi leur désir homosexuel trompe leurs utopies politiques, elles traitent avec grand cynisme des faux révolutionnaires et des révolutions trahies. Elles se demandent parfois comment elles en sont arrivées à intérioriser l’opprobre qu’elles ont/auraient subi, par quel mystère elles ont pu confondre la révolution avec la dictature – notamment celle de gauche : le castrisme, le stalinisme, le maoïsme, le socialisme –, et à se soumettre aux modèles sociaux qu’elles prétendaient combattre de tout leur cœur (cf. Wilhem Reich, La Fonction de l’orgasme, 1970). « Comment expliquer que le désir se livre à des opérations qui ne sont pas des méconnaissances, mais des investissements inconscients parfaitement réactionnaires ? » (Gilles Deleuze et Félix Guattari, L’Anti-Œdipe (1972-1973), p. 306) La réponse est simple : comme l’enfer est pavé de bonnes intentions, c’est-à-dire d’une sincérité non suivie des actes, et que le désir homosexuel pratiqué éjecte le socle du Réel qu’est la différence des sexes, il arrive qu’une idéologie révolutionnaire pétrie de jolies valeurs et d’idéaux humanistes comme l’est l’idéologie pro-droits-homos bascule très vite dans le totalitarisme, car elle ne se voit plus agir, vu qu’elle passe son temps à se regarder aimer, ressentir, sans tenir compte du Réel.

 
 

GRAND DÉTAILLÉ

 

FICTION

 
 

a) On annonce le personnage homosexuel comme un grand « révolutionnaire » :

Très souvent les fictions traitant d’homosexualité aborde le thème de la révolution : la pièce La Revolución (1972) d’Isaac Chocrón, le film « Shôjo Kakumei Utena : Adolescence Mokushiroku » (« Utena, la Fillette révolutionnaire », 1999) de Kunihiro Ikuhara, le téléfilm Fiertés (2018) de Philippe Faucon, la chanson « Réveiller le Monde » de Mylène Farmer, la chanson « Réévolution » d’Étienne Daho, la chanson « Ma Révolution » de Jenifer, le spectacle « Révolution » (2013) de Rebeka Brown, le film « Good Morning England » (2009) de Richard Curtis (avec l’équipe très queer de Radio Rock), la chanson « Ma Révolution » de Cassandre, le roman Quand nous étions révolutionnaires (2013) de Roberto Ampuero, etc.

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

On nous annonce les personnages homosexuels comme la fine fleur de la modernité. « Un homme vint me serrer la patte, me félicitant pour mon éloquence et une vieille hippie se mit à chanter s’accompagnant d’une guitare quelques mélopées afro-indiennes. » (Gouri, le rat homosexuel, dans le roman La Cité des Rats (1979) de Copi, p. 104) ; « C’est nous qui lançons la mode. Nous, les blacks et les gays. » (Maria, la prostituée, s’adressant à Jane, l’héroïne lesbienne, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 165) ; etc. Par exemple, dans la comédie musicale Chantons dans le placard (2011) de Michel Heim, la chanson « Comme ils disent » de Charles Aznavour est présentée comme une œuvre « vraiment engagée ». Dans le film « I Love You Phillip Morris » (2009) de Glenne Ficarra et John Requa, on fait passer Steven pour un héros-martyr. Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, tout un amphi d’université finit par avoir le courage de se lever pour défendre Howard, le prof homosexuel bafoué, et pour dire qu’il « est gay » (une sorte de parodie sincère du fameux « Ô Capitaine mon Capitaine ! » du « Cercle des Poètes disparus »). Et le film postiche « Servir et protéger », traitant d’une intrigue homosexuelle, reçoit une pluie d’Oscars à Hollywood. Dans le film « Imitation Game » (2014) de Mortem Tyldum, Alan Turing, le mathématicien homosexuel insupportable et misanthrope, est présenté comme un génie (« un prodige des mathématiques ») qui aurait sauvé 14 millions de vies pendant la Seconde Guerre mondiale parce qu’il aurait cassé à lui seul Enigma, un programme de guerre nazi. Il serait parvenu à déchiffrer l’Indéchiffrable. Il aurait fait reculer la Guerre de deux ans.

 

Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, Otis le héros hétéro va voir la comédie musicale Hedwig and the Angry Inch et offre une place à Éric son meilleur ami gay pour son anniversaire (c.f. épisode 5 de la saison 1) : ils s’y rendent tous les deux travestis en femmes. Otis célèbre ce navet théâtral et cinématographique comme « une véritable icône dans la communauté LGBTQI », et son amie Ola dit qu’« elle adore ce film ». Plus tard, Éric est applaudi par son propre père homophobe comme un héros (c.f. épisode 7 de la saison 1). Que fait-il ? Aide-t-il les autres ? Sauve-t-il des vies ? Pas du tout : il ose juste se déguiser publiquement en femme dans son lycée et affronter le regard des autres : « C’est le courage de mon fils qui me donne des leçons. »
 

Tout le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus associe lutte ouvrière et lutte gay, ou bien communauté « hétéro » et communauté LGBT, comme si le fait d’avoir fait fusionner les mondes que tout séparerait relevait du miracle : « On écrit l’histoire. Gays et hétéros ensemble ! » (Dai, le père de famille gay friendly) Dans ce film démagogique et anachronique, les membres gays friendly du village de mineurs gallois qu’un groupe de militants LGBT a aidé, tressent des couronnes à leurs compagnons homos (tels que Joe, par exemple) : « Tout un village gallois pense que Joe est un héros. » (Sian, la villageoise universitaire s’adressant à la mère homophobe de Joe)

 

Dans le docu-fiction « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo, on nous présente les militants homos d’Act-Up comme de courageux révolutionnaires qui font éruption dans les soirées cocktail bourgeoises, pour bousculer l’ordre établi. Le réalisateur entend nous prouver que le sexe serait révolutionnaire, ou bien encore la violence et la colère… Les scènes de sexe entre Thibault et Nathan se juxtaposent à l’happening du cocktail.
 

Le héros homosexuel s’annonce aussi lui-même comme un révolutionnaire. « ¡Viva la Revolución ! » (Zamba, le travesti M to F du film « 30° couleur » (2012) de Lucien Jean-Baptiste et Philippe Larue) ; « Je voudrais une Révolution. » (cf. la chanson « Bastille Day » des Valentins) ; « Mon vieux hippie, je vous adore toujours ! » (L. s’adressant à Hugh, dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi) ; « Mon Cachafaz, mon doux trésor, faisons la révolution ! » (Raulito parlant à son amant Cachafaz, dans la pièce Cachafaz (1993) de Copi) ; « Finalement, on a réussi. » (Citron s’adressant à Radmilo pendant dans première Gay Pride à Belgrade en 2010, dans le film « La Parade » (2011) de Srdjan Dragojevic) ; « Elia Kazan est un génie. » (Roger dans la biopic « Life » (2015) d’Anton Corbijn) ; etc.

 

Par exemple, dans son one-man-show Elle est pas belle ma vie ? (2012), Samuel Laroque compare la première Gay Pride à la Révolution Française de 1789. Dans la comédie musicale HAIR (2011) de Gérôme Ragni et James Rado, l’objectif premier de Sheila est de « propager la Révolution ». Dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, l’oisiveté et le cloisonnement des héros « hétéros et homosexuels de salons » s’opèrent dans un climat brûlant de révolte sociale et de grèves alentours… et pourtant, ils ont l’impression que ce sont eux les vrais révolutionnaires : « Tu n’imagines pas, c’est le monde à l’envers. La vraie révolution, c’est ici qu’elle a lieu. » (Amande, p. 420) Dans la pièce Soixante degrés (2016) de Jean Franco et Jérôme Paza, Rémi, le héros bisexuel, porte un sweat du Che Guevara, se dit attiré par le bouddhisme et les philosophies orientales. Dans le film « Vita et Virginia » (2019) de Chanya Button, Virginia Woolf écrit en 1929 une autobiographie, Orlando, qu’elle présente comme « une Révolution ».

 

Les protagonistes homosexuels s’expriment souvent à coup de slogans (identitaristes ou sentimentalistes) publicitaires, centrés sur la « réalisation de soi par soi-même » ou sur l’opposition de principe : « Moi, je dis que le vrai défi, c’est d’être soi-même ici et maintenant. » (Vincent, le héros homosexuel du téléfilm « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve) ; « Place à la Révolution sexuelle ! » (la Mère maquerelle et patronne du club échangiste, dans le film « Plus on est de fous », « Donde caben dos » (2021) de Paco Caballero) ; etc.

 

Jenifer, la nana qui défend l'amour alors qu'elle ne croit pas en l'Amour...

Jenifer, la nana qui défend l’amour alors qu’elle ne croit pas en l’Amour (cf. photo d’Olivier Ciappa)


 

C’est la raison pour laquelle ils ont tendance à prendre pour modèle d’action « révolutionnaire » et d’affirmation de soi la femme féministe indépendante, qui veut s’affranchir de son sexe, qui est « mère toute seule », qui a un désir machiste, qui est parfois lesbienne : « Jane Randolph a 24 ans. Elle a toujours été révolutionnaire. Elle est pour la révolution sexuelle. Elle est d’une famille bourgeoise ; des gens pas très riches, mais tu sais, à l’aise. Toute son enfance et sa jeunesse, elle a souffert de voir ses parents se détruire mutuellement. Avec son père qui trompait sa mère, tu vois ce que je veux dire… Et la mère passait son temps à le critiquer devant sa fille, elle passait son temps à se poser en victime. […] Elle a été élevée pour faire une femme d’intérieur. Leçons de piano, de français, de dessin ; et à la fin du lycée, université catholique. […] Là, elle a connu un garçon, ils sont tombés amoureux et ils ont eu une liaison. […] Et le garçon voulait se marier. Mais Jane ne voulait retomber dans aucun vieux schéma, elle se méfiait. Elle s’est fait avorter une fois. Cela l’a affermie davantage, au lieu de la déprimer. Elle a vu clairement que si elle avait un enfant, cela l’empêcherait de mûrir, d’évoluer. Sa liberté resterait limitée. » (Molina, le héros homosexuel du roman El Beso De La Mujer-Araña, Le Baiser de la Femme-Araignée (1979) de Manuel Puig, pp. 47-49) ; « Je suis complètement indépendante et je fais l’inverse de ce qu’on me dit de faire. Vivo al revés. Je vis à l’envers. » (Alba, l’héroïne lesbienne de la pièce Se Dice De Mí (2010) de Stéphan Druet) ; « Les voisines disaient qu’elle était devenue un homme. Elles avaient raison. Ma mère faisait sa révolution. Elle se libérait. Retrouvait sa jeunesse. Et pour cela, elle avait besoin de détruire notre monde, le centre de notre monde : mon père. » (Omar, le héros homosexuel du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, pp. 34-35) ; « Max, pour combien t’es juif, résistant, homosexuel et communiste ? » (Léon dans le le film « La Folle Histoire de Max et Léon » (2016) de Jonathan Barré) ; etc. Cette femme se propose en général de reproduire le péché d’Ève : celui de « vouloir un enfant toute seule », ou bien d’être vierge sans être mère. « Je deviens mère mais je reste une femme libre. » (Isabelle, la mère-porteuse-prostituée de la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade)

 
 

b) Le personnage homosexuel est un rebelle, joue les durs :

Vidéo-clip de la chanson "Désenchantée" de Mylène Farmer

Vidéo-clip de la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer


 

Vestimentairement et au niveau des attitudes, certains personnages homosexuels rentrent dans la peau de l’image stéréotypée du « rebelle » désobéissant, bref, dans ce qu’ils imaginent être la rebellitude : cf. le roman La Rebelle (2004) de Benoît Duteurtre, le film « Furyo » (1983) de Nagisa Oshima (avec le soldat inflexible joué par David Bowie), le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears (avec le personnage de Johnny), le film « Rebel Without A Cause » (« La Fureur de vivre », 1955) de Nicholas Ray, le vidéo-clip de la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer, la chanson « Rebel Rebel » (1974) de David Bowie, la chanson « Éternel Rebelle » de la Groupie dans la comédie musicale La Légende de Jimmy (1992) de Michel Berger, le film « Le Rebelle » (1980) de Gérard Blain, le vidéo-clip de la chanson « Who’s That Girl ? » de Madonna, le vidéo-clip de la chanson « Hasta Siempre » de Nathalie Cardone, le film « Jacquou le Croquant » (2007) de Laurent Boutonnat, le film « Les Rebelles du dieu Néon » (1992) de Tsai Ming-liang, le film « Thelma et Louise » (1991) de Ridley Scott, le film « L’Équipée sauvage » (1953) de Lazlo Benedek (avec Marlon Brando dans la peau de Johnny), la chanson « En rouge et noir » de Jeanne Mas, le film « Rimbaud Verlaine » (1995) d’Agnieszka Holland, le film « Rebelles » (2003) de Léa Pool, le one-woman-show Vierge et rebelle (2008) de Camille Broquet, la série télévisée « La Forja De Un Rebelde » (1951) d’Arturo Barea, « Young Soul Rebels » (1991) d’Isaac Julien, la pièce Les Fugueuses (2007) de Pierre Palmade (avec Claude, « la rebelle des Glaïeuls »), le film « New Wave » (2008) de Gaël Morel (avec Romain, « le rebelle »), la pièce La Tragi-comédie de Don Cristóbal et Doña Rosita (1936) de Federico García Lorca (avec Doña Rosita, la femme rebelle), le film porno « 100% Wesh » (2010) de Citébeurs (avec « Jawel le Rebelle »), l’album Rebel Heart de Madonna, le roman Le Diable emporte le fils rebelle (2019) de Gilles Leroy, La Bande Dessinée Deux Lesbiennes rebelles à Paris (2021) de Laure Bernard et Danielle Charest, etc.

 

« Je suis un bébé très rebelle. » (Vanina, la protagoniste lesbienne de la pièce Mi Vida Después (2011) de Lola Arias) ; « On a été rebelles, nous aussi. » (le père d’Ati, l’héroïne lesbienne, dans le film « Circumstance », « En secret » (2011) de Maryam Keshavarz) ; « Nous, les tantes, nous sommes résistantes. » (les personnages homosexuels de la comédie musicale Chantons dans le placard (2011) de Michel Heim) ; « J’ai été élevée dans l’orthodoxie juive, moi, et parfois, j’ai besoin d’afficher un symbole clair de rébellion. […] J’ai commencé à marcher, en femme indépendante que je suis. » (Ronit, l’héroïne lesbienne du roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 91) ; « À sa façon, quelque peu vague et enfantine, Stephen [l’héroïne lesbienne] s’était rebellée contre la vie et cela rétablissait à ses yeux sa dignité personnelle. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), p. 22) ; « Dites-moi… Qu’est-ce qui fait de vous la rebelle de la famille ? » (Agnès, l’héroïne lesbienne s’adressant à sa future amante, Marie, dans le film « Pièce montée » (2010) de Denys Granier-Deferre) ; « Ces fachos me font pas peur ! » (Dany, le héros homosexuel du film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras) ; « À bas la société bourgeoise ! » (Carole, l’héroïne lesbienne à poil au balcon, dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce Les Virilius (2014) d’Alessandro Avellis, les Virilius, parodie des Hommens (version puceaux homosexuels refoulés), s’annoncent comme des supers rebelles : « Les Sentinelles, c’est un truc de passifs. » (Jean-Paul) ; « Nous, jeunes étudiants progressistes ! » (Jean-Marc, homosexuel) ; « J’étais jeune dissident rebelle. » (Jean-Jacques, l’amant secret de Jean-Marc, et la tête du mouvement) ; etc. Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand dépeint les différentes catégories d’homos qu’il a identifiées dans la communauté LGBT , dont « les rebelles homos ». Dans le film « 20 ans d’écart » (2013) de David Moreau, Vincent Khan, le boss homo et pédant de la revue de mode féminine intitulée Rebelle est homo… et quand il voit son assistante Alice se dévergonder avec un petit jeune, il la félicite de sa rébellion :« T’as l’esprit rebelle. C’est ça que j’aime. »

 

La rébellion suit davantage une logique esthétique, orgueilleuse ou intentionnelle qu’un désir d’action concrète : « J’ai envie d’amour et d’être belle, c’est pour ça qu’on m’appelle rebelle, rebelle, rebelle. » (cf. la chanson « Rebelle » de Cindy dans la comédie musicale Cindy (2002) de Luc Plamondon) ; « Chrysanthème, rebelle plus que lesbienne » (Océane Rose Marie dans son one-woman-show La Lesbienne invisible, 2009) ; « Moi qui suis mi-voyou, mi-voyelle. » (cf. la chanson « Celles qui aiment elles » de Marie-Paule Belle) ; etc. Par exemple, dans le film « Un autre homme » (2008) de Lionel Baier, est prôné le « plaisir de désobéir ». Dans le film « Fried Green Tomatoes » (« Beignets de tomates vertes », 1991) de John Avnet, Idgie est la femme lesbienne insoumise, incorrecte, rebelle et indépendante. Dans la série Demain nous appartient, à l’épisode 87 diffusé sur TF1 le 14 novembre 2017, Sara Raynaud, l’héroïne bisexuelle, porte un tee-shirt « Belle et Rebelle ».

 
 

c) Le personnage homosexuel s’oppose par principe à tout, en adoptant l’idéologie de l’Anti :

Les héros homosexuels pratiquants ont tendance à appréhender la révolution non pas sous l’angle de la proposition réaliste mais bien sous l’angle de la proposition angéliste et de la contestation de principe. Ils sont « anti » et « contre », parce que ça fait joli, ça fait fort, ça fait déterminé, ça fait réel : cf. la pièce Antigone (1922) de Jean Cocteau, la pièce Les Anticlastes (1886-1888) d’Alfred Jarry, le poème « Non » (1915) de Gertrude Stein, la pièce Wrong (1993) de Dennis Cooper, les chansons « Maman a tort » et « La Poupée qui fait non » de Mylène Farmer, la pièce Contradanza (1980) de Francisco Ors, la pièce Antiphon (1958) de Djuna Barnes, le film « Antibodies » (2005) de Christian Alvart, l’album « En vert et contre tout » de Véronique Rivière, la chanson « À contre-courant » d’Alizée, la chanson « A contrapié » de Marta Sanchez, le film « Mathi(eu) » (2011) de Coralie Prosper (avec le cours sur les antonymes), le film « Contre-chaos » (2006) de Jérôme Legoff, le film « Contracorriente » (2009) de Javier Fuentes-Leon, la chanson et l’album « Désobéissance » de Mylène Farmer, le film « Les Crevettes pailletées » (2019) de Cédric le Gallo et Maxime Govare (avec l’écriteau « Anti » dans les buts de water-polo), etc.

 

« Je dis non, je dis non, je dis non, je dis non. » (cf. la chanson « Porno graphique » de Mylène Farmer) ; « Normalement, devrait y avoir en tout pédé un potentiel énorme de révolte, largement de quoi baser la Carole et faire disjoncter le système. […] On est dangereux, pour la Carole, dangereux, par nature, parce qu’on est ce qu’on est… » (Vincent Garbo, le héros homosexuel du roman éponyme (2010) de Quentin Lamotta, p. 177) ; « Vous êtes contre beaucoup de choses… mais vous êtes pour quoi ? » (Question posée à Harvey Milk dans le film éponyme (2009) de Gus Van Sant) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce My Scum (2008) de Stanislas Briche, les héros queer défendent leur manifeste des « anti-sexe », autrement dit des « anti-sexuation ». Dans le film « Ma vraie vie à Rouen » (2002) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, les protagonistes participent à la manif anti-FN suite à la victoire de Jean-Marie Le Pen au premier tour des présidentielles en 2002 en France. Dans le roman Gaieté parisienne (1996) de Benoît Duteurtre, le héros homosexuel, Nicolas, est directeur de la revue Anti-Pouvoirs. Dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, Adèle défile avec la CGT contre la privatisation de l’enseignement public, et chante « On lâche rien » ; puis, une fois en couple avec Emma, elle s’excitera à la Gay Pride parisienne.

 

Au bout du compte, la plupart des héros homosexuels finissent par devenir ce qu’ils reprochent aux autres, car à force de ne pas vouloir être comme les autres (alors que les autres sont une part d’eux), ils les imitent. Concrètement, l’« idéologie de l’Anti » est mimétique, est une soumission, même si en intentions, elle se rêve comme une rupture, une indépendance extraordinaire. Beaucoup de personnages homosexuels adoptant comme mode d’existence « l’anti » manquent totalement de personnalité (ils s’adaptent excessivement et obsessionnellement à ce contre quoi ils prétendent s’opposer) et deviennent cet homme « si transparent qu’on peut s’y voir dedans » décrit par Doriand dans sa chanson « Manque de personnalité » : « Je suis tout ce que je ne suis pas. » Ils sont même souvent sur le point de recréer un nouveau fascisme en prétendant éradiquer les anciens fascismes historiques. « En fait, rebondit Polly, t’es en train de nous dire qu’il y a autant de personnels armés en France que de gays et de lesbiennes ? Si je suis ton raisonnement, on pourrait faire une révolution gays-lesbiennes contre les uniformes armés, pour obtenir le pouvoir ? » (Polly, l’héroïne lesbienne, s’adressant à son meilleur ami gay Simon, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 30) Par exemple, dans la pièce Nietzsche, Wagner, et autres cruautés (2008) de Gilles Tourman, la pensée anti-totalitaire de Nietzsche est inconsciemment présentée comme le miroir inversé de la pensée nazie : c’est la raison pour laquelle la figure de Goebbels dit de Nietzsche qu’« il aurait fait un excellent nazi ».

 
 

d) Le personnage homosexuel échoue sa révolution :

Film "Salo ou les 120 journées de Sodome" de Pier Paolo Pasolini

Film « Salo ou les 120 journées de Sodome » de Pier Paolo Pasolini


 

Finalement, après s’être excité pour ses fantasmes de révolté et des mirages télévisuels, le héros homosexuel découvre la vanité de ses combats (identitaires, amoureux, politiques, etc.), de son action militante, de sa fuite du Réel. Très souvent dans les oeuvres homo-érotiques, il est question des révolutions ratées ou trahies : cf. la pièce Une rupture d’aujourd’hui (2007) de Jacques-Yves Henry, la fin du vidéo-clip de la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer (où la fuite au désert après la mutinerie se révèle un fiasco), la fin du film « Teorema » (« Théorème », 1968) de Pier Paolo Pasolini (qui est un cri de l’homme nu face au vide désertique de son combat existentiel), le film « Voyage à Niklashausen » (1970) de Rainer Werner Fassbinder, le roman El Anarquista Desnudo (1979) de Luis Fernández, la pièce Howlin’ (2008) d’Allen Ginsberg (avec l’allusion déçue au marxisme et au communisme), le film « Deutschland Im Herbst » (« L’Allemagne en automne », 1978) de Rainer Werner Fassbinder, le film « OSS 117 : Rio ne répond plus » (2009) de Michel Hazanavicius (avec les hippies bisexuels), etc. « Le feu vert s’éclaira et le taxi redémarra. Ils passèrent devant Rosa-Luxemburg-Platz et Jane pensa à Rosa tombant dans l’eau. Était-elle déjà morte lorsqu’ils l’avaient jetée dans le canal ? » (Jane, l’héroïne lesbienne du roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 36)

 

Dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, Georges, le héros homosexuel face aux résistances de Pierre l’hétérosexuel (qui s’obstine à être gêné par le « mariage pour tous »), se montre inquiet concernant la montée de « l’homophobie » en France : « Comme quoi, 3 ou 4 décrets, c’est pas suffisant pour assurer notre liberté du jour au lendemain. » Dans son one-man-show Bon à marier (2015), Jérémy Lorca rentre dans la peau d’une actrice vieillissante qui fait des publicités, Marie-Astrid : « Dans ‘Autant en emporte le vent’, en 1939, c’est moi qui faisais le vent. » Il se moque de sa prétention à vouloir jouer la militante… alors qu’elle se contente de faire une publicité pour le cassoulet : « J’veux faire que des choses engagées. » Dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet, le personnage libertin de Mireille à la fois encense mai 1968 (« Ceux qui ont connu cette période voyageaient sur les nuages. ») et décrit ceux qui l’ont vécu comme des lâches (« Vous êtes une génération de révolutionnaires qui n’ont jamais su faire la Révolution ! »).

 

La révolution proposée par le héros homosexuel reste cantonnée dans le domaine du pictural (radicalisé) : « La révolution, harmonie de la forme et de la couleur. » (Frida Kahlo dans la pièce Attention : Peinture fraîche (2007) de Lupe Velez) ; « On demande du changement. On obtient la révolution ! » (une cliente du salon de coiffure mécontente, dans le film « La Confusion des genres » (2000) d’Ilan Duran Cohen) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus, pour se justifier face aux journalistes d’avoir annexé arbitrairement tout un village de mineurs gallois avec son association LGBT, en vue de défendre les droits des mineurs en même temps que les droits homos, Mark, dit sur le ton de l’humour : « Ils créent avec le charbon l’électricité qui me permet de prendre mon pied sur du Bananarama ! » En réalité, Mark a tout du faux héros qui n’a rien maîtrisé de l’euphorie qui l’entoure ou de l’élan du mouvement homosexuel qu’il a lancé : « Je ne sais pas à quoi ça rime de défendre les droits gays… mais je le fais quand même pour les autres. » À la fin du film, le spectateur découvre que Mark n’a eu quasiment que le mérite d’avoir été un agitateur, et d’être mort jeune du Sida (à l’âge de 27 ans). Dans le film « Marguerite » (2015) de Xavier Giannoli, Kyril, le dandy anarchiste maniéré avec son monocle, prétend vouloir « brûler tous les bourgeois ». Il organise des spectacles scandaleux qui se finissent en baston.

 

FAUX REV laGayRevolution

 

Dans les œuvres homo-érotiques, le thème révolutionnaire sert presque uniquement de prétexte à filmer le corps musclé de l’homme prolétaire, à se rincer l’œil et à se faire (sensuellement et génitalement) du bien, à baiser tranquille, à s’auto-contempler narcissiquement : cf. le film « Far West » (2003) de Pascal-Alex Vincent, le film « Du sang pour Dracula » (1972) de Paul Morrissey, le vidéo-clip de la chanson « Cargo de nuit » d’Axel Bauer, le film « RTT » (2008) de Frédéric Berthe (avec Peyrac tombant sous le charme du beau mécanicien), etc. « La muscu a révolutionné ma vie ! » (Stéphane, le héros homosexuel de la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) ; « Ce jardinier, on le dirait sorti d’un calendrier des Dieux du Stade. » (Tom, le héros homosexuel en parlant de son futur amant qui le fait fantasmer, Louis, le jardinier sexy de la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen) ; « Si tu veux faire le potager tout nu, tu le fais. » (Graziella s’adressant à Louis, idem) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway, Sergueï Eisenstein, homosexuel, « refait la Révolution russe en film » (selon Alexandrov). Plus tard, quand il se fait sodomiser par son amant et guide Palomino, ce dernier lui plante un drapeau rouge dans le cul après l’avoir dépucelé : la sodomie homosexuelle est présentée comme une révolution.
 

La Révolution a été confondue avec l’inversion (or l’inversion n’est pas la suppression de la carte qu’on prétend détruire mais simplement un retournement de la même carte) : cf. le film « Hôtel Woodstock » (2009) d’Ang Lee ; etc. « La secrétaire modèle qui se transforme en furie syndicaliste » (Joëlle décrivant ironiquement Nadège dans le film « Potiche » (2010) de François Ozon) Je vous renvoie au code « Inversion » du Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Le héros homosexuel est en réalité un faux révolutionnaire qui ne veut de la révolution que la réputation, que l’image et les paillettes : pas l’action (constructive) ni ses contraintes. Il s’est installé dans le doux confort du militantisme à distance, en choisissant deux maîtres que tout – ou presque – oppose et qu’il ne pourra jamais servir bien entièrement : l’effort et la facilité. « Vous vous prenez pour des révolutionnaires ?!? Mais vous êtes juste des glandeurs ! » (une réplique du film « Nés en 68 » (2008) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau) ; « Sous vos airs révolutionnaires, vous n’avez pensé qu’à vivre comme un bourgeois. » (Nietzsche s’adressant à Wagner, dans la pièce Nietzsche, Wagner, et autres cruautés (2008) de Gilles Tourman) ; « Je suis pour le communisme, je suis pour le socialisme, et pour le capitalisme. » (cf. la chanson « L’Opportuniste » du groupe Indochine) ; « J’avoue : je me suis trompée ! J’ai dépensé des millions à te vouloir excentrique, bien élevée en liberté, en même temps sauvage et chic, cultivée et anarchique ! » (Solitaire s’adressant à sa fille lesbienne Lou, dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Je me rends compte à quel point Marcel est, avant tout, un homme tout entier tourné vers le passé, comme s’il cherchait un âge d’or à jamais disparu, comme s’il tâchait de retrouver des sensations enfuies dont il éprouverait le regret. Son œuvre scrute le passé et lui-même paraît étranger aux révolutions qui se sont produites ces dernières années. […] Marcel est le contraire d’un moderne. » (Vincent en parlant de la figure de Marcel Proust, dans le roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson, pp. 160-161) ; etc. Je vous renvoie au code « Bobo » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Par exemple, dans la pièce Les Babas Cadres (2008) de Christian Dob, Mimil est défini comme un « humaniste passif ». Dans le film « Hôtel Woodstock » (2009) d’Ang Lee, les « révolutionnaires » bisexuels s’empattent et deviennent avec le temps des businessmen corrompus par l’appât du gain et du sexe. Dans le film « Le Derrière » (1999) de Valérie Lemercier, Pierre Arroux (joué par Claude Rich) se targue d’avoir été un révolutionnaire en mai 1968… alors qu’il est la caricature vivante de l’homosexuel bourgeois installé. Dans le film « Saturn’s Return » (2001) de Wenona Byrne, les parents de Barney, le héros homosexuel, sont des ex-hippies encore accros à l’héroïne, des « révolutionnaires » irresponsables qui mettent des posters de Fidel Castro dans la maison familiale mais qui, à côté de cela, ont fui leur réalité et ont initié Barney à la drogue depuis qu’il est adolescent. Dans le film « Tan De Repente » (2003) de Diego Lerman, Mao et Lénine, deux lesbiennes marginales à la dérive, donnent une image désenchantée de la révolution. Dans la pièce Cannibales (2008) de Ronan Chéneau, on observe la déprime du trentenaire bobo qui voit l’hypocrisie de la révolution gauchiste. Dans le film « The Raspberry Reich » (2004) de Bruce LaBruce, on assiste à un pastiche de révolution homosexuelle. Dans le film « Potiche » (2010) de François Ozon, révolte syndicale et défoulement/infidélité sexuels s’entremêlent : la mère-pute bourgeoise, Suzanne, couche avec M. Maurice Babin, un ouvrier. Dans la nouvelle « La Mort d’un phoque » (1983) de Copi, le narrateur homosexuel fait partie d’un contingent d’Européens (quasiment tous homos) venu sauver les bébés phoques. Dans le film « Les Lendemains qui chantent » (2014) de Nicolas Castro, le milieu homo est associé à la gauche caviar (avec la couverture du magazine GLOBE « 3 millions d’homos : où en sont-ils ? » filmée en gros plan).

 

Dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini, Carole, l’héroïne lesbienne à poil au balcon, hurle « À bas la société bourgeoise ! » après sa nuit d’amour avec Delphine. Elle est passée d’une vie hétérosexuelle avec Manuel, à une vie lesbienne avec Delphine. Manuel finit par lui envoyer dans la figure son incohérence : « T’as aucune rigueur, Carole. Aucune. L’engagement, c’est pas dans un amphi avec les copines. C’est dans la vie aussi. »
 

Le vertige d’avoir été trompé par ses parents soixante-huitards et ses potes ou de s’être illusionné soi-même est parfois exprimé par une question ou par une révolte amère : « Est-ce qu’on peut faire confiance aux masses ? » (une réplique de la pièce Le Cabaret des utopies (2008) du Groupe Incognito) ; « On baisait, on était politique. Tu embrassais un mec, tu faisais la révolution d’Octobre. […] et là c’est fini, oui. C’est mal fini. » (Domi à propos des années 1980 dans le « milieu homo », dans le roman La meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, pp. 37-38) ; « Les vautours ont surgi. Les cancers de la contre-révolution. » (Trotsky dans le film « L’Assassinat de Trotsky » (1970) de Joseph Losey) ; « Le PaCS, ça ne change rien. » (une réplique de la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) ; « Le film ‘The Owls’ (2010) de Cheryl Dunye embrasse la vision utopique de la Lesbian Nation. À l’approche de la quarantaine, la révolution s’éloigne de leurs rêves. » (cf. la critique du catalogue du 16e Festival Chéries/Chéris au Forum des Images de Paris, en novembre 2010) ; etc.

 

Par exemple, dans la comédie musicale Chantons dans le placard (2011) de Michel Heim, les « chansons homo-humanitaires » et gay friendly (de Francis Lalanne, de Charles Aznavour, et plus actuelles) sont tournées en dérision ou bien taxées d’arrivisme misérabiliste : « La révolution, la provocation a laissé place à l’indifférence… » regrette Gérard.

 

Le héros homosexuel se rend compte du conformisme de son anticonformisme. « Comment je fais pour rien faire comme tout le monde, mais réussir quand même à être aussi con ? » (Jarry dans le one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman) ; « Maintenant, c’est de la merde, Paris ressemble à un musée pour vieux cons fachos, avec des gays (il prononce ‘géïzes’) qui tètent du petit lait électronique avec des airs ingénus et qui se branlent devant Xtube. Des petits moutons. On a transformé une armée de pédés rebelles qui dérangeaient le modèle hétéro en gays, c’est-à-dire en tarlouzes de droite incapables de réfléchir plus loin que le bout de leur bite. » (Simon dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 23-24) ; « Je veux faire comme tout le monde, mais à l’envers. » (cf. la chanson « Chemins de croix » du groupe Niagara) ; etc.

 

Et pour cause ! Que c’est dur, irréaliste et violent, de chercher à être révolutionnaire sans se mettre au service des seules instances et incarnations qui incarnent vraiment la Révolution sur Terre : Jésus et son Église catholique ! Les héros homosexuels se trompent de Révolution parce que tout simplement ils se trompent de maître. Au lieu de choisir Dieu, ils ont élu sa doublure : le diable, l’androgyne. Un mélange de Bien et de mal. « Bientôt, l’île [de la Cité] fut déserte d’humains et couverte de rats qui chantaient bien fort nos vieilles chansons révolutionnaires. […] Nous comprîmes que nous bénéficiions de la protection d’un être de nature soit divine, soit diabolique, ou une alliance des deux. » (Gouri, le rat homosexuel du roman La Cité des Rats (1979), p. 93)

 
 

e) Le couple homosexuel est formé d’un preux défenseur de la cause gay et d’un lâche « qui ne s’assume pas encore » :

Philippe le coincé et Marc le naturel, dans le film "La meilleure façon de marcher" de Claude Miller

Philippe le coincé et Marc le beauf naturel, dans le film « La meilleure façon de marcher » de Claude Miller


 

En général, dans les fictions représentant le couple homosexuel, l’échec de la « révolution homosexuelle » est imputé soit à l’extérieur (la société et les méchants « homophobes »), soit à la lâcheté d’un des deux partenaires du binôme… sachant que cette lâcheté se déplace ou s’échange entre eux comme un virus censé rehausser le courage de l’un au détriment de l’horreur de la haine de soi de l’autre : Steven et Johnny dans le film « Get Real » (« Comme un garçon », 1998) de Simon Shore, Pablo et Antonio dans le film « La Ley Del Deseo » (« La Loi du désir », 1986) de Pedro Almodóvar, Alexis et David dans le film « Été 85 » (2020) de François Ozon, Charlie et son agresseur dans le film « Urbania » (2004) de Jon Shear, William et Weldon dans le film « Reflection In A Goldeneye » (« Reflets dans un œil d’or », 1967) de John Huston, Marthe et Karen dans le film « The Children’s Hour » (« La Rumeur », 1961) de William Wyler, Max et Horst dans le film « Bent » (1997) de Sean Mathias, Martin et Lucas dans le film « L’Homme que j’aime » (2001) de Stéphane Giusti, Molina et Valentín dans le roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1976) de Manuel Puig, Roy et Jack dans le film « Roy Cohn/Jack Smith » (1993) de Jill Godmilow, Walt (ultra-conservateur) et Rusty (le débridé) dans le film « Personne n’est parfait(e) » (1999) de Joel Schumacher, Édouard (l’homo refoulé) et Georges (son partenaire décomplexé) dans la pièce En ballotage (2012) de Benoît Masocco, le footeux et son amant qui le romantisme belge dans la pièce Ma première fois (2012) de Ken Davenport), Louis ne s’assumant pas homo et son amant Nathan qui subit les quolibets au lycée à cause de leur liaison dans le téléfilm « Baisers cachés » (2017) de Didier Bivel, Markus (l’homo cool) et Gabriel (l’homo coincé) dans le film « Órói » (« Jitters », 2010) de Baldvin Zophoníasson, Marco l’homo blasé et Cibrâil le puceau dans le film « Cibrâil » (2010) de Tor Iben, Ivo et Sandro dans le film « More Or Less » (2010) d’Alexander Antunes Siqueira, Tania « la courageuse » et Élodie « la lâche » dans la pièce Ma double vie (2009) Stéphane Mitchell, Paul (qui veut croire en son histoire d’amour) en couple avec Jean-Louis (qui ne l’assume pas) dans la pièce Perthus (2009) de Jean-Marie Besset, Jason (l’homo conservateur) et Mourad (son amant détendu) dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, Seth et David dans le film « And Then Came Summer » (« Quand vient l’été… », 2000) de Jeff London, Ronit (la lesbienne célibattante et indépendante) et Esti (sa compagne frustrée et « à libérer » de son carcan de femme juive et mariée) dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, Lars (l’homo courageux par rapport à son homosexualité) et Fatso (l’amant qui n’assume pas) dans le film « Broderskab » (« Brotherhood », 2010) de Nicolo Donato, Ivan (pas encore prêt à « s’assumer ») et Vedran (son copain plus libre) dans le film « Straight-Pull » (2010) de Filip Sovagovic, Bernard (l’artiste) et Philippe (le pompier homo refoulé) dans la comédie musicale La Belle au bois de Chicago (2012) de Géraldine Brandao et Romaric Poirier, Sarah qui ne s’assume pas et Charlène qui assume leur relation dans le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, le film « Close » (2022) de Lukas Dhont (avec Rémi l’assumé et Léo le refoulé), etc. « J’ai le courage d’un lâche. » (la figure de Sergueï Eisenstein, homosexuel, dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway)

 

Par exemple, dans le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2006) d’Ang Lee, Jack, le personnage homosexuel « assumé », finira en martyr innocent de l’homosexualité non-assumée de son ami Hennis : le réalisateur veut nous faire comprendre que l’« homophobie homosexuelle » (entendre ici « identité homosexuelle non reconnue comme la Vérité profonde de l’individu homosexuel », et non ce qu’est vraiment l’homophobie, à savoir une « identité homosexuelle à la fois niée et trop célébrée ») tuerait. Dans le film « Memento Mori » (1999) de Kim Tae-yong et Min Kyu-dong, Hyo-Shin est victime de la lâcheté de Shi-eun : elle se suicide à cause de la non-validation de son amour homosexuel par son amante. Dans le film « Loin du paradis » (2002) de Todd Haynes, la culpabilité du mari de Cathy Whitaker, homosexuel effondré parce qu’il ne peut réprimer ses tendances, est accentuée pour que le spectateur ait en horreur et en compassion les crises soi-disant « injustifiées » de la « honte pédaloïde » (comme diraient Jean-Louis Bory et Guy Hocquenghem). Dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, Emma incarne la lesbienne assumée, décomplexée, qui a assurée et a su rester cohérente, tandis qu’Adèle est celle qui a trahi et a tout gâché par sa bisexualité. Dans le film « Contracorriente » (2011) de Javier Fuentes-León, c’est la lâcheté de Miguel (homme marié bisexuel) qui rend d’abord Santiago invisible aux yeux des autres puis qui finit par le conduire à la mort. Dans le film « Save Me » (2010) de Robert Cary, Mark se sent coupable du suicide de Lester. Dans le film « Week-End » (2012) d’Andrew Haigh, Glen est pro-infidélité et pro-visibilité gay (même s’il ne croit plus en l’amour) alors que Russell son amant croit au grand Amour mais n’est pas prêt à assumer une visibilité de couple homo… Dans le film « Free Fall » (2014) de Stéphane Lacant, Engel est l’homosexuel entreprenant, et son amant Marc l’homme marié qui n’est pas prêt à tout quitter pour lui : Engel a beau lui soumettre un chantage aux sentiments (« T’es homo, Marc, assume ! »), Marc lui répond : « Je suis pas homo ! » et lui fout un pain. Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, même scénario : Peter est le gay qui a osé afficher médiatiquement son homosexualité, et il reçoit un coup de poing de son futur amant Howard qui n’accepte pas son outing. Dans le film « L’Inconnu du lac » (2012) d’Alain Guiraudie, Franck veut vivre son amour au grand jour avec Michel qui s’y refuse et qui tuera pour que ça se fasse pas. Dans la pièce Happy Birthgay Papa ! (2014) de James Cochise et Gloria Heinz, Chris se sert de la « fille à pédé » Marilyn comme couverture pour ne pas afficher son « amour » pour Ruzy, le « courageux homo » qui s’assume. Dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, Johnny semble s’assumer homosexuel plus facilement que Romeo… et en même temps dans la vie, il est la mauviette qui a peur de tout, et Roméo le téméraire qui n’a peur de rien (véritable incohérence du scénario). Dans la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen, Tom, le héros homosexuel jouant l’hétéro pour rester un chanteur à minettes célèbre, se voit corrigé par son futur amant, Louis, le jardinier sexy : « Pourquoi tu veux faire croire que t’es hétéro ? » « Parce que j’ai peur. » lui répond Tom. Louis fait du chantage au coming out à Tom en lui soutenant que si ce dernier avait osé être un modèle télévisuel gay assumé, lui aurait eu plus de facilité à s’assumer homo quand il était ado. Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, Nathan est l’homo assumé, sans-gêne (il fume, boit, dévergonde Jonas), et Jonas est l’homo honteux, introverti, coincé, qui ne veut pas être associé à un gay par ses camarades de classe de 3e.

 

Dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis, Bryan est présenté comme l’homo courageux qui s’assume, et son amant Tom, catholique, comme « quelqu’un qui n’a pas le courage de penser qu’il a le droit à l’amour ». L’ironie du sort, c’est que le second se rend à l’association gay catholique Courage ! « Seul un gars lâche peut s’engager à une association qui s’appelle Courage. » (Irène, la sœur gay friendly de Bryan, s’adressant à Tom) ; « Courage… quel nom débile… » (Bryan)

 

Dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini, avant de sortir « durablement » ensemble, Carole rejette les avances de Delphine, en ne se déclarant pas lesbienne : « J’ai des copines lesbiennes. Je ne le suis pas, c’est tout. » Delphine lui répond « Moi non plus », et juste après, elles s’embrassent à pleine bouche. Plus tard, la vapeur s’inverse : c’est Carole qui va assumer à fond d’être en couple avec Delphine, et Delphine qui ne renoncera pas à afficher leur lesbianisme auprès des gens du village : « Dis que je te fais honte, en plus ! » récrimine Carole.
 

Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, tous les duos homosexuels (Harold et Michael, le couple Larry/Hank, le couple Bernard/Peter, le couple impossible entre Alan et Michael, le couple platonique Justin/Alan, etc.) sont composés de ce tiraillement entre coming out et outing, pratique homosexuelle et acte homophobe : « Tu es un homme triste et pathétique. Tu es homosexuel et tu ne veux pas l’être. Mais tu ne peux rien y faire. Toutes les prières du monde, toutes les analyses n’y changeront rien. Tu sauras peut-être un jour ce qu’est une vie d’hétérosexuel, si tu le veux vraiment, si tu y mets la même volonté que celle de détruire. Mais tu resteras toujours un homo. Toujours Michael. Toujours. Jusqu’à ta mort. » (Harold s’adressant à son coloc homo Michael) ; « Pourquoi est-ce que j’ai toujours le mauvais rôle ? » (Larry reprochant à Hank de l’aimer et sa propre infidélité) ; « Il rejette les faits. » (Michael essayant de convertir Alan à l’homosexualité) ; « C’est la révolution. » (Harold en parlant ironiquement d’Alan qui risque de virer sa cuti) ; etc.

 

Dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, Adèle reproche à Georges, le copain de son frère William, de ne pas vivre pleinement son homosexualité au grand jour avec William. William est l’homosexuel courageux et malheureux à cause de la lâcheté de Georges « l’homme qui n’assume pas l’amour qu’il lui porte ». C’est une pièce où on nous fait la morale, pour nous faire comprendre que la culpabilité de l’homme marié bisexuel qui ne s’assume pas pleinement homo et qui ne reconnaît pas « l’amour véritable » (comprendre homosexuel) est criminelle.

 

Dans quasiment aucun cas l’échec de la révolution homosexuelle (amoureuse et politique) n’est attribué à ce qui, pourtant, devrait être identifié comme l’unique source du problème : la pratique homosexuelle et la dualité schizophrénique du désir homosexuel, étant donné que le désir homosexuel est un élan de haine de soi, qui fait que le personnage qui s’y adonne (s’)adore et (se) déteste dans un même mouvement. C’est cette ambivalence ou cette bipolarité violente du désir homosexuel cru vrai et pratiqué qu’illustrent ces nombreux duos homosexuels fictionnels formés de l’homo assumé et de l’homo non-assumé, unis à la vie et surtout à la mort/à l’ennui par une union charnelle (je vous renvoie également aux codes « Androgynie bouffon-tyran » et « Doubles schizophréniques » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels). Ils sont même parfois l’illustration de l’homophobie qu’est l’identité ou l’« amour » homos. Par exemple, dans le film « Praia Do Futuro » (2014) de Karim Aïnouz, Konrad impose à son compagnon brésilien Donato de couper les ponts avec sa famille au Brésil (« Tu es un lâche. ») et de rester avec lui en Allemagne… alors que leur couple ne durera pas.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) On annonce les personnes homosexuelles comme des grands « révolutionnaires » :

Delacroix revisité par l'arc-en-ciel...

Delacroix revisité par l’arc-en-ciel…


 

Très souvent les personnes homosexuelles pratiquantes (et leurs sympathisants) traitant d’homosexualité abordent le thème de la révolution dans leurs propos et leurs écrits : cf. l’essai Homosexualité et Révolution (1983) de Daniel Guérin, l’essai La Rebelión De Los Homosexuales (1977) d’Alfonso García Pérez, l’essai La Trayectoria De Las Revoluciones (1919) d’Antonio de Hoyos, le documentaire « Schwestern Der Revolution » (1969) de Rosa von Praunheim, l’essai Global Gay : Comment la révolution gay change le monde (2013) de Frédéric Martel, le documentaire « Revolution Happen Like Refrains In A Song » (1987) de Nick Deocampo, le chapitre « Une Homosexualité révolutionnaire » dans l’essai L’Homosexualité au cinéma (2007) de Didier Roth-Bettoni, (p. 545), l’essai Gay Manifesto (1970) de Carl Wittman, le documentaire « Moralist Instruction Musical : The Revolutionary Conduct » (2010) de Lasse Längström, l’essai Révolution des corps homogènes (2012) de Bruno Cissinato, etc.

 

Beaucoup de mouvements et d’association LGBT se donnent une étiquette révolutionnaire, et ce, surtout à partir des années 1950-1960, partout dans le Monde : par exemple le Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (FHAR) qui traduisit en France un rapprochement entre les intérêts homosexuels et l’extrême gauche maoïste. Cela peut prendre une forme politique comme artistique. Par exemple, la photographe lesbienne Claude Cahun adhère en 1939-1940 à la FIARI (Fédération Internationale de l’Art Révolutionnaire Indépendant).

 

On nous annonce très souvent dans les mass médias, dans les gouvernements occidentaux, que les personnes homosexuelles sont comme la fine fleur (ou le chiendent poil-à-gratter) de la modernité. « Le film ‘Priscilla, folle du désert’ fut une véritable révolution. » (Ximo Cádiz cité dans l’essai Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, p. 112) ; « Porfirio Barba Jacob fut un révolutionnaire complet, un martyr de l’immoralité. […] L’audacieux poète bohème ne respectait rien. » (cf. l’article sur Porfirio Barba Jacob (1883-1942) de Nicolás Suescún, sur le site www.islaternura.com, consulté en janvier 2003) ; « En 50 ans, Yves Saint-Laurent a révolutionné le vestiaire féminin. » (cf. la note finale du générique de la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert) ; « Il n’y a qu’une fortune : celle d’être un génie. » (le commentateur parlant de Charles Trénet, dans le documentaire « Charles Trénet, l’ombre au tableau » (2013) de Karl Zéro et Daisy d’Errata) ; « Pour moi, Jean Genet est un révolutionnaire. » (le réalisateur homosexuel Rosa Von Praunheim dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Inside » (2014) de Maxime Donzel) ; « The L World a vraiment été une révolution. » (une des actrices de The L World, idem) ; « Bronski, ça a vraiment été une révolution. C’était pas un groupe show biz. » (Didier Lestrade dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Out » (2014) de Maxime Donzel) ; etc. Par exemple, dans le documentaire « Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé : l’Amour fou » (2010) de Pierre Thoretton, l’ancien ministre de la Culture français Jack Lang parle de Pierre Bergé (président du Sidaction) comme un héros, et le couple homo Pierre Bergé et Yves Saint-Laurent comme la lueur d’espoir pour toute personne homosexuelle en quête de modèle de couples solides. La biopic « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway présente Sergueï Eisenstein, homosexuel, comme un génie. Je vous renvoie à l’article suivant.

 

Ils nous présentent ce qu’elles vivent et les batailles législatives qui se jouent en leur nom comme des hauts faits « qui marqueront à jamais l’histoire du pays » et qui prouvent une incroyable ouverture nationale : cf. je vous renvoie à cet article. « Les droits et les libertés des personnes homosexuelles n’ont cessé d’évoluer durant ces quarante dernières années. […] Immersion au cœur de l’association Contact, dont les bénévoles : parents, homos, membres de la famille ou amis se démènent autour d’un mot qui manque bien souvent au sein de nos familles aujourd’hui, le dialogue. Au travers de cette mixité intergénérationnelle, regard sur des histoires de vie, d’acceptation ; de fierté, de honte et surtout d’amour. » (cf. la critique du documentaire « 20 ans de Contact » (2013) d’Héloïse Lester, dans le catalogue du 19e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013, p. 89) ; « C’est la Révolution. Une authentique Révolution de l’intime. » (personne intersexe qui se fait appeler « M », dans le documentaire « Ni d’Ève ni d’Adam : une histoire intersexe » de Floriane Devigne diffusé dans l’émission Infrarouge sur la chaîne France 2 le 16 octobre 2018) ; « C’était vraiment à vous couper le souffle. » (Perry Brass, vétéran gay décrivant les premières Gays Pride à New York dans les années 1970, dans le documentaire « Stonewall : Aux origines de la Gay Pride » de Mathilde Fassin, diffusé dans l’émission La Case du Siècle sur la chaîne France 5 le 28 juin 2020) ; etc.

 

Par exemple, selon Jean-Noël Segrestaa, dans son article « Le Désir à l’œuvre chez Jean Genet » sur la revue Triangul’Ère 4 (2003) de Christophe Gendron, Jean Genet aurait une « écriture révolutionnaire » (p. 190). Selon Michel Larivière, dans son Dictionnaire des Homosexuels et Bisexuels célèbres (1997), les ouvrages passéistes de Lytton Strachey seraient des « biographies révolutionnaires par l’ironie et l’irrespect de l’auteur » (p. 315). Même les colères imbibées d’alcool de Paul Verlaine sont jugées « révolutionnaires » (Steve Murphy, « Colères révolutionnaires », dans le Magazine littéraire, n°321, mai 1994, p. 36). Selon Connolly, les étudiants homosexuels de l’Homintern d’Oxford sont des « révolutionnaires psychologiques » (Connolly cité dans l’essai Historia De La Literatura Gay (1998) de Gregory Woods). Pierre Bourdieu considère que le « mouvement gay et lesbien » est probablement à « l’avant-garde des mouvements politiques et scientifiques » (Pierre Bourdieu, « Quelques questions sur le mouvement gay et lesbien », La Domination masculine, 1998). Didier Roth-Bettoni, dans son essai L’Homosexualité au cinéma (2007), qualifie les films (merdiques : je n’ai pas d’autres mots) de Bruce LaBruce de véritables « manifestes politiques » (p. 431). Dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004), Fernando Olmeda prête un grand « talent artistique » à Juan Fersero pour ses exhibitions de bodybuilding « malheureusement passées inaperçues à l’époque à cause de l’homophobie ambiante »… (p. 47) Peut-être fait-il ici la confusion entre « culture » et « culturisme »… Le réalisateur Pierre-Clément Julien dit que son documentaire « Ma très chère sœur Olivia » (2012), retraçant le parcours d’Olivia C. (transsexuel M to F et franc-maçon), « montre une femme combattive, militante et touchante, qu’il admire ». Dans le documentaire « Homophobie à l’italienne » (2007) de Gustav Hofer et Luca Ragazzi, les deux partenaires du couple homosexuel qui tente d’« ouvrir les mentalités » de leurs contemporains italiens par rapport à la revendication de l’« égalité des droits entre homos et hétéros », sont qualifiés par la voix-off de « héros ». Dans le docu-fiction « Brüno » (2009), Sacha Baron Cohen est célébré comme un grand révolutionnaire par tout le gratin bobo du showbiz nord-américain. Dans son article « Dessinateur, écrivain, acteur : Copi, l’enfant pornographe » sur le journal Le Matin de Paris daté du 15 décembre 1987, Gilles Costaz baptise Copi de « révolutionnaire ». Par exemple, dans le docu-fiction « Howl » (2010) de Rob Epstein et Jeffrey Friedman, la lecture publique du poème d’Allen Ginsberg, effectuée par l’auteur (qui se décrit lui-même comme « prophétique »), est filmée comme un instant sacré qui envoûte littéralement l’assistance (suspendue à ses lèvres), un pamphlet qui révolutionne l’Humanité (… alors que c’est franchement de la merde).

 

Et beaucoup de personnes homosexuelles, flattées par tant d’éloges, sont prêtes à croire leur réputation de grands héros des temps modernes « démocratiques ». Elles se définissent souvent comme « révolutionnaires », se congratulent entre elles… et gare à celui qui remettrait leur titre en doute ! « J’étais réformiste à un moment qui se voulait révolutionnaire, mais j’étais révolutionnaire sur un sujet qui ne pouvait se vivre dans le compromis. Et l’histoire m’a donné raison. » (Geneviève Pastre, De l’amour lesbien (1980), p. 27) ; « On construit un moment historique. » (Linn, jeune homme brésilien travesti en femme, dans le documentaire « Bixa Travesty » (2019) de Kiko Goifman et Claudia Priscilla) ; etc. Par exemple, dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, on voit le couturier Yves Saint-Laurent (qui a pourtant, pendant toute sa vie, fuit concrètement beaucoup de combats, et notamment l’armée et la Guerre d’Algérie) créer une collection de haute couture appelée « Libération », et son amant Pierre Bergé applaudir à leur acte « subversif » (qui n’était au fond qu’un business) : « Tu maltraitais les bourgeois. Et la Révolution s’est très bien vendue. »

 

FAUX REV Drapeau planté

 

Elles n’hésitent pas, d’ailleurs, à confondre la révolution avec la période historique de la Révolution française (période qui était tout sauf révolutionnaire puisqu’Elle a rejeté Dieu et l’Église violemment et a inauguré l’individualisme libéral et matérialiste), en essayant de réactualiser l’image d’Épinal du révolutionnaire laïcard et libertaire construite par les bourgeois républicains des Lumières, soucieux d’écrire la légende noire de la monarchie et de l’Église catholique. Par exemple, lors de sa conférence « Différences et Médisances » autour de la sortie de son roman L’Hystéricon à la Mairie du IIIème arrondissement le 18 novembre 2010, l’écrivain Christophe Bigot a adoré la Révolution française : « Je faisais le bourreau du Tribunal Révolutionnaire sur la cour d’école. » Il s’est identifié très tôt – avant de le dés-idéaliser – au procureur Camille Desmoulins, la figure du traître par excellence : « Il est jeune, courageux, fougueux, c’est un amoureux. J’ai voué un culte à Camille Desmoulins pendant toute mon adolescence. […] C’est un homme violent qui désigne, à la vindicte populaire, les contre-révolutionnaires. »

 

La plupart des personnes homosexuelles se croient héritières d’un passé et d’un futur conquérants, infinis. « Durant ces 30 dernières années, on a fait énormément de progrès. » (Michael Michalsky interviewé dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) Par exemple, dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), la romancière lesbienne Paula Dumont se remémore nostalgiquement les « temps héroïques des mouvements féministes » (p. 65).

 

FAUX REV United Colour

Mariage homo United Colour of Benneton


 

Et actuellement, elles distribuent des médailles de « révolutionnaires » à tous les membres de la « communauté homosexuelle » qu’elles estiment méritants ou partie prenante de ce grand courant que serait la révolution et l’émancipation homosexuelles. Les exemples pleuvent, mais je m’arrêterai juste sur quelques-uns.

 

Par exemple, le 22 juillet 2011, la revue Têtu célèbrait un couple lesbien, Hege Dalen et Toril Hansen, qui aurait prêté main forte aux rescapés du massacre d’Utoya. On nous laisse entendre qu’elles sont révolutionnaires PARCE QUE HOMOSEXUELLES. « Ces deux lesbiennes courageuses ont fait parti des premières personnes à porter secours aux jeunes ciblés par la terrible fusillade sur l’île d’Utoya, en Norvège, vendredi dernier. Grâce à un bateau, ce couple de femmes a aidé quarante personnes à s’enfuir lors du drame. »

 

Dans l’émission Aventures de la médecine spéciale « Sexualité et Médecine » de Michel Cymes diffusée sur la chaîne France 2 le 16 octobre 2018, les figures de proue de la Gender Theory (Ronald Virag – inventeur des injections de papavérine pour lutter contre l’impuissance érectile –, Margaret Sanger – instigatrice du Planning Familial aux États-Unis –, Alfred Kinsey – maître à penser du tout-le-monde-est-bisexuel – , les médecins William Masters et Virginia Johnson – pornocrates cliniciens utilisant des cobayes sexuels –, Magnus Hirschfeld – savant fou homosexuel –, Rodolf/Dora Richter – premier homme trans M to F et complètement dépressif, etc.) sont montrées comme des héros, des martyrs, des sauveurs qui se sont offerts en victimes pour nos droits et notre liberté sexuels. On nous présente même les travaux d’Alfred Kinsey comme « révolutionnaires » !
 

Toujours dans Têtu, le chanteur Ari Gold, en juillet 2011 dans l’État de New York, est baptisé de « nouveau Rosa Parks », parce qu’il aurait tenu tête à un chauffeur de bus qui lui aurait demandé que lui et son compagnon (qui se tenaient par la main) aillent s’asseoir au fond du bus.

 

Sur les affiches du film « Freeheld » (« Free Love », 2015) de Peter Sollett, on nous présente l’amour lesbien entre Stacie et Laurel, basé soi-disant sur des faits réels, comme « une histoire d’amour qui a changé l’histoire ».
 

FAUX REV Revolucion du Désir

 

C’est souvent le désir individuel (même porté par une communauté minoritaire, au nom des minorités et de l’« Amour universel ») qui est avancé comme le levier qui va équilibrer et guider l’Histoire de l’Humanité : cf. le documentaire « La Révolution du Désir » (2006) d’Alessandro Avellis. « Jean Genet, lui, est un révolutionnaire authentique. C’est au nom de la liberté qu’il entend conquérir sa liberté personnelle. » (Susan Sontag, « Une Fleur du mal », L’Œuvre parle (1968), p. 126)

 

Madonna, la femme-objet... mais féministe et pro-gays, la chanteuse anti-mondialisation... mais qui incarne la mondialisation

Madonna, la femme-objet… mais qui ose se prétendre féministe et pro-gays ! ; la chanteuse qui a le culot de se dire anti-mondialisation… mais qui incarne à elle seule la mondialisation !


 

Dans leurs discours, beaucoup de personnes homosexuelles pratiquantes (et leurs défenseurs hétérosexuels) s’expriment à coup de slogans (identitaristes ou sentimentalistes) publicitaires, centrés sur la « réalisation de soi par soi-même » ou sur l’opposition de principe. C’est la raison pour laquelle, très souvent, elles prennent pour modèle d’action « révolutionnaire » et d’affirmation de soi la femme féministe indépendante, qui veut s’affranchir de son sexe, qui est « mère toute seule », qui a un désir machiste… même si elle saura de temps en temps le cacher par un discours mielleux, émotionnel, poétique. Modèles du genre : la nouvelle Marianne d’Olivier Ciappa (la Femen Inna Shevchenko), Christiane Taubira, Caroline Fourest, etc.

Toute la rhétorique de Mme Taubira tourne autour des concepts publicitaires de « droit », « égalité », « générosité », « tolérance » et « progrès »

 

Leur révolution est symbolique : pas concrète. « Le mariage, c’est à la fois très symbolique et très matériel. Très symbolique parce qu’on est dans un monde qui colle des étiquettes et qu’avant il n’y avait pas de case pour nous. » (Christophe et Mehdi en couple depuis 13 ans, dans l’article « Pacsés… un jour mariés ? », sur le magazine Psychologies, juin 2004, n°231, p. 77) Elles luttent pour des idées abstraites (« la société », « le progrès », « l’égalité », « la solidarité », « la tolérance », « la liberté », « l’amour », « la lutte contre les discriminations » – discriminations jamais nommées, comme par hasard… –, « la reconnaissance », « le dépassement des préjugés » – jamais les leurs non plus, comme par hasard…), pour le paraître, en faveur de slogans poétiques : ce n’est ni pour elles, ni vraiment pour les autres, ni par réelle conviction qu’elles demandent un droit ou une loi : « C’est au sein de la société que ça fait évoluer les choses ; pas pour nous. » (Juliette et Sophie, op. cit., p. 76) ; « C’est la révolution la plus incarnée qui ait existé sur la planète. Amantes ou non, nous étions en amour les unes avec les autres. Nous étions en amour avec les idées et avec tout ce qui était possible… » (Lise Weil interviewée dans le documentaire « Lesbiana : une Révolution parallèle » (2012) de Myriam Fougère) ; etc.

 

FAUX REV Têtu

 

Et à présent, beaucoup d’hommes et de femmes politiques non-homosexuels et tout fiers de se qualifier d’« hétérosexuels », se servent de la communauté homosexuelle, de la défense de « ses » droits ou de la « lutte contre l’homophobie et les discriminations », pour se faire passer pour des bons samaritains révolutionnaires : « Je suis engagée depuis longtemps. » (Anne Hidalgo, femme politique socialiste, par rapport à son engagement politique en faveur du « mariage homo » dans l’émission Mots croisés d’Yves Calvi, sur le thème « Homos, mariés et parents ? », diffusée sur la chaîne France 2, le 17 septembre 2012) ; « Chacun sa révolution. » (c.f. la chanson « Lily Passion » de Barbara) ; etc.

Le Président Obama luttant efficacement contre l’homophobie en disant que « c’est triste » et que « c’est pas bien » (Programme It Gets Better)

La ministre Najat Vallaud-Belkacem qui pense que « lutter contre les discriminations », c’est « détruire les clichés », alors que c’est précisément l’absence d’explication des clichés qui contribue à leur actualisation violente et aux discriminations…

 

FAUX REV Frigide

 

Les bécasses du gouvernement français actuel (Dominique Bertinotti, Roselyne Bachelot, Cécile Duflot, Najat Vallaud-Belkacem, Christiane Taubira, Anne Hidalgo et même Frigide Barjot) et leurs homologues suiveurs masculins (Erwann Binet, François Hollande, Jean-Pierre Michel, en première ligne) n’ont rien compris à l’homophobie. Non seulement ils ne la dénoncent pas, mais en plus ils l’alimentent par leurs bonnes intentions, s’en servent comme étendard révolutionnaire, en ne parlant jamais de ce qu’elle est vraiment (= le viol) ni de comment elle marche et par qui elle est posée (= les personnes homosexuelles pratiquantes). Ils la réduisent à l’« opposition aux droits des homos » ou bien à l’« accusation d’homophobie » (comme le fait Frigide Barjot, qui est bien incapable d’expliquer la véritable homophobie ou de porter un diagnostic sur les couples homosexuels, surtout parce que précisément dans le privé elle tient des discours clairement homophobes… et rien ne sert de s’entourer, comme elle le dit elle-même, « d’homos qu’elle aime », ni de clamer sa « non-homophobie », pour masquer cette homophobie). L’attitude hypocrite et moralisante de ces faux pourfendeurs des discriminations homophobes est révolte. Ils instrumentalisent les personnes homosexuelles en niant les drames et les insatisfactions amoureux qu’elles vivent, juste pour le plaisir de rentrer au panthéon des justiciers. Ils sont catastrophiquement sincères, ignorants de leur combat, et en plus opportunistes et pères-la-morale. Honte sur ces révolutionnaires de pacotille !

 

FAUX REV Xavier Bongibault

Xavier Bongibault, le militant homo anti-mariage-gay opportuniste (qui pense qu’être révolutionnaire se limite à se présenter en tant qu’« homo », à se dire « anti-homophobie » et « anti-militantisme LGBT », mais qui ne réfléchit jamais sur l’homosexualité et l’homophobie).


 
 

b) Beaucoup de personnes homosexuelles jouent les rebelles, les dures :

James Franco

James Franco


 

Vestimentairement et au niveau des attitudes, certaines personnes homosexuelles rentrent dans la peau de l’image stéréotypée du « rebelle » désobéissant, inflexible, qui ne se laisse pas faire : James Dean (« l’éternel rebelle » comme on l’appelait), Marlon Brando, Rock Hudson, beaucoup de célébrités bisexuelles « planquées », de femmes lesbiennes butch (= camionneuses), de drama queen hystériques, nous le démontrent.

 

Je vous renvoie au documentaire « Une Suissesse rebelle » (2000) de Carole Bonstein, à l’essai Séverine, une Rebelle (1982) d’Évelyne Le Garrec, à l’essai Rimbaud, la double vie d’un rebelle (2011) d’Edmund White, au rassemblement de Blois autour des « rebelles » Eddy Bellegueule/Didier Éribon/Geoffroy de Lagasnerie en 2014, le Festival Ciné Rebelle de Nanterre, etc.

 

La rébellion suit davantage une logique esthétique ou intentionnelle qu’un désir d’action concrète, qu’une intelligence et une réelle liberté : « Je suis rebelle, résistante, indocile et rêveuse. » (Gislin cité dans la revue Triangul’Ère 4 (2003) de Christophe Gendron, p. 110) ; « Je ne suis pas douce je ne suis pas aimable je ne suis pas une bourge. J’ai des montées d’hormones qui me font comme des fulgurances d’agressivité. […] Je viens du punk-rock et je suis fière de ne pas très bien y arriver. » (Virginie Despentes, King Kong Théorie (2006), p. 131) ; « Le rock’n’roll est une rébellion, une musique tout sauf sage… et aussi un peu gay. » (la voix-off dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) ; « Je crois qu’à l’époque, je ne me rendais pas compte du rôle que je jouais. » (le chanteur Boy George, idem) ; etc. Par exemple, le film « Charming For The Revolution » (2009) de P. Boudry & R. Lorenz est un film muet, sans dialogue.

 

D’ailleurs, dans certains passages littéraires ou filmiques, l’adjectif « rebelle » remplace tacitement celui d’« homosexuel » : « Madame Berditcher […] déclara qu’elle [Ronit, l’héroïne lesbienne] l’était. Absolument. Ronit avait toujours été rebelle, même petite fille. » (Naomi Alderman, La Désobéissance (2006), p. 158)

 

La révolution défendue par les personnes homosexuelles pratiquantes repose uniquement sur la croyance en l’hétérosexualité, c’est-à-dire une conception récente (fin du XIXe siècle), marchand, techniciste, violent et cinématographique, de la différence des sexes : « La société des hétéroflics ne nous convient pas. La seule position qui nous convient est une position révolutionnaire. » (une gouine rouge en mai 1968 en France, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) On voit donc sa vacuité.

 
 

c) Beaucoup de personnes homosexuelles s’opposent par principe à tout (sauf au flou), en adoptant l’idéologie de l’Anti :

Les personnes homosexuelles pratiquantes ont tendance à appréhender la révolution non pas sous l’angle de la proposition réaliste mais bien sous l’angle de la proposition angéliste et de la contestation de principe. Elles sont « anti » et « contre », parce que ça fait joli, ça fait fort, ça fait déterminé, ça fait réel, ça fait « sans concession » : cf. l’essai L’Anti-Œdipe (1972-1973) de Gilles Deleuze et Félix Guattari, la boîte de production de films gays Anti-Prod, la revue militante homosexuelle L’Antinorme dans les années 1970 en France, les éditions Contre-Dires, l’essai Manifeste contra-sexuel (2000) de Beatriz Preciado, le site de critiques Non-Fiction chapeauté par Frédéric Martel, le CUARH (Comité d’Urgence Anti-Répression Homosexuelle) dans les années 1970 en France, le documentaire « Jean Genet, le contre-exemplaire » (2010) de Gilles Blanchard, etc. Par exemple, le compositeur Érik Satie se définissait comme « anti-Français », l’écrivain Jean Genet comme « anti-Blancs », les poètes Arthur Rimbaud et Paul Verlaine comme « anti-bourgeois », etc. La photographe lesbienne Claude Cahun participe en 1936 à la fondation du regroupement Contre-Attaque.

 

Elles recyclent les vieux poncifs, adages et imageries rebattues des mouvements révolutionnaires historiques (prioritairement de gauche, cela va sans dire). Par exemple, lors du générique du 18e Festival Chéries-Chéris (ayant eu lieu en octobre 2012 au Forum des Images de Paris), un homme déguisé en évêque arbore un tee-shirt avec, inscrit dessus, le fameux slogan révolutionnaire communiste/républicain « No Pasarán ».

 

Pour elles, peu importe si la fin justifie les moyens : « Je revendique la provocation comme outil politique. » (Noël Mamère, homme politique des Verts qui a célébré le premier PaCS dans sa mairie de Bègles, entretien avec Christophe Gendron, le 23 mai 2006) ; « Ce que le public te reproche, cultive-le, c’est toi. » (Jean Cocteau, Le Rappel à l’ordre, 1926) ; « Cocteau incarne l’anticonformisme absolu. » (cf. l’article « Une constante remise en cause » d’André Derval, cité dans le Magazine littéraire, n° 423, septembre 2003, p. 24) ; « Toutes les minorités se retrouvent dans le personnage du vampires. C’est le symbole du marginal de toutes les époques. Il est toujours un contre-pouvoir. » (Tony Mark, l’écrivain homosexuel lors de sa conférence « Vampirisme et Homosexualité » au Centre LGBT de Paris le 12 mars 2012) ; « Il s’agissait d’être pour et contre tout. » (Dan Savage, homosexuel, parlant de la bisexualité de David Bowie, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Out » (2014) de Maxime Donzel) ; etc.

 

Par exemple, le réalisateur allemand Rainer Werner Fassbinder fonde avec des amis une troupe de théâtre, l’Antiteater, à la fin des années 1960. Dans sa pièce Docteur Faustroll (1898), Alfred Jarry définit la pataphysique comme la « science des exceptions ». Le philosophe homosexuel Michel Foucault invite à « la traque de toutes les formes de fascisme » et prétend définir les règles de la « vie non fasciste » (Michel Foucault, « Préface » de L’Anti-Œdipe (1972-1973) de Gilles Deleuze et Félix Guattari).

 

En général, les personnes homosexuelles pratiquantes (et leurs suiveurs hétérosexuels) s’attaquent aux socles du Réel pour asseoir leur mouvement révolutionnaire de destruction (eux disent « déconstruction », « déplacement », « ouverture » : ça passe mieux et c’est plus discret) : ils cherchent prioritairement à déminer la différence des sexes (ils la définissent comme un système conservateur et totalitaire dangereux, qui imposerait la domination des hommes sur les femmes), à déminer la différence des générations (il s’agit pour elles de s’affranchir du « joug familialiste », de tout héritage et tradition du passé réel), à déminer la différence des espaces (les « penseurs du désir » tels que Foucault, Derrida, Deleuze, Guattari, qui ont construit leur réflexion sur la base des travaux de Reich et Marcuse qui proposaient de faire de la révolution des mœurs une révolution politique, notamment par le ré-examen complet du freudisme, ne pensent l’Homme et ses frontières que dans la projection de ses désirs) et à déminer enfin la différence entre Créateur et créature (leur cible est bien évidemment l’Église catholique et les prêtres qui sont les garants de cette distinction salutaire). Ces théoriciens, qu’on appelle aujourd’hui plus communément les « théoriciens du Genre », s’attachent, selon la formule de Tony Anatrella dans son essai Le Règne de Narcisse (2005), à « désincarner le sexuel » (p. 109) : « La théorie du gender s’appuie sur divers auteurs marxistes, structuralistes et d’inspiration psychanalytique, notamment ceux de la révolution sexuelle avec Wilhelm Reich (1897-1957) et Herbert Marcuse (1898-1979) qui invitent à vivre toutes les expériences sexuelles afin de se libérer des normes sociales pesant sur la sexualité. Simone de Beauvoir (1908-1986) est également une référence avec sa formule ambiguë et ‘constructiviste’ : ‘On ne naît pas femme, on le devient.’ » (p. 120)

 

Leur conception de la Révolution est mue non pas tant par la joie et l’humanisme que par la vengeance et la misanthropie : « Un peu révolutionnaires mais sûrement différents, mes ressentiments à l’encontre de la société s’accroissaient. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 42)

 

Très souvent, les personnes homosexuelles pratiquantes mènent une guerre iconoclaste (démarche typique des fanatiques des images et des idolâtres iconodules s’il en est !) : on les entend constamment être « contre les préjugés », « contre les clichés »… alors que nous sommes tous « à l’image de… » (c’est ce qui fait que nous existons : nous avons besoin des images) et que nous avons tous des préjugés (et heureusement : ce sont eux qui nous montrent que nous pensons, que nous ressentons, que nous désirons et que nous sommes libres de les changer).

 

Dans leurs discours, il y a une confusion récurrente entre révolution (qui reconnaît les limites et intègre l’échec) et transgression (qui nie les limites et qui cherche la toute-puissance). « Le légalisme est une abomination. Je déteste… Reste anarchique. » (Claude Cahun dans sa Lettre à André Breton, 1953) Par exemple, dans leur essai Le Cinéma français et l’homosexualité (2008), Anne Delabre et Didier Roth-Bettoni célèbrent la « grâce transgressive » (p. 74) des œuvres filmiques homosexuelles.

 

FAUX REV pètent la gueule

 

Au bout du compte, la plupart des sujets homosexuels finissent par devenir ce qu’ils reprochent aux autres, car à force de ne pas vouloir être comme les autres (alors que les autres sont une part d’elles-mêmes), ils les imitent. Concrètement, l’« idéologie de l’Anti » est mimétique, spéculaire, est une soumission, même si en intentions, elle se rêve comme une rupture totale, une indépendance extraordinaire. Beaucoup de personnes homosexuelles adoptant comme mode d’existence « l’anti » manquent totalement de personnalité (elles s’adaptent excessivement et obsessionnellement à ce contre quoi elles prétendent s’opposer) et recréent un nouveau fascisme en prétendant éradiquer les anciens fascismes historiques. « L’antitotalitarisme moralisant est le fondement de la censure d’aujourd’hui. » (Élisabeth Lévy, Les Maîtres Censeurs (2002), p. 19) ; « Le fascisme s’est présenté comme étant l’antiparti. […] Il s’est identifié avec la psychologie barbare et antisociale de certaines couches du peuple italien, qui n’ont pas encore été modifiées par une tradition nouvelle, par l’école, par la coexistence au sein d’un État bien ordonné et bien administré. » (Antonio Gramsci, « Forces élémentaires », L’Ordine Nuovo, 26 avril 1921)

 

Par exemple, l’anti-kitsch par le camp revient à reproduire du kitsch, quand bien même les artistes camp tels que Copi s’en défendent : « Nous allons vers la propreté, l’hygiène politique, sociale, artistique. Nous glissons délicieusement sur les pentes douces du ‘consensus’. L’esprit du temps est au kitsch : miauler avec les loups !… Cet esprit du temps m’emmerde ! Il se paye de trop de soumission (vous, moi). »

 
 

d) Les personnes homosexuelles pratiquantes échouent souvent leur révolution :

Finalement, après s’être excité pour ses fantasmes de révolté et des mirages télévisuels, les personnes homosexuelles pratiquantes découvrent la vanité de leurs combats (identitaristes, amoureux, politiques, etc.), de leur action militante, de leur engagement associatif ou artistico-journalistique, de leur fuite du Réel. Je vous renvoie aux essais La Fonction de l’orgasme (1970) de Wilhem Reich, à la Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary Club (1986) de Guy Hocquenghem, au documentaire « Después De La Revolución » (2008) de Vincent Dieutre, au film « Revolutions Happen Like Refrains In A Song » (« Les Révolutions surviennent comme des refrains dans les chansons », 1987) de Nick Deocampo (traitant de la prostitution masculines), et à l’excellent reportage « Les Lendemains tristes du mariage gay » (2013) de Matthieu Barbier (le seul qui revient fidèlement sur la bataille du « mariage pour tous » en France en 2012-2013), le film « La Révolution sexuelle n’a pas eu lieu » (1998) de Judith Cahen, etc.

Par exemple, Manuel Vázquez Montalbán, en écrivant son roman Los Alegres Muchachos De Atzavará (1988), dit avoir utilisé la thématique homosexuelle pour illustrer « l’hypocrisie du changement » de la transition démocratique espagnole aux lendemains chantants de la mort de Franco. Le réalisateur français Jean-Luc Godard règlera son compte avec les personnes homosexuelles dans le film « Masculin-féminin » (1966) en faisant graffiter « À bas la république des lâches » par Jean-Pierre Léaud sur la porte des toilettes où il vient de surprendre deux hommes enlacés.

 

« Avant ma mort, je ne verrai pas la société que j’ai toujours rêvée depuis que j’ai 10-15 ans. Je ne la verrai pas. J’ai cru à un moment que j’allais la voir, cette génération. Au moment de 1945, j’étais de tous ces jeunes cons qui ont cru qu’on allait passer de la résistance à la révolution, selon le merveilleux slogan. J’ai su maintenant que j’ai été couillonné. J’appartiens à une génération couillonnée jusqu’à l’intestin-grêle. Je sais que c’est cuit pour moi. C’est pour ça que j’attends tellement des jeunes. J’espère qu’ils réussiront ce que ma génération et la vôtre n’a pas réussi. On a loupé notre coup, Chancel, vous le savez très bien. » (Jean-Louis Bory au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 6 mai 1976)
 

La révolution que les personnes homosexuelles pratiquantes proposent reste en effet cantonnée dans le domaine du pictural. Par exemple, selon Gilles Deleuze et Félix Guattari, la schizophrénie qui nous entraînerait dans un devenir « anti-fasciste » braverait les obstacles de la réalité avec succès : « Des hommes savent partir, brouiller les codes, faire passer des flux, traverser le désert des corps sans organes. Ils franchissent une limite, ils crèvent un mur, la barre capitaliste. […] À travers les impasses et les triangles, un flux schizophrénique coule, irrésistible, sperme, fleuve, égout, blennorragie ou flot de paroles qui ne se laisse pas coder, libido trop fluide et trop visqueuse : une violence à la syntaxe, une destruction concertée du signifiant, non-sens érigé comme flux, polyvocité qui revient hanter tous les rapports. » (Gilles Deleuze et Félix Guattari, L’Anti-Œdipe (1972/1973), p. 158) Mais ensuite, ils sont un peu obligés de nuancer l’euphorie de leur propos : « Sans doute toute intensité s’éteint-elle à la fin, tout devenir devient lui-même un devenir de mort. Alors la mort arrive, effectivement. » (idem, pp. 394-395)

 

Dans les discours des militants pro-droits-LGBT, le thème révolutionnaire sert presque uniquement de prétexte à filmer le corps musclé de l’homme prolétaire, à se rincer l’œil et à se faire (sensuellement et génitalement) du bien, à baiser tranquille, à s’auto-contempler narcissiquement, à se draguer entre « camarades » d’« actions » : « Copi était fou amoureux de Guy Hocquenghem. » (Christian Belaygue cité dans l’essai Le Rose et le Noir, les Homosexuels en France depuis 1968 (1996) de Frédéric Martel, p. 158) ; « Pendant que mon cousin prenait possession de mon corps, Bruno faisait de même avec Fabien, à quelques centimètres de nous. Je sentais l’odeur des corps nus et j’aurais voulu rendre palpable cette odeur, pouvoir la manger pour la rendre plus réelle. J’aurais voulu qu’elle soit un poison qui m’aurait enivré et fait disparaître, avec comme ultime souvenir celui de l’odeur de ces corps, déjà marqués par leur classe sociale, laissant déjà apparaître sous une peau fine et laiteuse d’enfants leur musculature d’adultes en devenir, aussi développée à force d’aider les pères à couper et stocker le bois, à force d’activité physique, des parties de football interminables et recommencées chaque jour. » (Eddy Bellegueule, l’enfant de prolétaire simulant des films pornos avec ses cousins dans un hangar, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 153) ; etc. Pensons aux Gay Pride qui, sous couvert de lutte politique, n’est qu’une immense foire aux bestiaux où la plupart des participants sont davantage intéressés par la drague que par les slogans militants qui sont scandés dans les haut-parleurs et affichés sur les chars.

 

En général, l’engagement révolutionnaire des personnes homosexuelles n’est qu’intentions : pas un don entier de leur personne. Par exemple, Steven Cohen, le performer homosexuel travesti M to F, se rend dans des grandes mégapoles internationales, mais propose un art trash-bourgeois qui ne vient absolument pas en aide aux personnes qu’il visite : celui-ci se fige en posture silencieuse, exhibitionniste et destructrice (Cohen dira « iconoclaste »), en démobilisation quasi complète, en contemplation désespérée du genre humain urbanisé, en hargne contre l’Humanité (à commencer par ses propres parents).

 


 

Je pense également au dramaturge Copi, qui s’est mis nu aussi dans ses pièces, à tous les artistes bobos homos qui mettent en scène l’alliance sexe-mort, et qui sont persuadés que « révolutionner » c’est juste « choquer ».

 

Dans l’esprit de ces activistes, la Révolution a été confondue avec l’inversion (or l’inversion n’est pas la suppression de la carte qu’on prétend détruire mais simplement un retournement de cette même carte). « La transgression, c’est toujours quelque chose qui m’intéresse. Dans la vie. Dans mon travail. Et c’est quelque chose que j’aime dans la culture gay en général. C’est de vraiment twister les choses, de les rendre différentes. Et en fin de compte qu’arriver à coder quelque chose, je trouve que c’est assez drôle. » (Michel Gaubert interviewé dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) Je vous renvoie au code « Inversion », ou encore à la partie « Le Bien par le mal » du code « Se prendre pour le diable », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels. Par exemple, Lionel Souquet défend « un mentir vrai », « dévastateur et révolutionnaire », lors de sa soutenance de thèse « La ‘folle’ révolution autofictionnelle : Arenas, Copi, Lemebel, Puig, Vallejo (à la Sorbonne à Paris, en 2009). Je crois qu’il y a là une mauvaise compréhension et une caricature de ce qu’est la véritable révolution : un don entier de soi pour la Vérité et par des actes justes et bons.

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

Les personnes homosexuelles pratiquantes sont en réalité des faux révolutionnaires qui ne veulent de la révolution que la réputation, que l’image et les paillettes : pas l’action (constructive) ni ses contraintes. « La révolution sexuelle est en marche à Hollywood ! » (cf. la critique par rapport à un film sur le SM, « Interior. Leather Bar » (2013) de James Franco et Travis Matthews, dans le plaquette du 19e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013, p. 29) ; « Mon seul combat, c’est d’habiller les femmes. » (Yves Saint-Laurent dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert) ; « J’adorais suivre la mode. » (Jean-Michel Dunand, Libre : De la honte à la lumière (2011), p. 21) ; « J’ai le Sida. J’attrape toutes les modes. » (Copi s’adressant à Facundo Bo, cité dans l’essai Le Rose et le Noir (1996) de Frédéric Martel, p. 479) ; « On est à bonne école ici : on est chez les soumis ! » (cf. une blague d’un membre du Centre LGBT de Paris, entendue le 2 avril 2010) ; etc. Elles se sont installées dans le doux confort du militantisme à distance, en choisissant deux maîtres que tout – ou presque – oppose et qu’elles ne pourront jamais servir bien entièrement : l’effort et la facilité. « Les auteurs de la Beat Generation pensaient avoir fait un grand coup en se retirant et en prenant la route du Maroc, pour ne pas dire du haschich, mais ils n’avaient jamais commencé quoi que ce soit. C’étaient des marginaux qui n’auraient jamais été remarqués par personne sans le génie publicitaire d’Allen Ginsberg. » (Gore Vidal, Palimpseste – Mémoires (1995), p. 357)

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

Le vertige d’avoir été trompé par ses idéaux révolutionnaires, par ses parents soixante-huitards et par ses potes de combat, ou de s’être illusionné soi-même est parfois exprimé par une question ou par une révolte amère : « La fête est finie. » (Alberto Mira, De Sodoma A Chueca (2004), p. 565) ; « Que reste-t-il de l’explosion des années 1970 ? » (Jean-Luc Hennig cité dans le Dictionnaire gay (1994) de Lionel Povert, p. 8) ; « En cette fin de siècle, tout semble s’être refermé. Comment être outrageant en ces années outragées ? » (Bill T. Jones, idem, p. 288) ; « Comment passe-t-on d’une rive à l’autre ? Comment se fait-il que le désir puisse défier et même provoquer la mort ? » (Néstor Perlongher, « Matan A Una Marica » (1985), dans son recueil Prosa Plebeya (1997), p. 35) ; « Employer la terreur pour la révolution : c’est en soi une idée totalement contradictoire. » (Michel Foucault, « Le Savoir comme crime », entretien avec S. Terayama en 1976, cité dans Dits et écrits II, 1976-1988 (2001), p. 83) ; etc.

 

Par exemple, dans son essai Il Teatro Inopportuno Di Copi (2008), Stefano Casi qualifie le dramaturge homosexuel argentin Copi de « timide révolutionnaire » (p. 13).

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

Beaucoup de personnes homosexuelles se rendent compte du conformisme de leur anticonformisme. « Avant, c’était excitant et original d’être homo. Ça faisait de vous quelqu’un de spécial. Ça vous rendait différent des autres. Alors que maintenant, vous êtes aussi ennuyeux ou intéressant que n’importe quel hétérosexuel au monde. C’est comme ça. » (Steve Blame, en conclusion du documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) ; « Le PaCS ne donne pas plus d’amour. » (Christophe, en couple depuis 13 ans avec Mehdi, dans l’article « Pacsés… un jour mariés ? », sur le magazine Psychologies, juin 2004, n°231, p. 77) ; « Le problème, c’est que l’homosexualité n’a plus rien de subversif. […] Ne plus croire en Dieu n’est pas non plus exceptionnel. […] En vouloir à l’Église, c’est lassant, ça ne sert à rien. […] Aujourd’hui, ce qui est subversif, c’est justement d’adhérer à tout ça, de ne pas voir le Loup avant le mariage. […] Même voter à gauche n’est plus signe de rébellion, et si l’on y regarde de plus près, c’est l’inverse qui est bien souvent la preuve d’une bravade insolente. » (Gaël-Laurent Tilium, Recto/Verso (2007), pp. 257-258) ; « J’escroque un peu mon monde. » (Allen Ginsberg dans le docu-fiction « Howl » (2010) de Rob Epstein et Jeffrey Friedman) ; « Quant à la visibilité des homosexuels, j’ai l’impression que c’est un peu un leurre. On ne s’est pas battu pour rien, mais la gay pride et le PaCS restent de fausses libertés ; on reste emprisonné dans un ghetto, et si on est visible, c’est derrière un paravent. » (Jean-Daniel Cadinot cité dans la revue Triangul’Ère 4 (2003) de Christophe Gendron, p. 72) ; etc. Leurs constats confinent au cynisme. « L’Essobal, c’est un gars bon. Il est vachement engagé socialement, que même Béachelle et l’abbé Pierre à côté, c’est des veaux. Dès l’âge de douze ans, au sein du comité d’action révolutionnaire de son lycée, le petit Essobal fonda le groupe de lutte contre la tonte et le découpage des oreilles des caniches. » (Essobal Lenoir parlant ironiquement de lui-même à la troisième personne, dans sa nouvelle « Une Vie de lutte » (2010), p. 168) ; « Essobal Lenoir ne rate jamais une marche de la section Neuilléenne de lutte contre le Front national. Tous les week-ends, au golf, il est très farouchement opposé à toute forme d’antisémitisme, voire même de racisme, vous savez le truc des nègres et des bougnoules. » (idem, p. 171)

 

Dans la pièce musicale Rosa La Rouge (2010) de Marcial Di Fonzo Bo et Claire Diterzi, une très longue liste de noms d’auteurs dits « révolutionnaires » (dont le dramaturge Copi) est citée. Le plus significatif, c’est que l’immense papier où est inscrit le mot « Révolution » finit par être chiffonné… ; plus tard est diffusé avec ironie un extrait du film « Spartacus » (1960) de Stanley Kubrick, comme un symbole kitsch des révolutions d’antan, plus flamboyantes que celles d’aujourd’hui.

 

La passion soudaine chez les personnes homosexuelles pour des fausses réalités (l’égalité, la tolérance, leur conception erronée du droit et de la liberté, etc.) et des réalités travesties (l’homosexualité, la famille, le couple… les Jeux Olympiques « Gays » !), qui n’émane pas d’un désir profond mais plutôt d’une révolte inconsciente, n’est chez elles que l’expression, au fond, d’une désaffection de l’engagement, en plus d’un fanatisme. C’est parce que beaucoup de couples homosexuels sont infidèles et ne savent plus s’engager en amour, c’est parce que les individus homosexuels ne savent plus qui ils sont, qu’ils font précisément semblant de s’exciter pour des causes (le coming out, le mariage, l’adoption, les enfants…) qui ne les emballent pas vraiment, qui ne concernent pas véritablement leur situation de vie, qui tuent leur ennui ou leur angoisse d’être si mal assortis, et qu’une fois obtenues ils écartent. Ils ne les voulaient que « pour le symbole », « pour la reconnaissance sociale », que pour le paraître et la sincérité, parce que « ça faisait solidaire ».

 

L’humoriste Océane Rose-Marie s’engage pour les Gay Games (J.O. « homosexuels »)… parce que c’est HYPER important (pourquoi? Parce que c’est HYPER important)

 

Par exemple, invité du Petit Journal de la chaîne Canal + le 22 juin 2013, Pierre Bergé a admis qu’il n’était pas pour le mariage homo mais juste pour l’union civile (exactement comme Frigide Barjot), après avoir fait croire à tout le monde pendant des mois qu’il le voulait : « Je trouve que le mariage, c’est une institution bourgeoise. Donc je ne suis pas pour le mariage des hétéros, et je ne suis pas pour le mariage des homos. C’est clair, ça, je suis pour une grande union civile. » Lors de l’émission, il a l’aplomb de répondre à la question « Quel est votre plus gros défaut ? » : « La mauvaise foi. » Pour une fois, il dit vrai !

 

Caroline Fourest et les Femen, pleines de bonnes intentions

Caroline Fourest et les Femen, pleines de bonnes intentions


 

Pire encore, l’action « révolutionnaire et antifasciste » des personnes homosexuelles pratiquantes finit par devenir encore plus violente que le fascisme ou le totalitarisme qu’elles prétendaient dénoncer et éradiquer. « Contrairement à ce qui se passait aux Antilles, ici en métropole, nous poursuivions le combat avec acharnement. L’imminence d’une manifestation sur la voie publique se précisait à mesure que nous imposions nos idées. […] Plus que jamais le moment était venu de sortir de l’ombre, et les grands chambardements de la société de mai 68 furent une aubaine. » (Ednar dans les premiers groupes de revendication homo, dans le roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 172) Par exemple, dans le documentaire « La Grève des ventres » (2012) de Lucie Borleteau, le collectif « Grève du ventre » est un groupe commando voulant « arrêter de faire des enfants » et imposer leur idéologie infanticide/abortive à l’ensemble des femmes, des mères et de la Planète.

 

Cette violence militante vient d’une frustration de découvrir l’inutilité du combat, d’une bouderie. Les militants homosexuels découvrent inconsciemment que l’identité homo et l’amour homo ne sont pas des causes réelles… donc ils se mettent à faire la gueule, et même à faire passer leur coup de gueule pour minoritairement homosexuel (alors qu’il s’agit précisément du contraire). Il existe en effet une attitude homosexuelle présentée actuellement comme « révolutionnaire » : celle du rejet de l’étiquette « homosexuel » sous couvert d’ouverture à l’universalité et de rejet de la ghettoïsation du « milieu homo ». Par exemple, le réalisateur Xavier Dolan rejette avec virulence l’existence de prix spécifiquement « gays ». En réalité, ni les promoteurs de ces prix artistiques, ni ceux qui les détruisent (et qui sont au fond les mêmes personnes) ne font preuve de courage et de discernement par rapport au désir homosexuel. Dolan a l’attitude (bobo et homophobe) du commun des personnes homosexuelles pratiquantes qui ne veulent pas voir leur désir et leurs actes identifiés. Rien de révolutionnaire ni d’extraordinaire dans sa démarche. La marque de fabrique du désir homo, c’est qu’il se renie pour mieux se pratiquer. La grande majorité des personnes homos sont si homosexuellement correctes en pensant ne pas l’être !

 
 

e) L’homophobie : fragile et ultime rempart de la « Révolution LGBT »

Chris Colfer et Jim Parsons, pour la revue "Rolling Stone"

Chris Colfer et Jim Parsons, pour la revue « Rolling Stone »


 

En général, dans le quotidien des « couples » homosexuels, l’échec de la « révolution homosexuelle » est nié en bloc, ou bien est imputé soit à l’extérieur (la société et les méchants « homophobes »), soit à la lâcheté d’un des deux partenaires du binôme… sachant que cette lâcheté se déplace ou s’échange entre eux comme un virus censé rehausser le courage de l’un au détriment de l’horreur de la haine de soi de l’autre. « Je voulais montrer deux générations successives d’hommes gays, deux extrêmes, deux pôles, l’un qui est dans la honte et la culpabilité et l’autre qui est totalement libre. Et comment témoigner de ses sentiments lorsque l’on ne peut pas ? » (Tor Iben, le réalisateur du film « Cibrâil » (2010) de Tor Iben, s’exprimant sur la plaquette du 17e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris en octobre 2011)

 

On observe la même démarche de clivage manichéen à l’échelle cette fois communautaire ou nationale. « Sans être militant, Copi aura contribué, sans doute davantage que les Groupes de Libération Homosexuelle qui naissent en 1974, à façonner l’imaginaire homosexuel. » (Frédéric Martel, Le Rose et le Noir, les Homosexuels en France depuis 1968 (1996), p. 159) Il y aurait, selon les journalistes et les « intellectuels » pro-gay, la communauté homosexuelle « qui s’assume » et qui courageusement luttent pour l’épanouissement de la communauté homosexuelle « qui ne s’assume pas » et qui crache sur la première. Selon ces manichéens homosexuels actuels, soit on vit ouvertement son homosexualité comme ils le suggèrent/imposent, soit on finit frustré et malheureux : « Au final, il convient de rappeler une évidence majeure : […] l’homosexualité n’est pas un choix moral. Sauf dans le cas d’une homosexualité temporaire ou de circonstance, le seul et unique choix, pour la plupart de ceux d’entre nous qui naissent homosexuels et le découvrent très jeunes, est de vivre ouvertement et sereinement leur sexualité et leur vie ou de se replier dans la solitude, le refoulement et l’aigreur. Dans le premier cas, ils n’en seront que plus équilibrés et n’ennuierons en rien leurs voisins pas trop obtus, dans l’autre, cela ne peut qu’engendrer des conséquences fâcheuses pour eux-mêmes, leur entourage, et pour la société tout entière. » (Bertrand Desfossé, Henri Dhellemmes, Christèle Fraïssé, Adeline Raymond, Pour en finir avec Christine Boutin (1999), pp. 21-22)

 

Dans quasiment aucun cas l’échec de la révolution homosexuelle n’est attribué à ce qui, pourtant, devrait être identifié comme l’unique source du problème : le coming out et la formation du couple homo, autrement dit la pratique homosexuelle et la dualité schizophrénique du désir homosexuel, étant donné que le désir homosexuel est un élan de haine de soi, qui fait que la personne qui s’y adonne (s’)adore et (se) déteste dans un même mouvement.

 

Beaucoup de militants pro-gays se servent de l’homophobie comme seul et unique rempart/socle de leur « Révolution homosexuelle » fantasmée, mourante parce que basée sur une pratique homosexuelle violente.

 

Par exemple, le documentaire « L’Affaire Pasolini » (2012) d’Andreas Pichler essaie de faire passer le meurtre de Pier Paolo Pasolini pour un crime politique national, un complot collectif sournois, et non pour un assassinat dû avant tout aux actes honteux du fameux réalisateur opérés dans un cadre privé concret (celui du tourisme sexuel, de la drague homosexuelle et de la prostitution masculine), et dû à la terreur homosexuelle/homophobe du jeune voyou Pelosi… tout ça juste pour magnifier le personnage de Pasolini par la victimisation, pour l’ériger en héros et en martyre gênant d’une société qui a tué l’un de ses maîtres à penser parce qu’il lui aurait révélé de terribles vérités : « Comme tous les poètes, il entrevoyait l’avenir. » En réalité, le meurtre de Pasolini a été un « plan cul » qui a mal tourné.

 

Autre cas similaire. Avant de découvrir que le jeune Matthew Shepard, assassiné aux États-Unis en 1998, avait été massacré par ses deux ex-amants et fournisseurs de drogues, beaucoup présentaient (c’est très clair dans le docu-fiction Le Projet Laramie (2012) de Moisés Kaufman) et continuent de présenter le garçon décédé comme un révolutionnaire christique, qui s’était engagé pour les Droits de l’Homme et la Cause gay, alors que concrètement, ce n’était pas le cas. « Mon sentiment, c’est que les médias dépeignent Matthew comme un saint… alors que c’était un pilier de bar. » (une des rares autochtones lucides du Wyoming) Il est comparé à un Jésus crucifié sur un poteau, ligoté à une clôture : « Cet endroit est devenu un lieu de pèlerinage », déclare le père Steeven. Même le jeune cycliste (Aaron) qui a découvert le corps de Matthew, prétend que c’est Dieu qui l’a conduit sur les lieux du martyr. On constate tout l’opportunisme sincérisé des militants pro-gay et des mass médias qui se sont servis de la mort du jeune homme pour hurler à l’homophobie, pour satisfaire leur voyeurisme narcissique, pour justifier leurs propres actions militantes (« Il y avait dans la personnalité de Matthew Shepard un aspect politique. » avouera Doc O’Connor) en organisant partout aux USA une grande chaîne émotionnelle de solidarité, de veillées aux flambeaux (les fameuses « candlelight vigils » qu’on a pu voir aussi suite à l’assassinat du maire homosexuel Harvey Milk à San Francisco) : « Je crois vraiment que c’est une des plus belles choses que j’ai faites dans ma vie. » (Matt, un homme homosexuel parlant des veillées) ; « Quelle chance d’avoir vu une chose pareille dans sa vie. » (Harry, un autre veilleur, 52 ans)

 

(avec toujours l’insupportable et classique voix-off susurrée des films bobos)

 

Cette récupération du malheur ou de la violence dits « homophobes », pour tresser des couronnes révolutionnaires « aux homos » et se glorifier d’être leurs sauveurs, est observable dans tous les cas de meurtres non-élucidés (suicides, agressions, assassinats, épidémie de Sida, etc.). Elle est opérée avec la complicité des associations LGBT (Le Refuge, Act-Up, l’inter-LGBT, l’APGL, les Panthères roses, les Antifas, etc.), des revues de la presse homo (les officielles tout comme les officieuses : Têtu, Minorités, Yagg, etc.), et maintenant de nos gouvernants politiques.

 

On a pu la voir lors de l’affaire Sébastien Nouchet (homosexuel qui s’est auto-incendié à l’essence en 2004 en France), qui fut récupérée et montée en épingle par les mass médias pour accélérer l’adoption de deux amendements anti-discriminations réprimant notamment les propos homophobes en France. C’est aussi ce qu’on peut observer avec le meurtre de Clément Méric lors de la bataille du « mariage gay » en France en 2013 (la communauté homosexuelle a fait croire au crime politique impulsé par la « Manif Pour Tous » avant de se rendre compte que l’activiste anti-fasciste avait lui-même agressé ses tueurs).

 

Dans nos contrées occidentales pseudo « démocratiques », se dressent depuis un certain temps, autour des concepts d’homophobie et de fascisme, des tribunaux « révolutionnaires » formés en réalité de trouillards, d’ignorants, de condamnateurs et de personnes particulièrement homophobes (il n’y a qu’à voir comment elles traitent et insultent leurs pairs homosexuels qui ne pensent pas comme elles), qui culpabilisent tout le monde et surtout traînent la Terre entière (excepté leur élite) en procès de fascisme (ou d’intégrisme ou d’extrémisme), en les faisant comparaître dans leurs films, pièces, talk-shows, conférences, plateaux télé politiques (transformés en arènes par l’entremise de l’« équipe à Ruquier » et autres journalistes véreux). Quand le militantisme manichéen, agressif, idéologue, ose se présenter comme l’incarnation de l’humanisme, de l’amour, du respect, de l’humour, de l’engagement audacieux, on oscille, en tant que spectateur, entre rire, consternation et révolte. Car oui, ceux qui prônent l’amour en vous insultant ou en vous menaçant de penser/pleurer comme il faut, c’est-à-dire comme eux, sont littéralement tragicomiques (c’était palpable lorsque j’ai assisté à la projection du documentaire « Et ta sœur ! » (2011) de Nicolas Barachin et Sylvie Leroy, ou bien lors de la représentation de pièces dites subversives et engagées comme Golgota Picnic (2012) de Rodrigo Garcia, Grand Peur et Misère du IIIe Reich (2008) de Bertold Brecht, Le Projet Laramie (2012) de Moisés Kaufman, Bent (2007) de Martin Sherman, etc.). Ces idéologues « bienfaiteurs » vous crachent à la gueule le sourire aux lèvres, la larme à l’œil, et avec la satisfaction d’accomplir une œuvre de justice et de progrès. Sidérant. Déplacé. Indécent. Puant. Surtout au vu des crises dramatiques (économiques mais surtout morales) que traversent en ce moment tous les pays (Espagne, Belgique, France, Suède, États-Unis, Afrique du Sud, etc.) approuvant les yeux fermés les lois pro-gays en pensant que ça fera écran aux divisions dans les familles, entre concitoyens, et sur notre Planète qui perd pied avec le Réel, alors que c’est tout le contraire qui arrive.

 

FAUX REV Espagne

 

La défense sociale et la banalisation de la pratique homosexuelle (une pratique qui est tout sauf aimante car elle expulse la différence des sexes et repose sur une discrimination contraire à l’Amour et au Réel), loin de marquer un progrès humain et une ouverture, indiquent une régression civilisationnelle très grave, qui risque de se retourner contre les plus fragiles de notre société (les femmes, les enfants, les personnes homosexuelles, en premier lieu). L’égalitarisme bon ton est un rouleau compresseur extrêmement inhumain et dangereux, qui transforme le troupeau de moutons de panurge anti-conformistes et pro-Égalité en macaques décérébrés, incapables de penser par eux-mêmes (ce n’est pas moi qui le dis : ce sont eux-mêmes qui se représentent ainsi! cf. la photo ci-dessous que j’ai prise dernièrement), oubliant leur humanité, et présentant (par cynisme désabusé) leur décadence et leur barbarie comme de l’esprit et du progrès social.

 

Photo d'un graffiti des pro-mariage-pour-tous défendant l'égalité, et représentant un singe

Photo d’un graffiti des pro-mariage-pour-tous défendant l’égalité, représentant un singe (Paris, IVe arrondissement, 2013)


 

Finalement, que c’est dur, irréaliste et violent, de chercher à être révolutionnaire sans se mettre au service des seules instances et incarnations qui incarnent vraiment la Révolution sur Terre : Jésus et son Église catholique !

 
 

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Code n°76 – Focalisation sur le péché (sous-code : Péché « originel »)

focalisation

Focalisation sur le péché

 
 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Pédé = Péché ?

 

Pièce Homosexualité de Jean-Luc Jeener

Pièce Homosexualité de Jean-Luc Jeener


 

« Pédé » n’est pas synonyme de « péché »… même si ces deux mots riment et que, par haine d’elle-même, la communauté LGBT, pourtant persuadée qu’elle ne croit ni en Dieu ni en l’existence du péché, essaie de les faire fusionner.

 

En effet, les personnes homosexuelles pratiquant leur homosexualité passent leur temps à parler du « péché », à dire que ce sont les autres (et surtout les catholiques) qui le font, qui les jugent, qui les réduisent et les enferment dans leurs actes peccamineux, alors qu’en réalité, c’est leur propre pratique qui les exclut de l’Église et du Salut, alors que ce sont elles seules (et leurs « amis » hétéros-gays friendly) qui se focalisent sur le péché, elles seules qui s’étiquettent « pécheurs », « exclus du Salut et du Pardon de Dieu », et « maudits », pour se tenir chaud dans la victimisation et ne surtout pas se remettre en cause, alors qu’au contraire les vrais catholiques rejettent le péché mais aiment le pécheur et défendent la distinction cruciale entre personne homo et acte homo. Ils savent que la Miséricorde de Dieu pour les personnes homosexuelles est immensément plus grande qu’elles ne L’imaginent.
 

Vidéo-clip de la chanson "Je te rends ton amour" de Mylène Farmer

Vidéo-clip de la chanson « Je te rends ton amour » de Mylène Farmer


 

Pour une inversion incroyable et malhonnête, le diable réussit à faire croire aux esprits faibles et blessés qui lui obéissent que le péché le plus grave qui va faire mourir l’Homme, c’est la différence des sexes, donc le corps sexué, le mariage d’amour entre la femme et l’homme, la procréation aimante, et le célibat sexué consacré à Dieu. Alors que dans les faits, et aux yeux de Dieu, c’est la différence (des sexes) qui nous permet d’aimer, de Le connaître, et d’aimer totalement ; c’est l’accueil respectueux de la différence des sexes qui sauve vraiment tout être humain du péché. La sexuation, le mariage aimant entre la femme et l’homme, le célibat consacré, et parfois (si c’est donné) l’engendrement biologique dans la différence des sexes, ce sont les plus grands actes d’amour neutralisant le péché.

 

Les personnes homosexuelles, rejetant la différence des sexes de par leur désir sexuel, actualisent souvent cette inversion diabolique entre péché et sainteté (et d’autant plus quand elles pratiquent leur homosexualité et s’y identifient identitairement), au point de considérer que la différence des sexes est diabolique, et qu’elles deviendront saintes (ou des « pécheurs sanctifiés » !) une fois qu’elles l’auront évacuée de leur vie ou qu’elles chercheront à la détruire. Parfois, elles se rendent compte que le véritable péché réside dans la destruction et le mépris de la différence des sexes… et dans ces cas-là, elles sombrent dans une dépression de Drama Queen surjouant la victimisation de l’héroïne maudite et damnée, se confondant en excuses et en remords. Mais la plupart du temps, elles ne s’en rendent pas compte, et clament que le péché est une invention venant de l’Église, une création des gens « saints… et hypocrites ». Pire : elles considèrent qu’elles sont encore plus divines et éloignées du péché depuis qu’elles se prennent pour l’Incarnation du plus grand des Pécheurs, depuis qu’elles se prennent pour l’Incarnation vivante et individuelle de la différence des sexes, depuis qu’elles sont en couple homo, depuis l’opération chirurgicale leur ayant mutilé leur corps sexué, depuis leur divorce. Leur focalisation verbale sur le péché, qui se veut un pastiche ironique drôlissime et subversif de la bien-pensance « hétéro-patriarcale », une instrumentalisation camp de la culpabilité que la société ferait peser sur elles, est en réalité un appel et un rappel inconscient que l’éjection de la différence des sexes dans leur identité et dans leurs actes sexuels est concrètement peccamineuse et qu’elle les fait souffrir. C’est la raison pour laquelle elles reviennent sans arrêt, dans leurs créations artistiques, sur l’épisode de la pomme et du péché « originel » d’Adam et Ève raconté dans la Bible, épisode auquel elles s’identifient (y compris celles qui prétendent ne pas croire en Dieu). Nous devons écouter cet appel et le comprendre comme une illustration que les actes homosexuels sont vraiment des péchés graves dont pâtissent ceux qui les posent.
 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Homosexualité noire et glorieuse », « Blasphème », « Emma Bovary ‘J’ai un amant !’ », « Clown blanc et Masques », « Cour des miracles », « Se prendre pour Dieu », « Désert », « Mort », « Mort = Épouse », « Jardins synthétiques », « Ennemi de la Nature », « Je suis différent », « Icare », « Vampirisme », « Déni », « Homosexuel homophobe », « Milieu homosexuel infernal », « Appel déguisé », « Désir désordonné », « Amant diabolique », « Femme et homme en statues de cire », « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été dans un bois », « Se prendre pour le diable », « Curé gay », « Vierge », et « Attraction pour la ‘foi’ », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.
 
 

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FICTION

 

a) Le péché est partout et je suis un damné du Jardin d’Éden :

Film "La meilleur façon de marcher" de Claude Miller

Film « La meilleure façon de marcher » de Claude Miller


 

Dans les fictions homo-érotiques, il est souvent question du péché : cf. la chanson « It’s A Sin » du groupe Pet Shop Boys, la chanson « Such A Shame » du groupe Talk Talk, la photo La Faute énorme de Duane Michals, le roman El Último Pecado De Una Hija Del Siglo (1914) d’Álvaro Retana, le roman El Pecado Y La Noche (1910) d’Antonio de Hoyos, la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener, le film « Sin In The Suburbs » (1964) de Joseph W. Sarno, le film « The Sins Of Rachel » (1972) de Richard Fontaine, le film « Ordinary Sinner » (2001) de John Henry Davis, le film « Saints And Sinners » (2004) d’Abigail Honor et Yan Vizinberg, le film « Pecata Minuta » (1998) de Ramón Barea, le film « Preaching To The Perverted » (1997) de Stuart Urban, la pièce Confidences entre frères (2008) de Kevin Champenois, le film « Dirty Little Sins » (« Sale petit péché », 2005) de Kett Blakk, la pièce Dans la solitude des champs de coton (1985) de Bernard-Marie Koltès (où il est fait mention des 7 péchés capitaux), le film « Le Fil » (2010) de Mehdi Ben Attia, le film « Paresse » (2000) de Frank Mosvold, le film « The Children’s Hour » (« La Rumeur », 1961) de William Wyler, la série It’s a Sin (2021) de Russel T. Davies, etc.

 

Film "Los Abrazos Rotos" de Pedro Almodovar

Film « Los Abrazos Rotos » de Pedro Almodovar


 

C’est l’épisode biblique du jardin d’Éden perdu et du « péché originel » d’Adam et Ève qui semble obséder le héros homosexuel : cf. le film « Fruits amers » (1967) de Jacqueline Audry, le film « Secret Garden » (« Jardin secret », 1987) d’Hisayasu Sato, la chanson « Sapho et Sophie » d’Alain Chamfort, le film « Big Eden » (2000) de Thomas Bezucha, Le film « Expelled To Eden » (2005) d’Eran Koblik Kedar, le film « The Stepford Wives » (« Et l’homme créa la femme », 2004) de Frank Oz, la chanson « 1er novembre (Le Fruit) » du Beau Claude, la chanson « Quand tu m’appelles Éden » d’Étienne Daho, le film « Mon fils à moi » (2006) de Martial Fougeron (avec la scène incestueuse finale de la pomme entre Julien et sa maman), la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia (avec le thème de la chute de la pomme), le recueil de poésies Sombra Del Paraíso (Ombre du Paradis, 1944) de Vicente Aleixandre, le roman Le Jardin des chimères (1921) de Marguerite Yourcenar, le roman Éden, Éden, Éden (1970) de Pierre Guyotat, le roman La Busca Del Jardín (1978) d’Héctor Bianciotti, le film « The Apple » (2008) d’Émilie Jouvet, la chanson « Paradis inanimé » de Mylène Farmer, le film « The Gardener Of Eden » (1981) de James Broughton, le film « Minuit dans le Jardin du Bien et du Mal » (1997) de Clint Eastwood, le roman Invitados En El Paraíso (1958) de Manuel Mujica Lainez, les jardins picturaux des toiles de Pierre et Gilles, le film « Les Enfants du Paradis » (1945) de Marcel Carné, le film « Adam et Ève » (1995) de Joaquim Leitao, le film « Bug » (2003) d’Arnault Labaronne, le film « Les Majorettes de l’Espace » (1996) de David Fourier, les fresques La Création du Monde, Adam, Le Paradis de Michel-Ange (1475-1564), le film « Sotvoreniye Adama » (« La Côte d’Adam », 1993) de Yuri Pavlov, le roman Le Jardin d’acclimatation (1980) d’Yves Navarre, le film « De la chair pour Frankenstein » (1994) d’Antonio Margheriti et Paul Morrissey, le vidéo-clip de la chanson « Tristana » de Mylène Farmer (avec la pomme empoisonnée), le film « Je t’aime toi » (2004) d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky, le film « La meilleure façon de marcher » (1976) de Claude Miller, le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, le film « Paradis perdu » (1939) d’Abel Gance, le film « Eden’s Curve » (2003) d’Anne Misawa, le roman Del Huerto Del Pecado (1909) d’Antonio de Hoyos, le film « Les Filles du botaniste » (2006) de Daï Sijie (avec le meurtre du père dans la serre par le couple lesbien), le roman The Rubyfruit Jungle (1973) de Rita Mae Brown, le one-man-show Le Jardin des dindes (2008) de Jean-Philippe Set (avec Blanche-Neige se faisant poursuivre par le chasseur Rocco), la chanson « Miss Paramount » du groupe Indochine (avec la mention du film « Le Jardin des Tortures »), le film « Naissance des pieuvres » (2007) de Céline Sciamma (avec le croquage de pomme filmé comme un péché acté), la pièce La Journée d’une rêveuse (1968) de Copi (avec la métaphore du Jardin d’Eden inversé, avec une Ève violée : « Mon parc est semé de gens morts ! »), le film « Adam And Eve » (2006) de Stian Kristiansen, le roman Vincent Garbo (2010) de Quentin Lamotta, le roman La Pérdida Del Reino (1972) de José Bianco, la chanson « J’veux pas être jeune » de Nicolas Bacchus (où les amants homosexuels se rendent « jusqu’au jardin désert qu’ils n’avaient pas cherché »), le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears, le one-woman-show Karine Dubernet vous éclate (2011) de Karine Dubernet (avec la comédienne arrivant sur scène en Éve), le vidéo-clip de la chanson « Only Gay In The World » de Ryan James Yezak, le film « Gan » (« Un Jardin », 2003) de Ruthie Shatz Adi Barash (racontant l’histoire de deux jeunes prostitués de Tel Aviv), le film « Notre Paradis » (2011) de Gaël Morel, le film « Teens Like Phil » (2011) de David Rosler et Dominic Haxton, le film « Tchernobyl » (2009) de Pascal Alex-Vincent (filmant le dépucelage de deux adolescents dans une forêt), la pièce Folles Noces (2012) de Catherine Delourtet et Jean-Paul Delvor (avec la mention de la pomme et du serpent), la chanson « Jardin d’Éden » de Zaho, etc.

 
FOCALISATION Adam & Steeve
 

« En réalité, je préfère les représentations du péché originel. Cette faute que nous continuons de payer, elle m’a toujours intéressé. Et le cri silencieux d’Ève chassée du paradis, il m’apparaît tout à coup que cela pourrait être le mien. » (Luca, l’un des héros homosexuels du roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, p. 43) ; « Sur un arbre, je veux croquer la pomme. » (Philippe par rapport à Bernard, dans la comédie musicale La Belle au bois de Chicago (2012) de Géraldine Brandao et Romaric Poirier) ; « J’ai enfin trouvé mon alter ego. Car c’est moi qui fais l’homme. Accroche-toi comme tu peux à ma ceinture. Viens croquer dans la pomme. » (cf. la chanson « C’est moi qui fais l’homme » de Ginie Line) ; « Serpent, je ne mange pas de ce pain-là. » (OSS 117 s’adressant à son amant diabolique lui tendant sa pomme d’amour, dans le film « OSS 117 : Rio ne répond plus » (2009) de Michel Hazanavicius) ; « Ses yeux étaient immenses, ses cheveux tombaient en désordre sur ses épaules. La peau de son ventre faisait des plis, rentrait en elle-même. Je me suis rendu compte que nous étions nues. » (Ronit et Esti, les deux amantes du roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 243) ; « Nous étions seuls au monde. La forêt nous avait éloignés de tout et, plus ou moins, libérés de tout. Nous étions nus. Nous avions enlevé nos vêtements rapidement. » (Khalid et son amant Omar, dans la pièce Le Jour du roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 137) ; « Melocotón et boules d’or, deux gosses dans un jardin. » (cf. la chanson « Melocotón » de Colette Magny) ; « Après l’avoir laissée dans le bâtiment Pouchkine, je sentis mon cœur déborder d’un savoir que je ne sus pas identifier sur-le-champ. J’avais tant de fois imaginé ce qu’avait dû ressentir Newton quand la pomme lui était tombée sur la tête, lui révélant brusquement les lois de l’attraction universelle. […]J’aurais aimé qu’il y ait eu un objet tout simple comme une pomme, quelque chose de palpable que je pourrais observer de près et tenir en main, humer et mordre. » (Anamika, l’héroïne lesbienne parlant de son émoi homosexuel, dans le roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, p. 11) ; « Stephen [l’héroïne lesbienne] avait erré jusqu’à un vieux hangar où l’on rangeait les outils de jardinage et y vit Collins et le valet de pied qui semblaient se parler avec véhémence, avec tant de véhémence qu’ils ne l’entendirent point. Puis une véritable catastrophe survint, car Henry prit rudement Collins par les poignets, l’attira à lui, puis, la maintenant toujours rudement, l’embrassa à pleines lèvres. Stephen se sentit soudain la tête chaude et comme si elle était prise de vertige, puis une aveugle et incompréhensible rage l’envahit, elle voulut crier, mais la voix lui manqua complètement et elle ne put que bredouiller. Une seconde après, elle saisissait un pot de fleurs cassé et le lançait avec force dans la direction d’Henry. Il l’atteignit en plein figure, lui ouvrant la joue d’où le sang se mit à dégoutter lentement. Il était étourdi, essayant doucement la blessure, tandis que Collins regardait fixement Stephen sans parler. Aucun d’eux ne prononça une parole ; ils se sentaient trop coupables. Ils étaient aussi très étonnés. […]Stephen s’enfuit sauvagement, plus loin, toujours plus loin, n’importe comment, n’importe où, pourvu qu’elle cessât de les voir. Elle sanglota et courut en se couvrant les yeux, déchirant ses vêtements aux arbustes, déchirant ses bas et ses jambes quand elle s’accrochait aux branches qui l’arrêtaient. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), pp. 38-39) ; « Le jardin, au lever du soleil, lui sembla tout à fait étranger, comme un visage bien connu qui se serait soudain transfiguré. […]Elle prit soin d’avancer doucement, car elle se sentait un peu fautive. » (idem, p. 135) ; « La femme est l’avenir des pommes. » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012) ; « Dans toute femme, il y a une Ève malveillante qui sommeille. » (Rodin, l’un des héros homosexuels dans la série Joséphine Ange-gardien (1999) de Nicolas Cuche, épisode 8 « Une Famille pour Noël ») ; « Hedwig, tu me donnes un bout de pomme ? » (Tommy s’adressant au héros transgenre M to F Hedwig, dans le film « Hedwig And The Angry Inch » (2001) de John Cameron Mitchell) ; « Moi je suis comme le vent, j’emporte mon secret dans un jardin d’Éden, m’allonger dedans. » (cf. la chanson « L’Alizé » d’Alizée) ; « Mathilde et moi, c’est un drôle de paradis, un jardin luxuriant. » (la narratrice lesbienne dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, p. 29) ; « Nunca me ha llamado la atención lo de Eva y la manzana, porque de Eva soy hermana y tentarse es cosa humana. » (cf. les paroles d’une chanson de Tita Merello, citée dans la pièce L’Ombre de Venceslao (1978) de Copi) ; « Nous [les Rats] lui [le serpent] exprimâmes notre admiration sincère et la Reine des Rats l’invita à passer les vacances de Pâques enroulé dans notre arbre si jamais à Pâques, lui, l’arbre et nous-mêmes nous nous trouvions encore en vie et en liberté. […]Le serpent répondit qu’il était hermaphrodite et qu’il se fécondait tout seul. » (Gouri, le narrateur bisexuel du roman La Cité des rats (1979) de Copi, pp. 76-77) ; « Tant pis pour la Bible. Je veux mettre ma dent dans la pomme d’Adam. J’aime les filles et les garçons, j’aime tout ce qui est bon. Je suis bi-zarrement faite. » (Anne Cadilhac dans son concert Tirez sur la pianiste, 2011) ; « Je cherche un Adam pour croquer ma pomme. » (cf. la chanson « Avis au sexe fort » de Zazie) ; « Prions que l’enfer ne nous sépare pas. » (Valmont s’adressant à Merteuil, dans la pièce Quartett (1980) d’Heiner Müller, mise en scène en 2015 par Mathieu Garling) ; « Mon prof d’éducation physique… Moi, il m’a tout appris. C’est lui qui disait : ‘Un hétéro, c’est un homo qui s’ignore tant qu’il n’a pas goûté au fruit défendu.’. » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; « Comme disait ma grand-mère, à force de croquer la vie à pleine dent, on en perd son dentier. » (idem) ; etc.

 

Le « péché » dans le jardin, dont il est beaucoup question au sein de la fantasmagorie homosexuelle, en plus d’être un esthétisme décadent « innocent et folklorique », peut figurer le viol entre la femme et l’homme, ou bien l’acte homo, ou bien la perte de l’innocence, ou tout simplement la découverte de la différence des sexes. Par exemple, dans la pièce Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens (2007) de Gérald Garutti, Ève est présentée comme l’origine d’un monde pécheur. Dans la pièce musicale Érik Satie… Qui aime bien Satie bien (2009) de Brigitte Bladou, Érik Satie dit qu’il est un mélange d’Adam et d’Ève, « des paresseux sans doute ». Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, la pulpeuse Eva, la belle tentatrice, essaie de faire succomber le jeune prêtre Adam, secrètement homosexuel. Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Sissi, une cantatrice fantomatique transgenre des montagnes, raconte que, lorsqu’un de ses fans lui a lancé une pomme en plein concert, elle « en a perdu sa couronne » au moment où elle a croqué le fruit. Dans le film « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari, après leur coït adultère, les deux amants (dont Paul) croquent la pomme ensemble. Dans la comédie musicale Adam et Steeve jouée à l’intérieur du film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso, le couple homo formé par Adam et par Steeve remplace et répare le péché originel opéré par « les hétéros homophobes » Adam et Ève, le couple femme-homme défectueux : ce nouvel amour sans différence des sexes est qualifié de « Vérité du Ciel » même s’il n’est pas écrit dans la Bible. Le film « Mommy » (2014) de Xavier Dolan nous montre en premières images la mère de Steve, le héros homosexuel, cueillant une pomme sur un arbre. Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, l’amour entre Frankie et Todd est mis sous le signe du péché originel dès le départ. Dans la cuisine, ils se parlent de « la cire sur les pommes pour les faire briller ». Puis ils rejouent la scène du jardin d’Éden dans un parc de la San Francisco, où Frankie, près de l’arbre où ils s’abritent, menace son amant de l’attraper dans sa toile d’araignée, telle une Ève maléfique. Dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes, Thérèse, l’héroïne lesbienne, croque une pomme rouge dans la voiture que conduit sa compagne Carol.
 

Quand le personnage homosexuel a l’humilité de reconnaître son désir homosexuel comme un « signe de péché », et l’acte homosexuel comme un péché, c’est-à-dire une action qui rejette la différence des sexes et Dieu, il parle ouvertement de « péché »… et ce n’est pas si rare, surtout chez les héros homosexuels croyants qui ont un tant soit peu la crainte de Dieu : « Longtemps, il [Adrien, le héros homosexuel] avait cru ce penchant, ce mauvais penchant, surmontable. Dieu serait plus fort que son désir. Il saurait même dissiper, extirper jusqu’à sa racine ce mal profond. Il avait bien fini par comprendre, de guerre lasse, que la blessure resterait longtemps. » (Hugues Pouyé, Par d’autres chemins (2009), p. 25) ; « Vous comprendrez que de tels péchés parfois sont difficiles à avouer. » (cf. la chanson « Partenaire particulier » du groupe Partenaire particulier) ; « Je m’étais peu intéressé au péché, à ce que ça signifie vraiment. Cette fois, c’est sûr, j’en ai fait un. Les gens qui croient ont raison de dire qu’il faut toujours expier. » (Bjorn, l’un des héros homosexuels du roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 154) ; « La vie que je mène n’est pas parfaite, mais c’est ma vie, je l’ai façonnée d’après mes rêves en veillant à la tenir à distance du terrible glaive de Dieu. » (Michael, le narrateur homosexuel du roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, p. 90) ; « Une brebis égarée, j’en suis une depuis un petit bout de temps… » (Luc, l’un des héros homosexuels du roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, p. 234) ; « Tous mes idéaux, des mots abîmés. […]Pourtant, je voudrais retrouver l’innocence. » (cf. la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer) ; « De ses flèches j’étais la cible. Je n’ai pas eu le choix. Renoncer me met au supplice. Mes prières montent vers toi. Dieu, pourquoi me sentir si coupable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? Dieu du Coran ou de la Bible. Donne-moi la force et la foi, enfin. C’était un amour impossible… Pourquoi me sentir coupable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? Pourquoi me sentir misérable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? » (cf. la chanson « L’Orage » d’Étienne Daho) ; « C’est une espèce de malédiction. Tu penses qu’on va aller en enfers ? » (Bryan s’adressant à son amant Tom, dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis) ; « There’s no place in Heaven for someone like me. » (c.f. la chanson « No Place in Heaven » de Mika) ; etc.

 

Par exemple, dans le one-man-show Elle est pas belle ma vie ? (2012), Samuel Laroque raconte qu’il taille une pipe à un prêtre exorciste qu’il compare à Shrek. Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, Howard, découvrant son homosexualité, file en panique au confessionnal. Dans le roman N’oubliez pas de vivre (2004) de Thibaut de Saint Pol, le narrateur homosexuel croit en son « existence pécheresse » (p. 137) Dans le film « Rafiki » (2018) de Wanuri Kahiu, Kena, l’héroïne lesbienne, accepte de recevoir des prières de délivrance et d’exorcisme de sa communauté catholique kenyane qui la croit possédée parce qu’ils ont découvert son homosexualité : « Tu oublies les démons qui possèdent cette enfant ! » dit Mercy, sa mère, à son mari John. Le pasteur de l’église où Kena se rend tous les dimanches fait répéter à tous les fidèles qui imposent leurs mains sur la pauvre jeune femme : « Nous brisons ses liens avec les démons ! ».

 

Dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio, Lola trompe sa copine Vera d’un commun accord avec Nina. Se profile la culpabilité : « Vera, est-ce que tu considères que ma liaison avec Nina est une faute ? » s’interroge Lola. Vera acquiesce : « Peut-être même un péché. » Lola conclut : « Cette femme est diabolique. Elle a trouvé le moyen de me déculpabiliser. »
 

Mais chez le héros homo, la reconnaissance du péché est souvent bien trop pleurnicharde et théâtrale pour être repentante et vraiment coupable. C’est un petit caprice sincère, une mise en scène pour pleurer le péché sans agir concrètement contre. « Je me suis baladé dans la rue des péchés. Tout ce que je peux te dire, c’est qu’ils peuvent se les garder, leurs pèches ! » (Arthur, le personnage homosexuel à Atlanta, dans le roman Harlem Quartet (1978) de James Baldwin, mis en scène par Élise Vigier en 2018) Par exemple, dans la série Ainsi soient-ils (2014) de David Elkaïm (dans l’épisode 3 de la saison 1), Emmanuel, l’un des séminaristes, noir et homosexuel, confesse auprès d’un prêtre sa première expérience homosexuelle passée avec un homme anonyme à Carthage (« Les détails s’imposent à moi de façon démoniaque. Pourquoi je me sens si coupable ? »)… pour mieux se justifier de succomber ensuite au péché dans les bras d’un autre séminariste, Guillaume. Dans le film « Lilting » (« La Délicatesse », 2014) de Hong Khaou, Richard reproche à Junn, la mère de Kai son amant décédé dans un accident, d’avoir culpabilisé ce dernier au point de le maintenir dans le secret de son homosexualité et de l’avoir conduit à la mort. Celle-ci semble se défiler… mais en réalité, elle souligne une culpabilité justifiée et inconsciente chez les eux amants homos : « C’est votre culpabilité. Je ne vais pas jouer au psy. […] Cette culpabilité, il l’a toujours ressentie. Je n’ai pas étouffé Kai. »

 

En général, c’est par la voie du sarcasme et du ricanement que le personnage homosexuel dramatise/croit dramatiser ses actes homosexuels en utilisant des termes religieux anachroniques/cinématographiques diabolisants qui ne correspondent pas (ou qui correspondent trop !) à ce qu’il a fait ou à ce que son entourage en aurait dit. Le héros homosexuel est soit affolé par l’existence du péché (le péché étant entendu comme la rupture avec Dieu ou l’absence de Dieu), soit excité (même sexuellement) par le péché (et l’interdit/l’orgueil qu’il génère) : « Je suis le roi des péchés. » (sa Majesté Ignace dans la pièce Iwona, Księżniczka Burgunda, Yvonne, Princesse de Bourgogne (1938) de Witold Gombrowicz) ; « Si vous aimez le show, vous brûlerez en enfer avec nous ! » (les héros homosexuels de la comédie musicale Adam et Steeve dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Tu ne m’emmèneras pas sur la voie du péché ! » (Nathalie face à Tatiana avec qui elle rêve de faire l’amour, dans le one-woman-show Wonderfolle Show (2012) de Nathalie Rhéa) ; « I’m a sinner. I like it that way. » (cf. la chanson « I’m A Sinner » de Madonna) ; « Pietro veut devenir carmélite pour expier mes péchés. Mais je n’ai pas de péchés ! Bien sûr j’ai des péchés, des très grands péchés, lui-même n’est-il pas un de mes péchés ? » (le narrateur homosexuel parlant de son amant Pietro, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 146) ; « Et voici la star des péchés, Ada la violente ! » (Cherry s’adressant à son amante Ada dans la pièce La Star des oublis (2009) d’Ivane Daoudi) ; etc.

 

Avant même d’avoir pris le temps de laisser parler la Miséricorde, le héros homosexuel décrète à la place de Dieu qu’il ira en enfer. Par exemple, dans le téléfilm « Prayers For Bobby » (« Seul contre tous », 2009) de Russell Mulcahy, Bobby, le héros homosexuel, joue sa drama queen écartelée, pour mieux se justifier d’une part de pratiquer son homosexualité, et d’autre part de se suicider : malgré ce qu’il prétend (« Je ne veux pas choisir le péché. »), en s’étiquetant « homosexuel » et en s’engageant dans une pratique homosexuelle, il veut absolument être pécheur, et ce, malgré les tentatives de sa mère pour lui apprendre la Miséricorde de Dieu (« Je crois qu’Il aime le pécheur, pas le péché. » lui dit-elle) : « Je ne voulais pas aller en enfer mais j’irai quand même. […]Tu as raison maman, je suis condamné à brûler en enfer. Je suis damné. Je voudrais ramper sous une pierre et dormir pour toujours. […]Je sens Dieu qui me regarde les yeux remplis de pitié. Il ne peut pas m’aider car j’ai préféré le péché à la vertu. » Dans le spectacle musical Luca, l’Évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès, le héros homosexuel se filme entouré de flammes dans un monastère, et passe son temps à soutenir qu’il est maudit : « Nous, les monstres du Créateur. » Même la bande-annonce du concert indique que « Luca est condamné à mort à cause de son homosexualité ». Le comédien sur scène se met à pasticher des phrases que les « homophobes catholiques » ou que Dieu auraient prononcées, et qu’il reprend à son compte : « Le Sida est la punition divine sur les homos et les drogués. » Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, Michael est le prototype du catho homo sans cesse culpabilisé par sa foi (… en réalité par sa propre pratique homosexuelle en discordance avec sa foi) : « Je vais mourir !!! »
 

 

Quand le héros parle de la découverte de son homosexualité, le spectateur ne sait pas s’il cite les gens de son entourage, ou les pensées qu’il leur prête, ou les propos qu’il aurait entendus, ou même s’il dit ce qu’il est le seul à penser (tout semble mélangé) : « La Bible dit que nous sommes des pécheurs. » (l’un des amants de Paul, dans le film « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari) ; « Parfois, je pense que Dieu me punit. À cause de ce qu’on a fait ensemble. » (Esti, l’héroïne lesbienne juive, s’adressant à sa compagne Ronit, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 144) ; « Saïd est mort, tué par l’orage, un signe peut-être que Dieu n’approuve pas ce que les garçons s’apprêtaient à faire ce soir. » (Saïd et Ahmed, le couple homo maudit, dans le roman Accointances, connaissances, et mouvances (2010) de Denis-Martin Chabot, p. 48) ; « Quel péché ai-je commis pour être ainsi châtié de mon vivant ? » (le Jésuite dans la pièce La Pyramide ! (1975) de Copi) ; « Les rares condamnations à mort concernent le péché de tribadisme, c’est-à-dire d’homosexualité. » (la comédienne transgenre F to M dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems) ; « Qu’est-ce que tu préfèrerais ? Qu’on se torture pour les péchés de nos ancêtres ? Mon grand-père était un nazi. Tu veux que je me suicide ? » (Petra, l’héroïne allemande s’adressant à son amante Jane, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 37) ; « Nos péchés sont têtus. Nos repentirs sont lâches. Nous nous faisons payer grassement nos aveux. Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux, croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches. » (c.f. la chanson « Au lecteur » de Mylène Farmer, reprenant Charles Baudelaire) ; etc.

 

La croyance (et même la adhésion à la croyance) au désir homosexuel en tant qu’« identité pécheresse » (je ne parle pas ici des actes homosexuels, qui eux sont clairement peccamineux : le désir homosexuel, n’ayant pas visiblement fait l’objet d’un choix, peut tout au plus être considéré comme un « signe de péché », mais jamais comme un « péché » : le péché présuppose la liberté et la décision de se couper sciemment de Dieu) peut traduire chez le héros homosexuel une homophobie extérieure intériorisée : « Polly dit que le sida n’est pas une fatalité, que les pédés doivent arrêter de penser qu’ils le méritent. ‘C’est faux, c’est même archi-faux, affirme-t-elle, c’est comme quand vous pensez que vous méritez de vous faire agresser. Faut arrêter avec tout ça, on ne mérite pas le sida ni de se faire agresser quand on est pédé. Par contre, on peut se demander si cette propension des pédés à croire ça ne cache pas plutôt une forme d’auto-homophobie intériorisée. ’ Elle a tort. » (Mike, le narrateur homosexuel parlant de son amie lesbienne Polly, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 72-73)

 

Son entourage amical homosexuel ou gay friendly ou homophobe conforte le héros homosexuel dans ce « choix » qu’il aurait fait d’être condamné au péché : « Brûlez en enfer. » (cf. un écriteau d’une passante face au défilé de la première Gay Pride londonienne de 1984, dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus) ; « Elle va aller en enfer ! » (une des paroissiennes protestantes évangéliques parlant d’Elena après avoir découvert l’homosexualité de cette dernière, dans le film « Elena » (2010) de Nicole Conn) ; « C’est péché. » (Kevin dans la pièce Ma Double Vie (2009) de Stéphane Mitchell) ; « Le seul intérêt de l’homosexualité, c’est le péché. » (le père de Claire, l’héroïne lesbienne de la pièce Le Mariage (2014) de Jean-Luc Jeener) ; « C’est un péché. Dieu ne te le pardonnera pas. » (Rana s’adressant à Adineh l’héroïne transsexuelle F to M, dans le film « Facing Mirrors : Aynehaye Rooberoo », « Une Femme iranienne » (2014) de Negar Azarbayjani) ; « Ils ont envoyé Evaristo au Yucatan. Comme ça, il pourra expier tous ses péchés. » (Amada concernant le héros gay, dans le film « Le Bal des 41 », « El Baile de los 41 » (2020) de David Pablos) ; etc.
 
 

b) Le péché est nulle part puisque j’aime et je suis homo !

Contrebalancement impressionnant. Cette focalisation homosexuelle sur le péché est souvent suivie immédiatement après d’une censure : parce que j’ai culpabilisé, c’est vous qui m’avez jugé ! et pour rien, en plus ! Régulièrement, le héros homosexuel se focalise sur le péché, mais par mauvaise foi, va soutenir que cette focalisation vient des autres et pas de lui : « Tu es la personne la plus immorale que je connaisse ! » (Larry s’adressant à son pote gay Emory qui lui renvoie son infidélité, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Ils ont commis le péché original. Ils n’auront pas d’héritiers. Mais quel amour est idéal ? Qui est normal ? » (cf. la chanson « Adam et Yves » de Zazie) ; « Ça ne peut pas être péché que d’aimer. Jamais je ne goûterai le regret, plutôt se haïr, se rendre, mourir à la guerre sainte. Ça suffit ! Et alors ? La foi sèchera mes larmes. Sûrement que le soleil s’éteint et que Lucifer me guide, et je serai une ombre comme la Tour de Babel… et ton amour, Père rappelle-toi !! L’Église promulgue que je suis une pédale de merde, si c’est ça mon péché, je suis coupable, comme une infâme Inquisition. Mais je n’ai tué personne. Je me sens coupable d’être seulement moi. Je ne douterai, je ne douterai pas de moi. Non. Je ne douterai pas de moi. » (cf. la chanson « Madre Amadísima » de Haze et Gala Evora) ; « J’ai pris ce que tu m’as donné, de mon plein gré. Ce n’est pas de ta faute, Thérèse. » (Carol, l’héroïne lesbienne consolant son amante Thérèse en pleurs, culpabilisant d’avoir couché avec elle, dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes) ; etc.

 

À la croyance que le péché serait partout, le héros homosexuel va opposer celle que le péché n’est nulle part à partir du moment où il y a la sincérité que le péché n’existe pas, où il est considéré que les personnes « aiment » et n’ont « pas choisi » leur désir homosexuel : cf. le roman Ser Gay No Es Un Pecado (1994) d’Óscar Hermes Villordo, le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, etc. « Allons bâtir ce nouveau monde où l’on ignore le péché. » (cf. la chanson « Au commencement » d’Étienne Daho) ; « La ‘faute’ n’existe pas. » (Aaron, l’un des héros homosexuels du film « Tu n’aimeras point » (2009) de Haim Tabakman) ; « Nous ne cherchons pas de faute. » (le fiancé de Gatal s’adressant à son amant, dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud) ; « Ben, tu penses que tout ça est de ma faute ? » (Ben s’adressant à son amant George, dans le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs) ; « De là à dire que nous les homos nous vivons dans le péché… Nous suivons bien mieux les Dix Commandements : Aimez-vous les uns les autres, Tu ne convoiteras pas la femme de ton voisin, etc. » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc. Par exemple, dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, Johnny, le héros homosexuel, range arbitrairement son homosexualité du côté de l’évidence, de la censure, du chantage aux sentiments, et à l’abri de la culpabilité : « Je ne peux pas changer ce que je suis. Est-ce que c’est vraiment de ma faute ? » dira-t-il en pleurs au révérend Ritchie. Plus tard, lors d’une prêche caricaturalement homophobe de Lena, la femme du pasteur Ralph (secrètement homosexuel), dans un temple protestant, il s’insurgera encore plus radicalement devant toute l’assemblée en rejetant sur la prédicatrice sa propre culpabilité (« Pourquoi cette question [de l’homosexualité] vous intéresse tant ? ») et en lui tenant le discours de l’anti-jugement soi-disant « déculpabilisateur » : « Que celui qui n’a pas péché jette la première pierre. »

 

La procréation (et donc l’enfant) est parfois invoquée par le personnage ou le « couple » homosexuel fictionnel pour cacher la réalité du péché de la pratique homosexuelle. Au fond, le péché d’Adam (homosexualisé/bisexualisé) ou d’Ève (féministe/lesbianisée), c’est de s’auto-créer, c’est de chercher à avoir un enfant et à l’élever tout seul, sans former un couple avec quelqu’un d’autre, sans amour, sans différence des sexes : « Elle a fait un bébé toute seule, elle a fait un bébé toute seule, c’était dans ces années un peu folles où les papas n’étaient plus à la mode, hou hou, elle a fait un bébé toute seule. » (cf. la chanson « Elle a fait un bébé toute seule » de Jean-Jacques Goldman) ; « Je deviens mère mais je reste une femme libre. » (Isabelle, la postulante au titre de mère porteuse, auprès du héros homosexuel Pierre, qui lui répond « Moi aussi. », dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade) ; « Oh femme unique, péché, désir, pour un serpent de Bible, a brisé son Empire. » (cf. la chanson « Ève lève-toi » de Julie Piétri) C’est d’incarner l’Amour à soi seul, sans la différence des sexes.
 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Le péché est partout et je suis un damné du Jardin d’Éden :

Quand l’individu homosexuel a l’humilité de reconnaître son désir homosexuel comme un « signe de péché », et l’acte homosexuel comme un péché, c’est-à-dire une action qui rejette la différence des sexes et Dieu, il parle ouvertement de « péché »… et ce n’est pas si rare, surtout chez les personnes homosexuelles croyantes : « Clermont-Ferrand, ce 20 octobre 1968. J’accuse aujourd’hui ma mère d’avoir fait de moi le monstre que je suis et de n’avoir pas su me retenir au bord de mon premier péché. Tout enfant, elle me considère comme une petite fille et me préfère à ma sœur, morte aujourd’hui. De mon père, j’ai le souvenir lointain d’un officier pâle, doux, presque timide, perpétuellement en butte aux sarcasmes de son épouse. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 75) ; « J’ai désobéi à la totalité des Dix Commandements. » (Paul, racontant sa première visite au confessionnal après des années de débauche homosexuelle, dans le documentaire « Desire Of The Everlasting Hills » (2014) de Paul Check) ; « Je pense que les homosexuels éprouvent, peut-être inconsciemment, un tel poids d’opprobre sur leur être, au simple énoncé de ce mot, alors qu’il ne devrait s’agir que d’une lucidité sur leur vie, que la notion de péché est brouillée pour eux comme la surface d’une mare frôlée par les ailes d’un martin-pêcheur. » (Henry Creyx, Propos décousus, propos à coudre et propos à découdre d’un chrétien homosexuel (2005), p. 69) ; « La confession est dévalorisée par une sorte de contre-tabou, et très particulièrement chez beaucoup, beaucoup trop d’homosexuels même chrétiens, qui gèrent mal l’idée de péché qui lui est nécessairement associée. » (Idem (2005), pp. 71-72) ; « Ça n’a pas été facile de le dire. Surtout avec tout ce nuage noir de sida, de péché, de tout ce qui était interdit. » (Olivier, agriculteur homosexuel, dans le documentaire « Coming In » (2015) de Marlies Demeulandre) ; « Le seul problème que ça m’a posé était religieux. J’ai été chrétien. J’avais le sens du péché. Et donc ça m’a posé problème à cet égard. Jamais à l’égard de la société qui ne me paraît pas mériter tant de révérence. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; etc. Par exemple, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Inside » (2014) de Maxime Donzel, Rich Juzwiak, homosexuel, face à ses proches à qui il cachait ses actes homos, développe l’étrange sensation de « se sentir étrangement coupable alors qu’on n’a rien fait de mal ».

 

Très jeunes, les personnes homosexuelles, par superstition, peur ou haine d’elles-mêmes, ou sous l’influence de films d’épouvante qui les ont traumatisées, se sont identifiées au mal (cinématographique) qu’elles ont vu ou imaginé en comprenant la Vérité biblique de manière très approximative : « J’ai peur. La même peur qu’enfant, lorsque je pénétrais dans des églises, et que je me sentais pointé du doigt par toutes les statues, accusé de choses que j’étais incapable d’avouer, n’ayant aucune éducation catholique, ni baptême, ni catéchisme, pourtant ne doutant pas que mes fautes étaient terribles. » (Christophe Honoré, Le Livre pour enfants (2005), p. 107)

 
FOCALISATION Adam et eve
 

Certaines se sont même crispées sur la scène primitive du péché dit « originel » de la Genèse, autrement dit, ont considéré leur origine sexuée, existentielle, comme un péché : cf. le documentaire « Forbidden Fruit » (2000) de Sue Maluwa Bruce, Beate Kunath et Yvonne Zuckmantel. « C’est par un chemin bien long que je choisis de rejoindre la vie primitive. Il me faut d’abord la condamnation de ma race. » (Jean Genet, Journal du voleur (1949), p. 33) Certains auteurs gays se sont beaucoup intéressés au péché des origines d’Adam et Ève : Walt Whitman, Oscar Wilde, Pier Paolo Pasolini, Julien Green, John Cheever, Francis Bacon, etc. « L’attraction qu’a pour moi le sens du péché originel, c’est qu’il s’agit, je crois, d’une expérience universelle. » (John Cheever, cité dans le site La Isla de la Ternura, consulté en janvier 2003) Dans son article « Cuba, El Sexo Y El Puente De Plata » (1986) compris dans son essai Prosa Plebeya (1997), le poète homosexuel argentin Néstor Perlongher parle de la « nostalgie ironique d’une perte » (p. 120). Le dessinateur homosexuel Ralf König, qui parle beaucoup du récit de la Genèse de manière parodique, a même un serpent chez lui ! Or, comme l’explique très bien Jean-Pierre Winter, cette obsession homosexuelle ou transgenre pour l’origine de l’existence humaine et finalement pour être sa propre origine, cache un péché d’orgueil, que le psychiatre associe à un mouvement paranoïaque destructeur : « Les personnes préoccupées de façon trop exclusive par la question de leur origine, ou des origines en général, ont tendance à se sentir exclues et persécutées. » (Jean-Pierre Winter, Homoparenté (2010), p. 94)

 

Dans les cas où l’individu homosexuel parle du péché en tant que découverte de son homosexualité ou en tant qu’expérience sexuelle concrète, l’auditeur ne sait pas s’il cite (ironiquement) les gens de son entourage, ou les pensées qu’il leur prête, ou les propos qu’il aurait entendus, ou même s’il dit ce qu’il est le seul à penser (tout semble mélangé) : « J’étais dans le péché. » (Pierre, homosexuel, né dans une famille très catholique, témoignant dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; « Ma famille est très catho ; nous allions à l’église tous les dimanches. Au début, quand mes parents ont été au courant de mon homosexualité, ils ont flippé. Ils ont voulu me faire exorciser ! Ils ne comprenaient pas. C’était le mal, le diable. » (Cécile, témoin lesbienne dans la revue Têtu, n°69, juillet-août 2002) ; « Je voyais toujours le péché. Mes parents étaient très croyants. Pour eux, l’homosexualité c’était condamné, Dieu rejetait et haïssait les gais. Un dieu d’amour y paraît. Mes parents voulaient toujours me changer. J’étais coupable, j’étais pas bon, si je ne voulais pas, si je ne pouvais changer. Ils me faisaient lire des livres de témoignages de gais qui avaient réussi à changer et s’étaient mariés. J’étais un gros monstre, un déchet de la société. Si la religion n’avait pas été là, j’aurais peut-être pas essayé de me suicider. C’était super-opprimant cette idée du péché, de l’anormalité, de la faute, avec tout le monde qui y croit autour. » (un témoin homosexuel dans l’essai Mort ou Fif (2001) de Michel Dorais, p. 75) ; « Son mal-être rebondissait instinctivement parce que, dans son for intérieur, il avait commis l’irréparable en s’abandonnant aux bras de son copain Dylan. […]Après les grands secrets de mes six, dix et treize ans, à ma vie s’ajoutait maintenant le ‘péché’ qui n’aurait jamais dû être. » (Ednar, le narrateur homosexuel parlant des viols pédophiles qu’il a subis, et les mélangeant avec la découverte de son homosexualité puis la pratique homosexuelle, dans le roman autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, pp. 19-20) ; « Dans le train, il y a quelques jours, une religieuse aux yeux brillants, protubérants, fixait le monde. C’était le visage de l’Inquisition. » (Annie Ernaux, Je ne suis pas sortie de ma nuit (1997), p. 44) ; « Tout se passe comme si, par ses déambulations quasi somnambuliques, le pédéraste cherchait à troquer sa solitude contre la participation à une malédiction collective. » (Roger Stéphane, Parce que c’était lui (2005), pp. 77-78) ; « Chaque fois que j’ai un orgasme, je ressens un très fort sentiment de culpabilité après coup. C’est normal, ils l’ont bien dit au catéchisme : se masturber, ce n’est pas bien. Il faut se retenir jusqu’au mariage, sinon on va en enfer. » (Alexandre Delmar, Prélude à une vie heureuse (2004), p. 23) ; « Un des procédés les plus utilisés par les médias pour discréditer le combat des défenseurs de l’amour vrai et de la vie est de leur attribuer cette pensée plus ou moins secrète à l’égard des sidéens : ‘C’est bien fait, Dieu les a punis ! ’ Propos malveillants qui n’ont jamais été tenus que dans l’imagination désordonnée de journalistes en mal de calomnie ou, peut-être, par quelque chrétien égaré, en contradiction radicale avec les exigences de la charité. » (Thomas Montfort, Sida, le vaccin de la vérité (1995), p. 15) ; « S’ils savaient que je suis homo, j’crois qu’ils m’enverraient bouler, parce que l’homosexualité à la campagne, c’est considéré comme quelque chose de mal. » (Sacha, jeune Allemand homo, dans le documentaire « Homo et alors ?!? » (2015) de Peter Gehardt) ; « J’ai l’impression que je serai mort bien avant la diffusion de ce film. Je ne sais pas pourquoi je vous parle. J’ai l’impression d’un retour de ce vieux poison. Je le ressens comme une punition. Parce que je donne une mauvaise image de ces pauvres chrétiens. » (Thomas, homosexuel, dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) ; « J’ai peur d’être un mauvais sujet, peur de ne pas être un homme bon. Et cette peur est tellement intense que je sens bien qu’elle m’éloigne de Dieu. » (Alexander, en couple avec Sven un pasteur, idem) ; « Enfant, le réalisateur allemand Rosa Von Prauheim éprouvait une vive crainte de la damnation. » (la , idem) ; « C’était un péché d’avoir des pensées impudiques et bien sûr de se masturber. Je tenais le compte du nombre de fois où je me masturbais et je me sentais horriblement coupable. Plus j’essayais de réprimer mes pulsions, plus ça m’excitait. Tout ça était vraiment terrible. » (Rosa Von Prauheim, le réalisateur homosexuel, idem) ; etc.

 

Par exemple, dans son essai L’Homosexualité au cinéma (2007), Didier Roth-Bettoni fait lui-même l’association entre Sida et péché quand il parle du film « Mensonge » (1991) de François Margolin : « Mensonge’ fait sans hésiter porter le poids du péché (le VIH) sur les homosexuels. » (p. 594). Dans la biopic « Ma Vie avec Liberace » (2013) de Steven Soderbergh, le pianiste virtuose gay Liberace avoue à la fois qu’il a la Foi et qu’il a toujours été catholique, et en même temps qu’il finira en enfer : « J’étais damné d’une manière ou d’une autre… »

 

La croyance (et même l’adhésion à la croyance) au désir homosexuel en tant qu’« identité pécheresse » (je ne parle pas ici des actes homosexuels, qui eux sont clairement peccamineux : le désir homosexuel, n’ayant pas visiblement fait l’objet d’un choix, peut tout au plus être considéré comme un « signe de péché », mais jamais comme un « péché » : le péché présuppose la liberté et la décision de se couper sciemment de Dieu) peut traduire chez l’individu homosexuel une homophobie extérieure intériorisée. « Je lui répétais sans arrêt que l’homosexualité était quelque chose de dégoûtant, de ‘carrément dégueulasse’, qui pouvait mener à la damnation, à l’enfer ou à la maladie. » (Eddy Bellegueule parlant de son petit frère Rudy qu’il veut transformer en « hétérosexuel », dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 53) Par provocation et par instrumentalisation de ce qui est considéré comme une blague, une grande part de la communauté homosexuelle va clamer haut et fort son attachement pour les « péchés » et son étiquette de « foyer de pécheurs qui ne se repentiront jamais », juste pour se rendre intéressante et donner une consistance à « l’homophobie » qu’elle est la première à s’infliger.

 
Focalisation Péché
 

L’entourage amical homosexuel ou gay friendly ou homophobe conforte parfois l’individu homosexuel dans ce choix qu’il aurait fait d’être condamné au péché. Par exemple, lors de l’enterrement du jeune Matthew Shepard en 1998 dans le Wyoming, des militants de la Westboro Baptist Church, emmenés par leur pasteur protestant Fred Phelps, ont manifesté avec des pancartes « God Hates Fags » (« Dieu déteste les pédés ») ou « Matt In Hell » (« Matthew en enfer »). On peut également penser au fameux écriteau « Les Pédés au bûcher » de la Manifestation Anti-PaCS à Paris en 1998 – écriteau dont on ne sait pas trop d’où il est sorti tellement il ne correspondait pas à l’esprit paisible de la Manif (il est même fort possible qu’il ait été élaboré par une personne homosexuelle soucieuse de se faire passer pour une personne du cortège afin de discréditer l’événement).
 
 

b) Le péché est nulle part puisque j’aime et je suis homo !

Contrebalancement impressionnant. En général, la focalisation homosexuelle ou transgenre sur le péché est suivie immédiatement après d’une censure : parce que j’ai culpabilisé, c’est vous qui m’avez jugé ! et pour rien, en plus ! « Ralf König a choisi d’ignorer la culpabilité. » (la du documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) L’individu homosexuel se focalise régulièrement sur le péché, mais par mauvaise foi, va dire que cette focalisation vient des autres et pas de lui : « Rien qu’une soirée, j’ai embrassé deux mecs. Certes, c’était un jeu stupide et les deux mecs sont hétéros, mais ça m’a plu. Pendant cette soirée, j’ai oublié mes parents et leur point de vue satanique sur l’homosexualité. » (Simon, un témoin homosexuel cité dans la revue Têtu, juin 2002) ; « Aux yeux des chrétiens, je suis un sataniste. De mon point de vue, bien sûr, je ne le suis pas. Satan n’est pas au cœur de ma vision des choses. Ce n’est pas un dieu. Il incarne la rébellion. Si je pouvais être mon propre dieu, tout cela lui serait égal. » (Gaalh, la star norvégienne de death metal, ouvertement homosexuel, dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay », 2015) de Marco Giacopuzzi) ; etc.

 
FOCALISATION Trans
 

À la croyance que le péché serait partout, le sujet homosexuel va opposer celle que le péché n’est nulle part à partir du moment où il y a la sincérité que le péché n’existe pas, où il est considéré que les personnes « aiment » et n’ont « pas choisi » leur désir homosexuel. La procréation (et donc l’enfant) est parfois invoquée pour cacher la réalité du péché. Le péché d’Adam (homosexualisé/bisexualisé) ou d’Ève (féministe/lesbianisée), c’est de chercher à s’auto-créer, c’est de chercher à avoir un enfant et à l’élever tout seul, sans former un couple avec quelqu’un d’autre, sans amour, sans différence des sexes. C’est se définir comme un clone ou un « co-parent ». Et malheureusement, on y est !

 

Par exemple, dans le documentaire « Deux hommes et un couffin » de l’émission 13h15 le dimanche diffusé sur la chaîne France 2 le dimanche 26 juillet 2015 montre la mère porteuse (Veronica) au volant de sa voiture, en train de croquer une pomme tout en disant sa satisfaction d’offrir les deux bébés qu’elle porte à un « couple » homo. Incroyablement signifiant concernant le péché d’Ève. Tous les éléments y sont, et ce n’est même pas une mise en scène calculée. Satan se grille tout seul !
 

Pierre et Gilles

Pierre et Gilles

 

Aussi étonnant que celui puisse paraître à nos contemporains athées et laïcistes, le climat social relativiste fortement gay friendly en Occident, tendant à banaliser et à idéaliser les actes homosexuels pour leur retirer toute négativité et culpabilité, tout caractère peccamineux, renforce paradoxalement la force du péché homosexuel (et le sentiment de culpabilité qui va avec). Dans bien des cas, surtout quand il s’agit d’homosexualité, c’est le bannissement systématique de cette bonne gêne, de ces appels intérieurs de la conscience, qui est vraiment perturbant, et non la gêne en elle-même. Beaucoup de personnes homosexuelles se matraquent à elles-mêmes « C’est pas de ta faute ! C’est pas de ta faute ! » (cf. le film « Will Hunting » (1997) de Gus Van Sant), parce que précisément elles s’infligent souvent la culpabilité de ne plus se reconnaître coupables pour des actes qui parfois la mériteraient. L’encouragement à renier ses erreurs n’a jamais été une preuve d’amour de soi. La phobie de la culpabilité demeure le plus sûr moyen d’expérimenter de vieux réveils de conscience inexpliqués et coûteux. Ce n’est pas pour rien si, par exemple, la scène d’aveux déchirés de Marthe, l’héroïne lesbienne du film « La Rumeur » (1961) de William Wyler, émeut autant certaines personnes homosexuelles encore aujourd’hui : « La répugnance et le dégoût d’elle-même qu’elle éprouve me bouleverse quand je revois le film. Et je pleure en me demandant pourquoi. Pourquoi est-ce que cela me bouleverse ?!? Ce n’est qu’un vieux film idiot… Les gens ne réagissent pas comme ça aujourd’hui… Mais je ne crois pas que ce soit le cas. Les gens éprouvent toujours un sentiment de culpabilité que je partage, même si on prétend assumer sa condition en s’écriant : ‘Je suis heureuse, bien dans ma peau, bisexuelle, homo’, on a beau dire ‘Je suis homo et fière de l’être’, on se pose toujours la question de savoir ‘Comment est-ce que je suis devenu comme je suis ? ’. » (Susie Bright citée dans le documentaire « The Celluloïd Closet » (1981) de Rob Epstein et Jeffrey Friedman) L’embarras des sujets homosexuels face à leur désir ou à leur couple dit une part de la culpabilité justifiée qu’engendrent certains actes homosexuels. Loin d’être inquiétante, cette juste culpabilité est salutaire : elle dit que la conscience personnelle s’anime et se révolte à bon droit. Les personnes homosexuelles devraient s’accrocher à leurs gênes intérieures : elles sont de l’or en barre, des signes que leur conscience est encore en vie et qu’elle les appelle à se réveiller !
 

Vidéo-clip de la chanson "Such A Shame" de Talk Talk

Vidéo-clip de la chanson « Such A Shame » de Talk Talk


 
 

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Code n°90 – Homosexuel homophobe (sous-code : Frère homophobe)

Homosexuel homophobe

Homosexuel homophobe

 

 

 

Vous pouvez retrouver un autre éclairage détaillé sur l’homosexualité homophobe dans mon essai Homosexualité sociale (décembre 2008), dans L’homophobie en vérité (septembre 2013), ainsi que dans l’un des articles les plus importants de ce site, intitulé Le Phil de l’Araignée « On n’a rien compris à l’homophobie…« . Et pour les plus pressés ou paresseux, reste ma conférence lyonnaise sur l’homophobie, qui a été plébiscitée par tous les gens présents.

 
 

NOTICE EXPLICATIVE

 

Voici un scoop sur l’homosexualité qui, par les temps qui courent, fera certainement pousser des hauts cris du côté des militants homosexuels, mais que je vais essayer de vous expliquer ici : LE DÉSIR HOMOSEXUEL EST HOMOPHOBE. Je ne dis pas simplement qu’il provient de l’homophobie, ou qu’il attise l’homophobie. Je dis carrément qu’il EST, par nature, homophobe. Et que tant qu’on s’obstinera à ne pas percevoir cela, on se rendra compte que les attaques homophobes iront crescendo avec la soi-disant montée sociale de tolérance gay friendly.

 

Alors en guise de prélude pour vous expliquer dans quel obscurantisme et quel degré d’aveuglement sur l’homosexualité la communauté homosexuelle est tombée, je vais vous citer les 3 idées reçues qui reviennent le plus fréquemment lorsqu’on aborde le thème de l’homophobie homosexuelle, et sur lesquelles les personnes homosexuelles et bisexuelles butent, autant par mauvaise foi que par ignorance :

 

1 – « Le désir homosexuel est toujours positif, aimant, et en faveur de lui-même. »

2 – « Une fois qu’on a fait son coming out, qu’on s’assume en tant qu’homo, et qu’on est « bien casé« , on ne peut plus être homophobe. »

3 – « Il n’y a que les personnes hétéros, ou les personnes homos qui n’ont pas encore accepté leur homosexualité, qui peuvent être homophobes. » (il existe une version soft et plus hypocrite de la n°3, concoctée par ceux qui veulent bien reconnaître le phénomène de l’homophobie intériorisée mais pour mieux le minorer par rapport à la supposée homophobie hétérosexuelle : « Les hétéros homophobes sont quand même largement plus nombreux que les homos homophobes. »)

 

Ces trois idées reçues – qui sont pour moi d’une bêtise monumentale – ont la dent dure dans la communauté homosexuelle et dans notre société. En plus de ne pas se fonder sur la réalité, elles empêchent la grande majorité des personnes homosexuelles de comprendre vraiment les agressions homophobes, d’y remédier, et de reconnaître les fonctionnements violents et paradoxaux du désir homosexuel.

 

Le code « homosexuel homophobe » est l’un des plus importants de ce Dictionnaire des Codes homosexuels, car il renvoie à la nature profonde du désir homosexuel, et à la définition de l’homophobie : le désir homo est un élan idolâtre, à la fois pour et contre lui-même, qui traduit plus un manque ou une faiblesse du désir, qu’un désir plein, fort, positif, et ancré dans le Réel. C’est cette assise du désir homosexuel dans le monde du fantasme déréalisant bien plus que dans celui du Réel qui crée en la personne homosexuelle un écartèlement, une division, une schizophrénie, une haine inconsciente de soi, un tiraillement qui peut ressortir en homophobie : les sujets homosexuels en général s’adorent ou se détestent… mais en tout cas ne s’aiment pas. Et il s’avère que dans les fictions, comme parfois dans leur quotidien, cette haine de soi se traduit chez eux par une persécution de leurs pairs homosexuels : les anciens casseurs de pédé se disent homos quelques années plus tard (cette homophobie – la plus connue – s’appelle l’homosexualité latente refoulée, ou homophobie intériorisée), ou bien les « nouveaux pédés » (les born again), croyant s’assumer pleinement homos mais incapables de regarder en face la nature duelle semi amoureuse semi violente de leur désir homosexuel, redeviennent les persécuteurs « hors-milieu » et anti-homos qu’ils avaient été, notamment avec leurs amants successifs. Actuellement, c’est la thèse du refoulement/refus de l’homosexualité qui est communément admise en ce qui concerne l’homophobie. Mais plus complète et responsabilisante me semble celle de la justification aveugle du désir homo en tant qu’identité éternelle et en tant qu’amour.

 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Androgynie bouffon/tyran », « Liaisons dangereuses », « Hitler gay », « Milieu homosexuel infernal », « Violeur homosexuel », « Méchant pauvre », « L’homosexuel = L’hétérosexuel », « Homosexuels psychorigides », « Défense du tyran », « Témoin silencieux d’un crime », « Poids des mots et des regards » et la partie « L’homo combatif face à l’homo lâche » dans le code « Faux révolutionnaires », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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1 – PETIT « CONDENSÉ »

Le désir homosexuel, étant par nature une force éloignée du Réel puisqu’il rejette la différence des sexes (l’un des principaux rocs de la Réalité, et de l’origine de la vie), a du mal à se soutenir lui-même, à fonder des identités pleines et des amours durables, à ne pas se retourner contre lui-même à un moment donné parce qu’il fait machine arrière par peur d’accéder à la vraie Différence. C’est sans doute pour cette raison que l’essayiste nord-américain David Halperin écrit que l’homosexualité masculine ou féminine est « à la fois une identité homophobe en tant que totalisante et normalisatrice, et une identité dont toute négation et tout refus ne sont pas moins homophobes », et que sa revendication est « nécessaire mais politiquement catastrophique » (cf. l’article « Sociologie » de Jean-Manuel de Queiroz, dans le Dictionnaire de l’homophobie (2003) de Louis-Georges Tin, p. 380) Le désir homosexuel est un désir idolâtre, à la fois pour et contre lui-même, qui se déteste en même temps qu’il cherche à se dire avec fierté, qui a du mal à s’incarner, qui exprime la haine de soi en même temps qu’un trop-plein d’orgueil. Mais l’orgueil n’est pas autre chose qu’une blessure d’amour. Oui, je l’écris noir sur blanc : la spécificité du désir homosexuel, c’est d’être homophobe, c’est-à-dire contre lui-même. D’ailleurs, le terme « homophobie » – qui signifie littéralement « la peur du même » – ne pouvait pas mieux le démontrer !

 

HOMOPHOBE 1

Pièce « Somewhere in the Pacific » de Neal Bell


 

La communauté homosexuelle traque l’homophobie sans même s’être interrogée sur son sens profond, sur l’effet-miroir haineux dont elle est le témoin. « L’homophobie exprime une inquiétude face à l’autre indiscernable, équivoque, et dont les pratiques sont un peu les miennes. » (Frédéric Martel, Le Rose et le noir (1996), p. 444) Elle n’est qu’une haine de soi se traduisant parfois par une agression opérée sur les Hommes reconnus comme jumeaux de fantasmes (parfois actualisés). C’est sûrement ce qui fait dire aux personnages homosexuels du film « Les Garçons de la bande » (1972) de William Friedkin : « Si seulement nous pouvions ne pas nous haïr autant… C’est ça notre drame. » C’est une réalité difficilement audible dans nos sociétés contemporaines, mais qui s’impose à nous dans les faits : toutes les personnes homophobes sont homosexuelles/bisexuelles, et les personnes homosexuelles, très souvent homophobes. Cela se vérifie fréquemment dans les œuvres de fiction – le personnage persécutant le ou les homosexuel(s) se trouve être au final homosexuel lui aussi –, et parfois dans les faits. « À 16 ans, je cassais la gueule aux pédés. À 20 ans, je couchais avec. » (Jacques Nolot dans son film « La Chatte à deux têtes », 2002) ; « J’ai besoin de discrétion. » (Michel, le psychopathe homosexuel tuant ses amants dès qu’ils commencent à trop s’attacher, dans le film « L’Inconnu du lac » (2012) d’Alain Guiraudie) ; etc. Par expérience, on découvre à maintes reprises que ceux qui traitent les personnes homosexuelles d’« obsédés, de malades, de pervers, de détraqués » (Sébastien, Ne deviens pas gay, tu finiras triste (1998), p. 60) sont à la fois homophobes et homosexuels. Il faut s’y faire au départ, mais une fois qu’on a compris cela, beaucoup de choses sur les mécanismes de la violence s’éclairent par la suite. Les individus homophobes sont finalement ceux qui reprochent aux personnes homosexuelles d’être homosexuels eux-mêmes. La personne homophobe et la personne homosexuelle se ressemblent dans la peur de leur ressemblance, et ne supportent pas de se renvoyer l’un à l’autre leur désir mutuel de mort. Les individus homophobes ont toujours d’excellents amis homosexuels, connaissent très bien le « milieu », disent ouvertement qu’ils ne sont pas homophobes/homosexuels, semblent trop au courant des pratiques homosexuelles et des blagues sur les pédés pour ne pas « en être ». L’Homme qui rejette l’homosexualité pour en faire une espèce humaine à part entière qui serait tout à fait lui ou pas du tout lui est le même qui, en croyant s’en débarrasser, l’intériorise.

 

Qui oblige les personnes homosexuelles à se cloîtrer dans la clandestinité ? Bien avant que ce soit « la société » qui les y ait contraints, c’est un mode de vie qu’elles ont elles-mêmes choisi. Qui pratiquent les sinistres outing ? Sûrement pas prioritairement « les hétéros homophobes ». Ceux qui outent les personnes homosexuelles sont les individus qui côtoient leurs bars, leurs réseaux Internet, leurs cercles amicaux ou amoureux, donc des personnes homosexuelles aussi. Qui critique le plus la visibilité homosexuelle à la télévision ou à la Gay Pride ? Qui empêche la communauté homosexuelle de se faire une place confortable dans la société et d’être forte ? Ses propres membres. « Comment y aurait-il un pouvoir gay ? Ils se détestent tous ! » ironise Frédéric Mitterrand (c. f. l’interview « Y a-t-il une Culture gay ? » dans la revue TÉLÉRAMA, n° 2893, le 22 juin 2005, p. 18). Ceux qui défendent la cause homosexuelle dans les media s’étonnent que les seules lettres d’insultes qu’ils reçoivent proviennent presque exclusivement de leurs frères communautaires : « Je ne pensais pas qu’il y avait autant d’intolérance chez les homos. Ils se plaignent à longueur de journée de ne pas avoir tel ou tel droit et ils ne sont même pas unis entre eux.[…] Les seuls papiers méchants que j’ai eus dans la presse, c’était dans la presse gay. Quand je suis sorti de ‘La Ferme’, j’ai eu 10000 lettres de fans, et six lettres d’insultes qui venaient toutes de gays. » (Vincent McDoom dans le magazine Égéries, n° 1, décembre 2004/janvier 2005, pp. 52-55) ; « David Berger récolte des menaces de mort. Selon lui, ces dernières émanent principalement d’homosexuels. » (la du documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) ; etc.

 

Par exemple, dans les années 1920-30 en Allemagne, alors que Magnus Hirschfeld lance une pétition pour l’abolition de l’article 175, des tracts distribués devant son domicile accusait : « Dr Hirschfeld : un danger public ». Il sera attaqué par un autre militant homosexuel, Benedict Friedlander, pour avoir attiré la pitié sur les homosexuels au lieu de défendre leur dignité.
 

Actuellement, les gens ne voient dans la figure de la personne homophobe que l’individu gay frustré, honteux, « follophobe », tristounet, frigide. Ils oublient d’inclure dans le portrait toutes les personnes homosexuelles « assumées », extraverties, tout sourire, chantant le bonheur d’être gay ou lesbienne. Par exemple, certains sujets homosexuels se plaisent à imaginer qu’« il n’y a pas plus lesbophobe qu’une lesbienne qui s’ignore » (Marie-Jo Bonnet, Qu’est-ce qu’une femme désire quand elle désire une femme ? (2004), p. 15). Qu’ils se détrompent. Il y a tout aussi lesbophobe qu’une femme lesbienne refoulée : une femme lesbienne qui croit se connaître par cœur et qui, du fait de s’étiqueter éternellement lesbienne, refuse de reconnaître qu’elle puisse un jour devenir lesbophobe. On observe à bien des occasions des personnes homosexuelles, jouant en temps normal les grandes tapettes ou les militants de la première heure, se métamorphoser sans crier gare en brutes épaisses détestant leur communauté d’adoption. Bien des personnes homosexuelles, en disant qu’elles s’assument à 100% en tant qu’« homos », rejoignent dans l’extrême les personnes homophobes qui nient en bloc leur homosexualité, puisqu’elles aussi essentialisent le désir homosexuel, se caricaturent, se figent en objet, et donc refoulent qui elles sont profondément. S’il arrive exceptionnellement que certaines personnes homosexuelles reconnaissent que leur désir homosexuel est en partie homophobe, c’est pour mieux se donner l’illusion que depuis leur merveilleuse conversion à la « cause gay », elles s’assument pleinement en tant qu’homosexuelles et que la triste page de leur passé homophobe est déjà bel et bien tournée. S’avouer « ex-homophobe », cela revient pour elles à combattre l’homophobie et à montrer patte blanche. Mais derrière la personne homosexuelle et agressivement fière de l’être se cache souvent une personne (ex)homophobe convaincue, qui affirme haut et fort que l’homosexualité est quelque chose de monstrueux ou de génial : cela dépend des époques, du sens du vent, et des caprices de son désir homosexuel.

 

Encourager socialement l’homosexualité, cela revient à encourager l’homophobie. Le mécanisme paradoxal et homophobe du désir homosexuel est particulièrement bien expliqué par Frédéric Mitterrand dans son autobiographie La Mauvaise Vie (2005), quand il raconte comment lui et tant d’autres personnes homosexuelles connues (Pier Paolo Pasolini, Ramón Novarro, etc.) en sont arrivés à être persécutés et même tués par des amants homosexuels avec qui ils avaient été trop maternels, trop homosexuellement aimants : « Les plus graves menaces surgissent quand on est trop gentil ; le garçon est troublé, il s’expose à éprouver de la sympathie, il ne peut plus mépriser commodément. Si sa nature est franchement mauvaise, il peut prendre peur, s’enrager et devenir incontrôlable avec des pulsions de meurtre pour se débarrasser du gêneur qui a bousculé son équilibre et ses habitudes. […] Des Pelosi la grenouille, j’en ai croisé pas mal dans des endroits glauques à Paris. […] Je sais que je ne suis pas le seul à être hanté par ce crime et par tout ce qu’il laisse supposer. » (pp. 163-164) En effet, l’attaque homophobe survient si l’on traite l’homosexualité avec trop de complaisance, si non seulement on reconnaît son désir homosexuel mais en plus on s’y adonne. Ce sont ces pages qui devraient circuler dans les établissements scolaires pour la lutte contre l’homophobie ! La véritable homophobie, ce n’est pas uniquement être trop méchant envers les individus homosexuels : c’est aussi être trop gentil, trop peu exigeant et vrai. C’est pourquoi une société gay friendly et relativiste constitue une menace pour la communauté homosexuelle, tout autant qu’une société explicitement homophobe. « Aux États-Unis, à mesure que les gais et les lesbiennes réussissent à faire valoir leur droits, le nombre de meurtres homophobes semble augmenter en proportion directe. » (Louis-Georges Tin, Homosexualités : Expression/Répression (2000), p. 9) Au lieu d’applaudir ou de cracher sur les personnes homosexuelles, de leur distribuer les bons et les mauvais points, si nous réfléchissions à ce qu’est véritablement le désir homosexuel ? Un désir bassement humain, ni complètement mauvais ni tout à fait banal, parce qu’il est le signe de drames et d’une blessure à soulager.

 

Nous aurons, je crois, fait le premier grand pas contre l’homophobie le jour où nous comprendrons que, plus l’homosexualité sera tolérée socialement en tant qu’identité éternelle/idéal d’amour d’une part, et en tant que négatif parfait de l’homophobie d’autre part, plus la vraie homophobie s’accentuera. Non seulement les individus dits « hétéros » ne veulent aucun mal aux personnes homosexuelles, mais en plus de cela, à force de vouloir leur bonheur, l’écrivent parfois à leur place en ignorant totalement ce qu’elles vivent. C’est peut-être là leur seule homophobie : l’ignorance et l’indifférence sous couvert de respect des différences.

 
 

2 – GRAND DÉTAILLÉ

FICTION

a) L’homophobie avant-coming out : Le personnage homosexuel est en réalité homophobe parce qu’il refoule son désir homosexuel :


 

Les exemples d’homophobes homosexuels ne manquent pas à travers les fictions. C’est le cas dans le film « American Beauty » (2000) de Sam Mendes (avec le père de Ricky, assassin du héros Lester parce que celui-ci l’attire), le téléfilm « Madame le Proviseur : Jardin privé » (2000) de Sébastien Grall (avec un cas de outing), le film « L’Homme que j’aime » (2001) de Stéphane Giusti (avec une laborieuse acceptation d’homosexualité de la part du héros), le film « Urbania » (2004) de Jon Shear (avec le personnage très ambigu de Dean), le film « La Triche » (1984) de Yannick Bellon (dans lequel le meurtrier homophobe est finalement homosexuel), le film « Les Loups de Kromer » (2003) de Will Gould (où le prêtre persécuteur dévoile au final sa queue de loup homo !), le film « Reflets dans un œil d’or » (1967) de John Huston (avec le Major Weldon, homosexuel très refoulé, qui finira par assassiner l’amant tant convoité), le film « En El Paraíso No Existe El Dolor » (1995) de Víctor Sacca, le film « Grande école » (2003) de Robert Salis (avec le personnage très ambigu de Louis-Arnault), le film « Antibodies » (2005) de Christian Alvart, le film « Merci… Dr Rey ! » (2001) d’Andrew Litvack, le film « Hôtel des Amériques » (1981) d’André Téchiné, le film « Like It is » (1998) de Paul Oremland (avec le personnage de Craig), le roman La Colmena (1951) de Camilo José Cela (avec Matiitas, l’homosexuel refoulé et assassin), la pièce Guantanamour (2008) de Gérard Gelas (où le gardien et le prisonnier jouent au chat et à la souris), le film « Camionero » (2013) de Sebastián Miló (où l’agresseur féminise Randy avant de lui pisser dessus), le film « Terminus paradis » (1998) de Lucian Pintilie, le film « Feux croisés » (1947) d’Edward Dmytryck, le film « L’Homme de désir » (1969) de Dominique Delouche, le docu-fiction « Dear Mister Gacy » (2011) de Svetozar Ristovski, le film « Rude » (1995) de Clément Virgo, le film « Cruising » (« La Chasse », 1980) de William Friedkin (où criminalité et amour homosexuel s’unissent), le film « The Fan » (1981) d’Edward Bianchi, le film « De sang-froid » (1984) de Penelope Spheeris, le film « Contre-enquête » (1990) de Sidney Lumet, le film « Dirty Love » (2009) de Michael Tringe, le film « Edmond » (2005) de Stuart Gordon, le film « Curse Of The Queerwolf » (1988) de Mark Pirro, la pièce Big Shoot (2008) de Koffi Kwahulé, le film « Les Lunettes d’or » (1987) de Giuliano Montaldo (avec le prostitué profiteur), le film « Cercle vicieux » (2001) de Gary Wicks (avec le tapin homo tueur), le film « Dafydd » (1993) de Ceri Sherlock, le film « L’Immeuble Yacoubian » (2005) de Marwan Hamed (avec le prostitué tueur), le roman Dix petits phoques (2003) de Jean-Paul Tapie (avec l’adjuvant Diaz qui extermine les homos parce qu’il n’a pas pu les conquérir), le film « The Children’s Hour » (« La Rumeur », 1961) de William Wyler (avec Mary, la lesbienne homophobe), le film « Free Fall » (2014) de Stéphane Lacant (avec le personnage de Gregor), la chanson « J’ai tout aimé de toi » de Carmen Maria Vega, etc.

 

« Quoi qu’il y ait pu y avoir entre nous, c’est terminé ! » (Marie repoussant violemment son amante Ayla aux vestiaires de la piscine, dans le téléfilm « Ich Will Dich », « Deux femmes amoureuses » (2014) de Rainer Kaufmann) ; « Je suis pas un PD comme toi. Alors maintenant, tu ne m’approches plus. Si tu parles de ça, j’t’éclate la gueule ! T’as compris ou pas ? » (Selim menaçant son amant Victor, dans le téléfilm Fiertés de Philippe Faucon, diffusé sur Arte en mai 2018)
 

Par exemple, dans le film « Lilting » (« La Délicatesse », 2014) de Hong Khaou, Kai, le héros homosexuel, n’arrive pas à faire son coming out à sa mère et à assumer son copain Richard (« Tu dormiras dans la chambre d’amis. On fera semblant d’être amis. »). Le secret qu’il entretient autour de son homosexualité est pointé du doigt comme le responsable de la mise en quarantaine de sa mère Junn en maison de retraite… alors qu’en réalité, c’est l’acte du couple homosexuel qui est responsable de l’isolement maternel. Dans le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, Sarah, l’odieuse amante de Charlène, n’assume pas leur relation. Dans la pièce Soixante degrés (2016) de Jean Franco et Jérôme Paza, Damien raconte à Rémi (qui tombe amoureux de lui) qu’il a déjà connu dans son adolescence une ou deux expériences de touche-pipi avec un mec, « la bonne vieille amitié amoureuse », mais que ce mec a fini casseur de pédés, et que cette curieuse métamorphose l’a dissuadé de suivre jusqu’au bout le chemin de l’homosexualité : « C’est quand même vachement déstabilisant. » Rémi, qui n’arrive plus à dissimuler ses sentiments à Damien dont il se dit éperdument amoureux, continue à se dire « hétéro » : « J’t’arrête tout de suite. Je suis pas une tarlouze ! » À la fin, il persiste dans son discours d’ouverture/indéfinition bisexuelle homophobe : « Je ne suis même pas homo. Il y a deux ans, j’ai juste aimé follement l’homme de la vie de l’ancienne femme de la mienne. Depuis, tout est rentré dans l’ordre. »

 

Il arrive très souvent que les personnages homophobes soient présentés comme des homosexuels refoulés, haineux d’eux-mêmes depuis longtemps. « T’étais anti-gays au lycée. Même avec moi… » (Schmidt s’adressant à son meilleur ami Jenko, dans le film « 22 Jump Street » (2014) de Phil Lord et Christopher Miller) ; « Scrotes, pourquoi insistez-vous sur le fait que je me méprise moi-même ? » (Anthony, le héros homosexuel s’adressant à son amant, dans le roman At Swim, Two Boys, Deux garçons, la mer (2001) de Jamie O’Neill) ; « Je ne suis pas comme toi. Ce baiser, c’était juste pour essayer. Je suis pas homo ! » (Louis s’adressant à son amant Nathan, dans le téléfilm « Baisers cachés » (2017) de Didier Bivel) ; etc. Par exemple, dans le film « Qui a envie d’être aimé ? » (2010) d’Anne Giafferi, les rappeurs qu’écoute Antoine sont définis comme « des mecs qui s’enculent et niquent leur mère ». Qui tue Sébastien à Cabeza de Lobo dans le film « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1960) de Joseph Mankiewicz ? Non pas « les hétéros », mais ses anciens amants homos. Mankiewicz n’est pas le seul auteur homosexuel à décrire le cercle des prétendants homosexuels comme des brigands. Dans sa chanson « Boomerang », Étienne Daho parle du « gang » de ses amants. Un gigolo tue son client dans le film « Bas fond » (1957) de Palle Kjoerulff-Schmidt. Dans le film « Imitation Game » (2014) de Mortem Tyldum, Alan Turing a appelé la police pour cambriolage : en réalité, il s’est fait voler par un jeune amant, Murray, dans son domicile. Dans le film « L’Appât » (1975) de Peter Patzak, l’homosexuel est assassiné par son prostitué. Le protagoniste homo du film « Le Quatrième homme » (1983) de Paul Verhoeven détrousse des hommes gays dont il sait qu’ils ne porteront pas plainte. Dans le film « Seul avec Claude » (1992) de Jean Beaudin, un tapin se livre à la police après avoir assassiné son amant. Dans le film « Maurice » (1987) de James Ivory, le prostitué homophobe trahit le très homosexuel Vicomte Risley en l’attirant dans un guet-apens après l’avoir dragué. Dans le film « Minuit dans le jardin du bien et du mal » (1997) de Clint Eastwood, Jim Williams finit par assassiner un amant gigolo qui lui demandait toujours plus d’argent. Dans le film « Cruising » (« La Chasse », 1980) de William Friedkin, les flics profitent de leur autorité pour arrêter des travelos pour que ces derniers les sucent ; et pendant tout le film, un serial killer se venge et tue les hommes avec lesquels il « baise » parce qu’il ne supporte pas d’éprouver pour eux du désir : « Tu m’as forcé à faire ça ! » Dans le film « 7e Ciel » (2013) de Guillaume Foirest, « Sofiane est homosexuel et homophobe, un jour racaille, un soir pédé, un peu perdu » (dans le catalogue du 19e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013, p. 56). Dans le film « Fried Green Tomatoes » (« Beignets de tomates vertes », 1991) de John Avnet, Frank le mari de Ruth l’héroïne lesbienne, particulièrement hostile à l’union de sa femme avec Idgie la sauvageonne, est paradoxalement décrit comme un homosexuel : « J’lui trouve l’air tapette. Il paraît que tous ces messieurs en Georgie sont du genre folles tordues. » (Grady) Dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit, le « syndrome John Travolta » est le nom donné au pédé honteux qui ne s’assume pas. Dans son one-man-show L’Arme de fraternité massive ! (2015), Pierre Fatus identifie l’insulte « pédé ! » comme la preuve de l’homophobie : « ’Pédé’ ! C’est pas de la frustration sexuelle, ça ? » Dans la pièce Les Favoris (2016) d’Éric Delcourt, Guen, le héros homosexuel, réagit un peu de même : « J’ai jamais aimé ce mot ‘pédé’. C’est un peu moche, brutal, dur, carrément méprisant. Ça m’agresse. » Dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti, Martin, le héros hétéro homophobe, qui met la pression à Simon et le fait chanter sur son homosexualité afin d’obtenir les faveurs d’Abby (une pote de Simon), a tout l’air de l’homosexuel refoulé : à un bal masqué, il se travestit en femme et porte une robe ; il propose à Simon de « rester dormir chez lui » ; plus tard, il feint de se couper un doigt avec une feuille ; et enfin, à l’issue du film, il déclare sa flamme à Simon pour le piéger : « Simon, c’est moi, je suis Blue [pseudonyme secret de l’amant que Simon attend]. Je t’aime. »

 

Souvent, les héros homosexuels ont des démêlés avec des prostitué(e)s qu’ils essaient de convertir à l’ « amour (homo) » : « Nous sommes des victimes désignées. Et nous avons affaire à de véritables professionnels. D’abord ils nous disent qu’ils ont 20 ans et puis, ils nous volent. Et alors seulement ils nous montrent leur carte d’identité. Et naturellement nous ne pouvons pas porter plainte qu’en prenant le risque d’être poursuivis et arrêtés pour incitation de mineurs à la débauche. » (Jean Desailly, homme riche dévalisé par un tapin dans le film « Un Flic » (1971) de Jean-Pierre Melville) ; « Si j’étais capable, je draguerais tous les soirs. […] C’est vraiment juste quand je drague que je me sens en vie. C’est effrayant comment je me sens quand je sors. Je suis vraiment fou. Je deviens électrisé. Sauf que moi c’est dangereux. J’ai un de mes amis qui s’est fait poignarder dans sa douche. […] Je me fais voler en permanence dans mon appartement. Les gars partent avec mes disques, mes bouteilles de vin, ma montre. » (Claude dans le film « Déclin de l’empire américain » (1985) de Denys Arcand) ; « Dire qu’il y a des folles qui ont peur de draguer dans la rue et se font voler ou massacrer par des gigolos qu’ils ont dragué dans les boîtes de nuit ! » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 44) ; « Elle me prit par le bras et m’entraîna dans un coin sombre, comme elle devait le faire pour décider le client quand il n’était pas sûr de lui. Elle ouvrit un peu mon manteau et chercha entre mes jambes ce qu’il n’y avait pas. Elle entreprit de me palper plus avant. Je me mis à la regarder bien en face. […] Elle m’attrapa le bras violemment. Terrorisée, j’eus l’énergie de m’enfuir, courant comme je le pouvais dans mon accoutrement, manquant de trébucher dix fois sur mon pantalon trop long… Je l’entendis qui disait quelque chose comme : ‘J’ai d’la moralité, moi !’ Puis, très clairement, le mot ‘ordure’ claqua dans la nuit. » (Alexandra, l’héroïne lesbienne, face à une prostituée qu’elle a essayé de draguer, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, pp. 40-41) Par exemple, dans le téléfilm « Les Dix Petits Nègres » (2015) de Sarah Phelps, l’homosexualité est sous-jacente. William Blore, l’inspecteur, a violé dans une cellule de la prison de Dartmoor un prostitué homosexuel, James Stephen Landor, qui faisait le tapin dans les pissotières, et qu’il a fait condamner aux travaux forcés à perpétuité où il a fini ses jours : « Edward Landor était un pédéraste. Plutôt mourir que de m’approcher d’un de ces pervers ! »

 

Comment expliquer que l’agresseur homophobe soit en réalité homosexuel ? En général, c’est parce que le désir homosexuel n’est pas reconnu tel qu’il est que la pulsion homosexuelle refoulée par le personnage bisexuel ressort avec la rapidité et la violence d’un bouchon de champagne. Par exemple, dans le film « More Or Less » (2010) d’Alexander Antunes Siqueira, Ivo agresse constamment Sandro, un de ses camarades de classe, avant de lui avouer son trouble. Dans le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro, le personnage estampillé « homophobe » et chargé d’être méchant avec le duo initialement amical Gabriel/Léo, est extrêmement ambigu, en réalité : il projette sur les deux garçons une homosexualité qu’il est le seul à ressentir ; il interprète leurs gestes amicaux innocents en drague suspecte ; il attend leur union (« Alors, Léonardo, tu as un nouveau copain ? ») parce qu’il est lui-même peu au clair avec sa sexualité (il est blond, a les cheveux longs, est un peu androgyne). Dans le film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras, les agresseurs de Dany, le héros gay provocateur, l’identifient comme homo et lui proposent qu’il les suce comme il suce sa sucette. Dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus, les héros homosexuels se font insulter de « Bent Bastards ! » par un des fils homophobes de Maureen… (« Qu’ils viennent ici ! Ils se régaleraient ! ») qui se révèlera à la fin très gay friendly. Et au début du film, avant de « s’assumer pleinement gay », Joe, lors de sa toute première Gay Pride londonienne, surenchérit les insultes homophobes d’une passante offusquée qui trouve la manifestation « répugnante ! »… et pour ne pas passer pour homo, il acquiesce : « Exactement ! ». Dans le film « Le Français » (2015) de Diastème, Marco se fait poignarder par un homme maghrébin avec qui il y a un échange de regards ambigu, limite amoureux, à l’entrée de la boîte où Marco, pourtant hétéro, est videur. C’est cette reconnaissance mutuelle implicite de jalousie et de faiblesse qui provoque l’incident. Dans l’épisode 86 « Le Mystère des pierres qui chantent » de la série Joséphine Ange-gardien, diffusée sur la chaîne TF1 le 23 octobre 2017, Chloé est la méchante qui accuse Louison d’être lesbienne et qui la fait chier sur ça, précisément parce qu’elle est potentiellement lesbienne elle aussi (« Ça, tu vas me le payer… » marmonne-t-elle). Lorsque elle invente une nouvelle preuve de lesbianisme à Louison quand elle voit celle-ci se rapprocher de son amie Chanelle, Chanelle dévoile le pot aux roses et sort à Chloé : « En fait, si tu fais ça, c’est que tu la kiffes ? ».

 

Un certain nombre de personnages homosexuels nient leur identité homosexuelle (en tant que désir existant ; je ne parle pas ici d’identité homosexuelle envisagée à tort par notre société comme « LA vérité ontologique fondamentale de l’individu qui ressent en lui un désir homosexuel ») : « Je ne suis pas homosexuel ! » (Louis, un des personnages homos de la pièce Dépression très nerveuse (2008) d’Augustin d’Ollone) ; « Ah non mais attends, j’suis pas gay ! » (Bernard, le personnage homo qui fera plus tard son coming out à sa meilleure amie Donatienne, dans la pièce Nous deux (2012) de Pascal Rocher et Sandra Colombo) ; « Je ne suis pas comme ça ! » (Miguel s’adressant à son amant Santiago dans le film « Contracorriente » (2011) de Javier Fuentes-León) ; « Mais non !! Je ne suis pas gay !! » (Jules, le héros homosexuel de la pièce Les Sex Friends de Quentin (2013) de Cyrille Étourneau) ; « Je te préviens. J’suis pas pédé… » (Laurent, le personnage homo du one-man-show Gérard comme le prénom (2011) de Laurent Gérard) ; « C’était la première fois que je parlais de mon homosexualité et c’était pour la renier ! » (Ednar, le héros homo du roman Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 44) ; « Moi, j’ai horreur de ça ! » (le narrateur à propos de l’homosexualité de son auteur, dans la nouvelle « La Mort d’un phoque » (1983) de Copi, p. 18) ; « Y’a plein de bisexuels dans les séries TV. Sauf que j’en suis pas. » (Lennon le héros qui se révèlera bisexuel et homos à la fin de la pièce Scènes d’été pour jeunes gens en maillot de bain (2011) de Christophe et Stéphane Botti) ; « Je vous pisse à la raie, sale pédale ! » (Didier à Bernard, son futur amant, dans la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Cyril et Sébastien Ceglia) ; « Je ne suis pas une sale pédale comme toi. » (Ugo à son ami-amant homosexuel, avant de lui révéler qu’il est lui-même un homo refoulé, dans le film « No Soy Como Tú » (2012) de Fernando Figueiras); etc. Dans le film « Navidad » (2009) de Sebastian Lelio, le personnage d’Aurora a du mal à accepter ses attirances lesbiennes. Dans le film « My Own Private Idaho » (1991) de Gus Van Sant, Scott joue les parfaits hétéros en disant qu’il ne baise avec les mecs que pour l’argent, par nécessité… même si cela se révèle être un mensonge. Le personnage qui rejette l’homosexualité est le même qui, en croyant s’en débarrasser, l’intériorise. Par exemple dans le spectacle musical Starmania de Michel Berger, la maman de Ziggy offre à son fils l’intégrale de Tchaïkovski pour son anniversaire. Certes, Ziggy l’a revendu le lendemain au disquaire… mais il est resté enchaîné à ce qu’il a rejeté puisque Tchaïkovski était homosexuel et que Ziggy devient homosexuel à son tour en se choisissant un autre gourou tout aussi ambigu sexuellement : David Bowie. Dans la pièce En ballotage (2012) de Benoît Masocco, Édouard, pourtant homosexuel, prend des positions très homophobes devant les caméras de télévision afin de s’acheter un électorat de droite et parfaire sa carrière politique (c’est la raison pour laquelle son petit ami, Georges, le quittera). Dans le film « Jongens » (« Boys », 2013) de Mischa Kamp, c’est juste après s’être embrassés que Seiger dit à son amant Marc : « Je suis pas gay. » et ce dernier, pour ne pas le contredire, lui rétorque par le même déni d’acte : « Bien sûr que non. » Plus tard, face à des témoins, Sieger bousculera Marc en pleine forêt, lieu où ils avaient pourtant tous les deux rendez-vous.

 

C’est au moment de découvrir leurs penchants homosexuels, et leur probable violence une fois qu’ils sont actualisés, que certains personnages agressent ceux qu’ils identifient comme de dangereux tentateurs : leurs pairs homosexuels. Par exemple, dans le film « Shower » (2012) de Christian K. Norvalls, le héros homo fracasse le crâne du mec qu’il vient d’embrasser sur la bouche dans un vestiaire de douches : il finit par le tuer. Dans le film « Nettoyage à sec » (1997) d’Anne Fontaine, par exemple, Jean-Marie se fait sodomiser par le beau et provoquant Loïc dans le sous-sol de son pressing, avant de lui coller le fer à repasser brûlant sur la figure et de le tuer en le jetant violemment par terre. Dans le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant, Dan White, l’assassin d’Harvey, est un homosexuel refoulé. Le refoulement de l’homosexualité conduisant au fascisme est développé dans le roman Le Conformiste (1951) d’Alberto Moravia. Dans le film « Scènes de chasse en Bavière » (1969) de Peter Fleischmann, les hommes du village jouent les efféminés pour se moquer de l’homosexuel Abram. Et comme par hasard, le plus virulent et le plus homophobe de tous, c’est Georg, celui qui imite le mieux la tapette ! Dans la B.D. Pressions & Impressions (2007) de Didier Eberlé, le personnage homophobe de Martial, présenté pourtant comme un gros beauf masculin, est très ambigu : il est même plus efféminé que Romain, l’homo « officiel » ! Dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, l’ambiguïté du personnage hétéro de Mike – qui provoque Johnny, le héros homosexuel, soi-disant gratuitement et méchamment, et qui finira par le poignarder – est dévoilée par Johnny lui-même : « Mike, tu es le plus gros pédé que j’ai jamais vu. »

 

Il arrive très souvent que le personnage homosexuel, avant de se dire homo et de vivre des amours homosexuelles, ait un passé homophobe chargé (et parfois un futur homophobe post-coming out non moins musclé !). Comme si l’origine de son homosexualité était l’homophobie. « Avec les pédés, j’peux pas. En même temps, faut que je fasse gaffe : y’a pas plus folles que les folles qui critiquent les folles. […] C’est drôle. À 16 ans, je cassais du pédé dans les parcs. À 20, je couchais avec. » (Jacques Nolot dans son film « La Chatte à deux têtes », 2002) ; « C’était un peu paradoxal – j’envisageais de révéler mon homosexualité à nos parents, et en même temps je mentais à toutes les filles que je rencontrais. » (Petra, l’héroïne lesbienne se travestissant en homme en boîte, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 83) ; etc. Par exemple, dans la pièce Bonjour ivresse ! (2010) de Franck Le Hen, Raphaël s’est fait traiter de « tapette » par Benoît au collège… et à l’âge adulte, ce même Benoît fera pourtant son coming out, tombera amoureux du souffre-douleur qu’il avait jadis méprisé (et qui, avec le temps, est devenu un canon ! c’est fou, la vie, hein ?), et ils formeront un couple homo merveilleux et heureux. Dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, Esteban, qui se dira homo plus tard, a jadis été forcé par ses camarades de collège à être homophobe envers Mourad : il l’a battu dans les vestiaires. On assiste exactement à la même scène, cette fois dans le film « Broderskab » (« Brotherhood », 2010) de Nicolo Donato, où Jimmy est chargé de frapper à mort son copain Lars pour prouver à son groupe néo-nazis que tous les deux ne sont pas amants (ce qu’il fera). Dans le film « Moonlight » (2017) de Barry Jenkins, Chiron, le jeune héros homosexuel, se fait maltraiter physiquement et verbalement par un camarade de classe, Terell, qui le féminise pour mieux se justifier de le redresser « comme un homme » : « Je suis pas pédé… mais je te niquerais bien. » Son attitude agressive en dit long sur cet adolescent aux dreadlocks le transformant en Steevie Wonder efféminé… Par ailleurs, Kevin, l’amant secret de Chiron, sous la pression de ses camarades et de Terell, se retrouve à donner des coups de poing à Chiron pour que leur liaison ne soit pas découverte. Dans le film « Homophobie » (2012) de Peter Enhancer, on assiste à la lente et surprenante métamorphose de l’homophobe en homosexuel : ce film prouve inconsciemment que l’homophobie, c’est l’homosexualité pratiquée.

 

 

Dans la pièce Fixing Frank (2011) de Kenneth Hanes, Jonathan, l’un des personnages homos, raconte qu’il faisait partie de la bande de « casseurs de pédés » qui a tabassé un homme homosexuel de son village… alors qu’il se dira plus tard homosexuel ! « La petite frappe, c’est devenu moi… » avouera-t-il à son amant Frank qui, pour le coup, n’en revient pas que son homme soit un ex-homophobe : « Incroyable… T’as été un péquenaud haineux avant de devenir un Super-Pédé… » Dans le film « C.R.A.Z.Y. » (2005) de Jean-Marc Vallée, Zac a été « casseur du pédé » avant de devenir homosexuel. C’est exactement le même cas de figure avec le personnage de Joe Bill dans la pièce Inconcevable (2007) Jordan Beswick.

 

Dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, Bryan, le héros, n’est pas venu en aide à un camarade de classe efféminé, Julien, qui comme lui était homosexuel, et qui a fini par se suicider parce que ses camarades le rejetaient : « C’était mon frère de cœur. Nous avions la même faiblesse – si c’en est une – mais je ne me reconnaissais pas en lui. Je l’avais toujours ignoré. Finalement, j’étais peut-être pire que ceux qui se moquaient de lui. » (p. 49) ; « Personne n’était là quand Julien en avait besoin, quand il était bien vivant, quand il désespérait. Personne pour l’écouter, pour le comprendre et lui tendre la main… alors, il est parti. » (p. 51) Un peu plus loin dans le roman, Kévin, le petit copain de Bryan, se fait attaquer par un gang de « casseurs de pédés ». Laurent, le garçon qui est à la tête de ce groupe homophobe, se montre particulièrement ambigu dans ses gestes d’agresseur, vu qu’il embrasse sa victime sur la bouche (p. 266). Kévin explique à son amant Bryan tous les paradoxes de Laurent : « On peut faire semblant, comme le gros connard qui m’a peloté dans le parc. Lui, tout en cassant du pédé, il mourrait d’envie de me baiser et peut-être même qu’encore aujourd’hui, il pense à moi en se masturbant ! » (p. 323) À la fin de l’histoire (désolé de vous la raconter, pour ceux qui voulaient lire ce navet romanesque), Laurent finit par assassiner Bryan. Kévin-et-la-Ferrari-rouge, inconsolable, comprend une nouvelle fois que l’assassinat homophobe n’est pas qu’une déclaration de haine gratuite et hétérosexuelle : « Bryan est mort pour rien, juste parce qu’un malade, qui bande pour moi et qui rêve de me sauter, voulait se débarrasser de lui. » (p. 457) ; et Laurent passe en effet aux aveux devant Kévin : « Je ne sais pas quand, ni où, mais je sais que je te baiserai. J’en fais la promesse sur la tombe de ton pote. T’es trop beau ! Je n’y suis pour rien si tu me fais bander ! » (p. 459)

 

HOMOPHOBE 2

Film « Broderskab » de Nicolo Donato


 

Dans le film « Broderskab » (« Brotherhood », 2010) de Nicolo Donato (dont j’ai parlé précédemment, et qui est un film magnifique), on observe d’abord une homophobie intériorisée chez l’un des deux membres du couple, Lars, qui a du mal à se faire à son identité homosexuelle ; et dans un second temps, ce même Lars subit un outing surprenant de la part d’un de ses compagnons politiques qui nourrit envers lui un mélange d’admiration amoureuse et de haine (tiens… la jalousie, c’est une bonne définition de l’homophobie !). Dans le film « Nos Vies heureuses » (1999) de Jacques Maillot, Lukas traite au départ François de « sale pédé ! », puis couche un peu plus tard avec lui en mettant ses penchants homosexuels sur le compte de l’alcool et de la camaraderie militaire… Il « s’assumera » homosexuel à la fin du film. Dans le téléfilm « Baisers cachés » (2017) de Didier Bivel, Louis tabasse Nathan dans les vestiaires de sport, pour se blanchir/désinculper auprès des autres camarades par rapport à son homosexualité. Dans le film « Prora » (2012) de Stéphane Riethauser, l’amour entre les deux adolescents Matthieu et Jan commence par une grande violence homophobe. À la fin du film « On ne choisit pas sa famille » (2011) de Christian Clavier, César finit en couple avec Louis… qu’il avait au départ traité de « sale pédale ».

 
 

b) L’homophobie post-coming out : le personnage homosexuel est en réalité homophobe parce qu’il célèbre trop son désir homosexuel : 

En règle générale, et contre toute attente, les agressions fictionnelles homophobes ne viennent pas de l’extérieur, ni des personnages « hétéros ». Elles concernent les personnages soi-disant hétéros mais en réalité très bisexuels, et les personnages homosexuels entre eux, même s’ils sont les premiers à le regretter et à trouver cela absurde : « Un gay contre un gay, c’est malheureux… » (Harvey Milk, dans le film éponyme (2009) de Gus Van Sant) ; « On peut se demander si l’homophobie n’est pas créée par les homosexuels eux-mêmes ! » (le narrateur homosexuel du spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès) ; « Pourquoi tu me détestes ?? » (Thérèse, l’héroïne lesbienne s’adressant à l’ex-maîtresse Abby de son amante Carol, dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes) ; etc. Par exemple, lors de son one-man-show Elle est pas belle ma vie ? (2012), l’humoriste homosexuel Samuel Laroque déverse toute sa haine sur ses frères homos : « Les hommes politiques, c’est un peu comme les homosexuels. Ça te fait gober tout et n’importe quoi. Et plus c’est gros, plus ça passe. […] Les homos, c’est pas de la tarte. Y’a pas plus intolérant qu’un homo dans le milieu. »

 

Plus on regarde des fictions traitant d’homosexualité, plus on découvre que l’homophobie n’est pas qu’une homosexualité refoulée. Elle est aussi et surtout une homosexualité en apparence fièrement assumée et pleinement active. C’est quand tout semble être en règle que le naturel violent du désir homosexuel revient au galop, cette fois de manière tout à fait incompréhensible. Comme pour tuer l’ennui. « Chaque gay doit avoir un motif d’en tuer un autre… » signale sournoisement Xav dans la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand. Par exemple, dans la pièce Doris Darling (2012) de Ben Elton, Sidney, l’héroïne homo, oute tous les présentateurs-télé : c’est son jeu. Dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, Alexandra, l’héroïne lesbienne, est prête à « outer » sa jeune voisine par jalousie (p. 50). Dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, Romeo renie son amant Johnny en pleine fête en disant à sa girl friend Lonette qu’« il ne le connaît pas » ; il lui gueule même dessus : « Dégage ! » Dans la série Faking It (2014) de Dana Min Goodman et Julia Wolov (cf. l’épisode 1 « Couple d’amies » de la saison 1), Shane, le héros homo, fait tout pour outer, ou plutôt forcer Amy et Karma à être homosexuelles comme lui : « Je suis tellement fier de mes petites ! » Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand avoue qu’en amour, il « recherche un gay pas gay ». Dans le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino, le jeune Elio, 17 ans, pourtant homosexuel et sortant en cachette avec Oliver, se moque ouvertement du couple d’amis gays français invité par ses parents à la maison, Mounir et Isaac, qu’il juge « ridicules ». Il les surnomme « Sony et Cher », et les méprise car il refoule son homosexualité.
 

Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, Adam maltraite, insulte, rackette et violente Éric, le gay de son lycée, et qui deviendra son futur amant : « Ferme ta petite gueule, Trompette en l’air. » ; « Fais gaffe où tu vas, pédé. » (c.f. épisode 1 de la saison 1) ; « Comment ça va aujourd’hui, p’tite tapette ? » (Adam s’adressant à un camarade blond, dans l’épisode 2 de la saison 1) ; « Tu veux quoi, Adam ? » (Éric) « J’vais te tuer, connard. » (Adam, dans l’épisode 7 de la saison 1). Au moment où ils se donnent leur premier baiser et couchent ensemble (c.f. épisode 8 de la saison 1), juste avant, ils se battent dans la salle de musique, se plaquent violemment contre le sol, se crachent dessus (« Alors, ça te plaît ? » demande Adam). Comme c’est romantique… Et même après être sortis ensemble, Adam continue de le menacer de mort : « Si jamais t’en parles à qui que ce soit, je te jure que je te tue. »

 

Certains héros homosexuels, après avoir posé leur premier geste homosexuel, se rétractent et le renient. Par exemple, dans le film « Free Fall » (2014) de Stéphane Lacant, juste après avoir volé un baiser à son futur amant Marc, Engel n’assume pas : « C’était une blague. » Plus tard, quand ils se mettent en couple, Marc, l’homme marié, refuse sa situation, ce qui fait réagir Engel : « T’es homo, Marc, assume ! » Marc lui répond : « Je suis pas homo ! » et il lui fout un pain. Il finira par le renier. Dans le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro, Gabriel ment à Léo quand il lui dit qu’il ne se souvient de rien à la fête où pourtant il lui a donné leur premier baiser : ce désaveu montre qu’il n’assume pas du tout son acte homo. Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, comme Howard ne supporte pas de tomber amoureux de Peter, il lui fout un coup de poing dans la figure. Dans le film « L’Homme blessé » (1983) de Patrice Chéreau, Jean traite son futur amant Henri d’« enculé ». Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, Adrian est l’homosexuel pratiquant qui a identifié l’homosexualité latente du père Adam, et qui le fait chanter. Dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit, le Dr Katzelblum suit en thérapie un couple gay Benjamin/Arnaud parce qu’Arnaud ne s’assume pas comme homo. Arnaud s’insurge contre Benjamin et le traite de tous les noms : « Encore un truc de pédale ! » ; « Connard, va ! Trou de balle ! » ; « Tapette ! » ; etc. Benjamin ne se montre pas plus doux : « L’enfant de catin ! » Dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini, avant de sortir « durablement » ensemble, Carole rejette les avances de Delphine, en ne se déclarant pas lesbienne : « J’ai des copines lesbiennes. Je ne le suis pas, c’est tout. » Delphine lui répond « Moi non plus », et juste après, elles s’embrassent à pleine bouche.

 

Dans le téléfilm « Clara cet été-là » (2003) de Patrick Grandperret, toutes les héroïnes lesbiennes se réfugient derrière l’excuse de la bisexualité ou bien dans le déni pour devenir homophobe. Zoé trahit sa meilleure amie Clara, alors que c’était elle qui à la base l’avait poussé à être lesbienne et avait éveillé en elle un désir homo : « J’t’aime plus, Clara. J’ai fait l’amour avec Sébastien. À cause de toi, j’ai failli faire une croix sur les garçons. C’est toi qui as un problème avec les mecs. Pas moi. » Ensuite, Clara met du temps à assumer qu’elle a couché avec Sonia (et encore… elle a du mal à dire qu’elle en est amoureuse) : « J’suis pas une lesbienne ! Deux filles entre elles, j’vois pas l’intérêt. » Une fois qu’elle sort avec Sonia, elle la renie devant les autres : « Elle me saoule. Elle n’arrête pas de me coller… »

 

Dans le film « Stand » (2015) de Jonathan Taïeb, à Moscou, Anton et Vlad, un jeune couple homosexuel est par hasard le témoin passif d’une agression de rue. Plus tard, ils apprendront que la victime a succombé aux coups et qu’il s’agissait d’un crime homophobe. Leur enquête pour retrouver la trace du meurtrier les renvoie peu à peu aux sphères de drague internet homosexuelles : « Les rendez-vous entre gays sur internet, c’est toujours un peu craignos. » (Katya) Pire : elle les renvoie à eux-mêmes. En effet, Vlad n’a pas secouru Nikolay, le jeune gay qui se faisait tabasser à mort, quand il passait en voiture devant lui. Audrey, le tueur homophobe, et ami d’Anton, comme une voix d’outre-tombe, joue sur cette culpabilité et complicité homosexuelles : « Il faut au moins un mentor et un disciple pour réussir une quête. » ; « Pourquoi ne pas être sorti de la voiture ce jour-là ? » (idem). Anton finit par succomber à cette voix et par croire qu’en effet, la complicité de son amant Vlad vaut meurtre : « Tu as tué un homme, Vlad ! Tu as tué un homme ! » Vlad lui fout un poing dans la gueule et le quitte définitivement, blessé de cette semi-vérité, de la révélation de son homophobie homosexuelle.
 

Le plus contradictoire (et comique), c’est déjà quand les personnages homosexuels s’insultent de tous les noms d’oiseaux que l’homophobie ait créés, alors qu’ils forment pourtant à eux deux un couple qui prouve qu’ils sont aussi homo l’un que l’autre et qu’ils n’en a pas un pour rattraper l’autre ! : « On n’est pas des pédés ! » (Fred à son amant Max, dans la pièce Des Bobards à maman (2011) de Rémi Deval) ; « On n’est pas des tapettes ! » (Yoann, le héros homosexuel hyper efféminé, dans la pièce Ma belle-mère, mon ex et moi (2015) de Bruno Druart et Erwin Zirmi) ; « Connard, enculé, salope, connasse ! » (Emmanuel, du haut de l’immeuble, à son amant Omar qu’il a violé, dans le film « Homme au bain » (2010) de Christophe Honoré) ; « Pète-toi la gueule ! Tafiole ! » (Claude, le héros homo insultant un patineur artistique à la télé, dans le one-man-show Hétéro-Kit (2011) de Yann Mercanton) ; « C’est une folle ridicule. » (la voix narrative parlant du Rouquin, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 109) ; « Quand est-ce que tu auras fini de me poursuivre, sale pédale ? » (Pietro à Copi, son ex-amant, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 57) ; « On se dit partout connasse ! On se déteste, on s’insulte de sale peste ! » (cf. la chanson « L’Amour ça va » du groupe Mauvais Genre) ; « Tu ne te trouves pas un peu ridicule, connasse de travelo ? » (Luc insultant Micheline, dans la pièce La Tour de la Défense (1974) de Copi) ; « Ta gueule, espèce de connasse de travelo de merde ! » (Luc à Micheline, idem) ; « C’est toi, le spectacle sordide ; tu es le seul spectacle sordide ici. » (Jean à Micheline, idem) ; « On n’est pas des pédés ! » (Sébastien, le héros homosexuel, en conclusion de la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim) ; « Il faut toujours que les uns traitent à tort et à travers les autres de pédés, alors qu’ils se livrent peu ou prou aux mêmes activités. » (cf. la nouvelle « Mémoires d’un chiotte public » (2010) d’Essobal Lenoir, Le Mariage de Bertrand, p. 84) ; « Pas de ça chez moi ! Je te rends ton baiser ! » (Nathalie s’adressant à Tatiana dans le one-woman-show Wonderfolle Show (2012) de Nathalie Rhéa) ; « Toi et moi on sait repérer les mecs bien. Pas comme toutes ces folles qui cherchent à baiser. » (Romain, le compagnon d’Alexis, s’adressant à Laurent qui sort en secret avec Alexis, dans le film « L’Art de la fugue » (2014) de Brice Cauvin) ; « Une folle qui danse, c’est moche. » (Todd, l’homosexuel viril, dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson) ; « Je ne supporte pas les pédés. » (Adrien, le héros homosexuel efféminé, dans le film « Pédale douce » (1996) de Gabriel Aghion) ; etc. Dans la pièce Comme Ils disent (2008) de Christophe Dauphin et Pascal Rocher, David et Philibert se traitent mutuellement d’« enculé ! » et de « pédé ! ». Dans le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald, Stella, l’héroïne lesbienne, traite Prentice de « Sissy » parce qu’il fait des mouvements de danse sur la plage.

 

Par exemple, dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, tous les personnages homosexuels jouent les grandes folles décomplexées de pratiquer leur homosexualité, mais sont odieux entre eux : Michael veut pousser Alan au outing et dans les bras de Justin ; Alan est follophobe, frappe Emory et l’insulte de « Pédale ! » (« Je n’aime pas sa façon de parler, ça me tape sur les nerfs. ») ; Harold humilie son coloc Michael, et ce dernier organise une fête où il règlera ses comptes avec tous ses « amis » : « Je me sens si mal. J’en ai assez de vivre et j’ai peur de mourir. Si on pouvait ne pas tant se haïr. C’est tout. Si on essayait de ne pas tant nous détester. » conclut-il.

 

Il est également très fréquent que le personnage homosexuel dise ouvertement son aversion pour la communauté homo et pour ses semblables homosexuels : « La pensée de devenir involontairement comme eux… me faisait peur, me rendait malade et en colère. » (William Windom à propos des homosexuels, dans le film « Le Détective » (1968) de Gordon Douglas) ; « Il est important que vous le sachiez : je ne suis pas ‘un homo comme ils disent’. Si je reconnais beaucoup de mes frères et sœurs dans le personnage de la chanson de Charles Aznavour – mal dans sa peau, minable, pathétique –, moi, personnellement, je ne m’y reconnais pas. » (Dominique dans le roman Les Julottes (2001) de Françoise Dorin, p. 25) ; « Moi ce qui me gêne, c’est les pédés. Y en a trop. » (Willie, lui-même homosexuel, dans le roman La Meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, p. 96) ; « Elles me font chier, toutes ces folles. » (François, précisément la plus « grande folle » du roman Riches, cruels et fardés(2002) d’Hervé Claude, p. 112) ; « J’aime pas les mecs qui traînent dans les bars à pédé. » (JP dans la série Clara Sheller (2005) de Renaud Bertrand, l’épisode 5 « Oublier Paris ») ; « Nicolas se désintéresse de la femme, mais ne s’intéresse guère au ‘gay’. Sa curiosité s’applique exclusivement aux jeunes mâles ‘normaux’. […] Il voit trop de femme dans l’homosexuel. » (Benoît Duteurtre, Gaieté parisienne (1996), pp. 21-22) ; « Le milieu, c’est pas mon style ! » (Benoît dans la pièce Bonjour ivresse ! (2010) de Franck Le Hen) ; « J’aime pas les pédés ! » (Lou dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Ah, race de femmes maudites, vous êtes toutes des putes ignorant tout de la bite ! » (Ahmed à des lesbiennes dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « J’aurais envie de les tuer, mais il vaut mieux que je ne perde pas mes pédales. » (la voix narrative dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 130) ; « Maintenant, finies les tantes ! On en a plein le dos ! » (les protagonistes homos de la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy) ; « Qu’est-ce qu’elles peuvent être niaises dans les bras les unes des autres ! » (Cy Jung, Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005), p. 164) ; « Je veux un mari, 2 enfants, une maison et un chien. Pas être une salope comme les autres ! » (Paul, le héros homo parlant de ses amis homos en couple, dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Nous ne serons plus jamais gay. » (la troupe de chanteurs homos de la comédie musicale Adam et Steve, idem) ; « Il n’y a pas pire que d’être gay. » (Eddie, homosexuel, idem) ; « En gros, c’est des crétins comme les autres. » (Glenn, le héros homo parlant des autres homos, dans le film « Week-End » (2012) d’Andrew Haigh) ; « Je le trouve beau, jeune, fort. Après un moment, il se rhabille, je l’imite. Je lui demande son prénom, il répond ‘H.’ et j’ajoute ‘Tu vois, ce qui est important, c’est de vivre chaque instant. Peu importe quoi, peu importe avec qui.’ Puis il dit ‘Adieu’ et il s’en va sans se retourner. Je hurle le plus fort possible ‘Connard, gros connard, sale pédé de merde, va crever. » (Mike, le narrateur homo, en parlant de « H. » qu’il rencontre à la gare du Nord, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 61) ; « Y’en a marre des déhanchés sur Lady Gaga et Mylène Farmer. » (François, le héros homosexuel, dans la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy) ; etc. Dans le roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall, Brockett, le meilleur ami homosexuel de l’héroïne lesbienne Stephen, reproche à celle-ci son homophobie : « Vous fuyez vos semblables comme s’ils étaient des démons ! » (p. 451) Dans la pièce Le Cheval bleu se promène sur l’horizon, deux fois (2015) de Philippe Cassand, Guy a tué l’amant (Herbert) de l’amant (Fabien) de son amant (Hugues), par « amour ». Dans sa chanson « Normal », Eddy de Pretto traite son amant d’« assassin » qui le rejettent parce que porteur du VIH.

 

Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, les héros homosexuels se détruisent entre eux : les amants Nathan et Jonas se conduisent à la mort, et Jonas abandonne son ami aux mains d’un prédateur homo rencontré en sortie de boîte, et qui lui-même décriait l’inhumanité du milieu homo : « Une fois que tu seras là-dedans, tu verras à quel point c’est triste et moche. ». Avant d’être assassiné par ce client, Nathan se plaignait que lui et Jonas n’aient pas pu rentrer dans le club gay The Boys parce qu’ils étaient mineurs, et donnait des coups de pied contre la porte de la discothèque, en insultant le videur : « Putain ! Quel enculé, ce mec ! T’as vu comment il m’a parlé ! » Dix-huit ans plus tard, Jonas enchaîne les plans cul sur les sites de rencontres, et se rend chez un internaute qui ne correspond pas à sa photo de profil sur Grindr : ce dernier pense que, sur un malentendu, le « plan cul » pourra quand même passer… mais il révèle néanmoins les revers de son mensonge : « Y’en a plein qui ont voulu me casser la gueule. »
 

Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, il n’y a aucune solidarité fraternelle entre personnages homosexuels. Anwar et Éric, qui sont pourtant les deux gays officiellement connus de leur lycée, se tirent dans les pattes : « Toi, t’as l’air d’être un clown de chantier. » (Anwar, dans l’épisode 6 de la sainson 1). Éric, au moment où il pète un câble et file son premier coup de poing « viril » à quelqu’un, jette son dévolu sur Anwar et s’en prend aveuglément à lui… ce qui étonne ce dernier : « Frapper le seul autre gay ici… bien joué, Éric ! Maintenant, ma mère pense que t’es un sale homophobe. J’suis toujours pas ton pote. » (c. f. épisode 6).
 

Dans son spectacle Madame H. raconte la saga des transpédégouines (2007), Madame H. décrit l’homophobie comme un virus… et demande ensuite – comme elle est bien inspirée ! – à la salle entière, remplie de personnes homosexuelles, de se taper dessus les unes les autres ! Dans la pièce Se Dice De Mí en Buenos Aires (2010) de Stéphan Druet, Alba, la femme lesbienne, rejette son fils Roberto parce qu’il est homo. Dans la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel, il y a une kyrielle de personnages homosexuels homophobes : par exemple, un homo est violé dans une tournante par des bad boys, qu’il définit comme par hasard comme ses « jumeaux » ; par ailleurs, la chanson « Je hais les gays » de ce même spectacle ouvre les festivités (elle est interprétée par les quatre comédiens-chanteurs qui virent leur cuti au fur et à mesure de l’intrigue). Dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi, Pédé se fait attaquer par Fifi et Mimi, les deux clochards travestis, et traiter de « pouffiasse », d’« hystérique ». Dans la nouvelle « Virginia Woolf a encore frappé » (1983) de Copi, « des travestis cubains et pro-lesbiens s’attaquent à une boîte homosexuelle à Pigalle, et aux homos dans les backroom » (p. 90). Ce genre d’assauts homophobes, commandités par les personnages homosexuels eux-mêmes sont apparemment monnaie courante : « Une guerre tribale, comme d’habitude. » (idem, p. 91) L’écrivain Essobal Lenoir, dans sa nouvelle « Kleptophile » (2010), croque les clones du Marais en portraiturant leurs « déhanchements de dindes et gloussements d’oies », comme s’il se décrivait lui-même ou détruisait ses propres fantasmes : « Toutes ces folles à franges se faisaient monter au rayon j’ai vingt ans, bien qu’elles en eussent au moins le double chacune » (p. 77) Dans le film « Une Femme, un jour… » (1974) de Leonard Keigel, Caroline assène qu’elle est « normale » par rapport aux autres femmes lesbiennes. Dans le one-man-show Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé, Didier passe son temps à se faire passer pour un homo supérieur aux autres homos de son entourage, même s’il prétend être un « homo ordinaire ». Dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H., Jonathan ne veut pas être catalogué « homo du Marais », alors qu’il en a pourtant tous les travers (« Surtout, ne jamais aimer Mylène ! »). Dans le film « Week-End » (2012) d’Andrew Haigh, Glenn et Russell méprisent les « éternels bars gays »… genre « on ne mange pas de ce pain-là ! »… alors qu’ils se sont rencontrés précisément dans un bar gay ! C’est toute la production artistique homosexuelle qui appelle à la haine du « milieu homosexuel ». C’est fou, non ?

 
 

c) L’homophobie prend parfois le visage de la tolérance gay friendly, voire homosexuelle :

Mais c’est également la tolérance gay friendly et l’acceptation sans borne de l’homosexualité qui sont les vecteurs de l’homophobie ordinaire. Par exemple, on entend ce genre d’injonctions apparemment paradoxales (mais en réalité très logiques !) énoncées par des personnages bisexuels qui se targuent d’être des « hétéros ouverts » : « Les homophobes, ça devrait pas exister. C’est comme les pédés. » (le personnage de l’hétérosexuelle dans le one-woman-show Karine Dubernet vous éclate ! (2011) de Karine Dubernet) ; « J’aime pas trop les pédés, même si je suis du genre tolérant. » (Claudio dans le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 58) ; « Pourtant, vraiment, les mecs, ce n’est pas mon truc… » (idem, p. 60) ; « On n’est pas homophobes ! Sales pédés ! » (les Virilius – dont certains sont homosexuels refoulés et pratiquants – dans la pièce Les Virilius (2014) d’Alessandro Avellis) ; etc. Certains héros homosexuels, conscients de leur « ancienne » homophobie, expriment un piteux mea culpa : « Peut-être que j’étais jaloux. Tu l’assumes depuis que t’as 16 ans. » (Simon, le héros homo, s’excusant auprès d’Eytan, un camarade affiché « gay » depuis bien plus longtemps que lui dans leur lycée, et se justifiant de ne pas avoir été plus tôt solidaire avec lui, dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti)

 

Par exemple, dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, une « pote » d’Adèle, pro-gay et indifférente à la pratique homosexuelle, insulte pourtant sa copine de « sale goudou » et s’imagine en train de se faire mater/tripoter salement par elle. Adèle rentre dans son jeu et dément qu’elle est lesbienne devant ses camarades : « Puisque je vous dis que je ne suis pas lesbienne ! Dans le one-man-show Thomas joue ses perruques (2023) de Thomas Poitevin, le frère beauf friendly (donc finalement homophobe) fait un discours en l’honneur du « mariage » de son frère gay Valentin qui officialise son union avec Nicolas. Poitevin croque le manque de finesse des gays friendly caricaturant ceux qu’ils prétendent honorer. »

 

Pire. L’homophobie homosexuelle arbore le masque du militantisme LGBT (pro-mariage-gay, pro-PMA, pro-GPA). Par exemple, dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud, Gatal, le héros homosexuel, est outé et forcé par le couple homo de ses deux « pères » à trouver absolument « mari ». Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, l’homophobie est présentée comme une mode d’un passé révolu, donc vue comme une irréalité : « Hey, Adam, je sais pas si t’es au courant mais l’homophobie, ça fait vraiment 2008. C’est super ringard. » (Anwar, homo, s’adressant à un autre gay, dans l’épisode 1 de la saison 1).
 

C’est la pratique homosexuelle – hors et dans le « milieu » – qui provoque indirectement l’agression homophobe par la violence et le rejet de la différence des sexes qu’elle induit. Par exemple, dans le film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell, c’est après que Charlotte et Mélodie se soient embrassées dans un bar qui provoque chez un des clients du bar une grosse bagarre. Cette coïncidence (ou effet-miroir) laisse Michel, l’amant officiel de Charlotte et l’amant officieux de Mélodie, songeur : « Qu’est-ce que vous lui avez fait pour qu’il soit aussi agressif comme ça ? »
 

Dans le film « Les Crevettes pailletées » (2019) de Cédric le Gallo et Maxime Govare, c’est un festival d’homophobie homosexuelle. Par exemple, Cédric se fait traiter de « connard » et d’« enculé » par son propre « mari » Bertrand… Et les membres de l’association sportive gay de water-polo Les Crevettes pailletées dont il fait partie passent leur temps à se tirer dans les pattes, même s’ils ont décidé de partir ensemble aux Gays Games. Leur voyage est compromis par leur mésentente : « J’ai pas quitté ma famille pour me faire insulter par mes amis ! » (Cédric) ; « Si vous ne vous supportez plus, on n’est pas obligés d’y aller ! » (Jean, le capitaine de l’équipe). Certains, tels que Joël, font preuve de transphobie et de la lesbophobie : « On va commencer à prendre des trans ?!? Pourquoi pas des gouines tant qu’on y est ?!? On n’est pas l’Arche de Noé ! » Il s’en prend notamment à Fred, le trans M to F : « T’as pas ta place ici ! » On apprendra plus tard que sa transphobie remonte à son passé pendant lequel une personne trans lui a piqué sa place à la trésorerie d’une association. Fred se venge en traitant Joël de vieux croûton : « Une vieille en moins ! » Ils se réconcilient in extremis.
 
 

d) Le frère (de sang) du personnage homosexuel se montre particulièrement homophobe :

Qui mieux que la figure récurrente du frère homophobe dans les fictions homos pouvait prouver que l’homophobie n’est qu’un effet-miroir d’un seul et même désir : le désir homosexuel ? On retrouve ce frère homophobe dans la pièce Inconcevable (2007) de Jordan Beswick (avec le personnage de Cindy, la catho tradi aux idées très arrêtées), le film « Embrasser les tigres » (2004) de Teddi Lussi Modeste, le film « Du même sang » (2004) d’Arnault Labaronne (avec le frère « casseur de pédés »), le film « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve (avec le grand frère qui fait une crise de jalousie parce que son frère homo Vincent serait le préféré des parents), le film « Un Amour à taire » (2005) de Christian Faure (avec Régis, le frère collabo qui trahit son frère), le film « Le Clan » (2003) de Gaël Morel, le film « Le Temps qui reste » (2005) de François Ozon, le film « C.R.A.Z.Y. » (2005) de Jean-Marc Vallée (avec les frères particulièrement intolérants de Zac), le roman Las Locas De Postín (1919) d’Álvaro Retana (avec Guillermo le frère de Rafaelito), le film « Lola et Bilidikid » (1998) de Kutlug Ataman, le film « Dernière sortie pour Brooklyn » (1989) d’Uli Edel, le film « Pervola » (1985) d’Orlow Seunke, la pièce Ça s’en va et ça revient (2011) de Pierre Cabanis (avec Viviane, la sœur très bourgeoise et très homophobe de Jean), la pièce Ma Double Vie (2009) de Stéphane Mitchell (avec la sœur homophobe de Tania), le film « Donne-moi la main » (2009) de Pascal-Alex Vincent (Antoine, le frère « hétéro » de Quentin, son jumeau gay, devient carrément son maquereau), le film « Toto qui vécut deux fois » (1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresto (avec Bastiano, le frère homophobe de Pietrino), la pièce Mon frère en héritage (2013) de Didier Dahan et Alice Luce (avec Alex, le frère homophobe de Philippe l’homosexuel), le film « Circumstance » (2011) de Maryam Keshavarz (avec Mehtan, le frère homophobe de l’héroïne lesbienne Ati), etc. Par exemple, dans le film « Jongens » (« Boys », 2013) de Mischa Kamp, Ed, le frère de Sieger le héros homosexuel, est un hétéro qui traite son petit frère de « pédé » quand ce dernier est avec de simples amis.

 

HOMOPHOBE 3

Film « Un amour à taire » de Christian Faure


 

Chez le personnage dont le frère est homo, l’acceptation précipitée de l’homosexualité de son frangin gay, si acceptation il y a, n’est parfois que l’expression d’une homophobie inversée, c’est-à-dire une confirmation/affirmation de l’étiquette du macho hétérosexuel qu’il s’attribue pour se rassurer qu’il n’est pas « homo comme son frère » : « Quand, à 26 ans, j’avais enfin annoncé à mes parents que j’étais gay, Irwin avait accueilli la nouvelle avec flegme tel qu’il m’a fallu un bail pour comprendre ce qu’il ressentait, c’était principalement du soulagement. Pour lui, ma sortie du placard signifiait qu’il n’était plus la honte de la famille ; il pouvait s’occuper de faire des mômes et de vendre des baraques, de redevenir le mec. » (Michael à propos de son frère Irwin, dans le roman-feuilleton Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, p. 90) ; « Ça t’intéresse de savoir si mon frère est gay ? » (Martin, l’hétéro homophobe, qui fait chanter Simon sur son homosexualité, dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti, Martin) ; etc.

 

C’est parfois le frère gay friendly qui est capable d’une belle démonstration d’homophobie. « T’as tourné le dos au monde. T’es qu’un pédé égoïste ! » (Ayrton s’adressant à son grand frère homo Donato, dans le film « Praia Do Futuro » (2014) de Karim Aïnouz) ; « À cause de ta différence, on m’a toujours traitée comme une paria dans cette famille. » (la sœur hétéro de Jérémie, le héros homo qui avoue finalement son hétérosexualité, dans le film « Toute première fois » (2015) de Noémie Saglio et Maxime Govare) ; « Son frère est venu me menacer de me casser la gueule si je publiais ces horreurs. » (Guillaume, journaliste homosexuel, à propos de l’homosexualité de son ami Gérard, dans la pièce Commentaire d’amour (2016) de Jean-Marie Besset) ; « Quand je pense qu’ado, t’étais mon idole ! » (Daniel s’adressant à son frère Louise, désormais trans M to F, dans le téléfilm « Louis(e) » (2017) d’Arnaud Mercadier) ; « Lydia, c’est la soeur de Rick. Elle l’a dégayïsé. Depuis, Rick est devenu son cobaye. » (Jane, patiente lesbienne parlant des deux directeurs du centre de thérapies de conversion de l’homosexualité, dans le film « Come as you are » (2014) de Desiree Akhavan) ; etc. Par exemple, dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, Adèle, la sœur du héros homosexuel William, fait des leçons à Georges, le copain de William sur le fait qu’il n’assumerait pas son couple avec William parce qu’il ne délaisse pas son statut bancal d’homme marié bisexuel. Elle et son frère le maltraitent verbalement et physiquement : « Tu te fous de moi ! Ça fait cinq ans que tu m’abreuves de mensonges ! Marre ! Marre ! Marre ! Marre d’être englouti dans ta double vie ! » (William) Les homosexuels assumés (ou leurs défenseurs gays friendly) font le procès des hommes bourgeois bisexuels, donc de leurs amants secrets. Dans le film « Les Tuche » (2011) d’Olivier Baroux, Donald suspecte son grand-frère Wilfried de le maltraiter simplement à cause du « refoulement de sa propre homosexualité » : Wilfried demande à Donald d’« arrêter de parler comme un p’tit pédé »… parce qu’en réalité, il complexe d’être moins brillant intellectuellement que lui. Dans le film « The Cakemaker » (2018) d’Ofir Raul Graizer, Moti, Juif orthodoxe, et frère homophobe d’Anat (femme mariée à Oren, homme qui a eu une liaison secrète avec l’Allemand Tomas avant de décéder tragiquementdans un accident de voiture) gifle Tomas et l’oblige à quitter Israël pour retourner à Berlin, dès qu’il découvre le lien amoureux entre Oren (son beau-frère) et Tomas.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 

a) L’homophobie avant-coming out : Beaucoup de personnes homosexuelles deviennent homophobes parce qu’elles refoulent leur désir homosexuel

N.B. : Voir également le code « Liaisons dangereuses » dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

La haine de soi – il serait peut-être temps qu’on s’en rende compte (… rien qu’en voyant l’origine étymologique du mot « homophobie ») – est l’un des piliers du désir homosexuel. Si on est trop « ennemi de soi-même, comment aimer les autres ? » reconnaît justement Étienne Daho dans sa chanson « Retour à toi ». En parlant des individus homosexuels dans son essai Homoparenté (2010), le psychanalyste Jean-Pierre Winter a ces mots un peu secs mais finalement très justes : « Les uns et les autres sont divisés par ce qu’on appelle une ‘haine de soi’. L’homosexuel est clivé intérieurement entre un homosexuel et un détracteur de l’homosexualité. » (p. 196) Au commencement de l’homophobie, il y a un désir et un orgueil blessé, une peur qui s’appelle l’homosexualité : « Pendant de longs jours, j’eus l’impression d’être guéri : la vision ignoble de ce garçon, que je croyais viril, les images de cet homme singeant la femme en présence d’un autre homme tout aussi efféminé, tout cela endormait en moi toute velléité de recommencer. Toutes mes aventures, je les avais eues ou menées sous le signe de cette domination : en un mot, je ne m’étais jamais vu moi-même. Sensible et féminin, désirant d’impossibles caresses, j’eus alors la révélation que l’on n’est pas fait pour cela ; je sus qu’il y avait, en cet individu, quelque chose de détruit, comme en moi-même. Une sorte de timidité sexuelle faisait de nous ‘les invertis’, des monstres, des malades. Ainsi, il m’arrivait parfois de ne pas croire à ma propre homosexualité. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 110) ; « C’était un garçon charmant, affectueux, mais sa discrétion excessive m’agaçait, et pour cause ; c’était un Antillais ‘pures sucres’. Rarement dans la journée nous sortions ensemble. Il avait toujours cette crainte de tomber sur une connaissance et de devoir se justifier. Le plus embêtant était que ce garçon n’avait jamais l’esprit tranquille par rapport à cette homosexualité qui le perturbait.[…] À la longue, je ne supportais plus ses jérémiades ; malgré tous mes efforts, je finis par lâcher prise. En vivant si mal son homosexualité, Hugo se mettait de fait dans la catégorie des homosexuels limite homophobes. En effet, il n’est pas rare de rencontrer ce genre de personne dans la communauté ; c’est même fréquent aux Antilles. » (Ednar, le héros homosexuel du roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, pp. 177-178) ; « Vous vous aimez si peu que ça ? » (un des psys s’adressant à Guillaume, le héros bisexuel, dans le film « Guillaume et les garçons, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne) ; « Comment être un autre si on n’essaie pas d’être soi-même ? » (Gabriel et Nicolas, les deux potes gays du film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha) ; « Aux côtés d’hommes, je m’ennuie très rapidement. Je les considère comme des pères ou frères. Pas comme des hommes avec qui je dois coucher. Je trouve qu’un homme sent mauvais et c’est crade. J’aime pas qu’un homme me regarde, qu’il soit hétéro et encore moins homo. J’ai l’impression qu’ils ressentent quelque chose en moi, ou ils me projettent mon propre miroir et ça me répugne encore plus. […] J’ai rêvé que je me faisais violer par des hommes et au final ils m’avaient tué. […] Je me reconnais dans beaucoup de points que tu cites comme par exemple sur les agressions homosexuelles qui sont commises par des homos refoulés. Et c’est vrai que pour mon cas, non pas que j’aie eu fait des agressions ni physiques ni verbales, loin de là, mais dès que je croise des hommes qui ont un regard empli d’attention à mon égard, ça me fout la rage. Sûrement, le fait de voir son propre miroir ne fait pas plaisir à voir. Mais c’est idem pour les lesbiennes. Ça m’énerve encore plus car j’ai l’impression qu’elles me rejettent dans mon intégrité en tant qu’individu. Je me dis qu’elles sont heureuses sans nous, et qu’elles se font du bien entre elles alors que moi je voudrais aussi en faire partie. » (cf. le mail d’un ami homo, Pierre-Adrien, 30 ans, reçu en juin 2014) ; « Himmler a aussi été un des persécuteurs les plus assidus des homosexuels allemands. » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 253) ; « Je suis arrivée au pensionnat à l’âge de 14 ans. J’étais très naïve. Et je me suis retrouvée très tôt face à ces problèmes. Et j’ai été choquée. Il ne se passait que ça autour de moi, et je ne voulais pas le voir. Et j’en étais choquée. Depuis la surveillante qui couchait avec la surintendante, jusqu’aux élèves qui partageaient ma chambre, il n’y avait que ça autour de moi. J’étais la seule à ne pas être informée et à ne pas trouver que c’était épouvantable. Je me suis d’autant plus braquée que je sentais confusément en moi une attirance. Mais je voulais absolument la nier. » (Germaine, femme lesbienne suisse, dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta) ; etc.

 

Il arrive très souvent que la personne homosexuelle, avant de se dire homo et de vivre des amours homosexuels, ait un passé homophobe chargé (et parfois un futur homophobe post-coming out non moins musclé !). « En prépa, je me souviens, j’avais une amie qui m’avait fait des déclarations amoureuses et je l’avais envoyée chier violemment. » (Catherine, femme lesbienne de 32 ans, dans l’essai Se dire lesbienne : Vie de couple, sexualité, représentation de soi (2010) de Natacha Chetcuti, p. 57) ; « En fait, si une fille pouvait provoquer chez moi quelque chose qui n’était pas nommable à l’époque, j’avais tendance à l’agresser. » (Élodie, femme lesbienne de 46 ans, idem, p. 60) ; « Je lui répétais sans arrêt que l’homosexualité était quelque chose de dégoûtant, de ‘carrément dégueulasse’, qui pouvait mener à la damnation, à l’enfer ou à la maladie.» (Eddy Bellegueule, homosexuel, parlant de son petit frère Rudy qu’il veut transformer en « hétérosexuel », dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 53) ; « Avec deux ou trois élèves de ma classe, nous nous moquions d’un garçon du lycée que nous jugions efféminé et que nous traitions de ‘tapette’. En l’insultant, je m’insultais moi-même, par ricochet, et le plus triste, c’est que je le savais confusément. » (Didier Éribon, Retour à Reims (2010), p. 203) ; « J’entendais dans la cour de récréation les élèves se traiter de ‘pédé’. C’était une insulte, pour moi. Une simple insulte, rien de plus, que j’utilisais à mon tour sans penser à mal, pour être comme les autres. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), p. 16) ; « Je me tenais à l’écart de tout ce qui se rapprochait plus ou moins de l’homosexualité. » (Eddy Bellegueule, homosexuel, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 147) ; « J’avais échoué, avec Sabrina, dans la lutte entre ma volonté de devenir un dur et cette volonté du corps qui me poussait vers les hommes, c’est-à-dire contre ma famille, contre le village tout entier. Pourtant je ne voulais pas abandonner et continuais à me répéter cette phrase, obsédante, ‘Aujourd’hui je serai un dur’. Mon échec avec Sabrina me poussait à accentuer mes efforts. Je prenais garde à rendre ma voix plus grave, toujours plus grave. Je m’empêchais d’agiter les mains lorsque je parlais, les glissant dans mes proches pour les immobiliser. Après cette nuit qui m’avait révélé plus que jamais l’impossibilité pour moi de m’émouvoir pour un corps féminin, je me suis intéressé plus sérieusement au football que je ne l’avais fait auparavant. Je le regardais à la télévision et apprenais par cœur le nom des joueurs de l’équipe de France. Je regardais le catch aussi, comme mes frères et mon père. J’affirmais toujours plus ma haine des homosexuels pour mettre à distance les soupçons. Je devais être en classe de troisième, peu avant la fin du collège. Il y avait un autre garçon, plus efféminé encore que moi, qui était surnommé ‘la Tanche’. Je le haïssais de ne pas partager ma souffrance, de ne pas chercher à la partager, ne pas essayer d’entrer en contact avec moi. Se mêlait pourtant à cette haine un sentiment de proximité, d’avoir enfin près de moi quelqu’un qui me ressemblait. Je le regardais d’un œil fasciné et plusieurs fois j’avais essayé de l’approcher (uniquement lorsqu’il était seul à la bibliothèque, car il ne fallait pas que je sois vu en train de lui parler). Il restait distant. Un jour qu’il faisait du bruit dans le couloir où une foule assez importante d’élèves était amassée, j’ai crié ‘Ferme ta gueule pédale’. Tous les élèves ont ri. Tout le monde l’a regardé et m’a regardé. J’avais réussi, l’instant de cette injure dans le couloir, à déplacer la honte sur lui. » (idem, p. 195-196) ; etc. Dans son autobiographie Libre (2011), Jean-Michel Dunand raconte comment il a renié son homosexualité face à un garçon avec qui il avait eu une aventure (« Je te préviens, je ne suis pas du tout homo. C’est juste une expérience. », p. 38), ou bien l’épisode inverse durant lequel Yann, l’un de ses amants, après leur première nuit ensemble, s’est défilé en présentant la même excuse homophobe pour se désengager au plus vite (« D’abord, je ne suis même pas sûr d’être vraiment homo. » idem, p. 85)

 

HOMOPHOBE 4

Film « La Chatte à 2 têtes » de Jacques Nolot


 

Dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, Eddy Bellegueule raconte toute l’ambivalence séductrice de ses deux bourreaux du collège (un grand roux et un petit) : « Regarde, c’est Bellegueule, la pédale. » (p. 20) Et le pire, c’est que lui, par homophobie intériorisée, rentre dans leur jeu ! « Ils sont revenus. Ils appréciaient la quiétude du lieu où ils étaient assurés de me trouver sans prendre le risque d’être surpris par la surveillante. Ils m’y attendaient chaque jour. Chaque jour je revenais, comme un rendez-vous que nous aurions fixé, un contrat silencieux. […] Uniquement cette idée : ici, personne ne nous verrait, personne ne saurait. […] Dans le couloir, je les entendais s’approcher, comme les chiens qui peuvent reconnaître les pas de leur maître parmi mille autres, à des distances à peine imaginables pour un être humain. » (Eddy Bellegueule parlant de ses deux agresseurs au collège, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 38)

 

Il est grand temps que nous le reconnaissions. L’agresseur n° 1 des personnes homosexuels n’est pas le « méchant non-homosexuel » mais bien l’homme à la sexualité ambiguë/incertaine, le macho qui joue les « hétéros » pour mieux masquer son homosexualité latente, sa bisexualité violente, cette bisexualité qui s’exprimera à l’occasion par une brutalité envers sa femme/les femmes et envers ses amants homosexuels occasionnels, ou dans des rapports fortement liés au cadre violent de la prostitution et du jeu collectif cruel de la « chasse aux pédés » : « Au grand dam de ma propre expérience, j’étais souvent désagréablement surpris qu’à l’unanimité, ces trop ‘Posés’, idéalisés et en même temps si ressemblants, qui parlaient de tare congénitale et de détournement, condamnaient cette pratique et refusaient de voir cette autre image de la sexualité pourtant si révélatrice de leur personnalité. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 61) ; « Si véritablement je n’étais pas leur star, à coup sûr, je devins par la suite une célébrité parmi eux [les garçons]. Ma féminité les rendait impulsifs les uns les autres. Ils m’aimaient, me parlaient avec douceur en me caressant la nuque ou le dos, comme il était permis ici pour démontrer une certaine affection. » (idem, p. 58) ; « Ce qui est arrivé, oublie-le. Je ne tiens pas à ce que cela se sache et encore moins à ce que tu le prennes comme la naissance d’un amour véritable. Vous êtes ‘toutes’ les mêmes. » (un ex-amant parlant à Berthrand Nguyen Matoko, idem, p. 72) ; « La violence traduit la peur d’être séduit. » (Rennie Yotova, Écrire le viol (2007), p. 111) ; « Quand je vois un beau gars qui me plaît dans la rue, il faut que je change de trottoir. Je connais trop ma sensibilité. » (un témoin homo refoulé, cité dans l’essai Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, p. 198) ; « Bruno, malgré un discours carrément homophobe, a vraisemblablement davantage de relations homosexuelles que de relations hétérosexuelles. Il en va de même pour Éric, qui se prostitue exclusivement avec des hommes ; quoiqu’il s’affirme plus volontiers hétérosexuel qu’homosexuel, il n’a presque jamais eu de rapports hétérosexuels. » (idem, p. 241) ; « Dans leur ambivalence, certains semblent ‘jouer avec le feu’ : ils sont à la fois attirés et dégoûtés par l’homosexualité. Une grande anxiété mais aussi une curiosité certaine en amènent plusieurs à entretenir à la fois des préoccupations homosexuelles et homophobes. Le cas de Bruno, 25 ans, est à ce titre éloquent. Il dit détester les homosexuels mais hésite, au cours de promenades nocturnes, entre deux possibilités : les pourchasser ou les inviter à faire l’amour avec lui… » (idem, p. 198) François, 17 ans, sympathisant des skinheads, et abusé dans son enfance, participe activement à des expéditions de « tabassage de tapettes » dans le village gay de Montréal : « J’ai de la misère avec les homos. L’an passé, avec des amis, on allait dans le quartier gay à Montréal, le soir. J’en attirais un dans une ruelle en lui parlant puis, avec les chums [chum = ‘mec’ en Québec] qui m’attendaient cachés, on lui faisait les poches, on lui râpait la face sur l’asphalte si on pouvait. C’était comme une vengeance. […] Finalement c’est à des gars comme mon père que j’en veux, pas aux homosexuels. Je fais la différence aujourd’hui entre les hypocrites qui abusent et les homos. » (idem, p. 171) ; « Il n’est pas nécessaire, pour expliquer l’attitude ambivalente à l’égard du rival, d’invoquer une homosexualité latente ou refoulée. Le rival détourne vers lui une bonne partie de l’attention que le sujet, en bonne hétérosexualité, devrait réserver à l’objet ; cette attention est forcément ‘ambivalente’ puisqu’à l’exaspération suscitée par l’obstacle se mêle l’admiration et même l’exaspération que suscite les prouesses du don juan. » (René Girard, Des choses cachées depuis la fondation du monde (1978), p. 474) ; etc.

 

Les agresseurs homophobes se font souvent passer pour des homos pour satisfaire leurs appétits sexuels sans en assumer la responsabilité, comme le montrent certains articles. « Le grand point faible de l’homosexualité, c’est sa lâcheté : surpris en flagrant délit ‘d’outrage aux mœurs dans un lieu dit public’, le pédéraste ne peut chercher aucun secours chez son partenaire de rencontre ; il est seul. Personne n’est jamais homosexuel… sauf celui qui se fait pincer. Une ignoble loi de la jungle régit notre existence et nous vivons dans la perpétuelle attente de la catastrophe. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 103) ; « Le violoniste virtuose Paul Körner est victime de chantage de la part du prostitué Franz Bollek. Körner refusant de continuer à payer toujours plus d’argent au maître-chanteur, Bollek le dénonce pour infraction à l’article 175. Au cours du procès qui s’ensuit, le docteur Magnus Hirschfeld, qui joue son propre rôle, prononce un ardent plaidoyer contre l’intolérance et la discrimination dont sont victimes les homosexuels. Bollek est condamné pour extorsion de fonds. Körner, qui est pourtant victime de chantage, est lui aussi condamné, mais pour avoir enfreint l’article 175. Sa réputation est ruinée, il ne supporte pas l’opprobre public et finit par se suicider. » (Philippe Simonnot dans son essai Le Rose et le Brun (2015), p. 112) ; « Pour le poète René Crevel, Magnus Hirschfeld est un ‘abominable charlatan’, un ‘Moloch qui dévore chaque jour au moins un hermaphrodite ou un travesti’. De fait, Crevel n’était pas le seul homosexuel à détester Hirschfeld, on le verra. » (idem, p. 113) ; etc.

 

À titre d’exemples d’homophobie homosexuelle entre amants, Costas Taktsis, l’écrivain grec, est assassiné (étranglé) le 30 août 1988 par un amant de passage, alors qu’il se prostituait dans les rues d’Athènes. L’agresseur du chanteur espagnol Miguel de Molina n’est autre qu’un homme homosexuel lui aussi (cf. l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 56). Carlos Travers, à l’automne 1979 à Madrid, est tué par un prostitué, étranglé par un câble. Álvaro Retana, le romancier espagnol, est assassiné par un prostitué homosexuel en 1970. Joan Joachim Winckelmann est assassiné dans sa chambre d’hôtel de Trieste par un jeune voyou, Francesco Arcangeli. Ramón Novarro, amateur de jeunes prostitués, est retrouvé mort dans sa piscine, assassiné par deux gigolos. Pier Paolo Pasolini a été tué par Pino Pelosi, un jeune homme homosexuel de 17 ans, le 1er novembre 1975. L’homme politique Harvey Milk est assassiné par Dan White en 1978 à San Francisco : l’orientation sexuelle du tueur, si l’on s’en tient à l’adaptation cinématographique de Gus Van Sant, semble plus que trouble. Le directeur de Sciences Po Paris, Richard Descoings, est retrouvé nu et décédé à 53 ans sur son lit de chambre d’hôtel à New-York en 2012 : il y avait fait de drôles d’expériences avec deux jeunes prostitués. Le 4 avril 2012, Jean-Nérée Ronfort, un expert en antiquités de 69 ans, a été découvert par son compagnon gisant au sol de son bureau, le crâne fracassé : il a été tué par trois prostitués roumains de 20, 21 et 25 ans. Le 12 juin 2016, Omar Mateen, l’auteur de la fusillade la plus meurtrière des États-Unis dans la boîte gay The Pulse à Orlando, en tirant sur 49 personnes, s’est révélé être homosexuel refoulé et client régulier de l’établissement.

 

Personnellement, j’ai rencontré à Angers, l’année 2002, un homme de cinquante ans, Jacques, à l’association homosexuelle Tonic’s. Quand je lui ai parlé en tête à tête au cours d’un dîner associatif, il avait l’air d’être assez torturé, d’avoir des pratiques aux antipodes de ses idéaux profonds. Si je devais résumer, l’impression que Jacques m’a laissée est celle d’un dragueur désespéré. J’ai appris quelques années plus tard qu’il avait été retrouvé mort étranglé dans son appartement. Tout de suite mes amis homos de l’époque m’ont raconté les faits et ont conclu au meurtre HOMOPHOBE perpétré par un terrible psychopathe hétéro qui s’attaquerait à tous les homosexuels de cette belle ville d’Angers (Qui sera le prochain sur la liste du « méchant Homophobe » ? Sûrement). Le fin mot de l’histoire n’intéressa pas grand monde (à part moi…). En effet, la police a découvert qu’il s’agissait d’un règlement de compte entre amants, et que Jacques avait demandé à son amant homo de passage de le soulager définitivement d’une existence trop lourde à porter. Affaire classée. Pas qu’homophobe : homosexuelle surtout !

 

Beaucoup d’hommes et de femmes homosexuels décrivent le visage homosexuel de leur agresseur homophobe : « Le pire ennemi est la folle exhubérante. » (la voix-off du film « Ce n’est pas l’homosexualité qui est perverse » (1971) de Rosa Von Prauheim) ; « J’ai moi-même été plusieurs fois la victime d’agressions. » (Denis Daniel à propos de ses amants, dans Mon théâtre à corps perdu (2006), p. 119) ; « La vie de cet intellectuel [Pasolini] qui ne se sentait bien qu’avec la canaille était fascinante et, on le comprendrait quelques années plus tard, assez effrayante. » (Jean-Claude Brialy dans Le Ruisseau des singes (2000), p. 144) ; « Ce qui, pour moi, reste un mystère absolu, c’est pourquoi ces garçons, malgré leur haine féroce pour les homos, voulaient avoir des relations sexuelles avec un gay comme moi. » (Brahim Naït-Balk, Un Homo dans la cité (2009), p. 81) ; « J’ai travaillé pendant 4 ans avec une ‘bande de loubards’, tels qu’ils se définissaient eux-mêmes, dans le XVIIe arrondissement de Paris. Fréquemment, ils allaient ‘casser du pédé’ au square des Batignolles. En repensant à eux, à leurs discours, aux descriptions qu’ils aimaient faire, s’intégrant à leur mode de provocation par rapport à l’adulte, à l’éduc, je reconnais volontiers ma cécité. La bande : une cinquantaine de jeunes de 14 à 30 ans, bardés de chaînes, de croix gammées pour certains, de blousons de cuir, vivaient une homosexualité latente. […] Sans vouloir en rien énoncer que ces hommes provoquaient le viol parce que homosexuels, le viol d’hommes est peut-être localisé autour des sphères homosexuelles. » (Daniel Welzer-Lang, Le Viol au masculin (1988), pp. 183-184)

 

Dans son témoignage sur un viol collectif survenu contre un homme homosexuel par une bande de jeunes, Carlos López décrit leur homosexualité latente (Carlos López, cité dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 115). En avril 1993, deux hommes sont arrêtés (l’un de 60 ans, Félix P.R., l’autre de 50 ans, Gregorio C.M.) parce qu’ils se faisaient passer pour des policiers au cinéma Carretas de Madrid afin de forcer des clients à coucher avec eux (Fernando Maldonado, dans l’essai El Látigo Y La Pluma (2004) de Fernando Olmeda, p. 142). Pendant la Seconde Guerre mondiale, un prisonnier homosexuel raconte que ses deux compagnons de cellule de camp de concentration, qui maltraitaient la « pédale » qu’il était parce qu’ils se disaient « hétéros », étaient finalement homosexuels : « De ce qu’ils racontaient, je pus déduire qu’ils étaient tous deux mariés, mais j’ai découvert dès la première nuit qu’ils se faisaient des choses sans se cacher. D’après ce qu’ils pensaient, c’était un moyen de remplacement et pas une histoire de pédés ! » (un témoin cité dans l’ouvrage Les Hommes au triangle rose (1981) de Hans Heger) Le 12 octobre 1998 aux États-Unis, Aaron McKinney et Russell Henderson, les assassins de Matthew Shepard prétendument « hétéros », le soir du meurtre, dans les toilettes du bar Fireside, se sont faits passer pour un « couple gay » auprès de Matthew, avant de l’embarquer dans leur camionnette pour le draguer et le torturer ; après leur procès, on découvre l’homosexualité refoulée de Aaron en prison (l’un de ses compagnons de cellule, Andrew, le laissera sous-entendre : « Pourquoi t’as enculé cette putain de tante ? Parce que tu vas devenir une putain de tante aussi… »).

 

Le crime homophobe est toujours l’aveu d’un trouble sexuel mal géré. « Je me fis traiter de ‘sacré makoumè ( = pédé) par beaucoup de personnes, même par les jeunes de mon âge, qui, la veille encore, m’avaient sollicité pour un plan masturbation à un coin de plage. » (Ednar, le héros homosexuel du roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 69) Par exemple, à Oxnard, en Californie, le 12 février 2008, le jeune Brandon McInerney (14 ans), trouvant que Lawrence King (15 ans) flirtait trop ouvertement avec lui, l’a tué de deux balles dans la tête devant tous leurs camarades de classe.

 

L’orientation bisexuelle ou homosexuelle n’est quasiment jamais dévoilée par l’agresseur : « La plupart des agresseurs auraient tendance à se définir comme hétérosexuels exclusifs et s’avèreraient, de surcroît, homophobes » (Michel Dorais, Ça arrive aussi aux garçons (1997), p. 108), ce qui conduit la victime à désigner naïvement son violeur homophobe comme « 100 % hétérosexuel » (alors qu’à mon avis, si l’agresseur a une orientation sexuelle, il a les trois en même temps : homosexuelle, hétérosexuelle, et bisexuelle !) et à se croire elle-même parfois d’orientation homosexuelle, du fait de son statut de victime passive : « La plupart des agresseurs sont décrits par leurs victimes comme étant ou s’affirmant d’orientation hétérosexuelle, quelquefois bisexuelle, très rarement homosexuelle. » (idem, p. 73) Encore une fois, la majorité des personnes homosexuelles se voilent la face sur la nature homophobe du désir homosexuel, et sur le caractère homosexuel de l’agression homophobe.

 

Dans mon cas personnel, et dans le cadre de ma pratique professionnelle de prof d’espagnol au lycée, j’ai constaté que les seules attaques homophobes que j’ai connues ne sont venues que des garçons les plus efféminés ou des filles les plus garçonnes, ou bien à l’extrême-inverse, des élèves qui forçaient trop leur hétérosexualité et leur identité masculine pour en être totalement sûrs (ils n’avaient d’ailleurs aucun succès avec les filles…).

 
 

b) L’homophobie post-coming out : Beaucoup de personnes homosexuelles sont en réalité homophobes parce qu’elles célèbrent trop leur désir homosexuel

N.B. : Je vous renvoie également aux code « Milieu homosexuel infernal » dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Actuellement, l’homophobie est souvent caricaturée par les personnes homosexuelles comme un refoulement, un refus de ne pas s’accepter soi-même et de ne pas passer à l’acte homo (« La pire des homophobies, c’est l’homophobie intériorisée. » déclarera par exemple Sébastien Carpentier, lors de sa conférence au Centre LGBT de Paris à l’occasion de la sortie de son essai sociologique Délinquance juvénile et discrimination sexuelle, en janvier 2012)… alors qu’en réalité, l’homophobie est aussi le passage à la pratique homo, est aussi la caricature du coming out ! Car qui, par l’identité et la pratique homosexuelle, rejette la différence des sexes (dont nous sommes tous issus) finit toujours par se rejeter lui-même dès qu’il se croit « un homo » ou qu’il pose un acte homo. C’est totalement logique ! L’homophobie bien homosexuelle est le résultat de l’éjection (jalouse) de la différence des sexes, y compris entre personnes homosexuelles : « Hans Blüher manifeste du dégoût pour Magnus Hirschfeld – dégoût représentatif de l’attitude du camp homosexuel masculin pour celui des ‘efféminés’, dans lequel il range le célèbre docteur et son comité humanitaire. » (Philippe Simonnot, Le Rose et le Brun (2015), p. 137)

 

En tout individu homosexuel, même après son coming out, même en couple « stable », il y a des vieux réflexes d’homophobie qui reviennent au galop : « Encore aujourd’hui, à 24 ans, Alexandre n’arrive pas à dire aux autres qu’il est homosexuel. Pourtant, à 24 ans, c’est un homosexuel qui est ouvert, qui le dit, qui assume déjà bien. » (le père d’Alexandre, encore étonné de la persistance de l’homophobie de son fils homo, dans l’émission Temps présent spéciale « Mon enfant est homo » de Raphaël Engel et d’Alexandre Lachavanne, diffusée sur la chaîne RTS le 24 juin 2010) ; « Je n’oublierai jamais l’horreur indicible qui glaça la lymphe de mes glandes quand le mot honteux jaillit dans mon esprit torturé : j’étais un homosexuel.’ Parce qu’on est tous plus ou moins passés par là, les tourments de William Burroughs relèvent de l’universel. » (cf. la citation de Burroughs commentée par un journaliste de la revue Têtu, n°127, novembre 2007, p. 104) ; « Je ne vais pas vous faire le coup du coming out, ce serait presque banal et dénué d’intérêt. » (Gaël-Laurent Tilium, Recto/Verso (2007), p. 14) ; « Est-ce que je suis homo ou hétéro ? Je me vois comme hétéro ; l’homosexualité, ce n’est pas pour moi. Je suis certain que ça vient des abus. » (Bruno, un garçon bisexuel de 25 ans, cité dans Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, p. 206) ; « Pour s’intégrer à la meute, on rajoute une couche d’homophobie à l’homophobie. » (un témoin homosexuel breton avouant qu’il dissimule son homosexualité au travail, dans le documentaire « Coming In » (2015) de Marlies Demeulandre) ; etc. Le cinéaste homosexuel britannique Terence Davies considère l’homosexualité comme une « exécrable malédiction » (cf. l’interview dans le journal The Guardian, 6 octobre 2000). On voit bien, à travers de tels témoignages, qu’il ne suffit pas de se dire « homosexuel » pour bien le vivre. C’est bien parce que le désir homosexuel est intrinsèquement homophobe que Didier Éribon dit que le coming out est une démarche souvent ratée et à refaire éternellement : pas pour une autre raison (même si le sociologue soutiendra à l’inverse que c’est à cause de l’imbattable homophobie sociale que ce travail de Sisyphe est sans fin). Cette homophobie intériorisée peut d’ailleurs prendre le visage de l’auto-parodie, comme c’est le cas dans cette vidéo, où ses concepteurs jouent à imiter les homophobes (… de leur propre camp).

 

Les exemples de haine homophobe des personnes homosexuelles déclarées fusent. Par exemple, André Gide ne tolère que les hommes pédérastes, pas les personnes homosexuelles efféminées qu’il juge « anormales ». Jean Genet « n’aime pas les homosexuels » (Edmund White concernant Jean Genet, cité dans Magazine littéraire, n°313, septembre 1993, p. 29). Dans l’essai L’Homosexualité dans tous ses états (2007) de Pierre Verdrager, Simon, comme la majorité des personnes homosexuelles, « se sent très différent des homosexuels » (p. 89). Dans le documentaire « Pierre Louÿs : 1870-1925 » (2000) de Pierre Dumayet et de Robert Bober, Pierre Louÿs, pourtant homosexuel, dit être « dégoûté de l’homosexualité ». La lesbophobie des hommes gay est assez répandue. Mais celle des femmes lesbiennes entre elles est tout aussi marquée (cf. le film « Sex Revelations » (1996) de Jane Anderson). Violette Leduc, Marguerite Yourcenar, ou Cathy Bernheim, se sont même demandées si elles ne détestaient pas seulement les femmes mais aussi les femmes lesbiennes. Virginia Woolf, par exemple, refuse d’être assimilée aux « saphistes » et aux hommes efféminés qui s’affichent.

 

Cela choquera certains que je le dise, mais c’est pourtant vrai. Le premier acte d’homophobie intériorisée, c’est déjà le suicide opéré au nom de l’homosexualité/l’homophobie. Par exemple, le militant gay Alfredo Ormando, en 1998, s’est immolé lui-même par le feu sur la place saint Pierre au Vatican pour protester contre l’homophobie. Son acte a-t-il été reconnu comme un acte homophobe ? Pas du tout, puisqu’il est enrobé d’intentions pro-gay, d’émotionnel catastrophiste, et qu’il est dirigé contre sa propre personne. Notre époque a tout simplement du mal à envisager qu’on puisse être son pire ennemi… Autre exemple d’homophobie homosexuelle par le suicide : celui de Sébastien Nouchet, qui, on l’a appris plus tard, n’a pas été la victime de l’acte homophobe odieux qu’on croyait, mais qui s’est en réalité incendié lui-même à l’essence dans son jardin le 16 janvier 2004 (cette affaire avait défrayé la chronique et ému l’opinion publique juste au moment des Gay Pride françaises).

 

Magnus Hirschfeld prétendra en 1914 que 300 de ses patients, soit 3% des 10 000 individus homosexuels qu’il a reçus, se sont donné la mort. Pour les seules années 1906-1907, on comptait six suicides parmi les homosexuels officiers de l’armée allemande, dont l’existence avait été dévastée par les réclamations de maîtres-chanteurs.
 

L’homophobie homosexuel prend parfois le visage sournois de la victimisation. En effet, la logique victimiaire peut pousser certaines personnes homosexuelles à rechercher l’homophobie pour « exister », ou bien à créer et à répéter pour elle-même ce qu’elles n’attribuent qu’aux autres (« Choquant ? Pour les homophobes. » signale une affiche de Journée Mondiale contre l’Homophobie ; « Un homosexuel aux Antilles ne peut être respecté. » déclare avec fatalité Ednar, le héros homosexuel du roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 81) Par exemple, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz, Élisabeth et Catherine font en sorte d’être virées de leur boulot uniquement au nom de leur homosexualité.

 

Par exemple, dans le spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès le comédien sur scène se met à citer des phrases que les homophobes auraient dites… mais qui sortent quand même de lui, au final : « Les homos, je leur pisse à la raie ! Le Sida est la punition divine sur les homos et les drogués. »

 

L’homosexualisation de la violence faite à une personne qui ressent un désir homosexuel, comme si sa seule homosexualité suffisait à expliquer l’acte violent qu’elle a vécu et qu’une attaque justifiait qu’on réduise des personnes à leur orientation sexuelle, est aussi homophobe que l’« homophobie » pointée du doigt : « Un gamin venait d’être battu dans cette ville parce qu’il était homo ! » (un jeune garçon homo parlant du meurtre de Matthew Shepard, dans la pièce Le Projet Laramie (2001) de Moisés Kaufman)

 

Mais allons plus loin en reconnaissant que ce sont ceux qui persécutent le plus la communauté homosexuelle qui sont, dans le privé, les individus les plus homosexuellement pratiquants. Par exemple, dans les années 1950, le sénateur homosexuel américain Joseph McCarthy organise une véritable « chasse aux sorcières » contre les communistes et les personnes homosexuelles aux États-Unis. Son amant, l’avocat républicain et gay honteux, Roy Cohn, mort des suites du Sida en 1988, a toute sa vie exprimé publiquement son dégoût des personnes homosexuelles et prétendu être atteint d’un cancer au moment de sa mort (son histoire est représentée dans la pièce Angels In America (1991) de Tony Kushner). Autre cas qui semble inouï : celui du directeur du F.B.I., J. Edgar Hoover. Cet homme a pourchassé les personnes homosexuelles en temps de maccarthysme alors même qu’il a vécu 40 ans avec son compagnon (c’est pourquoi Sébastien Chauvin, dans son article « Hoover », publié dans le Dictionnaire de l’homophobie (2003), évoque le « paradoxe Hoover »). Tout récemment, en 2010, on a découvert que le pasteur Eddie Long, télévangéliste nord-américain pourtant particulièrement connu pour ses prêches anti-gay, est pédophile et homosexuel. Wes Goodman est un député américain homophobe ET homosexuel. En 2011, aux États-Unis, on découvre que Phillip Hinkle, opposant au mariage gay dans l’État de l’Indiana, a eu des relations sexuelles avec un jeune escort boy. Idem pour le sénateur républicain Roberto Arango, opposé au « mariage homo »… mais inscrit et posant nu sur Grindr ! En France, le politicien Renaud Donnedieu de Vabres est « outé » alors qu’il défile contre le PaCS en 1999 ! Les ambiguïtés homophobes de la pratique homosexuelle se vérifient à l’échelle d’une nation ou de communautés particulièrement hostiles aux personnes homosexuelles : « Il se passe dans l’Islam le contraire de ce qui se passe en Occident. En Occident, aujourd’hui, le pouvoir est libéral, mais l’opinion reste à la traîne ; dans l’Islam, les autorités répriment ce que la population pratique sans complexe. » (Dominique Fernandez, L’Amour qui ose dire son nom (2000), p. 11)

 

HOMOPHOBE 5

Film « Tu n’aimeras point » de Haim Tabakman


 

Beaucoup de personnes homosexuelles disent clairement leur mépris de leurs « semblables » d’orientation sexuelle et leur préférence sexuelle pour tous les individus qui, de près ou de loin, ne « font pas homos » : « Quand un gars s’approche et qu’il me plaît, je le laisse faire. Quand il ne me plaît pas et qu’il s’approche trop, je lui dis : ‘Aie, qu’est-ce que tu fais ? Laisse-moi tranquille, maudite tapette !’. » (Bruno, bisexuel de 25 ans, cité dans l’essai Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, p. 205) ; « Je ne fais pas partie de ces vieilles folles qui se peinturlurent. » (Francis Bacon dans le documentaire « Francis Bacon » (1985) de David Hinton) ; « C’est avec quelqu’un comme lui que je conçois une relation entre deux garçons, peut-être parce que nous nous ressemblons, parce qu’on ne dirait pas que nous sommes homosexuels. » (Alexandre Delmar, Prélude à une vie heureuse (2004), p. 144) ; « Je ne suis toujours pas gay. Je n’ai jamais supporté cette appellation souvent utilisée du bout d’une lèvre incertaine, mêlant grivoiserie retenue et honte passagère à l’égard des garçons qui préfèrent les garçons. […] Je ne me reconnais en aucun cas dans ce que certains appellent ‘le milieu’. » (Gaël-Laurent Tilium, Recto/Verso (2007), pp. 255-256) ; « Le plus triste dans sa déchéance alcoolique aura été son antisémitisme, ses délires homophobes. » (Gore Vidal parlant de l’écrivain homo Jack Kerouac, dans Palimpseste – Mémoires (1995), p. 352) ; « Les pédés sont des cons. Ils nous détestent. Ils marchent comme des zombies. Notre but, c’est de réveiller toutes ces folles ! » (Thibault, homosexuel, leader du mouvement Act-Up, dans le docu-fiction « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo)

 

Le libertinage donne une illusion de liberté et construit finalement un ghetto doré, avec des nouvelles règles, une nouvelle loi de la jungle : « Outre la mauvaise réputation qu’avait la Savane la nuit, je lui rapportais en détail certaines agressions dont j’avais été témoin. Sur la place, je rencontrais toutes sortes d’individus ; les ‘branchés’ étaient une population très hétéroclite. On était du même bord, mais on ne se fréquentait pas. Sans doute par manque de confiance, beaucoup se méfiaient de leur propre clan et jouaient à cache-cache en permanence, se dénigrant et se méprisant mutuellement. Impensable pour un groupe déjà victime du malheur de sa propre différence ! C’est quand même surprenant et regrettable d’en arriver là.[…] Cette histoire de clans est une fatalité pour la communauté et l’on ressentait une rivalité oppressante entre les groupes différents. En fait, chaque groupe entrait dans une catégorie bien distincte : les extravagants, les cancaniers, les très discrets et enfin les ‘leaders’, ceux qui incitaient à la prise de conscience contre les discriminations et l’homophobie dans la région d’outre-mer. Je trouvais bien dommage cette diversification au sein de la communauté. » (Ednar parlant des lieux de drague antillais, dans le roman autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, pp. 188-189)

 

Le 7 avril 2011, je discutais avec un ami metteur en scène et écrivain, Jérémy Patinier, à la fin de la représentation d’une de ses pièces. On parlait de ses projets à venir. Et il me dit qu’il est en train d’écrire une pièce plus ouvertement gay que ses précédents travaux… mais qui traitera du « comment rester folle tout en étant hors milieu ». Je me suis dit en moi-même : Pourquoi les créateurs homosexuels ont-ils en général tant de mal à assumer de parler franchement d’homosexualité, même quand ils prétendent sincèrement le faire ?

 

Certains membres de la communauté homosexuelle se leurrent en pensant que seule l’homosexualité refoulée est facteur de violence et que « de toutes les déclinaisons, la moins néfaste n’est certainement pas l’homophobie intériorisée » (Daniel Borrillo, « Homophobie », dans le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 255). Le sujet homosexuel peut devenir homophobe après s’être « assumé » pleinement homosexuel, comme c’est le cas avec « Sébastien » (cf. l’autobiographie Ne deviens pas gay, tu finiras triste (1998) de Sébastien). On le voit également à travers l’article de Manuel Puig, « El Error Gay », publié dans le journal argentin El Porteño en 1990, dans lequel l’écrivain fait une critique sévère du « milieu homosexuel ». Ou encore à travers les mots de l’écrivain Berthrand Nguyen Matoko, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004) : « Je me demandais pourquoi les choses n’étaient pas si simples entre garçons, pourquoi la médisance avait cours dans nos esprits. […] Je me butais à dire que j’étais rejeté par ce même milieu, tout en le fréquentant assidument. Je savais que je me contredisais. Pire, j’avais tendance à me positionner en victime vis-à-vis à d’eux. […] On se haïssait. On se scrutait en chiens de faïence. Ainsi allaient nos humeurs. […] Des liens de rivalité et de dépendance, des uns par rapport aux autres, s’installèrent par la suite. Nous étions en fait des assoiffés du renouveau et du sexe, même si , nos mœurs nous obligeaient à une pseudo convivialité. » (p. 141)

 

On entend très souvent de la part des personnes homosexuelles une attaque féroce du « milieu homosexuel », surtout à travers la Gay Pride. C’est sensiblement les mêmes discours sur l’exhibition et la discrétion qui reviennent sur le tapis (genre « ‘Ils’ donnent une mauvaise de nous. Tous les homos n’ont pas une vie sexuelle débridée et des plumes dans le cul ! ») : « Dans la réalité, une mouvance gay s’exprime dans les médias d’une manière provocatrice qui me dérange et le tapage médiatique qui en résulte offre une vision unilatérale de l’homosexualité. » (Jean-Michel Dunand, Libre (2011), p. 132) Le plus gênant, à mon sens, dans ces plaintes – lâches mais compréhensibles – , c’est qu’elles sont démobilisatrices, et surtout, elles déplacent et réduisent la critique des actes homosexuels à une simple question de visibilité, de paraître (« Après tout, les homos/nous font/faisons bien ce qu’ils veulent/ce que nous voulons, à partir du moment où ça ne se voit pas… »). Elles ne règlent absolument pas la question morale des actes homosexuels. En cela, je trouve que la demande du fameux « droit à l’indifférence » pour se fondre dans la masse, la revendication d’une homosexualité invisible et belle dans la fidélité, la critique homosexuelle de la Gay Pride, si et seulement si elles ne donnent pas lieu à une reconnaissance et à une remise en cause des actes homosexuels privés, sont des démarches particulièrement homophobes. À travers beaucoup de récits d’auteurs homosexuels dépeignant avec amertume et cynisme la soi-disant superficialité du « milieu », on décèle une forme de déni de leurs propres actes, d’auto-punition d’être tombés dans les panneaux qu’ils dénoncent. Dans tous les cas, on ne sort pas la tête de l’eau, et le débat sur la nature et le sens du désir homo passe à la trappe… pour laisser du coup un espace vacant à une homophobie croissante.

 

Par exemple, dans le roman Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, Ednar effectue un va-et-vient entre mensonge et caricature d’affirmation de soi, par l’homosexualité. Il est libéré sans être libre : « Après quelques années de retrait en marge du combat contre l’intolérance, je ressentis tout à coup le besoin d’exprimer au grand jour mon identité sexuelle. […] Cette prise de conscience, bien que tardive, faisait de moi un homme libre, oh, que dis-je ! Un homosexuel totalement libéré… » (p. 185)

 

Les artistes homosexuels savent implicitement que leur public le plus impitoyable, ce n’est pas les personnes dites « hétérosexuelles » mais bien les membres antipathiques de leur propre « famille homosexuelle ». « Je suis lesbienne. Donc quand je vais voir un film qui parle du sujet, je suis la pire ! » (Océane Rose-Marie se décrivant sur le qui-vive pendant qu’elle voyait « La Vie d’Adèle » au cinéma, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Out » (2014) de Maxime Donzel) ; « Les mêmes folles qui s’étaient hystérisées dans les manifs du FHAR – le Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire – étaient prêtes à brûler théâtres et cinémas où l’on jouait La Cage aux folles. Et à cribler d’épingles des figurines à l’effigie de Jacques Chazot, copieusement honni, et qui donna pourtant à la follitude quelques-unes de ses lettres de noblesse. » (cf. la revue Têtu, n°135, juillet-août 2008, p. 72) À la question « Ça vous gênerait d’avoir un public uniquement gay ? », Pascal Rocher, metteur en scène homosexuel, répond en boutade : « Oui. Parce qu’ils ne sont pas faciles, ils sont sans pitié ! » (cf. le magazine Égéries, n°1, décembre 2004/janvier 2005, p. 95) ; etc. Par exemple, le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture » (« Out », 2014) de Maxime Donzel, méprise le coming out du chanteur Ricky Martin comme s’il avait été un manque de courage, car il l’aurait fait parce qu’il était en fin de carrière et aurait voulu vendre son livre. De nombreuses personnes homosexuelles médiatiques continuent de nous prouver qu’elles ont fait concrètement l’expérience de l’homophobie homosexuelle, et que l’homophobie hétérosexuelle n’est qu’un mythe. Mais malheureusement, nous persistons à nous boucher les oreilles pour contenter notre propre haine des couples femme-homme réussis et préserver nos illusions amoureuses !

 

Nos illusions paternalistes et maternalistes aussi ! Entre elles, même les personnalités homosexuelles médiatiques et « assumées », peuvent s’écharper comme jamais. C’est ce qui s’est passé lors de l’émission On n’est pas couchés de Laurent Ruquier diffusée le 20 octobre 2018 sur la chaîne France 2, pendant laquelle Muriel Robin, Marc-Olivier Fogiel et Laurent Ruquier (je ne compte même pas Christine Angot) se sont ligués contre le jeune chroniqueur homo Charles Consigny, à propos d’un désaccord sur la GPA (Gestation Pour Autrui).
 

 

Pour clore ce long exposé sur l’homophobie homosexuelle, j’avais envie de finir par un best of de tous les témoignages (mal connus du grand public puisqu’ils ne résonnent qu’en coulisses) de ces personnalités homosexuelles qui, en croyant bien faire et défendre courageusement leur Patrie LGBT, sont revenues du champ de bataille blessées – et abasourdies ! – par les balles qu’elles ont reçues, non de la part de l’« ennemi hétérosexuel » du devant, mais de l’ennemi homosexuel qui se tenait derrière elles et qui était censé logiquement les couvrir ! :

 

« Je ne pensais pas qu’il y avait autant d’intolérance chez les homos. Ils se plaignent à longueur de journée de ne pas avoir tel ou tel droit et ils ne sont même pas unis entre eux.[…] Les seuls papiers méchants que j’ai eus dans la presse, c’était dans la presse gay. Quand je suis sorti de ‘La Ferme’, j’ai eu 10000 lettres de fans, et six lettres d’insultes qui venaient toutes de gays. » (Vincent McDoom dans le magazine Égéries, n°1, décembre 2004/janvier 2005, pp. 52-55) ; « Sache qu’on ne m’a pas classé dans une catégorie après mon passage à la télé. Certes, je suis l’homo de service à mon boulot et c’est pour rire que mes collègues balancent des blagues sur les pédés. Mais les gens veulent me connaître pour mes qualités et mes défauts, pas pour mon homosexualité. Ce qui est amusant, c’est que ce sont les homos qui me caricaturent en s’imaginant que j’aime les mêmes choses que les folles, qui fréquentent le milieu. Les homos sont intolérants. » (cf. un extrait d’une lettre de Jérôme qui a été l’invité remarqué de l’émission Jour après Jour de novembre 2000 sur France 2, et qu’il m’a écrite personnellement en 2001) ; « Avec Clovis [Cornillac], nous avons été surpris de la petite polémique qu’il a pu y avoir à la sortie cinéma de ‘Poltergay’, concernant le côté homophobe ou homophile du film. On est vraiment tombés des nues. » (Éric Lavaine, le réalisateur du film « Poltergay » (2005), cité dans Le Cinéma français et l’homosexualité (2008) d’Anne Delabre et Didier Roth-Bettoni, p. 57) ; « J’ai été mieux perçu par les rappeurs que par les homos. » (le rappeur gay Monis à l’émission Homo Micro de Radio Paris Plurielle le 1er mars 2010) ; « J’ai plus souffert dans le milieu LGBT que dans le milieu du rap [pourtant réputé homophobe]. » (ce même rappeur, cette fois à l’émission Homo Micro du 25 avril 2011) ; « J’ai eu beaucoup plus de problèmes avec les femmes qu’avec les hommes. Les mecs m’ont toujours accepté à 85% avec mon penchant pour les filles. Les filles ne m’ont pas accepté à 85% avec mon penchant pour les mecs. » (Christine, intervenante bisexuelle, huée par le public de l’émission Ça se discute, diffusée sur France 2 le 18 février 2004, parce qu’elle a osé dire tout haut que l’homophobie était plus homosexuelle qu’« hétérosexuelle ») ; « Curieusement, du côté hétérosexuel, je n’ai jamais eu d’ennemis. Évidemment, il existe toujours quelques vrais conservateurs. Mais mes pires ennemis, je me les suis fait parmi les homos. » (Rosa Von Praunheim dans le documentaire « 68, Faites l’amour et recommencez ! » (2008) de Sabine Stadtmueller) ; « Magnus Hirschfeld fut tellement détesté non seulement par les antisémites, mais aussi par certains homosexuels allemands. » (Philippe Simonnot, Le Rose et le Brun (2015), p. 117) ; « Vous prêchez la compréhension, la tolérance et puis vous vous attaquez aux autres. Seulement parce que quelqu’un a une opinion différente. Est-ce une manière de penser démocratique et éclairée ? C’est de l’ignorance, parce qu’il ignore le fait que d’autres peuvent avoir une opinion différente, aussi digne de respect que la sienne. Domenico a ses idées, il a fait certains choix. Elton John a fait des choix différents. Différents choix, différentes vies. Respect égal. Je constate, surtout en ligne, qu’il y a beaucoup d’homosexuels qui sont homophobes : des homosexuels qui attaquent d’autres homosexuels qui expriment des idées différentes des leurs. » (Gabbana, le styliste homosexuel qui a exprimé en mars 2015, avec son ex-compagnon Dolce, son opposition à l’adoption par les couples homos, et son indignation face à l’appel au boycott de leur marque de prêt-à-porter par le chanteur Elton John) ; « Je ne connais pas du tout ce milieu. Je ne sais pas s’il a ses cadres. Je le vis en homme libre. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; etc.
 

Tweet daté du 27 octobre 2018


 

José Mantero, l’ex-prêtre catholique, raconte qu’au moment de son coming out dans la revue gay espagnole Zero en février 2002, ses deux ennemis ont été la hiérarchie catholique, et, à sa grande surprise, les membres des mouvements homosexuels officiels, « les dirigeants gay du moment, trop préoccupés par leur propre ascension personnelle » (José Mantero, « Doce Días De Febrero », dans l’essai Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, pp. 189-194). Lors de la sortie du livre-bombe Le Rose et le noir (1996), on couvre d’insultes le pourtant très objectif Frédéric Martel qui a décrit la censure qui sévit dans le « milieu homosexuel », notamment au moment de l’apparition du Sida en France : « Un gay trahit les gays » (cf. propos rapportés dans l’essai La Politisation de l’ordre sexuel (2008) d’Albert Le Dorze, p. 103). Dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), Paula Dumont parle de la cruauté et de l’ingratitude d’une grande partie de la population homosexuelle à l’encontre d’un de ses pionniers, André Baudry, ancien séminariste, créateur des thés dansants et de la fameuse « danse du tapis », qui a fondé la première association française ouvertement homosexuelle, Arcadie, et qui a déblayé le chemin de la communauté homosexuelle actuelle. « Il était de bon ton de ricaner derrière le dos de cet homme et je n’ai jamais compris pourquoi. Les gens de gauche le trouvaient trop à droite alors qu’Arcadie était apolitique, les homosexuels honteux lui reprochaient de rendre visible ce qu’ils auraient préféré voir tenu caché, les femmes regrettaient qu’il soit un homme et tous ceux qui n’avaient jamais remué le petit doigt pour améliorer notre sort criaient, quoi qu’il fasse, qu’il se fourvoyait. Tout en laissant braire ces ânes, j’ai adhéré au club et j’ai été de tous les congrès et de tous les débats jusqu’à ce qu’André Baudry finisse par jeter l’éponge. J’ai toujours eu la plus grande estime pour cet homme qui s’était entièrement dévoué à la cause de ses semblables et en qui l’on pouvait avoir toute confiance. […] Il connaissait tous les Arcadiens par leur nom et il avait pour chacun d’eux un mot chaleureux. Merci à vous, cher André Baudry ! » (p. 69) Qui, parmi la jeune génération homosexuelle, connaît ce monsieur ? Et qui, chez les rares militants homosexuels plus âgés qui l’identifient, rendent hommage à celui que la légende actuelle à presque transformer en « pédé bourgeois, honteux » (voire homophobe !) ? Pas grand monde. Par ailleurs, Paula Dumont continue d’évoquer l’homophobie homosexuelle, mais cette fois celle dont elle a fait les frais de la part de son entourage proche. Elle évoque en effet l’inimitié de certaines de ses amies lesbiennes qui ne supportent pas qu’elle ose afficher son homosexualité au grand jour : « Il était manifeste que Catherine était choquée par la visibilité de mon homosexualité. Pour elle, j’étais la représentation, la statue vivante, l’incarnation même du lesbianisme. » (idem, p. 174). Geneviève Pastre, quant à elle, regrette que certaines lesbiennes féministes lui aient reproché d’avoir affiché ouvertement son homosexualité : « J’ai reçu ce boycott du petit monde féministe-lesbien, en pleine figure. » (Geneviève Pastre, De l’amour lesbien (1980), p. 15) Et bien oui ! On a beau jouer le vieux routier du « milieu homosexuel », ce n’est pas pour ça qu’on a compris d’où venait les balles ! En mars/avril 2020, Pete Buttigieg, le candidat homosexuel à la présidentielle des États-Unis parle de la « négativité » de l’électorat gay à son égard… même si, pour rester poli, il met ça sur le compte du fossé générationnel et la violence des réseaux sociaux.

 

Je peux aussi vous parler de mon cas personnel, avec un exemple particulièrement parlant d’homophobie homosexuelle. Le 3 mai 2011, le jour de mon anniversaire, j’ai reçu une véritable pluie de vœux de la part de mes amis, et notamment de mes contacts Facebook. Jamais on ne m’avait autant souhaité mon anniversaire ! Le député UMP, Christian Vanneste, réputé très homophobe, m’a également écrit un simple « bon anniversaire » sur mon mur public Facebook. Il faisait partie de mes contacts car suite à ma participation au duo « Lettre ouverte » que j’avais chanté avec le rappeur Monis (et qui était clairement une main tendue, non une matraque : « Ceci n’est pas une déclaration de guerre. Juste un appel à la paix. C’est notre lettre ouverte. » termine la chanson), je souhaitais poursuivre ce dialogue amorcé, appliquer ce que j’avais défendu, et m’expliquer sur ma démarche. Les vœux de Vanneste étaient donc discrets mais justifiés. Perdus au milieu de 300 autres messages de sympathie, ils ont quand même été identifiés par quelques-uns de mes camarades chroniqueurs de l’émission radio Homo Micro de Fréquence Paris Plurielle, dans laquelle je travaillais bénévolement depuis 2 ans et demi, presque tous les lundis, pour animer la chronique symbolique. L’un d’eux est allé moucharder dans un mail collectif adressé à toute l’équipe radio que « le très homophobe Christian Vanneste avait souhaité un bon anniversaire au Roi des Codes » que j’étais. J’ai bien évidemment réagi, en proposant à ce chroniqueur-Grand-Inquisiteur de fouiller mes 2500 contacts Facebook (et même ma corbeille à papier !) s’il voulait absolument m’associer à tous mes amis et à toutes mes nombreuses lectures pour prouver que j’étais bien le dangereux homophobe qu’il suspectait ! S’en est suivi un échange de mails plus ou moins orduriers, certains me taxant de « traître homophobe » ou me reprochant ma foi catholique. Si ces soi-disant « défenseurs des homos » savaient au moins se relire quand ils rédigent un mail délateur, ça m’éviterait d’avoir à expliquer que les individus homophobes ne se trouvent pas du côté qu’on croit. La preuve en est qu’en m’attaquant, le chroniqueur qui m’a « balancé » auprès des autres, et m’a forcé à quitter l’émission, a terminé son tout premier mail collectif par un aveu qui résume à lui seul tout ce que j’ai essayé de vous expliquer sur l’homophobie de ces militants pro-gays : « Bises homophobes. » Enfin, à l’heure actuelle, le visage 100% homosexuel des attaques et insultes homophobes dont je fais les frais est particulièrement visible sur Twitter : en effet, les seuls qui m’agressent, me traitent de malade mental, m’empêchent de parler d’homosexualité et de l’analyser, ce sont des personnes homosexuelles (ou des personnes bisexuelles se présentant comme « hétéros gay friendly« ) !

 

Les hommes et les femmes homosexuels sont réellement plus exposés à être confrontés à la violence dans leur vie. Ce plus grand risque de violence arrive malheureusement au sein des relations LGBT. En 2002, une étude réalisée par Greenwood et d’autres faisait apparaître que « dans une population représentative on constate statistiquement que le degré de violence dans les relations entre hommes homosexuels était considérablement supérieur au degré de violence des hommes envers les femmes dans une communauté femme-homme. » Greenwood indique que « la fréquence sur 5 ans de violence physique entre des MSM citadins (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes) (22%) était significativement plus élevée que la fréquence annuelle de violence grave (3,4%) ou que le taux annuel des violences totales (11,6%) dans un échantillon représentatif de femmes qui étaient mariées ou en concubinage avec des hommes. »

 

Comme le dit fort à propos l’écrivaine Nina Bouraoui dans l’émission « Culture et dépendances » (diffusée le 9 juin 2004 sur France 3), « avant de combattre l’homophobie des autres, il faut avant tout dépasser notre propre homophobie », et envisager l’homophobie non pas comme un processus extérieur à nous, mais comme un processus intérieur, lié à la nature profonde de notre désir homosexuel. Un désir pour et contre lui-même.

 

Pour finir ce chapitre sur la menace homophobe de la gay friendly attitude, j’aimerais insister sur le grand danger que représente actuellement la banalisation bisexuelle de l’homosexualité chez les personnes pro-gays qui, sous prétexte de faire ce qu’elles veulent et d’avoir la paix pour ne plus être obligées de faire leur coming out ou de rendre des comptes sur leurs actes sexuels (ni aux autres ni à leur partenaire de vie), invitent à ce que le désir homosexuel soit nié, soit mis sur le même plan invisible que les autres désirs, pour être justifié et ignoré dans un même mouvement. « J’ose espérer à l’avenir qu’on ne parlera plus d’orientation sexuelle, que ça deviendra juste un fait naturel. » (une femme trentenaire lesbienne dans le documentaire « Coming In » (2015) de Marlies Demeulandre) Cette homophobie bobo-bisexuelle (particulièrement visible dans le fait divers qui a impliqué un couple lesbien agressé en septembre 2018 à Paris par Arthur, un homme bisexuel), qui ne souhaite plus entendre parler d’homosexualité et qui réduit les individus homosexuels au silence, arrive de manière très forte dans les pays occidentaux. En plus de rajouter du flou sentimentaliste, individualiste et relativiste sur le désir homosexuel, et de déconnecter les êtres humains de leurs actes sexuels, elle est de l’indifférence qui se fait passer pour du respect. Donc elle est redoutable. Je décris ses travers paradoxaux dans le code « Amoureux » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.
 
 

d) Le frère (de sang) du sujet homosexuel se montre parfois particulièrement homophobe :

Le cliché du frère homophobe peut se vérifier dans les faits, comme en témoigne cet homme homosexuel qui a été violé par son frère quand il était petit : « C’est lui qui m’a appris l’homosexualité qu’il me reproche aujourd’hui. Comme s’il ne se souvenait plus de rien. » (Jean-Sylvain dans, Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, p. 55) Par exemple, dans son film autobiographique « Guillaume et les garçons, à table ! » (2013), Guillaume Gallienne raconte que son frère a essayé de le noyer dans la piscine quand ce dernier a appris qu’il avait eu une liaison avec un Noir. Dans la biopic « Vice » (2018) d’Adam McKay, Liz est présentée comme la sœur homophobe : elle s’oppose publiquement au « mariage gay » alors que sa sœur Mary est lesbienne.

 

Applaudir à l’homosexualité de son frère, cela revient concrètement à cautionner qu’on attaque ce dernier parce qu’on ne serait radicalement pas du tout comme lui… Il arrive aussi que le frère soit trop proche de son frangin homo pour se sentir à l’aise avec l’ambiguïté homosexuelle de ce dernier ou bien qu’il partage avec lui le secret d’une blessure : « Ni mon père ni mes frères et sœurs n’eurent le moindre soupçon de ce qui s’est passé. Seul mon frère aîné demeurait l’ennemi et le témoin secret qui nous [le père Basile et moi] liait. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 40) ; « Ti Éloi. Ce dernier, si par hasard il apprenait son terrible secret, lui briserait les os. » (Ednar en parlant de son grand-frère, dans le roman très autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, p. 20) ; etc. Avoir un frère homosexuel renvoie forcément un reflet de sa propre sexualité ! « Il s’entêtait, aboyait, balbutiait, m’adressait des injures de toutes sortes. » (Eddy Bellegueule parlant de son grand frère Vincent, alcoolique et brutal, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 38) ; « C’est vraiment Frédéric qui a réagi le plus mal à ce moment-là. On a vraiment senti ce mouvement de combat en lui-même, ce dégoût. » (Alexandre, témoin homo parlant de son frère cadet Frédéric dit « hétéro », dans l’émission Temps présent spéciale « Mon enfant est homo » de Raphaël Engel et d’Alexandre Lachavanne diffusée sur RTS le 24 juin 2010) ; etc. Dans l’émission Toute une histoire spéciale « Quand ils ont renoncé leur homosexualité, leurs proches les ont rejetés » diffusée sur France 2 le 8 juin 2016, Tony, 19 ans, se dit homosexuel et a un frère jumeau dit « hétéro », Enzo, qui au départ a bien réagi au coming out de son frère pour finalement, par peur des comparaisons, l’insulter : « J’ai eu droit aux insultes. » De mon côté, même s’il affiche un discours gay friendly pour faire bien en société (il se dit pro-mariage-pour-tous), mon frère jumeau adopte à mon égard des attitudes homophobes puisqu’il pathologise (et me réduit à) mon homosexualité (pour me transformer en dangereux « cas » qui aurait gâché sa vie), et qu’il nie complètement mes études sur l’homosexualité.

 

Enfin, je commence à connaître un certain nombre de cas où l’attention et l’empathie qu’a suscitées le coming out d’une personne dans une famille ont réveillé des jalousies cachées (entre un fils « hétéro » et ses parents, entre un frère « hétéro » et son frère « homo »).

 
 

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Code n°181 – Violeur homosexuel (sous-codes : Psychopathe homosexuel / Victime du grand viol reproduisant un autre viol)

violeur homosexuel

Violeur homosexuel

 

 

NOTICE EXPLICATIVE

 

Tous des violeurs ?

 
 

Sujet épineux qui ne manquera pas de choquer les gens qui se victimisent et qui diabolisent leurs ennemis ! Mais tant pis. Je ne suis pas là pour croire aux bonnes et mauvaises intentions, mais pour découvrir le Réel, reconnaître des faits (parfois dramatiques et violents) et défendre l’Amour en actes !

 

Ce n’est pas pour des prunes que dans tous mes écrits, je soutiens que le désir homosexuel est par nature le signe d’un viol parfois réel, ou en tous cas un fantasme de viol (dans le double sens de l’expression : fantasme de violer ou/et fantasme d’être violé)… même si, en disant cela, rien ni personne ne m’autorisé à penser que toutes les personnes homosexuelles sont des violeurs en puissance. Elles sont bien plus violées que violentes (cf. je vous renvoie au code « Viol » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels)… mais à force de croire qu’elles ne sont que violées, une part d’entre elles assouvit son plan secret de vengeance plus régulièrement que prévu !

 

Le visage du violeur homosexuel n’est pas nécessairement porté par celui qu’on attend. On se trompe en beauté si on pense que le violeur homosexuel ne peut être que l’individu adulte (à partir de la quarantaine, environ), masculin, bear ou butch, « actif » sexuellement, adepte des pratiques sado-maso, 100% méchant et malveillant. J’ai vu des hommes et des femmes homosexuels, en apparence innocents, conformes physiquement aux canons de la mode de leur sexuation biologique originelle, jeunes, jouant les fragiles, homosexuels dits « assumés », sincères et « amoureux », frapper quand on s’y attendait le moins ! N’oublions jamais que tout être humain est profondément libre, donc ni « victime à vie », ni « bourreau à vie »… Autant nous pouvons assurer que tout bourreau a été victime, autant on ne pourra jamais dire que toute victime sera plus tard bourreau… et heureusement ! (Merci la résilience !) Or ceux qui l’oublient, afin de diaboliser les violeurs et béatifier les victimes de viol, sont en général des gens qui violent aussi, qui suppriment la liberté humaine en causalisant/personnifiant le viol.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Destruction des femmes », « Milieu homosexuel infernal », « « Première fois » », « Duo totalitaire lesbienne/gay », « Pédophilie », « Cannibalisme », « Vampirisme », « Homosexualité noire et glorieuse », « L’homosexuel = L’hétérosexuel », « Liaisons dangereuses », « Coït homosexuel = viol », « Milieu psychiatrique », « Viol », « Inceste », « Humour-poignard », « Douceur-poignard », « Parricide la bonne soupe », « Méchant pauvre », « Voleurs », « Personnage homosexuel empêchant l’union femme-homme », « Emma Bovary « J’ai un amant ! » », « Se prendre pour Dieu« , « Se prendre pour le diable », « Super-héros », « Couple criminel », « Homosexuels psychorigides », « Amant diabolique », « Androgynie bouffon/tyran », « Homosexuel homophobe », « Voyeur vu », « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été à l’orée des bois », à la partie « Voyeur » du code « Espion », et à la partie « Grands Hommes » du code « Défense du tyran », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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FICTION

a) Le violeur homosexuel : légende ou réalité ?

VIOLEUR 1 psychose

Film « Psychose » d’Alfred Hitchcock


 

Dans les fictions traitant d’homosexualité, une rumeur causalisant le lien entre homosexualité et viol circule autour du héros homosexuel ou de l’homosexualité en général : « Ok, les gars… j’ai peut-être un p’tit problème de violence. » (Océane Rose-Marie parlant de son adolescence, dans son one-woman-show Châtons violents, 2015) ; « Tu sais ce qu’il a fait, monsieur ton fils ? Il a violé le Rovo. » (la Bouchère à Barbara, la mère d’Abram, le héros homosexuel qui a fait de la prison, dans le film « Jagdszenen Aus Niederbayern », « Scènes de chasse en Bavière » (1969) de Peter Fleischmann) ; « Si je me fais violer, ce sera de votre faute. » (Patrik, le jeune adolescent hétérosexuel, en s’adressant à l’agent qui le laisse partir avec ses deux pères homosexuels adoptifs, dans le film « Patrik, 1.5 », « Les Joies de la famille » (2009) d’Ella Lemhagen) ; « T’es tellement fou que tu pourrais tous nous violer ! » (Pénélope au protagoniste principal du one-man-show Jérôme Commandeur se fait discret (2008) de Jérôme Commandeur) ; « Je parie que toi et Peggy, vous faites des trucs aux gosses… » (Santiago s’adressant à Doris la lesbienne, dans la pièce Doris Darling (2012) de Ben Elton) ; « Peut-être qu’elle est folle, qu’elle va nous assassiner ! » (Fanny s’adressant à son mari Jean-Pierre par rapport à Catherine, l’héroïne lesbienne dont elle va tomber amoureuse, dans la pièce Un Lit pour trois (2010) d’Ivan Tournel et Mylène Chaouat) ; « Chaque homme tue celui qu’il aime. » (le maquereau de Davide le jeune héros homosexuel de 14 ans, pendant qu’il se désape avant de le violer, dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso) ; « Mais t’es qu’un connard de psychopathe ! » (Damien insultant Rémi qui lui a donné un coup de serpillère sur la tête en croyant assommer un rat, dans la pièce Soixante degrés (2016) de Jean Franco et Jérôme Paza) ; « Le psycho ! Le psycho !! » (Chanelle en panique au moment de voir l’ombre de Louison la lesbienne dans la grotte, dans l’épisode 86 « Le Mystère des pierres qui chantent » de la série Joséphine Ange-gardien, diffusée sur la chaîne TF1 le 23 octobre 2017) ; « Tu l’as violée, c’est tout ! » (Marcel s’adressant à son « mari » Dominique par rapport à Mireille, dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet) ; « La victime est belle et le crime est si gay ! » (c.f. la chanson « Coeur de loup » de Philippe Lafontaine) ; etc.

 

Il n’y a pas que les personnages dits « hétéros » qui présentent les homosexuels fictionnels comme des « obsédés sexuels » et des « pervers ». La mauvaise réputation provient aussi et surtout des héros homos eux-mêmes, même si elle prend le visage sexiste de la misandrie (beaucoup d’héroïnes lesbiennes prennent les hommes gays pour des violeurs, parce qu’ils ont le malheur d’être nés « mâles »…), de la misogynie (beaucoup de héros gays voient les femmes comme des tigresses et des prédatrices sublimes), de la peur de la sexualité, de la phobie de la génitalité, de l’auto-parodie cynique, voire de l’effroi amoureux (cf. je vous renvoie aux codes « Liaisons dangereuses », « Viol », « Prostitution » et « Femme-Araignée » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels).

 

« J’ai échappé au viol ! » (Mimil, le héros homosexuel parlant des avances de son ami Jeff, dans la pièce Les Babas cadres (2008) de Christian Dob) ; « Pas elle ! Elle va me violer !! » (Camille, l’héroïne lesbienne face à sa nouvelle camarade de cellule carcérale Caroline, avec qui elle formera finalement un couple après sa conversion au lesbianisme, dans le one-woman-show Vierge et rebelle (2008) de Camille Broquet) ; « Pfu, vous êtes pareils tous les deux, Simon et toi, complètement obsédés. Je vais finir par croire que c’est un syndrome homosexuel… Non, en fait j’en suis convaincue ! Un jour, tu vas voir, j’en aurais marre que les pédés parlent que de cul, on dirait que chez vous, si y avait pas le cul, y aurait rien. Vous êtes complètement obsédés, tous. Bande de freaks ! » (Polly, l’héroïne lesbienne s’adressant à ses deux amis gays Simon et Mike, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 25) ; « Coucher avec des filles, c’est un truc de pédés. » (cf. une réplique du film (2004) de Matthew Vaughn) ; « Il y a un tueur en liberté dans cette maison. Et vous avez le profil requis ! » (Giles Ralston s’adressant à Christopher Wren, le héros homosexuel, dans la pièce The Mousetrap, La Souricière (1952) d’Agatha Christie, mise en scène en 2015 par Stan Risoch) ; etc.

 

Quelquefois, le héros homosexuel voit en son amant un violeur : « Je n’avais jamais voulu voir la vraie nature de Jan. […] Maintenant que j’ai vu Jan menacer Gordon, depuis cet instant où il a braqué son automatique vers moi, je sais aussi comment leur empire, leur business s’est édifié… » (Bjorn à propos de son propre amant Jan, dans le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 159) ; « Ton amant gay est un voleur et un assassin. » (Combs au héros homosexuel Price, dans le film « Somefarwhere » (2011) d’Everett Lewis) ; « Non, je n’ai jamais été violé et abandonné comme par ce regard en une seconde et en pleine rue, subtil, sagace, sûr de son harpon et sans remords… Cet homme… s’est retourné tout d’un coup et, me dévoilant son visage d’Archange, m’adressa face à face ce message d’une langueur, d’une ferveur et à la fin d’une férocité qui n’avaient plus rien d’humain… » (Marcel Jouhandeau, Carnets de Don Juan (1947), p. 96)

 

Par exemple, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, c’est au moment où les deux héroïnes (Ronit et Esti) se retrouvent toutes les deux dans un bosquet pour se dire leur amour que Ronit dit à Esti qu’elle « a l’air d’un tueur en série » (p. 139) Dans le film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell, Mélodie arrive chez son amante Charlotte avec une robe de soirée assez sexy. Elle qui passe ses journées à gérer des affaires de viol en cour d’assise, elle n’en revient pas de voir Charlotte se transformer en violeuse à son encontre, hors d’un contexte professionnel. « C’est un vrai appel au viol, ton truc… » s’en amuse au départ Charlotte, qui devient de plus en plus insistante (« En fait, t’as fait ça pour me rendre dingue ! »), au point d’inquiéter Mélodie : « Mais arrête ! ». Finalement, Mélodie se laisse faire : « Alors c’est que ça ? Faut que je te fuis pour que tu me rattrapes ? ». Dans l’épisode 1 de la saison 1 de la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, Adam, le héros homosexuel, est présenté comme un psychopathe, un monstre (Aimee le surnomme « Bitzilla »). Éric, son futur amant, avertit Otis qu’ « Adam va le tuer dans sa propre maison ».

 

Par peur ou fantasme de donner crédit à cette croyance populaire au lien de causalité viol/homosexualité (pas totalement infondée non plus, car le désir homosexuel et les actes qu’il implique sont par nature semi-sincères semi-violents), certains personnages homosexuels prennent l’image du violeur homosexuel pour une vérité sur eux-mêmes, pour un ordre et un modèle. Ils intériorisent alors le fantasme de violer vraiment : « Je l’aurais violée sur-le-champ, si j’avais pu. » (Suzanne à propos de son amante Héloïse, dans le roman Journal de Suzanne (1991) d’Hélène de Monferrand, p. 305) ; « Déshabille-toi et j’arriverai. Comme l’homme du rêve… » (Léopold, le héros homosexuel s’adressant à son amant Franz qui vient de lui raconter le rêve incestueux et effrayant qu’il faisait étant jeune à propos de son beau-père, dans la pièce Gouttes dans l’océan (1997) de Rainer Werner Fassbinder) ; « Je vais t’égorger, tu le sais, ça ? » (Guen, le héros homosexuel, parlant à Stan, dans la pièce Les Favoris (2016) d’Éric Delcourt) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « La Vie privée de Sherlock Holmes » (1970) de Billy Wilder, Holmes (très homosexualisé dans le film) s’amuse à passer pour le violeur de Gabrielle. Dans le one-man-show Raphaël Beaumont vous invite à ses funérailles (2011) de Raphaël Beaumont, le protagoniste principal part à la recherche de son violeur (« Quand j’étais enfant, j’ai été violé. Franchement, c’était génial. Et ce site m’a permis de retrouver la trace de mon violeur. Et je suis drôlement content d’avoir retrouvé mon grand-père. ») et incite les membres du public à devenir violeurs eux-mêmes (notamment en répondant à un questionnaire sur le site fictionnel « syndromedestockholm.com » : « Quel genre de psychopathe êtes-vous ? »). Dans la pièce Jerk (2008) de Dennis Cooper, il est fait référence à « l’obsession de violence » chez les personnages homosexuels. Dans l’épisode 98 « Haute Couture » de la série Joséphine ange gardien, Dallas, l’assistant-couturier homo de la créatrice Cecilia, veut mettre hors d’état de nuire Hélène, la première d’atelier concurrençant Cecilia, et décrit sa stratégie arachnéenne pour s’en débarrasser proprement : « Je sais ! Je l’intimide avec mes ciseaux crantés, je la saucissonne à la dentelle de Calais, et je la planque dans un rouleau de taffetas noir. Tout ça avec des gants : pour ne pas laisser d’empreintes. »

 

Le violeur homosexuel commence par s’auto-persuader qu’il ne viole pas quand il essaie d’exercer son emprise psychologiquement sur son amant. « N’ayez crainte, je n’ai pas l’intention de vous violer, mais seulement de vous interroger. » (Cyrille, le héros homosexuel s’adressant au journaliste, dans la pièce Une Visite inopportune (1988) de Copi) Il fait souvent porter à sa victime son propre discours de l’évidence, une évidence en général infondée et qui n’est le signe que de son attachement à ses pulsions, à ses projections identitaires et amoureuses. Par exemple, dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, il est très souvent question de la défense de la « prédestination » dans les rencontres amoureuses. Celles-ci seraient déjà écrites d’avance, ne se choisiraient pas, et devraient obligatoirement se vivre. Ce film offre une vision totalement déterministe et peu libre de l’amour : « Il n’y a pas de hasards. » dit Emma à son amant Adèle qu’elle vampirise. Le violeur homosexuel voit des « signes » et des « confirmations » de ses désirs partout.

 
 

b) Le violeur homosexuel passe effectivement à l’action :

Dans certaines créations homo-érotiques, il arrive que le personnage homosexuel viole des femmes (cf. je vous renvoie avec insistance au code « Destruction des femmes » et à la partie « Prostituée tuée » du code « Prostitution », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : cf. la comédie musicale Se Dice De Mí En Buenos Aires (2011) de Stéphane Druet (avec Pedro, le héros homosexuel, infligeant une séance de torture à Claudia avec sa guitare), le one-woman-show Betty Speaks (2009) de Louise de Ville (avec la figure lesbianisé d’Angelina Jolie en violeuse), le film « Frankenstein Junior » (1974) de Mel Brooks (avec Dracula, le vampire efféminé), le film « Hécate, maîtresse de la nuit » (1982) de Daniel Schmid (avec Julien, le jeune ambassadeur qui violente Clotilde), le film « Kaboom » (2010) de Gregg Araki (avec la violeuse lesbienne Lorelei), le film « Je suis une nymphomane » (1970) de Max Pécas, le film « Naissance des pieuvres » (2007) de Céline Sciamma, le film « Kill Your Darlings » (2014) de John Krokidas, etc.

 

« Je te fends la chatte ! » (Venceslao parlant à Mechita dans la pièce L’Ombre de Venceslao (1999) de Copi) ; « Comme j’utilise le mot ‘chatte’, j’passe par un violeur en puissance. » (Max dans la pièce Penetrator (2009) d’Anthony Neilson) ; « Ayez pitié d’une pauvre femme par-dessus vieille ! J’allume la boule. Vous la voyez votre petite Delphine pendue ? Monsieur, me dit-elle, je me sens mal. Mes sels ! Je la gifle. Je l’attrape par les cheveux, lui cogne le front contre la boule de cristal, elle râle, elle s’affaisse sur sa chaise, elle a une grosse boule bleue sur le front, un filet de sang coule de son oreille. En bas on entend le bruit régulier de la caisse, je regarde par la fenêtre, le boulevard Magenta est toujours le même. La vieille continue de râler, je l’étrangle, elle meurt assise. Je me recoiffe de mon peigne de poche, j’enfile mon imperméable. » (le narrateur homosexuel parlant de Mme Audieu, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 89) ; « Il paraît que c’est un truc de pédés, d’homos refoulés, les mecs qui niquent des gonzesses dans tous les coins. » (Fred à son futur copain Greg, dans le film « Les Infidèles » (2011) de Jean Dujardin) ; etc.

 

VIOLEUR 2 Parle avec elle

Film « Hable Con Ella » de Pedro Almodovar


 

Par exemple, dans « Hable Con Ella » (« Parle avec elle », 2001) de Pedro Almodóvar, on découvre avec étonnement à la fin du film que l’infirmier homosexuel Benigno a violé la patiente dans le coma qu’il veillait pourtant jour et nuit à l’hôpital avec une sollicitude quasi maternelle. Dans la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia, Didier, le héros homosexuel qui était jadis en couple avec sa copine Yvette, avoue qu’il « a eu le malheur de l’aimer à outrance ». Dans la pièce Le Choc d’Icare (2013) de Muriel Montossey, Romain, le héros homosexuel, séquestre Ariane. Dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi, Mr Alouette est le violeur de « Madame ». Dans le film « Maigret tend un piège » (1958) de Jean Delannoy, Marcel Maurin, le personnage homosexuel (doté d’une mère castratrice), tue des femmes. Dans le film « Vil Romance » (2009) de José Celestino Campusano, Roberto, l’un des héros homosexuels, ne supportant pas d’être dragué par Alejandra, la maltraite violemment et la fout sous la douche ; plus tard, il dira à la jeune femme : « Moi, je t’aurais déjà tuée ! » Dans la pièce Perthus (2009) de Jean-Marie Besset, Charlène accuse Jean-Louis, le héros homosexuel, de l’avoir violée. Dans la pièce Carla Forever (2012) de Samira Afaifal et Yannick Schiavone, Angelo, l’un des héros homos refoulés, après sa tentative de kidnapping de Carla Bruni dont il dit être fou amoureux, est activement recherché par la police. Dans le film « Strangers On A Train » (« L’Inconnu du Nord-Express », 1951) d’Alfred Hitchcock, Bruno, le héros homosexuel, va essayer d’étrangler une vieille femme bourgeoise désirant connaître la sensation d’étouffement. Dans le film « I Love You Baby » (2001) d’Alfonso Albacete et David Menkes, Daniel montre à son amant Marcos la scène d’un film de merde où il a joué un petit rôle secondaire d’un homme cagoulé qui agresse une femme dans une ruelle urbaine ; il commente la scène en prenant un malin plaisir à rentrer dans la peau de son personnage (« Ici, c’est moi, cagoulé. […] T’as vu comme je sors mon couteau. […] Bouge pas, salope, ou je te bute ! »). Dans le film « Matador » (1985) de Pedro Almodóvar, Angel (Antonio Banderas) suit en filature une fille dans une rue pendant la nuit et la viole sur le capot d’une voiture, en écoutant intérieurement la voix de son professeur de corrida : « Les filles, c’est comme les taureaux. Faut les choper quand elles s’y attendent le moins. » Dans la pièce Big Shoot (2008) de Koffi Kwahulé, Stan, le personnage homosexuel, enfonce un tisonnier dans le sexe de la femme bourgeoise qu’il tue au moment de lui faire l’amour. Dans le roman Journal d’Adam (1978) de Knut Faldbakken, une femme est battue par le héros homosexuel. Dans le roman Si j’étais vous (1947) de Julien Green, Paul Esménard tue Berthe par strangulation : « Il saisit le cou de Berthe dans ses doigts. Pendant une seconde, elle eut le temps de crier, mais d’une simple pression de pouce il la fit taire. […] Paul avança, posa la femme sur le lit et reconnut alors qu’elle était morte. Un peignoir blanc et mauve recouvrait son petit corps potelé qui semblait presque celui d’une enfant. » (pp. 115-116) Dans le film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré, tous les personnages sont des violeurs : par exemple Bacchus a « abusé de plein de pauvres filles », les bacchantes se ruent sur Penthée et le dévorent, la naïade viole le bel Hermaphrodite, Jupiter viole Europe, etc. Dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson, Vincent, le héros homosexuel sur le point de se marier avec Sophie, passe son temps à la frapper et à lui gueuler dessus. Il était tout aussi violent avec son ex-amant Stéphane : « Mes coups, parfois, je les retenais pas. Mes mots, oui. » Dans le roman The Girl On The Stairs (La Fille dans l’escalier, 2012) de Louise Welsh, Alban Mann traite sa propre fille de « pute » (p. 18), et finira par la tuer, comme il a assassiné sa femme Greta, elle-même prostituée « professionnelle ». Dans le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, Sarah harcèle son amante Charlène, au point que celle-ci en vient au main et l’étouffe avec un coussin. Dans le roman The Girl On The Stairs (La Fille dans l’escalier, 2012) de Louise Welsh, le skinhead gay tente d’agresser sexuellement Jane la lesbienne : « Le rire de ce skinhead éméché résonna contre les murs, aigu et efféminé » (p. 95) Dans la pièce Jardins secrets (2019) de Béatrice Collas, Maryline, l’héroïne bisexuelle, est inculpée pour homicide involontaire sur son mari Gérard qui l’a violée et harcelée. Dans le film « Pédale dure » (2004) de Gabriel Aghion, Seb et Loïc, couple homo, harcèlent leur meilleure amie Marie et l’empêchent d’être heureuse et d’avoir une vie amoureuse avec un homme, Charles. Dans l’épisode 5 « Circé » (saison 2) de la série Astrid et Raphaëlle (2020), Cécile Maignant se fait violer par le Dr Lavandier, un médecin super maniéré et efféminé.

 

Dans le film « Mommy » (2014) de Xavier Dolan, Steve, le héros homosexuel, s’en prend aux femmes de son entourage, et surtout à sa mère, qu’il bat, tente de draguer, tripote à sa guise et embrasse de force sur la bouche : « T’aimes bien quand j’te chope comme ça, hein ? ». Celle-ci se rend compte que « Steve, c’est un violent. » Steve ne maltraite pas que sa maman : il tente de s’attaquer à Kyla, la voisine, mère au foyer qui se défend violemment : « Tu ne me touches plus ! »
 

Dans le film « Le Roi de l’évasion » (2009) d’Alain Guiraudie, Armand, le héros de 43 ans, vit une relation pédophile avec Curly, une fillette de 16 ans alors qu’il était pourtant exclusivement homosexuel. Ils sont arrêtés par les flics sur un lieu de drague homosexuelle pour cause d’exhibitionnisme. Et lorsque Armand essaie de se valoir qu’il ne peut pas être pédophile puisqu’en temps normal il est homosexuel et seulement attiré par les hommes plus âgés que lui, le chef de la police lui laisse entendre que ce n’est absolument pas contradictoire, et que la pédophilie fait imparfaitement miroir à l’homosexualité et au goût incestuel de la vieillesse : « Le fait que vous aimiez les vieux m’incite à penser que vous aimez aussi les jeunes filles. » À la fin du film, la nature violente de l’amour exceptionnel qu’Armand porte à Curly se déclare. Lors de leur fugue amoureuse notamment, il la force à la sodomie, et Curly le prend très mal (« Arrête !!! T’es vraiment un connard ! […] Ça te fait quoi de me faire des coups comme ça ? »). Une fois que le père de la fillette retrouve le couple en cavale, Armand nie le viol : « Ça va, c’est bon, j’l’ai pas violée ! » Un peu plus tard, les amoureux prennent à nouveau la fuite. Curly se met à croire au grand Amour. Mais lassé de son idylle hétérosexuelle, Armand a un comportement très surprenant à l’égard de son amoureuse : à la fin du film, pour se débarrasser d’elle, il la ligote de force et l’abandonne dans la forêt. Il retourne à sa vie d’homo d’avant, en couchant avec des vieillards…

 

Dans la série 13 Reasons why (2018), Montgomery de la Cruz (alias Monty) viole Tyler avec un balai dans les toilettes dans le dernier épisode de la saison 2 (ce qui a fait grand bruit parmi les fans car la scène était extrêmement choquante). Dans l’épisode 5 de la saison 3, Winston fait une fellation en secret au même Monty à l’occasion d’une fête lycéenne et ce dernier finit par le tabasser quand son jeune amant lui demande s’ils peuvent se revoir en public : une fois arrêté pour le viol de Winston dans l’épisode 13 de la saison 3, Monty finit par avouer qu’il a une attirance pour les hommes face à son père au parloir de la prison.
 

Le viol des protagonistes féminines n’est pas uniquement le fait des héros homosexuels mâles. Il est aussi opéré parfois par des personnages lesbiens qui fantasment de se comporter en hommes violents : cf. le film « Chloé » (2009) d’Atom Egoyan (avec Chloé, l’amante intrusive), le film « Haute Tension » (2003) d’Alexandre Aja (avec Cécile de France en lesbienne psychopathe), le film « Intrusion » (2003) d’Artemio Benki (avec l’auto-stoppeuse dangereuse), etc. Par exemple, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, Alexandra, la bourgeoise, viole sa petite voisine de 14 ans : « J’avais imaginé un moment demander à la petite voisine de passer me voir afin de faire ensemble ce que je l’avais obligée à faire seule devant moi, sachant combien j’aimais à outrepasser la pudeur des autres, pour le plaisir que son viol me donnait. Cette envie ne me quittait pas, mais je devais résister, c’était trop risqué. J’avais peur de moi. Quand je sentais monter ce besoin de chair, peu m’importaient les moyens et la figure de celle qui me donnerait ce qu’il me fallait. » (p. 57) Elle renouvelle l’expérience sur une cousine de son âge, adulte comme elle : « Je me rappelle qu’avant son départ, le matin, pratiquement contre sa volonté, par la faim que j’avais encore d’elle, je l’ai presque forcée, ainsi que le ferait un homme, allant au plus près du désir, comme un mari brutal. Moi qui pourtant ne voulait que sa tendresse. » (p. 72) L’héroïne lesbienne de ce roman ne s’intéresse pas à l’identité de ses amantes, mais plutôt à sa propre jouissance : « J’étais presque exclusivement intéressée par la fente des filles […] à tel point d’ailleurs que leurs visages ou leurs corps m’indiffèrent. » (p. 76) ; « Je me dis : ‘Il m’en faut une, et peu importe la figure qu’elle aura.’ » (p. 79) Elle prend également pour modèle un couple de femmes allemandes (amies de sa cousine) qui pratiquaient elles aussi le viol sur des vierges « hétérosexuelles » : « Ayant fait, si l’on peut dire, le tour des plaisirs les plus ordinaires, elles se mirent en tête que le viol tel que les hommes le pratiquent parfois leur permettrait une beaucoup plus grande liberté quant à leur choix. L’opportunité d’un voyage en Grèce les amena à passer à l’action. Elles voulaient absolument vivre cette sensation de puissance que l’on doit ressentir dans le viol, y prenant comme un plaisir supplémentaire du fait qu’il soit considéré partout comme un crime. » (p. 108) Son but est de voler l’amour et la tendresse à ses amantes, en faisant passer sa violence impatiente pour de la fougue belle, spontanée et accidentelle : « Sachant qu’elle allait partir, avec une énergie et une détermination qui m’étonnèrent moi-même, je me précipitai pour lui prendre un baiser. » (Alexandra face à une jeune religieuse, op. cit., p. 223) ; « Elle m’a prise à nouveau. » (Mathurine, la servante violée par son patron, « Monsieur », qu’elle féminise – « Madame, c’est Monsieur. » – dans la pièce Viol (2014) de Louis Lefèbvre) ; etc.

 

Au départ, comme certains héros homosexuels fictionnels n’assument pas l’existence du désir homosexuel en eux, il arrive qu’ils cherchent à se prouver à eux-mêmes ou à prouver à leur société leur hétérosexualité en couchant avec leur meilleure amie, en violant la « fille à pédés » ou la prostituée : cf. le film « Le Refuge » (2010) de François Ozon (avec Paul se forçant à coucher avec Mousse, ou plutôt la forçant à coucher avec lui), le film « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve (où Vincent, le héros homo, fait l’amour avec Noémie, sa meilleure amie, pour savoir s’il est vraiment homo), le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure (avec Laurent qui se force à coucher avec Carole, sa meilleure amie, un soir d’ivresse, pour se prouver qu’il peut être « hétéro », et qui la viole pendant son sommeil), etc. Par exemple, dans le film « Free Fall » (2014) de Stéphane Lacant, Marc, pour essayer de se persuader qu’il n’est pas homo, tente de violer sa femme Bettina, de la forcer à la sodomie.

 

VIOLEUR 3 Spiderman

Spiderman et Psyché


 

Le personnage homosexuel viole aussi des hommes, et très souvent des amants (cf. je vous renvoie avec insistance aux codes « Parricide la bonne soupe » et « Amant diabolique » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : cf. la pièce Dans la solitude des champs de coton (2009) de Bernard-Marie Koltès, le film « J’ai pas sommeil » (1993) de Claire Denis (avec le tueur en série Thierry Paulin), le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears (avec Fred, le violeur homosexuel), le film « Frisk » (1995) de Todd Verow (avec le psychopathe homosexuel), le film « Notre paradis » (2011) de Gaël Morel (avec un serial killer gay), la série britannique Hit & Miss (2012) d’Hettie McDonald (avec Mia, le tueur en série transsexuel M to F), le film « Homme au bain » (2010) de Christophe Honoré (avec Emmanuel, le héros homosexuel qui a pour habitude de violer ses amants), le film « Du même sang » (2004) d’Arnault Labaronne, le roman Querelle de Brest (1947) de Jean Genet (avec les violeurs Nono et Querelle), le film « Le Dernier train du Katanga » (1967) de Jack Cardiff, le film « Furenchi Doressingu » (1997) d’Hisashi Saito, le roman Cosmétique de l’ennemi (2001) d’Amélie Nothomb, le film « Speeters » (2000) de Paul Verhoeven (avec Eef, l’homosexuel refoulé et « casseur de pédés »), le film « Irréversible » (2002) de Gaspar Noé (avec le Ténia, violeur homosexuel), le film « Sixième Sens » (1986) de Michael Mann, le film « Toute nudité sera châtiée » (1973) d’Arnaldo Jabor, le film « Mad Max » (1979) de George Miller, le film « Midnight Express » (1978) d’Alan Parker, le film « Brubaker » (1980) de Stuart Rosenberg, le film « The Sweet Smell Of Death » (1995) de Wong Ying Git, le film « Gazoline » (2003) de Monica Strambini, le film « L’Épouvantail » (1973) de Jerry Schatzberg, le film « The Glass House » (1972) de Tom Gries, le roman Pavillon noir (2007) de Thibaut de Saint Pol (avec le personnage de Cyril), le film « Él Y Él » (1980) d’Eduardo Manzanos, la pièce Doubles (2007) de Christophe et Stéphane Botti (avec le personnage de Louis), le film « Tremblement de terre » (1974) de Mark Robson, le film « Grégoire Moulin contre l’Humanité » (2002) d’Artus de Penguern (avec Jean-François, le violeur joué par Didier Bénureau), le film « Lonesome Cowboys » (1968) d’Andy Warhol, le film « Sans rémission » (1992) d’Edward James Olmos, le film « Chute libre » (1993) de Joel Schumacher, le film « Amours mortelles » (2001) de Damian Harris, le film « Moon 44 » (1990) de Roland Emmerich, le film « Lucifer-Sensommer : Gul Og Sort » (1990) de Roar Skolmen, le film « Cold Light Of Day » (1990) de Fhiona Louise, le film « All Night Long 2 » (1994) de Katsuya Matsumara, le film « Sac de nœuds » (1984) de Josiane Balasko, le film « Le Dénommé » (1988) de Jean-Claude Dague, le film « Okoge » (1992) de Nakajima Takehiro, le film « Huangjin Daotian » (1993) de Chou Tan, le film « Impasse des vertus » (1955) de Pierre Méré (avec le jeune pompiste truand), le film « Le Grand Pardon » (1984) d’Alexandre Arcady (avec le truand joué par Bernard Giraudeau et tué dans le lit de son amant), la pièce Lacenaire (2014) de Franck Desmedt et Yvon Martin (avec Lacenaire, le criminel), le film « Cannibal » (2005) de Marian Dora, le film « My Night With Andrew Cunanan » (« Ma nuit avec Andrew Cunanan », 2012) de Devin Kordt-Thomas (sur un jeune tueur en série), etc.

 

Par exemple, dans le film « Camionero » (2013) de Sebastián Miló, Randy se fait violer et pisser dessus par un camarade de classe au lycée. Dans la pièce Hors-piste aux Maldives (2011) d’Éric Delcourt, Francis, le seul personnage homosexuel de l’intrigue, tente de violer Stan, l’un des protagonistes hétéros, en profitant chez lui d’un état de faiblesse. Dans la pièce Penetrator (2009) d’Anthony Neilson, les « penetrators » homosexuels exercent des viols à la chaîne. Dans le film « Female Trouble » (1974) de John Waters, Divine joue le rôle d’un violeur homosexuel. Dans le roman Moravagine (1926) de Blaise Cendrars, le personnage de Moravagine incarne la figure du violeur homosexuel androgyne. Dans le film « No Se Lo Digas A Nadie » (1998) de Francisco Lombardi, le héros homosexuel, le jeune Joaquín, âgé seulement de 8 ans, impose le silence à son camarade qu’il a attouché sous la tente en camp scout : « S’il te plaît, ne le dis à personne. » Dans le film « Shower » (2012) de Christian K. Norvalls, le héros homosexuel finit par tuer l’homme qui l’a excité sous la douche à la piscine.

 

Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, le prédateur homo, sans doute client du bar Boys Paradise, emmène de force en voiture le couple Nathan-Jonas dans un établissement gay, La Dolce Vita qui en réalité n’existe pas, pour finalement ne pas les faire descendre et pour tuer Nathan en le frappant. Et pourtant, ce violeur n’avait pas l’air du tout dangereux puisqu’il écoutait à fond dans sa voiture « T’en va pas » d’Elsa, une chanson pour midinette. Nathan, quant à lui, n’avait pas le profil de la parfaite victime, puisqu’il mentait sur son viol, et manipulait Jonas comme un prédateur lui aussi : « T’y avais quand même pas cru à cette histoire de curé ? » (Nathan ayant fait croire à Jonas qu’il a été violé par un prêtre pédophile à 14 ans… pour cacher qu’il a été violé par un groupe de jeunes aux autos tamponneuses à l’âge de 9 ans). Survivant du drame qui a frappé son compagnon Nathan, dix-ans après, Jonas, pourtant chétif à l’adolescence, présente le même profil criminel. Il déclenche une baston au Boys. Et lorsqu’il pénètre dans un hôtel de luxe, L’Arthémis, le standardiste, Léonard, le prend pour un faux doux, un criminel armé, et préfère lui fouiller son sac : « Je sais pas. Je vérifie que t’aies pas d’arme, de couteau. J’en sais rien. Si je reviens et que tout le monde est mort, et que t’as buté tout le monde, on fait comment ? ».
 

« Y yo / pillaba yo » (cf. le poème « Anales » de Néstor Perlongher) ; « Stephen [l’héroïne lesbienne] avait erré jusqu’à un vieux hangar où l’on rangeait les outils de jardinage et y vit Collins et le valet de pied qui semblaient se parler avec véhémence, avec tant de véhémence qu’ils ne l’entendirent point. Puis une véritable catastrophe survint, car Henry prit rudement Collins par les poignets, l’attira à lui, puis, la maintenant toujours rudement, l’embrassa à pleines lèvres. Stephen se sentit soudain la tête chaude et comme si elle était prise de vertige, puis une aveugle et incompréhensible rage l’envahit, elle voulut crier, mais la voix lui manqua complètement et elle ne put que bredouiller. Une seconde après, elle saisissait un pot de fleurs cassé et le lançait avec force dans la direction d’Henry. Il l’atteignit en plein figure, lui ouvrant la joue d’où le sang se mit à dégoutter lentement. Il était étourdi, essayant doucement la blessure, tandis que Collins regardait fixement Stephen sans parler. Aucun d’eux ne prononça une parole ; ils se sentaient trop coupables. Ils étaient aussi très étonnés. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of LonelinessLe Puits de solitude (1928), pp. 38-39)

 

Hubert – « De toute façon vous m’aviez déshonoré bien avant d’avoir déshonoré ma famille. Quant à ma sœur Adeline, ne vous en formalisez pas, je l’avais déshonorée bien avant vous.

Cyrille (le héros homosexuel) – Vous êtes diabolique, Hubert. »

(Copi, Une Visite inopportune, 1988)

 

Certains personnages homosexuels violeurs s’en prennent à des êtres fragiles (cf. je vous renvoie aux codes « Pédophilie », « Vierge » et « Petits morveux » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : « Tu violes des p’tits handicapés de 10 ans : le commun du p’tit pédé. » (Jonathan s’adressant cyniquement à son amant Frank, dans la pièce Fixing Frank (2011) de Kenneth Hanes) ; « Elle était d’une grande beauté, les larmes qu’elle versait donnaient à son visage une expression et un charme extraordinaires. J’avais l’envie presque irrépressible d’abuser d’elle. » (Alexandra, l’héroïne lesbienne du romanLes Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 116), etc. Par exemple, dans le film « Black Swan » (2011) de Darren Aronofsky, Veronika, comme un aigle prédateur, « déniaise » sa camarade de danse Nina, fébrile comme de la porcelaine. Dans le film « Festen » (1998) de Thomas Vinterberg, le père de Christian est un homme impuissant avec les femmes, et qui a violé son fils (qui deviendra plus tard homosexuel). Dans le film « La Caduta Degli Dei » (« Les Damnés », 1969) de Luchino Visconti, Martin Essenbeck viole une fillette juive. Dans le film « Antibodies » (2005) de Christian Alvart, Jürgen Bartsch, 15 ans, assassine et viole des garçons encore plus jeunes que lui. Dans le roman Try (1994) de Dennis Cooper, un couple homosexuel composé de deux pères adoptifs violent leur petit Ziggy.

 

D’autres personnages homosexuels violent en se cherchant un partenaire sexuel plus « fort » qu’eux. Ils deviennent violeurs par omission en quelque sorte, par amant interposé, en se plaçant en victimes, parce qu’ils appellent leur pair « actif » à les pénétrer et qu’ils l’engagent à obéir à leur mise en scène de viol dont ils sont les héros « passifs » : « Pendant un apéro au Boobs’bourg, en attendant les autres, Cody m’avoue qu’à New York il met des petites annonces sur craiglist.org en se faisant passer pour une fille : ‘Comme ça, quand les hommes ils veulent ma chatte, je dis à eux je suis un pédé mais je peux te sucer bien ta bite à fond et avaler ton jus. Ça marche, quoi, les hommes ils ont envie d’une fille parce qu’ils pensent que c’est la seule chose qui les fait bander mais un jour où ils sont en manque ils goûtent à la bouche ou le cul d’un pédé et d’un coup ils se rendent compte que ce qui les fait bander c’est le sexe, et pas une fille, quoi. Je suis comme une sorte de terroriste queer comme j’oblige les hommes hétéros de se rendre compte que tout le monde est pédé, quoi, parce que tout le monde bande pour n’importe qui. » (Cody, le héros homosexuel nord-américain très efféminé du roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 98-99) ; « Il consent à une rencontre, chez moi, mais il ajoute ‘Les yeux bandés. Tu ne dois jamais voir ma laideur repoussante.’ J’accepte. Les jours qui précèdent la rencontre, je les passe dans un état de surexcitation incroyable. Le jour prévu, à l’heure prévue, il frappe trois coups contre la porte, notre code secret. Je place mon bandeau, et j’ouvre en me demandant si je n’ouvre pas ma porte à un voleur, un tueur de sang froid ou un violeur. Peut-être que j’en aurais envie… […] Je referme la porte et tout de suite nous portons nos mains sur le visages de l’autre, pour sentir le bandeau, pour être sûr que le contact est respecté. Il sourit, je sens sous mes doigts sa bouche tendue. Moi aussi je souris. On se prend dans les bras l’un de l’autre et on cherche nos bouches, qu’on s’embrasse voracement, qu’on viole avec la langue. Après un instant, en reprenant notre souffle, il dit ‘Ouhaou, c’est chaud !’ Je le prends par la main. Je me glisse devant lui, et ensemble nous marchons comme un seul homme dans l’appartement, Vianney parfaitement collé à ma nuque, mon dos, mes fesses, mes jambes. » (Mike, le narrateur homosexuel racontant son aventure avec un certain Vianney, op. cit., p. 84) Le viol n’est jamais effectué par une seule personne (= le bourreau), mais bien le produit d’une relation, d’un consentement mutuel, où la victime et son bourreau jouent tous les deux un rôle (même un rôle réduit parfois à celui d’objets qu’ils ne seront jamais) : « Dans le sexe, c’est surtout Claude qui parle, qui dit ‘Maintenant je suis un mec, je viens de te voir passer devant moi dans la rue, je te chope dans un coin sombre et je te baise comme la belle salope que tu es…’ Polly aime bien être passive, ça l’arrange que Claude veuille toujours être dominante. » (Mike parlant du couple lesbien Claude-Polly, op. cit., p. 74)

 

Dans son obsession pour le corps et la beauté de son amant, le personnage homosexuel montre parfois l’impatience cannibale du violeur, ses pulsions de possession : « Je veux sa bouche. Je veux son cul. Il est à moi ! » (Lennon parlant de Martin dans la pièce Scènes d’été pour jeunes gens en maillot de bain (2011) de Christophe et Stéphane Botti)

 
 

c) Comment le héros homosexuel en arrive-t-il à passer à l’acte odieux ?

VIOLEUR 3 Lit

Film « Jeanne Dielman » de Chantal Akerman


 

Le violé devient parfois violeur. Par exemple, dans le roman Radcliffe (1963) de David Storey, Léonard Radcliffe, soumis au joug de son amant Vic, avoue son propre despotisme sous-jacent : « Le pire dans tout ça, c’est qu’une partie de moi l’aime et l’autre partie de moi ne lui sera jamais soumise. » D’ailleurs, à la fin de l’histoire, lui qui était jadis homosexuel soumis et passif, finit par tuer Vic et par devenir l’homosexuel actif et prédateur une fois incarcéré. Dans le roman Baise-moi (2002) de Virginie Despentes, Nadine et Manu, les deux héros transsexuels M to F violés, deviennent aussi violents que leurs agresseurs. Dans le film « The Talented Mister Ripley » (« Le Talentueux M. Ripley », 1999) d’Anthony Minghella, Tom, le héros homosexuel, se retrouve embarqué dans une série de meurtres en cascade parce qu’il a découvert l’ambiguïté homosexuelle du jeu de son premier amant, Dick, qu’il a tué accidentellement et par légitime défense. Il tue au moins trois hommes et se comporte comme un parfait manipulateur.

 

Dans les œuvres traitant d’homosexualité, il existe très souvent un ambigu rapport idolâtre d’attraction-répulsion, d’imitation (involontaire ?), d’amour, entre la victime et son agresseur. « De ma vie, je ne m’étais jamais fait baiser sans le vouloir. Je sais maintenant que tout peut arriver. Et que, même sans le vouloir, on peut aimer cela. » (Bjorn, l’un des personnages homosexuels, dans le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 154) ; « J’adore qu’on profite de moi. […] Personne ne me force. » (Matthew Ferguson, le gigolo du film « Eclipse » (1995) de Jeremy Podeswa) ; « Je ne criais jamais, j’étais tellement heureuse d’être ton objet, d’exister. » (Cécile à son amante Chloé dans le roman À ta place (2006) de Karine Reysset, pp. 39-40) ; « J’ai envie d’être l’outil de sa jouissance. » (la narratrice lesbienne parlant de son amante, dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, p. 65) ; « ’Tu désires l’abomination.’ Il ne pouvait y croire au début. Lui qui avait souffert des attentions de Goudron se transformait maintenant en Goudron ! Cela ne pouvait pas être vrai. Pourtant, c’était vrai ! » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, parlant de son élan homosexuel pour le jeune David, suite à l’attachement pédophile de Goudron, un écrivain bien plus âgé que lui et qui l’avait courtisé, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 177) ; « Ce que j’aurais fait à cette époque de ténèbres, d’autres me l’avaient fait. » (idem, p. 441) ; etc. Par exemple, dans la pièce Dépression très nerveuse (2008) d’Augustin d’Ollone, le Dr Labrosse fantasme de se faire violer par un jeune Sénégalais de 16-17 ans appelé « Babacar ». Dans le film « Una Giornata Particolare » (« Une Journée particulière », 1977) d’Ettore Scola, plus Antionetta, la femme au foyer, rêve d’être violée par son voisin de pallier homosexuel Gabriele, plus elle joue la saint-nitouche persécutée qui se fait des gros films : « Allez-vous-en ! Allez-vous-en, je vous en supplie ! » Elle embrasse de force Gabriele sur la bouche quand celui-ci lui avoue qu’il est homosexuel. Vexé d’avoir été pris pour un macho qui allait satisfaire une femme mariée désireuse de « se faire sauter sur la terrasse » de l’immeuble, et aussi pour se venger de son double jeu, il finit par la violenter vraiment : « Je ne suis pas le Superman viril que tu attendais !! »

 

Le basculement de rôles violé/violeur est symbolisée d’une manière très particulière dans les fictions homo-érotiques. La victime homosexuelle d’un viol se voit généralement inculpée d’un meurtre qu’elle n’a pas voulu commettre et auquel elle a été poussée par son tortionnaire. Par « légitime défense », elle reproduit le viol : cf. le film « Légitime violence » (1982) de Serge Leroy, le roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1976) de Manuel Puig, les films « Dial M For Murder » (« Le Crime était presque parfait », 1954), « Torn Curtain » (« Le Rideau déchiré », 1966), « Psycho » (« Psychose », 1960), et « Marnie » (« Pas de printemps pour Marnie », 1964) d’Alfred Hitchcock, le film « Ossessione » (« Les Amants diaboliques », 1943) de Luchino Visconti, le film « Volver » (2006) de Pedro Almodóvar, le film « Bas fond » (1957) de Palle Kjoerulff-Schmidt, le film « Les Voleurs » (1996) d’André Téchiné, le film « La Triche » (1984) de Yannick Bellon, le film « Boys Don’t Cry » (1999) de Kimberly Peirce, le film « Flying With One Wing » (2002) d’Asoka Handagama, le film « Le Roi et le clown » (2005) de Lee Jun-ik, le film « La Victime » (1961) de Basil Dearden, le film « Pouvoir intime » (1987) d’Yves Simoneau, l’autobiographie Parloir (2002) de Christian Giudicelli (avec Kamel), etc.

 

Par exemple, dans son roman Le Conformiste (1951), l’écrivain Alberto Moravia décrit l’évolution de Marcel, une jeune victime d’attouchements sexuels qui tue par accident son agresseur. Dans le film « Moonlight » (2017) de Barry Jenkins, Chiron, le jeune héros homosexuel, pour se venger des attaques homophobes de Terell, un camarade de lycée, débarque en classe et lui casse une chaise sur le dos, laissant ce dernier inconscient. Il est embarqué par la police. Dans le film « Chaînes » (1928) de Wilhelm Dieterle, Franz tue sans le vouloir un inconnu qui dérangeait sa femme. Dans le film « Celui par qui le scandale arrive » (1960) de Vincente Minnelli, Théron est responsable d’un crime involontaire. Dans le roman Je suis vivant dans ma tombe (1975) de James Purdy, Daventry a tué ses deux agresseurs en opérant un assassinat de légitime défense. Dans le roman Adrienne Mesurat (1927) de Julien Green, Adrienne tue son dictateur de père en le poussant accidentellement dans les escaliers. Dans le film « Prisonnier » (2004) d’Étienne Faure, le petit viol est presque excusé par l’existence d’un plus grand viol dont le protagoniste n’est pas responsable : en effet, Julien séquestre son amant Tom dans son grenier afin de le protéger de la police, « par amour ». Dans le film « Les Filles du botaniste » (2006) de Daï Sijie, les deux amantes provoquent l’attaque cardiaque accidentelle du despotique botaniste. Dans le film « Les Diaboliques » (1955) d’Henri-Georges Clouzot, le couple de lesbiennes est à la fois victime et bourreau de l’homme qu’il veut éliminer. Dans le film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo Nathan euthanasie son amant Sean, puis ensuite pleurer son geste.

 

Le héros homosexuel décide d’imiter son violeur, et de le violer à son tour, en baptisant leur relation d’« amoureuse ». Comme s’ils étaient tous les deux quitte ! Leur union serait « égalitaire dans la violence », ré-équilibrée par le viol : « Entre la baffe qu’elle m’a donnée et ce titre de transport que je n’ai pas payé, qui de nous deux est la débitrice ? » (la narratrice lesbienne dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, p. 49)

 

Par exemple, dans le roman semi-autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, Ednar, le héros homosexuel faisant son service militaire, décide volontairement de coucher trois fois avec Octave, son violeur d’adolescence, pour réparer une ancienne souillure par une domination inédite sur ce dernier : « Je ressentais ce désir comme une sorte de revanche pour satisfaire égoïstement ma propre libido. » (p. 92)

 

Et quand son amant ne lui a rien fait, le violeur homosexuel décide de le punir de sa fragilité, de sa complicité à se laisser dominer par lui. Le pire, c’est que dans toute sa schizophrénie, il trouve le moyen de s’auto-victimiser pour nier qu’il fait le mal. Il ne viole pas par gaieté de cœur, vous comprenez… Il fait ça par « sacrifice d’amour », parce que c’est sa victime qui le lui aurait demandé… : « Cette folle perverse rêve depuis des années d’être tuée, elle est à la recherche d’un assassin, voilà : elle l’a trouvé : c’est moi. » (le narrateur homosexuel parlant de Mme Audieu, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 110) ; « Tu m’as forcé à faire ça ! » (Steeve juste avant de poignarder mortellement Vincent, son amant d’un soir, dans le film « Cruising », « La Chasse » (1980) de William Friedkin) Ou bien il survalorise l’individu qu’il a violé, en lui inventant une liberté, une maturité, un consentement, un désir, une liberté et des sentiments qu’il n’a vraisemblablement pas (genre : « Il n’ose pas me le dire, mais je suis persuadé qu’il a aimé ça ! Je suis sûre qu’il est fou de moi… » ou « Il est très mûr pour son âge ; et puis en plus, il était d’accord ! ») : « Contre toute attente, la bergère se prit entièrement à ce qu’elles [= le couple lesbien violeur] faisaient et devint, selon ce que disaient les amies de ma cousine, une partenaire aussi réceptive qu’audacieuse. […] À leur grande surprise, elles la virent, alors qu’elles étaient déjà très loin, faire de gentils gestes de la main pour leur dire au revoir. […] Les deux amies considéraient par ailleurs leur action comme une initiation et nourrissaient le souhait caché que les autres femmes se convertissent, espérant ouvrir leur esprit, les libérer des conventions et des contraintes qui trop longtemps les avaient enfermées. » (Alexandra, l’héroïne lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, pp. 108-110)

 

Par exemple, dans la pièce Ma première fois (2012) de Ken Davenport, l’héroïne lesbienne dit que les cris de résistance de sa copine (« Arrête, lâche-moi !!! ») quand elle la viole amplifient son désir et l’encouragent à poursuivre : « Ça, ça me fait bander comme un cheval ! » Elle finit par projeter sur son amante son propre désir/amour éjecté : « J’suis sûre qu’elle a adoré sa première fois même si elle prétend le contraire. »

 

La « correction » du violeur homosexuel se pare souvent des meilleures intentions (solidarité, lutte contre l’homophobie, défense de l’amour homosexuel, etc.). C’est la raison pour laquelle il ne se voit même pas déraper. Par exemple, dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, les amants Georges et William tapent sur Pierre l’hétérosexuel, et essaient de l’approcher, de le provoquer physiquement (par rapport à une homosexualité supposée latente chez lui). Georges lui fout une baffe, et ça finit en bagarre que les lamentations théâtrales d’Adèle, la « fille à pédé » pleureuse internationale, viennent miraculeusement éteindre en jetant tout de même toute la faute sur la soi-disant « homophobie » de Pierre.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Le violeur homosexuel : légende ou réalité ?

Dans nos civilisations contemporaines, une rumeur causalisant le lien entre homosexualité et viol circule autour des personnes homosexuelles ou de l’homosexualité en général. Il suffit d’écouter le mythe des violeurs d’enfants (les « enculeurs d’adolescents », comme diraient Jacques de Guillebon et Falk Van Gaver, dans leur article « Voie sans issue » de la revue Nouvelles de France, en août 2012) développés par quelques tribuns du FN, réac’ gauchistes et autres ecclésiastiques de la droite évangélique américaine : « Que faisons-nous contre ces hommes qui violent nos enfants ? » (le parlementaire David Baati dans le documentaire Ouganda : au nom de Dieu (2010) de Dominique Mesmin)

 

Il n’y a pas que les personnes hétérosexuelles qui présentent les personnes homosexuelles comme des « obsédés sexuels » et des « pervers ». La mauvaise réputation provient aussi et surtout des individus homos eux-mêmes, même si elle prend tantôt le visage sexiste de la misandrie (beaucoup de femmes lesbiennes prennent les hommes gays pour des violeurs, parce qu’ils ont le malheur d’être nés « mâles »…), tantôt celui de la misogynie (beaucoup d’hommes gays voient les femmes comme des tigresses et des prédatrices sublimes), tantôt celui de la peur de la sexualité, de la phobie de la génitalité, de l’effroi amoureux, voire de l’auto-parodie cynique. Je ne citerai à ce titre qu’un seul exemple parlant : l’ouvrage Trois milliards de pervers : grande encyclopédie des homosexualités (1973) de Félix Guattari et Guy Hocquenghem. Dans la programmation du festival de cinéma gay & queer Chéries-Chéris édition 2013 au Forum des Images de Paris, il y a une nuit consacrée aux « serial killers et killeuses ». Et je vous renvoie aux codes « Liaisons dangereuses », « Viol », « Prostitution » et « Femme-Araignée » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

J’ai entendu par exemple des amis homosexuels/bisexuels qui m’ont avoué que lorsqu’ils avaient couché avec des femmes, ils avaient eu l’impression de les violer. On retrouve cette idée dans l’autobiographie Un Homo dans la cité (2009) de l’animateur radio homosexuel Brahim Naït-Balk : « Alors que j’avais déjà 25 ans et que j’étais toujours vierge, plus par désespoir que par désir j’ai répondu aux avances d’une collègue éducatrice. Elle me draguait depuis un moment et je la fuyais. Un soir de réveillon du jour de l’An, nous nous sommes retrouvés dans une chambre du foyer et je me suis lancé. C’était horrible, je me suis forcé à la pénétrer, sans préliminaires. J’ai eu l’impression de la violer. Tout de suite après, je l’ai fuie comme un voleur. » (pp. 40-41)

 

En amour homosexuel aussi, j’ai entendu à de nombreuses reprises mes amis me décrire en privé leur initiation sexuelle ou leur propre partenaire amoureux comme un violeur (cf. je vous renvoie aux codes « « Première fois » », « Viol » et « Amant diabolique » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels).

 

Par peur ou fantasme de donner crédit à cette croyance populaire au lien de causalité viol/homosexualité (pas totalement infondée non plus, car le désir homosexuel et les actes qu’il implique sont par nature semi-sincères semi-violents), certains individus homosexuels prennent l’image du violeur homosexuel pour une vérité sur eux-mêmes, pour un ordre et un modèle. Ils intériorisent alors le fantasme de violer vraiment : « Pour moi, le viol, avant tout, a cette particularité : il est obsédant. J’y reviens tout le temps. […] J’imagine toujours pouvoir un jour en finir avec ça. […] Impossible. Il est fondateur. De ce que je suis en tant qu’écrivain, en tant que femme qui n’en est plus une. C’est en même temps ce qui me défigure, et ce qui me constitue. » (Virginie Despentes, King Kong Théorie (2006), p. 53) ; « Étant donné qu’il m’arrivait de m’occuper d’enfants, j’étais obsédé par la crainte qu’ils me soupçonnent de pédophilie. C’était absurde, mais je ne pouvais m’empêcher d’y penser. » (Brahim Naït-Balk, l’animateur radio qui ne cache absolument pas son attirance pour les jeunes garçons, dans son autobiographie Un Homo dans la cité (2009), p. 65) ; « Je veux faire des films qui rendent les spectateurs fous, qui les poussent à commettre un meurtre. » (le réalisateur Hisayasu Sato) ; « J’y suis allé pour avoir du sexe avec les hommes. C’est la première chose que j’ai faite. Donc ce gars avec qui j’avais chatté un temps sur Internet était de Flint, dans le Michigan. C’est là-bas que j’ai perdu ma virginité. La capitale mondiale des assassinats, c’est de notoriété publique [rires] [. [ » (Dan, homme homosexuel, dans le documentaire « Desire Of The Everlasting Hills » (2014) de Paul Check) ; etc. Par exemple, en 1971, la féministe Susan Griffin frappe l’opinion publique en déclarant qu’elle « n’a jamais pu se débarrasser de la peur du viol ».

 

Certains auteurs homosexuels, par leur sacralisation des méchants de dessins animés, des dictateurs et des Grands Hommes, montrent, certainement à leur insu, une fascination pour le violeur (cf. je vous renvoie aux codes « Se prendre pour Dieu », « Se prendre pour le diable », « Homosexualité noire et glorieuse », « Liaisons dangereuses », « Homosexuel homophobe », « Couple criminel », « Super-héros », et à la partie « Grands Hommes » du code « Défense du tyran », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : « Je suis un chasseur ! Pas un gratte-papier. J’aimerais être de ceux qui visitent les appartements des opposants politiques et s’emparent de leur contenu, des livres au courrier et aux meubles, et les envoient vers Berlin. » (Heinrich, figure par excellence du voleur/violeur, dans le roman À mon cœur défendant (2010) de Thibaut de Saint-Pol, p. 103) Par exemple, dans son recueil de poésie Le Condamné à mort (1942), Jean Genet met le « tueur à la lourde braguette » sur un piédestal.

 
 

b) Le violeur homosexuel passe parfois effectivement à l’action :

Par malheur, il arrive que certains individus homosexuels violent vraiment. Par exemple, en 1869, l’affaire Zastrow fait la « une » des journaux. Carl Ernest Wilhelm von Zastrow (1821-1877), ancien militaire, peintre, est arrêté pour viol homosexuel. Je pense également à ce jeune violeur nantais de 18 ans (2 novembre 2016) qui ne s’attaquait qu’à des hommes. On trouve sur le garçon qui a été sa victime un anus si élargi qu’il ne peut plus retenir ses excréments. Le 5 juillet 1869, Zastrow, dans le box des accusés : « J’appartiens à ces malheureux qui à cause d’un défaut de leur nature ne ressentent aucune inclination pour le sexe féminin. J’ai souvent parlé de ça avec des hommes, qui alors m’ont traité froidement et inamicalement, de telle sorte que je me suis retrouvé seul au monde. » Le film « Darkroom – Tödliche Tropfen » (« Backroom – Drogue mortelle », 2019) de Rosa von Praunheim retrace la vie réelle de Lars, un serial killer homosexuel qui a tué cinq de ses amants, et qui avait défrayé la chronique en Allemagne en 2012. Le cas de l’Ougandais homo de 37 ans Emanuel G., qui a violé en septembre 2016 une femme dans la rue à Freising en Bavière, laisse également perplexe. Tout comme le meurtre de la petite Lola (12 ans) qu’une femme (Dahbia, 24 ans) a violée puis mise dans une malle après avoir obtenu son orgasme lesbien/pédophile, le 14 octobre 2022.

 

Cela peut commencer par la société toute entière et l’État, sous prétexte de lutte politique contre le monstre « Homophobie ». Je pense par exemple dans toutes les Gay Pride à la simulation de viol par l’exhibitionnisme agressif. Je pense aussi aux méthodes musclées et agressives d’associations comme Act Up, ou bien à des coups de folie isolés (Dernièrement, un certain Floyd Corkins, 28 ans, ancien bénévole homo au Centre LGBT de Washington, a ouvert le feu au siège d’une organisation chrétienne conservatrice, le 16 août 2012).

 

Le grand viol social peut-être précédé du petit viol homosexuel. Autre exemple : dans ce fait divers daté du 22 décembre 2016, on voit bien que l’agression homophobe s’origine sur le petit délit de larcin homosexuel.
 

Le viol se poursuit aussi sur des femmes (cf. je vous renvoie avec insistance au code « Destruction des femmes » et à la partie « Prostituée tuée » du code « Prostitution » dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels). « Le garagiste [Nacho], agenouillé près d’Ernestito, demandait pardon, pardon pour ses péchés. Il avait tué la femme, la seule qui aurait pu l’éloigner de son secret, des hommes, de son désir des hommes. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 314) Ce viol est en général exercé par deux profils de personnes homosexuelles : soit les individus homosexuels refoulés, soit à l’opposé les individus homosexuels soi-disant « homosexuellement assumés ». Et là encore, le sexe de ces agresseurs homosexuels importe peu.

 

VIOLEUR 4 Favorites

« Favorites »


 

Au départ, comme certains individus homosexuels n’assument pas l’existence du désir homosexuel en eux, il arrive qu’ils cherchent à se prouver à eux-mêmes ou à prouver à leur société leur hétérosexualité en couchant avec leur meilleure amie, en violant la « fille à pédés » ou la prostituée. Le violeur endossera alors le déguisement du faux bisexuel ou de l’hétérosexuel surfait (pléonasme). Et pour ce qui est de l’individu homosexuel qui cherche à prouver à sa société qu’il est « 100% homosexuel » et que « ça se passe très bien », l’obstination à rester conforme à son masque du coming out ou à son étiquette de « parfait mec casé en couple homosexuel » a tendance à se traduire sur la durée par une agression vis à vis des femmes, des hommes mariés et des personnes homosexuelles en général.

 

Par exemple, dans le roman Manigances (2011) de Denis-Martin Chabot, il y a le personnage du « prédateur », Julien, à l’identité sexuelle trouble, qui viole les hommes qu’il rencontre, et qui leur laisse des séquelles (l’histoire est basée sur des faits réels). Autre exemple parlant, c’est celui de Jonathann Daval, le soi-disant gendre idéal, qui a assassiné et calciné sa femme Alexia en 2017 en France, en jouant ensuite le veuf épleuré pendant la Marche blanche et l’enterrement. Il se trouve que Jonathann est homosexuel et qu’il a refait sa vie avec un codétenu en prison… nouvelle qui ne ravit évidemment pas la presse gay qui hurle à l’amalgame « homophobe » entre monstruosité et homosexualité.

 

N’en déplaise à la communauté homosexuelle, les loups sont dans la bergerie (même s’ils passent leur temps à se dire « hors milieu » !). Certains hommes et certaines femmes homosexuels violent non seulement des femmes mais aussi des hommes, et particulièrement des amants de passe ou des compagnons de vie qu’ils harcèlent parfois pendant des mois (cf. je vous renvoie avec insistance aux codes « Milieu homosexuel infernal », « Parricide la bonne soupe », « Homosexuel homophobe », « Liaisons dangereuses » et  « Amant diabolique » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels). On citera ici le nom d’hommes homosexuel serial killer, funestement passés à la postérité parce qu’ils tuaient successivement leurs compagnons d’un soir (ils sévissaient dans et à l’extérieur du « milieu gay » stricto sensu) : Jeffrey Dahmer, Andrew Cunanan, Gilles de Rais, Luis Alfredo Garavito, Randy Steven Kraft, Luka Magnotta (présenté comme le « premier web killer » de notre époque), etc. Allez faire un tour sur cette page pour ceux parmi vous qui veulent frémir…

 

Le violeur des personnes homosexuels, loin d’avoir une sexualité stable et non-homosexuelle, cache son homosexualité derrière la violence d’une hétérosexualité excessivement prouvée en actes, trop assurée et travaillée : « Je connais leur rapport tordu à leur propre sexualité. […] À moins qu’ils n’aient eu eux-mêmes des tendances homosexuelles qu’ils n’osaient s’avouer. […] Ce qui, pour moi, reste un mystère absolu, c’est pourquoi ces garçons, malgré leur haine féroce pour les homos, voulaient avoir des relations sexuelles avec un gay comme moi. » (Brahim Naït-Balk parlant de ses violeurs, dans son autobiographie Un Homo dans la cité (2009), pp. 78-81)

 

Certains individus homosexuels violeurs s’en prennent à des êtres fragiles (cf. je vous renvoie aux codes « Méchant pauvre », « Prostitution », « Pédophilie », « Vierge » et « Petits morveux » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) et qui donnent par leur faiblesse l’illusion d’un consentement : je pense par exemple à ce fait-divers du couple lesbien de Verdun, ainsi qu’au témoignage d’Alfred, homosexuel, qui a « violé un tapin » et que relate cet acte dans l’essai Le Viol au masculin (1988) de Daniel Welzer-Lang (cet ouvrage a beaucoup d’intérêt dans la mesure où l’auteur a eu l’intelligence de choisir d’interviewer non seulement des victimes masculines de viol mais aussi des agresseurs, jadis victimes).

 

Je vous signale au passage cet article destiné à ceux qui me soutiennent que l’homosexualité n’a rien à voir avec ce que nous vivons (crise, terrorisme, islamisme, transhumanisme, attentats d’Orlando ou de Nice, etc.), qu’ « il n’y a pas que ça dans la vie », et que le fait que j’en fasse le centre des débats sociétaux serait le signe de ma « monomanie narcissique homosexuelle »… D’aucun vont se servir de ce qu’ils identifient comme une bizarrerie paradoxale ou minoritaire, pour affirmer haut et fort qu’il faut encore plus faire son coming out et encore plus pratiquer son homosexualité. Quand tout le monde la réduit à un refoulement d’homosexualité, moi, je dis que l’homophobie est à la fois refoulement et surtout pratique et identité « assumées » d’homosexualité.
 

Pourquoi les personnes homosexuelles ont tellement de mal à reconnaître l’existence du lien non-causal entre homosexualité et pédophilie, par exemple ? Parce qu’il les renvoie parfois au douloureux (et enjolivé… par stratégie de survie !) souvenir de leur initiation au plaisir (homo)sexuel par leur violeur, qui s’est présenté à eux comme un guide, un père bienveillant, un amant protecteur.

 

Le violeur tient exactement le même refrain d’indifférence de la sacralisation du « consentement mutuel » et de l’absence de bien ou de mal : « Pour ma part, je me suis fait une règle de ne pas juger la sexualité des autres ; tant que ça se passe entre adultes conscients et consentants, je pense que rien de mal ne peut se faire. » (Voir sur ce lien)

 

D’autres personnes homosexuelles violent en se cherchant un partenaire sexuel plus « fort » qu’elles. Elles deviennent violeurs par omission en quelque sorte, par amant interposé, en se plaçant en victimes, parce qu’elles appellent leur pair « actif » à les pénétrer et qu’elles l’engagent à obéir à leur mise en scène de viol dont elles seraient les héros « passifs ». J’ai en tête plein de récits d’amis homosexuels qui ont forcé leur partenaire sexuel à les violer au lit parce que « ça les excitait ». « Je rêve d’être kidnappé, attaché, offert, je rêve d’être à la merci. » (Christophe Honoré, Le Livre pour enfants (2005), p. 55) Oui, détrompez-vous si vous doutez de ce que j’écris là. Le violeur homosexuel n’est pas forcément le « dominant » !

 

Le rôle du violeur homosexuel n’est pas nécessairement porté par celui qu’on attend. On se trompe en beauté si on pense que le violeur homosexuel ne peut être que l’individu adulte (à partir de la quarantaine, environ), masculin, bear ou butch, « actif » sexuellement, adepte des pratiques sado-maso, 100% méchant et malveillant. J’ai vu des hommes et des femmes homosexuels, en apparence innocents, conformes physiquement aux canons de la mode de leur sexuation biologique originelle, parfois jeunes et pimpants, jouant les fragiles, homosexuels dits « assumés », sincères et « amoureux », frapper quand on s’y attendait le moins ! N’oublions jamais que tout être humain est profondément libre, donc ni « victime à vie », ni « bourreau à vie »… Autant nous pouvons assurer que tout bourreau a été victime, autant on ne pourra jamais dire que toute victime sera plus tard bourreau… et heureusement ! (Merci la résilience !) Or ceux qui l’oublient, afin de diaboliser les violeurs et béatifier les victimes de viol, sont en général des gens qui violent aussi, qui suppriment la liberté humaine en causalisant/per le viol.

 

Pour vous donner un exemple très parlant, je me trouvais un jour aux studios de la radio RFPP à Paris, pour animer, comme chaque lundi, l’émission Homo Micro aux côtés de Brahim Naït-Balk et de quelques chroniqueurs. C’était le 20 décembre 2010. Fabien, le « chroniqueur santé » (jeune, beau gosse, raffiné, en couple assumé et discret, visiblement plutôt passif sexuellement), a avoué ouvertement à l’antenne que l’un de ses fantasmes sexuels secrets était de « violer une femme ». Quand il a prononcé cette phrase hallucinante (que personne n’a relevée, sauf moi évidemment… et Sylvain, le chroniqueur de la « revue de presse », qui m’a instantanément fixé droit dans les yeux, bouche bée, en étant sur le point de dire en me pointant du doigt : « C’est fou… Ce fantasme de viol chez les homos, c’est exactement ce qu’a décrit Philippe dans des émissions précédentes ! Avait-il finalement raison ?!? »). Je pense, connaissant Fabien, que ce n’était de sa part que l’expression d’un fantasme non-actualisé (j’ose espérer, et je n’en doute pas, car ce garçon est l’exemple même de la mesure et de l’homosexualité clean). Mais en revanche, ce fantasme doit être certainement actualisé par des personnalités moins équilibrées que Fabien, et de manière beaucoup plus répandue qu’on ne le croit dans la communauté homosexuelle. Ce n’est pas pour des prunes que j’écris noir sur blanc dans mes essais que le désir homosexuel est par nature le signe d’un viol parfois réel ou en tous cas un fantasme de viol (dans le double sens de l’expression : fantasme de violer ou/et fantasme de violer).

 

J’ai remarqué que les vrais violeurs homosexuels pouvaient être aussi bien sur-virils qu’hyper efféminés (Récemment, j’en ai croisés trois parmi mes connaissances homosexuelles lointaines – des hommes entre 25 et 35 ans – qui peuvent se montrer non seulement menteurs et langues de vipère, mais aussi menaçants et incontrôlables). Ils ont le visage crispé du sadomasochiste. Et je ne souhaite à personne de se retrouver nez à nez avec leur hystérie schizophrène inattendue…

 
 

c) Comment le sujet homosexuel en arrive-t-il à passer à l’acte odieux ?

VIOLEUR 5 Inconnu Nord

Film « Strangers On A Train » d’Alfred Hitchcock


 

Triste et désarçonnant constat : le violé devient parfois violeur. Par exemple, Diane de Margerie évoque le « désir d’agression » inhérent à la personnalité du romancier japonais Yukio Mishima (Correspondance 1945-1970 (1997), p. 22).

 

De récentes études canadiennes de criminologie prouvent qu’un des grands facteurs aggravants de récidive des viols est l’agression entre personnes de même sexe ; par exemple, les incarcérations en cas d’inceste ou de pédophilie entre personnes des sexes différents sont plus rarement répétées (sources données par le pédo-psychiatre Vincent Rouyer).

 

Force est de reconnaître qu’il existe très souvent un ambigu rapport idolâtre d’attraction-répulsion, d’imitation (involontaire ?), d’amour, entre la victime et son agresseur. Le désir d’être violeur a pu être précédé par le désir d’être violé (cf. je vous renvoie évidemment la partie « Désir de viol » du code « Viol » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) :

 

« Coco [travesti M to F], à la sortie de la gare, indiqua une pissotière.

– ‘Celle-là fonctionne très bien. Des mecs à perdre la tête. Maintenant, une fois sur deux, on te vole ou on te tue.

Mais on te viole d’abord au moins ? s’inquiéta Paquito.

Oui, parfois », le rassura Coco en souriant avec sa dentition canine impeccable. »

(Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 94)

 

Pourquoi ne parle-t-on quasiment jamais des violeurs homosexuels réels ? Parce qu’en cas d’agression, en général, le violeur, pour jouer au dur, cache son orientation bisexuelle ou homosexuelle qui le désignerait comme faible, blessé ou semblable à sa proie : « La plupart des agresseurs auraient tendance à se définir comme hétérosexuels exclusifs et s’avèreraient, de surcroît, homophobes » (p. 108) explique Michel Dorais dans son essai Ça arrive aussi aux garçons (1997). Et dans leur naïveté, la plupart de leurs victime croient leurs violeurs sur parole, validant intérieurement ainsi la possibilité de s’affirmer elles-mêmes homosexuelles par réaction d’opposition, par réflexe de survie : « La plupart des agresseurs sont décrits par leurs victimes comme étant ou s’affirmant d’orientation hétérosexuelle, quelquefois bisexuelle, très rarement homosexuelle. » (idem, p. 73)

 

Aussi incompréhensible que cela puisse paraître, certaines personnes homosexuelles sont fascinées par leur violeur et justifient le viol : « Les violeurs, loin d’être des monstres ou des fous mus par une pulsion sexuelle irrépressible, sont des hommes normaux ayant parfaitement intégré les modèles érotiques. » (Daniel Welzer-Lang, Le Viol au masculin (1988), p. 23) ; « Il croyait que j’avais peur. Ce qu’il me proposait m’allait très bien. […] Je me sentais bien, bizarrement bien, et je ne luttais pas contre ce bien-être. » (Abdellah Taïa parlant de son violeur, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), pp. 15-17) ; « J’aimais Chouaïb. À présent, je l’admirais. » (idem, p. 26) ; « Il ne faut pas punir J. » (Gilles justifiant son violeur, dans l’essai Le Viol au masculin (1988) de Daniel Welzer-Lang, p. 177) ; « J’ai été victime d’un viol à Marseille, tard dans la nuit. Je n’aime pas le simplisme d’un certain féminisme qui déclare que tout viol est une chose atterrante… Je serai même assez affreux pour dire que je l’ai bien vécu… C’est-à-dire que j’ai compris de quelle misère était fait cet Arabe qui m’a coincé dans un coin. C’est comme si c’était une mauvaise drague qui avait mal tourné. Je n’ai pas porté plainte contre lui. Non, j’ai causé avec lui. On est même allé boire un verre après (rire)… J’ai offert une bière à mon violeur. » (idem, pp. 182-183)

 

Il arrive que l’individu homosexuel cherche à imiter son violeur, et qu’il décide de le violer à son tour, en baptisant leur relation d’« amoureuse ». Comme s’ils étaient tous les deux quitte ! Leur union serait « égalitaire dans la violence », ré-équilibrée par le viol et une « bonne correction », en commémoration du passé : « Il fallait, à tout prix, que je me persuade, que j’étais l’homme au même titre que le père Basile [le prêtre pédophile qui l’a violé] ou mon initiateur et que, partant de ce principe, je pouvais jouer le rôle du preneur. » (Berthrand Nguyen Matoko, très longtemps strictement « passif » sexuellement, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), p. 119) Il y a comme une conjuration trouvée dans la reproduction du viol : « Je suis arrivée au pensionnat à l’âge de 14 ans. J’étais très naïve. Et je me suis retrouvée très tôt face à ces problèmes. Et j’ai été choquée. Il ne se passait que ça autour de moi, et je ne voulais pas le voir. Et j’en étais choquée. Depuis la surveillante qui couchait avec la surintendante, jusqu’aux élèves qui partageaient ma chambre, il n’y avait que ça autour de moi. J’étais la seule à ne pas être informée et à ne pas trouver que c’était épouvantable. Je me suis d’autant plus braquée que je sentais confusément en moi une attirance. Mais je voulais absolument la nier. » (Germaine, femme lesbienne suisse, dans le documentaire « Les Homophiles » (1971) de Rudolph Menthonnex et Jean-Pierre Goretta)

 

On retrouve à ce titre la reproduction du schéma violeur/violé chez beaucoup de couples homosexuels existants (la tapette/le moustachu ou l’actif/le passif du côté des hommes gays ; la fem/la butch du côté des femmes lesbiennes) : « masculin = actif = violeur = pénétrer = appropriant = dominant ; féminin = passive = violée = dominée = trou = appropriée » (Daniel Welzer-Lang, Le Viol au masculin (1988, p. 196)

 

Même si ce n’est absolument pas systématique, certaines personnes homosexuelles peuvent parfois reproduire le viol qu’elles ont jadis subi. Par exemple, dans l’essai Ça arrive aussi aux garçons (1997) de Michel Dorais, de nombreux témoignages (qui par ailleurs remettent en cause l’adage « Qui a été abusé abusera ») illustrent que des jeunes hommes jadis violés ont violé à leur tour : « Dès qu’ils sentent qu’ils peuvent être les plus forts, certains garçons victimes d’agressions physiques ou sexuelles vont tenter de rejouer la même scène traumatique à leur tour, en inversant les rôles. » (pp. 57-58) C’est parfois avec horreur que certains individus homosexuels découvrent qu’ils peuvent reproduire inconsciemment ce que pourtant ils ont détesté chez leur agresseur, comme c’est le cas de Denis, 31 ans, victime d’abus à l’âge de 8 ans, et qui a abusé de son petit cousin une fois arrivé à l’âge adulte : « D’avoir abusé de quelqu’un, c’est encore ça le plus gros, même aujourd’hui. Plus que l’abus que j’ai subi. » (Denis, idem, p. 160). Un autre témoin homosexuel, Paul parle d’« imaginer, fantasmer le viol, quand il prend quelqu’un en stop. Des fois. La discussion sur les dangers du stop… » (idem, p. 186).

 

À Liège (Belgique), en juillet 2012, Raphaël Wargnies, 35 ans, a assassiné à coups de marteau un homme dans un jardin public. Interpellé aussitôt, il a reconnu les faits, et a expliqué avoir été violé par un homosexuel dans le même parc un an plus tôt, à l’été 2011. Aux États-Unis, le 26 août 2015, Vester Flanagan, 41 ans, a tué la journaliste Alison Parker, 24 ans, et son caméraman Adam Ward, 27 ans, alors qu’ils intervenaient en direct dans le cadre d’une émission matinale de la chaîne WDBJ7. Flanagan a lui-même filmé la tuerie avant d’en poster des extraits sur les réseaux sociaux, en soutenant qu’il avait été discriminé en raison de sa couleur de peau et de son orientation homosexuelle. Poursuivi par la police, il s’est suicidé quelques heures plus tard.

 

Et quand son amant ne lui a rien fait, le violeur homosexuel décide parfois de le punir de sa/leur fragilité, de sa complicité à se laisser dominer par lui. Le pire, c’est que dans toute sa schizophrénie, il trouve souvent le moyen de s’auto-victimiser pour nier qu’il fait le mal. Il ne viole pas par gaieté de cœur, vous comprenez… Il fait ça par « sacrifice d’amour », parce que c’est sa victime qui le lui aurait demandé… Ou bien il survalorise l’individu qu’il a violé, en lui inventant une liberté, une maturité, un consentement, un désir, une liberté et des sentiments qu’il n’a vraisemblablement pas (genre : « Il n’ose pas me le dire, mais je suis persuadé qu’il a aimé ça ! Je suis sûre qu’il est fou de moi… » ou « Il est très mûr pour son âge ; et puis en plus, il était d’accord ! ») : « Les despotes n’exigent pas seulement qu’on leur obéisse corps et âme. Ils exigent aussi d’être aimés de ceux qu’ils brisent. » (Albert Le Dorze, La Politisation de l’ordre sexuel (2008), p. 160) L’enfer est pavé de bonnes intentions amoureuses. N’oublions jamais.

 
 

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Une « pastorale pour les personnes homosexuelles » ?

L’idée d’une pastorale ecclésiale spécifique aux personnes homosexuelles ne sera envisageable, viable, pas homophobe, vraiment respectueuse des personnes et fidèle à l’Église catholique, qu’à la condition de pointer vers la continence voire la disparition du désir homosexuel. Sinon, elle reste hyper choquante et inappropriée.