Dilettante homo
NOTICE EXPLICATIVE :
Communauté homosexuelle :
« Génération Paresse » ? Plutôt Génération terrorisée par le Réel !
Gender, es-tu là ? Existe-t-il un lien entre homosexualité et paresse ? Assurément oui. Mais il n’est pas causal. Loin de moi l’idée de faire des personnes homosexuelles une population naturellement et spécifiquement plus flemmarde que la moyenne. Nous devenons tous paresseux quand le désir ou l’amour des autres nous quittent.
La paresse homosexuelle n’est pas un fait objectif, puisque dans la réalité – contrairement au fiction, où les héros homosexuels paresseux fleurissent –, elle semble très peu volontaire puisque liée à la peur d’affronter le Réel, liée à une angoisse existentielle très courante et bien compréhensible (« Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? Suis-je assez solide pour être quelqu’un de bien et qui va faire de grandes choses ? »). Et nous savons bien que la peur, quand on est petit, est un sentiment difficile contrôlable. Le personnage de la dilettante homosexuelle dans les fictions, une fois transposé dans le quotidien des personnes homosexuelles, indique surtout un rapport distancé et craintif au Réel, aux autres. Elle pourrait s’appeler « misanthropie » ou « homophobie » (peur du même) ou « mépris de soi » : je pense par exemple aux individus homosexuels masculins qui ont rejeté, étant adolescents, le sport, le foot (peur du ballon), les bagarres, les corps à corps avec leurs semblables sexués, les jeux collectifs, les travaux manuels, toute activité physique qui nécessite l’effort ou la force ; ils ont préféré se réfugier dans un monde plus imaginaire et féminin, où ils étaient sûrs qu’on ne leur reprocherait pas d’être des mauviettes et des « garçons sensibles ».
Par ailleurs, ce qui est analysé comme une paresse homosexuelle est parfois plus positivement une juste résistance à la suractivité du monde moderne mécanisé, de la société capitaliste, marchande, productiviste, brutale et barbare (d’aucun dirait « patriarcale » et « machiste »). Une quête de poésie et d’idéaux, une revendication de la sensibilité et d’un droit à la fragilité. Un appel à l’authenticité.
Globalement, je dirais que le dilettantisme, c’est l’absence de liberté, de conscience, de désir. Il n’a donc pas à être jugé d’abord comme une mauvaise volonté, mais bien comme une ABSENCE de volonté… ce qui, pour le coup, ne juge pas des personnes, et peut déculpabiliser les sujets homosexuels.
Étant donné qu’elles pensent que l’action cinématographique peut se substituer à l’action réelle, beaucoup de personnes homosexuelles vont développer une forme de schizophrénie. Il leur sera difficile de connecter leurs actions à leur conscience, leur cœur à leurs mains. Leurs actions se chargent souvent d’une intention esthétique qui paralyse leur rayonnement et leur efficacité. En s’obligeant à tout styliser, elles ont tendance à reproduire des attitudes qu’elles ont déjà vues chez tel ou tel acteur, à ne pas être à ce qu’elles font ni à ce qu’elles sont, même quand elles agissent concrètement et en toute sincérité. Souvent trop conscientes d’être observées parce qu’elles désirent être leur propre spectateur, elles se pensent agissantes tout pendant qu’elles agissent, ce qui enlève du naturel à leurs gestes, surcharge ceux-ci d’intentions. Trop souvent, elles font sans faire, sans mettre de désir dans leurs actions (En image, cela est symbolisé par les protagonistes homosexuels dilettantes, plongés dans un semi-sommeil, qui ne savent rien faire de leurs mains… pas même changer une roue de voiture !). Leur paresse peut aussi prendre la forme de l’hyper-activité, de l’investissement massif des domaines artistiques, universitaires, intellectuels, cybernétiques, décisionnels et non plus actionnels : elles s’occupent de tout sauf de ce qui devrait pourtant mobiliser leurs priorités du moment, ou de ce à quoi leur sexe et leur corps les prédisposent davantage. Dans les deux cas (l’inaction ou l’activisme), elles tendent à refuser le « faire collectif » et « concret ».
N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Bourgeoise », « Artiste raté », « Différences physiques », « Manège », « Bovarysme », « Fan de feuilletons », « Chevauchement de la fiction sur la Réalité », « Voyeur vu », « Télévore et Cinévore », « Femme au balcon », « Sommeil », « Femme allongée », « Main coupée », « Promotion ‘canapédé’ », « Obèses anorexiques », « Faux révolutionnaires », à la partie « Foot » du code « Solitude », et à la partie « Schizophrénie » du code « Doubles schizophréniques », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.
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FICTION
a) Le héros homosexuel sans sens pratique ou paresseux :
Dans les fictions traitant d’homosexualité, beaucoup de héros homosexuels sont montrés, ou se montrent eux-mêmes, comme des incapables, des cruches sans bras : « Regardez ces fainéants ! » (Zize, le travesti M to F face aux homos, dans le one-(wo)man-show Zize 100% Marseillaise (2012) de Thierry Wilson) ; « Je me demande pourquoi il y a toujours autant de pédales chez les bourgeois. Ça doit être l’absence d’effort physique. À force de rien foutre assis sur des fauteuils, leurs gènes deviennent mous et dégénérés. » (le boucher – Philippe Nahon – dans le film « Seul contre tous » (1998) de Gaspard Noé) ; « J’étais incapable de planter un clou. Je savais que quelque chose clochait chez moi. » (Frank, le héros homo de la pièce Fixing Frank (2011) de Kenneth Hanes) ; « Au moins, Olivier, il sait faire quelque chose. » (Philibert s’adressant à son amant David, dans la pièce Comme ils disent (2008) de Christophe Dauphin et Pascal Rocher) ; « Nous autres on est des bonnes à rien, même pas à faire des gosses. » (Suzy Solidor dans le film « Jalousie » (1936) de Jean de Limur) ; « J’étais même pas foutu de faire un cendrier qui n’était pas bancal. » (Jean-Luc, le héros homo, parlant de son expérience en atelier poterie, dans la pièce Cosmopolitain (2009) de Philippe Nicolitch) ; « Je n’aurai jamais la main ! » (le narrateur du recueil Une Saison en enfer (1873) d’Arthur Rimbaud) ; « Ben oui, j’suis fainéant. Je vais pas le crier sur les toits. » (le jeune Mathant dans la pièce Un Cœur en herbe (2010) de Christophe et Stéphane Botti) ; « Chaque jour, même parcours, ne rien faire, attendre et voir. Errer dans les limbes de mon âme qui boîte. Rester dans ma chambre, me bercer dans le ouate. Dormir, me blottir contre mes idées noires. » (cf. la chanson « Je baille » du Beau Claude) ; « Vous passez votre temps à flâner dans votre chambre ou à nager au Forty Foot. » (Tante Eva en parlant à Anthony, son neveu homosexuel, dans le roman At Swim, Two Boys, Deux garçons, la mer (2001) de Jamie O’Neill) ; « Tu vas répondre, feignasse ?! » (Julien s’adressant à son amant Yoann, dans la pièce Ma belle-mère, mon ex et moi (2015) de Bruno Druart et Erwin Zirmi) ; « Comme je vous le disais, j’ai pas mal de temps libre. » (Gabriele, le héros homo licencié de son travail, s’adressant à son amie Antonietta, dans le film « Una Giornata Particolare », « Une Journée particulière » (1977) d’Ettore Scola) ; « Défaitiste, inutile et de tendance dépravée : voilà ce qu’ils ont dit. » (Gabriele par rapport à son renvoi de la radio, idem) ; « Va travailler, comme ton père te l’a appris ! » (la mère de Rettore se plaignant de l’oisiveté de son fils homo prostitué, dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso) ; « Moi, dans ma vie, je suis séropo. Voilà ce que je fais dans la vie. » (Sean, le héros homo du film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo) ; etc.
La vie de certains personnages homosexuels semble vide, douillette, et désertée par la prise de risque : « J’ai rien à dire. […] Il m’arrive jamais rien. […] Je sais, c’est chiant. » (le comédien du one-man-show Raphaël Beaumont vous invite à ses funérailles (2011) de Raphaël Beaumont) ; « Tu sais…moi, j’me fais chier depuis que je suis née. » (Teena, l’héroïne lesbienne du film « Boys Don’t Cry » (1999) de Kimberly Peirce) ; « Un risque, tout de même, dans ma vie. Merci. » (le juge Kappus dans le roman Portrait de Julien devant la fenêtre (1979) d’Yves Navarre, p. 97) ; « Je suis restée toute seule dans ma petite maison à attendre, occupant mes journées aux arts quotidiens du ménage et de la cuisine, ainsi qu’à l’art de la réflexion discrète. À attendre quoi ? […] À attendre quoi, je vous pose la question. » (Jeanne dans la pièce La Journée d’une Rêveuse (1968) de Copi) ; « À cette époque, j’étais en première année à l’Institut des arts graphiques, je me destinais donc, pas par goût mais par pure paresse, à un métier d’imprimerie, comme mon père, comme mon frère, sans savoir encore tout à fait lequel. » (le narrateur homosexuel dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 27) ; etc. Ils semblent tenaillés par une peur existentielle : « Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? Je ne sais rien faire. » (Gwendoline dans le one-(wo)-man show Désespérément fabuleuses : One Travelo And Schizo Show (2013) du travesti M to F David Forgit) ; « Ça me crève de ne rien foutre. » (Charlotte, l’héroïne lesbienne du film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell) ; etc.
Par exemple, dans le film « Les Demoiselles de Rochefort » (1967) de Jacques Demy, aucun des personnages ne travaille, et certains se montrent particulièrement peu habiles de leurs mains (par exemple, Étienne est tellement maladroit qu’il casse un œuf sans le faire exprès). Dans le film « Patrik, 1.5 » (« Les Joies de la famille », 2009) d’Ella Lemhagen, Jan, l’un des héros homosexuels, ne sait même pas s’occuper du jardin de sa maison. Dans le film d’animation « Shark Tale » (« Le Gang des Requins », 2004) d’Eric Bergeron, Lenny, le fils requin, est présenté comme une vraie lopette qui a peur de mal faire, et qui ne passe jamais à l’action. Dans le film « New Wave » (2008) de Gaël Morel, Éric, le héros gay, n’est pas du tout manuel. Dans le film « Les Garçons et Guillaume, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne, Guillaume, le héros homosexuel, imite sa mère, jusqu’à être contaminé par son dilettantisme : « Elle ne fait rien de ses journées et prend un ton râleur et exaspéré pour le cacher. » Il fuit les sports collectifs, le monde des travaux manuels, fait tout pour être exempté du service militaire. Dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson, Stéphane, le héros homosexuel, est tellement peu débrouillard qu’il ne sait même pas aller chercher une bouteille de vodka dans un comptoir de bar. Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, Frankie demande à son amant Todd pourquoi il continue de faire le métier de danseur qui le barbe. Celui lui répond : « Je sais rien faire d’autre. » Dans son one-man-show Jefferey Jordan s’affole (2015), Jefferey Jordan, le héros homo, définit tout homosexuel comme « une espère de grosse feignasse qui marche sur un fil ». Dans la biopic « Life » (2015) d’Anton Corbijn, James Dean est un j’m’en foutiste présenté comme un génie-sans-effort. Lui-même confirme sa réputation : « Je suis paresseux, c’est tout. » Dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa, Phil, le héros homo, se définit lui-même comme un glandeur invétéré : « Là où j’assure, c’est pour me la couler douce, écouter de la musique ou glander dans notre bibliothèque. » Sa meilleure amie Katja lézarde aussi : « Je crève d’ennui. ». Et l’amant éphémère de Phil, Nicholas, lui avoue qu’il « aime bien glander »… et il papillonne tellement qu’il finit par sortir avec Katja !
Parfois, c’est l’émergence de l’amour homosexuel qui pompe l’énergie de travail (cf. je vous renvoie à la partie « Fatigue » du code « Manège » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : « J’ai même plus envie de travailler. » (Florence après sa rencontre avec Hélène, dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) L’homosexualité annonce un éloignement de l’actionnel. Par exemple, dans la pièce Gouttes dans l’océan (1997) de Rainer Werner Fassbinder, c’est lorsque Franz s’installe chez son amant Léopold qu’il se tourne les pouces, n’a plus l’énergie de trouver un appartement ou du boulot, passe son temps à écouter de la musique, se transforme en un lion en cage, attendant avec angoisse et déception le retour de son ingrat de prince. Il veut absolument « rêver », mais le rêve vire au cauchemar. Dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H., depuis que Jonathan s’est installé avec son copain Matthieu, il ne fait plus rien dans la maison, comate devant l’ordinateur, ne fait plus la vaisselle. Il se laisse complètement aller. Dans l’épisode 68 « Restons zen ! » (2013-2014) de la série Joséphine Ange gardien, Romane, l’héroïne lesbienne, dit à son père qu’elle a décidé de vivre en Thaïlande, et d’arrêter la fac. Mais elle ne donne pas la vraie raison… qui est son homosexualité.
Dans le film « A Moment in the Reeds » (« Entre les roseaux », 2019) de Mikko Makela, Leevi et son amant Tareq doivent retaper la maison de campagne du père de Leevi, Jouko. Leevi ne semble pas débrouillard et se tape sur le doigt avec un marteau. Et son père le méprise dans l’exercice du bricolage : « J’aurais dû me douter que tu n’y arriverais pas. » Il n’hésite pas à le dévaloriser même devant Tareq : « Mon fils ne sait rien faire. » Et en effet, Leevi est plus occupé à tapoter sur son portable et à lire des livres (d’ailleurs, il est thésard en littérature) qu’intéressé par les travaux manuels : « C’est la première fois que je fais ça. » Concernant la pêche, son père a essayé de l’initier, mais Leevi ne s’est pas laissé enseigner : « Je n’étais pas très doué… » avoue-t-il à Tareq, plus habile de ses mains. Néanmoins, Leevi comme Tareq ne se poussent pas au travail. Bien au contraire. Ils préfèrent batifoler dans les roseaux, faire de la barque et l’amour. Ils esquissent un semblant de remord : « Je t’ai ralenti dans ton travail… » (Tareq) « C’est pas grave ! » (Leevi). Et Tareq se fait un peu violence (« Je suis ici pour travailler. ») mais Leevi le prend mal d’être repoussé et de ne pas parvenir à désoccuper complètement son partenaire. Les deux amants, au final, ne remplissent pas le contrat paternel et les travaux n’avancent pas : « Rien n’est fait ici ! » constate Jouko, qui les chasse de la maison.
Dans beaucoup d’œuvres de fiction homo-érotiques, le personnage homosexuel ne veut pas travailler et se montre particulièrement paresseux : cf. le roman Mimi (2011) de Sébastien Marnier, le film « La Cage aux Folles II » (1981) d’Édouard Molinaro (avec le personnage de poule mouillée de Zaza), le film « Bent » (1997) de Sean Mathias (avec Max, le héros homosexuel artiste se la coulant douce), le film « My Summer Of Love » (2004) de Pawel Pawlikovsky (avec Mona et Tamsin, vivant passivement leur amour de vacances), le film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier (avec le portrait de Loïc, le « j’m’en foutiste » homosexuel), le film « L’Homme de sa vie » (2006) de Zabou Breitman, le film « Un Trabajo Tranquilo » (1974) de Pasquale Festa Campanile, le film « Absences répétées » (1972) de Guy Gilles, le film « 101 Reykjavik » (2000) de Baltasar Kormakur, le roman Les Rêves du Paresseux (1940) d’Alberto Moravia, la pièce Scènes d’été pour jeunes gens en maillots de bain (2012) de Christophe et Stéphane Botti, le film « Godelureaux » (1960) de Claude Chabrol (avec les dandys oisifs), le film « Beautiful Thing » (1996) d’Hettie Macdonald (avec l’errance des deux amants homosexuels, vivant en HLM), le film « Another Gay Movie » (2006) de Todd Stephens, le film « Les Demoiselles de Rochefort » (1967) de Jacques Demy (les sœurs jumelles Solange et Delphine se lèvent à 11h30 tous les matins…). le film « Chouchou » (2003) de Merzak Allouache (avec le play-back d’un travesti M to F sur la chanson « C’est la ouate » de Caroline Loeb, un classique gay), le téléfilm « Clara cet été-là » (2003) de Patrick Grandperret, le film « Vacation ! » (2010) de Zach Clark, le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso, etc.
Extrêmement souvent, le héros homosexuel revendique sa fainéantise : « Je ne suis pas naturellement courageux physiquement. » (Claude dans le film « Déclin de l’Empire américain » (1985) de Denys Arcand) ; « J’aime être dilettante. » (Louis dans la pièce Juste la fin du monde (1999) de Jean-Luc Lagarce) ; « Je déteste l’idée de travailler. » (Chéri dans le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears) ; « Je suis pour vivre couchée. » (Léonore, l’héroïne lesbienne de la pièce On vous rappellera (2010) de François Rimbau) ; « J’suis une loque. » (Philippe, le héros homo du film « Une Histoire sans importance » (1980) de Jacques Duron) ; « J’ai jamais travaillé. » (cf. la chanson « Banlieue Nord » de Johnny Rockfort, dans la comédie musicale Starmania de Michel Berger) ; « Au large de Miami dans mon hamac, je me laisse bercer par le ressac, discipline quotidienne. Tous les jours j’encaisse, je vous le confesse sans aucune faiblesse le prix de la paresse. » (cf. la chanson « Au large de Miami » d’Arnold Turboust) ; « C’est simple, si la vie était un magazine féminin, j’habiterais un superbe loft duplex de 458 mètres carré mansardé avec poutre apparentes, beaucoup de cachet… Je ne pourrais pas travailler, ah ben non, je suis une femme libérée mais comment vous voulez que je bosse avec toutes les choses que j’ai à acheter… » (le comédien de la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « Je suis fait pour rien faire et surtout pour bien le refaire ! Je suis fait pour la fête, pas pour la prise de tête, non ! » (Philippe d’Orléans, le frère homosexuel de Louis XIV, dans la chanson « À qui la faute ? » de la comédie musicale Le Roi Soleil de Kamel Ouali) ; « Je veux travailler mais ne rien faire. » (Rosa dans la pièce musicale Rosa La Rouge (2010) de Marcial Di Fonzo Bo et Claire Diterzi) ; « Ne m’oblige pas à travailler. » (Cachafaz à son amant Raulito dans la pièce Cachafaz (1993) de Copi) ; « J’ai pas envie de travailler. » (Gérard Robert dans la comédie musicale Chantons dans le placard (2011) de Michel Heim) ; « Moi, je vis d’amour et de danse, je vis comme si j’étais en vacances. » (cf. la chanson « Laissez-moi danser » de Dalida) ; « On est heureux, c’est con, hein, on n’en fout pas une rame. » (Doumé à son amant Willie, dans le roman La meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, p. 68) ; « Scum favorisera la force de non-travail. » (cf. une réplique de la pièce My Scum (2008) de Stanislas Briche) ; « J’me suis toujours trouvée trop paresseuse pour me battre. » (Karin dans le film « Die Bitteren Tränen Der Petra Von Kant », « Les Larmes amères de Petra von Kant » (1972), de Rainer Werner Fassbinder) ; « Il n’y a pas plus paresseuse que moi ! » (Michel Hermon dans son spectacle-cabaret Dietrich Hotel, 2008) ; « Je déteste tout ce monde d’attardés qui ne parlent que du cours des drogues et des chemises indiennes. Je les supporte parce que ça amuse Pierre, il essaie des drogues nouvelles et passe toute la journée assis à côté de la piscine en position de lotus à regarder fixement le soleil pendant que je dessine à côté de lui. » (le narrateur homosexuel parlant de son amant Pierre, dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 65) ; « Travail ? Pas la peine. » (Steeve dans la pièce Bang, Bang (2009) de Lascars Gays) ; « Perdre son temps est une façon comme une autre d’en user. » (Denis, le héros homosexuel geek faisant l’éloge de la paresse hédoniste, de l’agir inutile et de « l’art pour l’art », dans le film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta) ; « Je suis fainéante. » (Giovanna dans le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho », « Au premier regard » (2014) de Daniel Ribeiro) ; « J’ai pas envie de bosser. » (Gabriel, l’un des héros homos, idem) ; « Je suis à Pôle Emploi depuis deux ans. » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc.
Par exemple, dans le film « Mauvaises Fréquentations » (2000) d’Antonio Hens, Guillermo, le jeune héros homo, est un paresseux (et fier de l’être !) ; son but affiché dans la vie est d’en faire le moins possible et ne pas travailler : « Parfois, je m’imagine gagnant au loto. Pas besoin de travailler. Mon père se tue pour trois fois rien. Moi, je ne veux pas d’horaires, pas de chef, gagner beaucoup et en faire le moins possible. » Dans le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino, l’histoire d’amour se passe en plein été : Oliver et Elio tuent leur ennui en prenant des bains de soleil… et en couchant ensemble. Dans le film « Portrait de femme » (1996) de Jane Campion, Osmond, le machiavélique bisexuel, est décrit comme un « dilettante stérile ». Dans le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2006) d’Ang Lee, les protagonistes homosexuels ont une réputation de glandeurs : « Vous, les gars des ranchs, vous n’êtes que des bons à rien ! » dit leur chef Aguirre ; l’un d’eux, Hennis (le blond), ne faillit pas à cette réputation puisqu’il avoue que « le plus long voyage qu’il a effectué dans sa vie est celui qui l’a conduit à la poignée de sa cafetière ». Dans la comédie musicale HAIR (2011) de Gérôme Ragni et James Rado, Claude a soutenu qu’« il était pédé » pour être réformé du service militaire. Dans le film « Camping 2 » (2010) de Fabien Onteniente, pour imiter le très efféminé Patrick qui n’a jamais travaillé de sa vie, Jean-Pierre s’habille comme lui : en rose, avec un débardeur où il est écrit « NO JOB ». Dans le sketch « Le Colonel » de Pierre Palmade, le très homosexuel chasseur de la Guéronnière veut en faire le moins possible et passer une semaine à se la couler douce : pour cela, il négocie un traitement de faveur avec son supérieur. Dans la pièce Érik Satie… Qui aime bien Satie bien (2009) de Brigitte Bladou, le compositeur Érik Satie dit qu’il est un mélange d’Adam et d’Ève, « des paresseux sans doute » ; il ne semble d’ailleurs pas avoir une grande idée du travail (« Sachez que le travail, c’est la liberté… La liberté des autres. »). Dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, les héros sont montrés totalement désœuvrés ; à part pour l’équeutage des haricots, ils ne foutent rien dans leur baraque, et ne savent même pas organiser une vie commune avec un partage équilibré des taches (p. 204). Dans le film « Órói » (« Jitters », 2010) de Baldvin Zophoníasson, Marcus, le héros homosexuel, est très oisif et sèche tous les cours. Dans le film « Nuits d’ivresse printanière » (2009) de Lou Ye, Wang Ping avoue qu’il n’a jamais travaillé, et qu’il est resté éternellement étudiant. Dans le roman Autobiographie érotique (2006) de Bruce Benderson, Romulus, le prostitué roumain, « glande en Hongrie ». Dans le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure, Laurent (Cyrille Thouvenin) est l’étudiant dilettante refusant de travailler, et peu motivé par son cursus scolaire. Dans la pièce Une Cigogne pour trois (2008) de Romuald Jankow, Sébastien figure l’homosexuel dilettante devant sa télévision, qui ne donne aucun coup de main pour les services à la maison. Dans le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears, Johnny ne veut pas venir travailler à la laverie automatique de son amant Omar. Dans le film « Grande École » (2003) de Robert Salis, Louis-Arnault ne fait jamais la vaisselle. Dans le film « Mort à Venise » (1971) de Luchino Visconti, l’oisif Aschenbach ne fait rien d’autre de ses journées qu’observer passivement son entourage. Dans le film « Swimming Pool » (2002) de François Ozon, Sarah est la femme rigide qui ne se mouille jamais (dans tous les sens du terme ! elle ne veut même pas se baigner dans la piscine par peur des microbes !), qui ne retrousse ses manches que pour le maquillage du crime. Dans le film « Les Enfants terribles » (1949) de Jean-Pierre Melville, Paul est présenté comme un fainéant « qui refuse de faire un effort », et sa sœur Élisabeth, comme une bonne à rien qui, selon son frère, « ne sait pas travailler et qui n’a jamais travaillé » ; cette dernière cherche à démentir cette réputation en se trouvant un travail… mais le seul « métier » qu’elle accepte est un travail de figuration, c’est-à-dire le mannequinat ; ensuite, en épousant un milliardaire qui meurt accidentellement sitôt le mariage consumé, elle règle finalement le problème en s’assurant un veuvage prospère qui la dispensera de travailler. Dans le film « Presque rien » (2000) de Sébastien Lifshitz, Mathieu est présenté par sa sœur comme un « glandeur », tandis que Cédric, le petit copain de Matthieu, n’a pas de travail. Dans le film « Torch Song Trilogy » (1989) de Paul Bogart, Arnold ne travaille pas et ne sait rien faire de ses mains : son seul métier consiste à jouer le travesti la nuit, autrement dit à l’exhibition. Dans la pièce Qui aime bien trahit bien ! (2008) de Vincent Delboy, Sébastien l’homosexuel dit qu’il ne veut pas travailler : « J’en fous pas une de la journée… » ; le seul « boulot » qu’il accepte, c’est celui de gogo dancer… Dans le film « Les Yeux fermés » (2000) d’Olivier Py, Ahmed est présenté comme « un oisif authentique » ; et il confirme sa réputation : « Je suis le garçon qui ne fait rien. C’est terrible. Ma mère est morte, elle m’a laissé un peu d’argent. Je me laisse vivre. » Dans le roman Des chiens (2011) de Miko Nietomertz, Claude, la compagne de Polly, traite sa copine et ses deux potes gays Simon et Mike de paresseux : « Vous me faîtes rire, les deux pédés et la lesbienne, on dirait deux burnes accrochées à une bite. Accrocs au virtuel, hein, c’est ça ? Parfois, je pense à vous et je me dis que vous êtes vraiment à côté de la plaque, tous autant que vous êtes, les trois branleurs capables de rien. La génération virtuelle, celle qui existe même pas vraiment. Vous avez quoi dans vos vies à part vous branler et coucher avec le premier venu ? Du cinéma, de l’écriture, ah lala, mais on vous a pas appris la vie, je te jure. Moi je vous conseille de vous bouger, de trouver quelque chose à faire de vos vies, parce que c’est pas la vie qui va venir vous chercher dans vos petits appartements bourgeois avec vos petits ennuis bourgeois et vos petites gueules bourgeoises. Un jour il faudra faire bouillir la marmite au lieu d’attendre que les allocs vous tombent dans la gueule. » (p. 80-81) Dans le film « Far West » (2003) de Pascal-Alex Vincent, Ricky, le héros homosexuel, et ses deux potes gay fashion victim, arrivant fraîchement de la ville et débarquant dans la ferme du grand-père de Ricky, sont incapables d’aider ce dernier aux champs… et quand ils sont forcés à le faire, ils lui bousillent son tracteur en se disputant le volant ; ils ne sont bons qu’à exécuter des « chorés » dans la grange à papy (avec de chapeaux de cow-boys à la Madonna), à jouer aux cartes, et à se la couler douce à la ferme sur des transats (« Toi et tes amis, vous êtes plus utiles au four qu’au moulin, hein… » remarque le grand-père).
À plus grande échelle, l’homosexualité, si elle devient une option et une loi d’État, apparaît alors comme un signe de crise profonde d’un pays qui connaît(-ra) une grande hausse du chômage. « L’homosexualité, c’est de la peur, de la paresse. C’est criminel de la part d’un État d’avoir infantilisé ainsi les gens. » (le père de Claire, l’héroïne lesbienne, parlant du « mariage pour tous », dans la pièce Le Mariage (2014) de Jean-Luc Jeener). Dans le film « Plaire, aimer et courir vite » (2018) de Christophe Honoré, Jacques, le héros homo, a la flemme de travailler, et au moment d’être à découvert, se réveille un peu : « Faut que je travaille. Et très très vite. ».
b) Changer la roue de voiture :
Dans certaines créations artistiques, il arrive que le personnage homosexuel masculin ne sache pas changer une roue de voiture, ou refuse de le faire : cf. le film « Drôle de Félix » (1999) de Olivier Ducastel et Jacques Martineau, le film « Priscilla, folle du désert » (1995) de Stephan Elliot, le film « Le Soleil assassiné » (2002) d’Abdelkrim Bahloul, le film « Almost Normal » (2005) de Marc Moody, le film « Loin » (2001) d’André Téchiné, la chanson « Équivoque » de Jean-Luc Lahaye ; etc.
La roue de secours est comme la métaphore homo-fictionnelle du manque d’enracinement du désir homosexuel dans la réalité et dans le bon sens humain, ou bien le signe d’une exploitation, ou même un symptôme de lesbianisme : « Vous êtes incapable de changer un pneu. » (Lydia s’adressant à Otho le personnage homosexuel, dans le film « Bettlejuice » (1988) de Tim Burton) ; « Les homos sont ceux qui ne savent pas réparer une voiture. » (cf. une réplique de la pièce Faim d’année (2007) de Franck Arrondeau et Xaviéra Marcjetti) ; « Iris urinait contre une roue de la voiture pendant que Carina poudrait de poivre ses moustaches en bavardant avec elle. » (Copi, La Cité des Rats (1979), p. 44) ; « Vous savez quoi ?!? La roue de secours, elle est crevée ! » (César, parlant de lui-même, et se plaignant d’être le dindon de la farce du projet d’homoparentalité du couple lesbien Kim-Alexandra, dans le film « On ne choisit pas sa famille » (2011) de Christian Clavier) ; « Y’a plein de femmes qui ont leur permis poids-lourds : les lesbiennes. » (Anthony Kavanagh dans son one-man-show Anthony Kavanagh fait son coming out, 2010) ; « Je sais changer une roue… et là, elle croit que je suis lesbienne. » (Agathe dans la pièce Les Deux pieds dans le bonheur (2008) de Géraldine Therre et Erwin Zirmi) ; etc. Par exemple, dans le one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman, Jarry, le héros homosexuel, ne sait pas changer sa roue de voiture : c’est une passante qui est obligée de le faire à sa place ! Dans le one-man-show Au sol et en vol (2014) de Jean-Philippe Janssens, Jeanfi, le steward homo, dit que sur la fraterie de quatre enfants dont il fait partie, ils sont deux, sa sœur et lui, à avoir fait un coming out : « Ça fait un beau ratio ! ». Il fait la remarque qu’avec sa frangine, qui a choisi d’être chauffeur routier, de se comporter en mec, de changer les plaquettes de freins de leur père, et lui qui a décidé d’assumer sa féminité, d’être hôtesse de l’air, il a dû y avoir « inversion ». Dans le film « Facing Mirrors : Aynehaye Rooberoo » (« Une Femme iranienne », 2014) de Negar Azarbayjani, le taxi de Rana crève. Et ni sa conductrice ni sa passagère transsexuelle F to M Adineh ne savent changer la roue. Dans la pièce Le Cheval bleu se promène sur l’horizon, deux fois (2015) de Philippe Cassand, Guy, homosexuel, ne sait pas changer sa roue de voiture. Il tue Herbert, l’amant caché de son amoureux Hugues, avec un cric.
c) La simulation d’action :
L’hyper-activité chez le héros homosexuel n’est pas non plus un gage d’ancrage dans le réel. Certains personnages gays se transforment, surtout à travers l’art et la culture (bodybuilding et gonflette, aussi), en fous de travail ou en hommes de terrain (fermiers, ouvriers), pour faire illusion sur leur paresse ou leur désir d’éloignement de la réalité ; et certaines héroïnes lesbiennes, à la force du poignet, s’imposent dans des milieux masculins physiquement difficiles (l’agriculture, l’armée, le sport, la mécanique, etc.) : cf. le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2005) d’Ang Lee, le film « W… imie » (« Aime et fais ce que tu veux », 2013) de Małgorzata Szumowska, le film « Far West » de Pascal-Alex Vincent, le film « Oublier Chéyenne » (2005) de Valérie Minetto, le film « Stadt, Land, Fluss » (« La Clé des champs », 2011) de Benjamin Cantu (racontant l’idylle entre deux garçons fermiers), « Désirs interdits » (« Hombres de Piel dura », 2019) de José Celestino Campusano, la chanson « Travaillera Rusticana » de O’dett, etc.
Ces personnages se détournent en réalité de ce que leur sexe d’origine et leur corps sexué les prédisposaient un peu plus à faire, soit en faisant des métiers trop manuels pour eux, soit au contraire en fuyant tout travail manuel : « Ceux qui me considèrent comme un oisif, un bon à rien, un dilettante, devraient connaître l’énergie que je dépense sans compter [dans l’écriture]. » (la figure de Marcel Proust dans le roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson, p. 109)
D’ailleurs, dans les discours de certains héros homosexuels et transsexuels, le rôle social se confond avec le rôle cinématographique : « Le travail ne me fait pas peur : je suis un peu décorateur, un peu styliste. Mais mon vrai métier, c’est la nuit que je l’exerce, travesti : je suis artiste. » (cf. la chanson « Comme ils disent » de Charles Aznavour)
Si le personnage homosexuel aime le travail, ce sera juste « dans l’idée », pour le « trip »… ou pour regarder le bel ouvrier qui bûche à sa place : « J’aimais d’instinct ce monde de la mer, ces hommes qui ne vivaient qu’auprès de la mer, des bateaux. Je voulais de tout mon cœur appartenir à ce monde-là, être en compagnie de ces hommes. Je pressentais que je saurais amarrer les bateaux, répondre à des ordres qu’on gueule, avoir ce visage buriné, ces rides ensoleillées, ces vêtements usés. Les premiers rêves de mon enfance ont été des rêves de marins. […]. Je ne suis pas devenu marin. » (Luca, le héros du roman Son Frère (2001) de Philippe Besson, pp. 29-32) ; « La sueur qui ruisselait de son torse convergeait dans sa lavogne ombilicale. » (cf. la description du tondeur travaillant à l’extérieur de la propriété du narrateur homosexuel, dans la nouvelle « Crime dans la cité » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 73) ; « Je me penchai sous ma voiture. Un apprenti m’aperceva et se relevit. Il finissait sa journée, et ça se voyait sur son bleu de travail qu’il n’avait de bleu que le nom. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « De l’usage intempestif du condom dans la pornographie » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 97) ; « Je dois avouer qu’il est beau dans son gilet bleu et son pantalon de toile. Il n’a vraiment pas l’air d’un Boche. On croirait un de ces jeunes ouvriers qui travaillent sur les chantiers navals et, si je ne le connaissais pas, je m’y serais laissée prendre. » (Madeleine dans le roman À mon cœur défendant (2010) de Thibaut de Saint-Pol, p. 194) ; « Ce jardinier, on le dirait sorti d’un calendrier des Dieux du Stade. » (Tom, le héros homosexuel en parlant de son futur amant qui le fait fantasmer, Louis, le jardinier sexy de la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen) ; « Si tu veux faire le potager tout nu, tu le fais. » (Graziella s’adressant à Louis, idem) ; etc. Par exemple, dans la pièce Chroniques des temps de Sida (2009) de Bruno Dairou, le héros homosexuel envie la vie calme des pêcheurs. Mais seulement « envie »…
Par exemple, dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Gabriel, Nicolas et Rudolf, les trois potes gays parisiens, ne sont pas du tout débrouillard ni manuels. Ils font semblant de l’être, juste le temps de la carte postale. Notamment, Nicolas se prend sérieusement en photo torse nu avec une hache à la main pour faire croire qu’il sait couper du bois dans un chalet montagnard en Autriche… mais il se garde bien de faire vraiment le travail de bûcheron après ! Dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti, Simon, le héros homo, fantasme sur un ouvrier paysagiste horticole qui s’occupe des espaces verts de son quartier résidentiel.
Dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway, Sergueï Eisenstein, homosexuel, est décrit comme « une dilettante avec des intérêts encyclopédiques ». Et en effet, il voyage au Mexique pour soi-disant tourner un film, et on ne le voit jamais au travail. Mary Sinclair vient lui rendre visite et s’étonne de son inactivité : « Il est 10h du matin… et vous êtes encore en pyjama ? » Face à son dilettantisme, Eisenstein joue les débordés : « J’ai une quantité illimitée de travail. »
Je vous renvoie également à l’expo photos Hommes à la tache (2015) du photographe Marc Martin, présentant des clichés d’ouvriers sexys, à la galerie Au Bonheur du Jour à Paris, et qui illustre parfaitement le simulacre homosexuel d’action.
FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION
PARFOIS RÉALITÉ
La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :
a) La peur/paresse de faire :
Dans le langage courant et dans la pensée populaire, quand on dit « C’est pas un boulot de tapette », on sous-entend que c’est un boulot difficile ou de qualité… et donc on associe l’homosexualité au travail mal fait, voire pas fait du tout ! La paresse est, dans l’inconscient collectif, souvent associée à l’homosexualité.
Plus qu’une vraie paresse, l’inactivité homosexuelle, comme je le disais dans la notice explicative, vient davantage d’une peur de ne pas savoir faire (peur par exemple de soulever une lourde charge, de mettre les mains dans le cambouis, de se salir, de ne pas savoir se boucher le nez sous l’eau ou plonger, de changer une roue de voiture, d’être attaquant au foot, etc.), une angoisse de se confronter à l’effort (autre qu’intellectuel) et à la réalité/Réalité. C’est ce que semble nous faire comprendre la scène cocasse de la biscotte de La Cage aux Folles (1973) avec Zaza Napoli… tout fictionnelle qu’elle soit. La décontraction excessive est souvent l’arme ultime des angoissés.
Si on les écoute, beaucoup d’individus homosexuels (le plus souvent garçons) sont montrés, ou se montrent eux-mêmes, comme des incapables, des « lopettes » : « La tendance à l’efféminé est une forme de mollesse, celle de l’homme qui fait traîner son manteau pour s’éviter l’effort de le soulever. » (Aristote, Éthique à Nicomaque, chapitre VII, cité dans l’essai Queer Critics (2002) de François Cusset, p. 31) ; « Carson, qui avait toujours eu des domestiques, ne savait rien faire. » (Josyane Savigneau, Carson McCullers (1995), p. 81) ; « Mon père était bricoleur, et fier de ses capacités en ce domaine, comme il était fier du travail manuel en général. […] Moi, je ne savais rien faire de mes dix doigts. Et dans cette incapacité voulue, j’investissais bien sûr tout mon désir de ne pas lui ressembler. Plus tard, j’allais découvrir que certains intellectuels adorent bricoler et qu’on peut à la fois aimer les livres, et s’adonner avec plaisir aux activités pratiques et manuelles. Cette découverte me plongerait dans des abîmes de perplexité : un peu comme si toute ma personnalité se trouvait mise en cause par la déstabilisation de ce que j’avais longtemps perçu et vécu comme un binarisme fondamental, constitutif (mais en réalité, seulement constitutif de moi-même). Il en ira de même avec le sport. » (Didier Éribon, Retour à Reims (2010), pp. 57-58) ; « Je désirai plus que tout être ‘réformé’ pour éviter d’aller à l’armée. » (idem, p. 111) ; « Il fallait s’occuper de l’intendance, du ménage, des paperasses et de mille autres broutilles qui me parurent rapidement insurmontables. Je n’avais aucune idée de ce que signifiait équilibrer un budget ou payer des factures d’eau et d’électricité. J’avais vécu jusqu’ici dans une bulle spirituelle et je ne m’attendais pas à la violence de la confrontation aux réalités du quotidien. » (Jean-Michel Dunand parlant de la vie religieuse communautaire, dans son autobiographie Libre : De la honte à la lumière (2011), pp. 86-87) ; « J’ai tenu comme j’ai pu. J’ai arrêté de travailler. Je suis devenu une petite femme. Ta conception de la femme. » (Abdellah Taïa s’adressant à son ex-amant Slimane avec qui il vivait une relation amoureuse déséquilibrée, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), p. 117) ; « Jean Cocteau a eu la vie facile. » (Yves Riou et Philippe Pouchain dans leur documentaire « Cocteau/Marais : un couple mythique », 2013) ; « Je le voyais, Abdellah. Naïf. Amoureux. Paresseux. Ambitieux. Décidé à conquérir Paris. Impatient. Source de mal malgré lui pour ceux qui tombaient en amour pour lui. Seul, pour son plus grand bonheur. Seul, pour son plus grand malheur. » (Abdellah Taïa parlant de lui à la troisième personne, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), p. 63) ; « Avec l’homosexualité, on n’est pas avec ceux qui font le boulot. On est dans les rapports de désir. On oublie toujours la production, c’est marrant, on oublie qu’il faut qu’il y ait des gens qui travaillent quand même. » (Alain Soral dans l’émission 100% Politique de Patrick Buisson traitant du « communautarisme gay » sur la chaîne LCI en 2003) ; « Je ne veux pas prendre un studio pour me retrouver seul face à moi-même, livré à moi-même (pauvre petit). Je ne sais pas faire la bouffe. Je sais me laver le linge et faire l’entretien courant du ménage, repasser et nettoyer. Mais j’ai du mal à me gérer moi même, je suis en insécurité permanente, comme si la mort m’attendait à chaque coin de rue. Une nouvelle référence à la fainéantise (le je-m’en-foutisme) que tu cites comme un point inhérent à l’homosexualité. » (cf. le mail d’un ami homo, Pierre-Adrien, 30 ans, reçu en juin 2014) ; « J’ai vécu dans du coton, dans du capitonnage douillet. Je baigne dans le miel. » (Jean-Louis Bory au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 6 mai 1976) ; « Guillaume II est superficiel et agité, incapable de travailler sérieusement, sentimental et théâtral, arrogant et parfois même violent, et il recherche les applaudissements comme un homme de théâtre. » (Baechler cité dans l’essai Le Rose et le Brun (2015) de Philippe Simonnot, pp. 48-49) ; etc.
Dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), la romancière lesbienne Paula Dumont dit qu’elle « est de nature plutôt dilettante » (p. 171) : « Tout au long de mes années de lycée, les enseignants m’avaient reproché mon dilettantisme. » (idem, p. 39) Et quand elle tire le portrait de sa compagne Martine, elle arrive au même constat : « Pendant toute ma carrière, je n’ai vu une novice aussi inefficace que Martine. Elle tardait à se lever le matin. […] Sa vocation était de travailler quand ça lui chantait, de jaser avec les autres forains, de bronzer à côté de son étalage, bref de ne plus avoir de comptes à rendre à un patron et de se tourner les pouces. […] J’étais arrivée à la conclusion que Martine, malgré de grandes proclamations d’indépendance et d’actes de foi en vue d’une vie libre et sans entraves, ne rêvait que de ne pas travailler du tout, ni chez un patron, ni à son propre compte. » (pp. 25-26)
Il arrive que cette peur de faire s’habille d’orgueil et d’une paresse assumés pour se cacher. On l’enrobe de préciosité, de mystère, d’arrogance, ou d’agressivité. « Je suis paresseux. » (Étienne Daho dans l’émission Alcaline sur France 2 le 20 février 2014) Par exemple, le poète Arthur Rimbaud ne veut pas trouver de boulot : il prétexte ne pas avoir de temps à perdre à gagner sa vie en travaillant. Ce n’est pas sans raison que François Coppée le définit comme un « fumiste réussi » (cf. l’article « Sentes buissonnières » de Daniel Grojnowski, dans le Magazine littéraire, n°321, mai 1994, p. 45). Dans son one-(wo)man-show Charlène Duval… entre copines (2011), Charlène Duval, après avoir dit que l’héritière Paris Hilton « ne faisait rien de ses journées », avoue très innocemment : « Nous sommes tous un peu héritières… ». Dans le documentaire « Homophobie à l’italienne » (2007) de Gustav Hofer et Luca Ragazzi, le « couple » Gustav/Luca, est tellement branché médias qu’ils ne savent même pas se faire la cuisine.
Derrière cette paresse homosexuelle, la décontraction travaillée ou la désinvolture déprimée, se cachent souvent un viol ou des pratiques violentes. « Devant mon représentant, mes absences commencèrent à faire désordre. Je donnais l’impression de ne rien faire et d’être immensément riche. Ce qui, mal s’en fut, suscita d’énormes questions. Il pensait, en effet, que j’étais tombé dans une histoire de drogue. Le moyen le plus sûr était de l’ignorer totalement, lorsqu’il souhaitait faire ma chambre de fond en comble. Mais s’avouer homosexuel et, par-dessus le marché, se faire entretenir, n’était pas mieux non plus. » (Berthrand Nguyen Matoko, multipliant les absences au travail car il commence à se prostituer avec des hommes, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), p. 115) La censure que certaines personnes homosexuelles s’imposent pour dissimuler ces violences/souffrances peut prendre la forme de la phobie scolaire, de la désertion du devoir d’État, du chômage, de la dépression, de l’incapacité à mobiliser ses forces à un quelconque ouvrage orienté vers le bien commun.
b) Changer la roue de voiture :
La roue de secours serait comme la métaphore homo-fictionnelle du manque d’enracinement du désir homosexuel dans la réalité et dans le bon sens humain, ou bien le signe d’une exploitation, ou même un symptôme de lesbianisme : « Depuis toujours, j’ai un vrai problème avec les objets, qui semblent se liguer contre moi dès que je les approche. Ainsi, j’évite les marteaux et les pinces, je ne touche pas à l’électricité […]. » (Jean-Claude Brialy, Le Ruisseau des Singes (2000), p. 404) Dans l’émission V.I.P. de la chaîne KTO diffusée le 2 janvier 2016, Dominique Fernandez, académicien homosexuel, révèle qu’il s’ennuie souvent, mais également qu' »il ne sait même pas planté un clou » Quand je me trouvais en études à Rennes, j’avais fait le test de poser une question facétieuse à un groupe d’amis gays que je fréquentais, la question-qui-tue : « Qui sait changer la roue crevée d’une voiture en cas d’accident ? » Sur les six personnes interrogées, aucune ne savait ! Il y en aurait, des stages de confrontation au réel (et à sa réalité sexuée) à faire, dans le « milieu homosexuel » !
Je sais, pour ma part, que mon désir homosexuel est un des signaux de ma peur d’être qui je suis (un homme). Je n’ai jamais eu vraiment le sens pratique pour tout ce qui est le jardinage, le bricolage, la mécanique, le sport, la cuisine, les mathématiques, les travaux manuels, les jeux de logique ou de construction. J’ai conscience aussi que cela est du en infime partie par mon éducation parentale : mes parents, même encore aujourd’hui, ont eu peur que je fasse, que je me blesse, que je m’y prenne mal… et ont agi « à ma place », toujours avec les meilleures intentions du monde. Mais voilà…
c) La simulation d’action :
Dans l’extrême inverse, comme faisant écho à la paresse, certaines personnes homosexuelles sombrent dans un activisme forcené : on les dit « incapables de rester inactives » (Ronald Martinetti, James Dean (1995), p. 105). Le dilettantisme peut se traduire alors par une peur obsessionnelle de l’ennui. On s’investit à fond dans les milieux artistiques ou intellectuels pour se fuir et fuir ses identités d’homme ou de femme. « En dehors du travail, je ne sais rien faire. C’est à peine si je sais remplir un chèque. » (Yves Saint-Laurent dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert) ; « J’aimerais partir. Ne rien faire. Pour tout oublier. Devenir sage. » (Yves Saint-Laurent, dans le documentaire « Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé : l’Amour fou » (2010) de Pierre Thoretton) ; etc. L’hyper-activité n’est pas un gage de fidélité au réel. Comme le font par exemple certains individus homosexuels – qui, avec le temps, se sont transformés en fous de travail (c’est mon cas !) pour faire illusion sur leur paresse ou leur désir d’éloignement du réel –, ou bien certaines femmes lesbiennes qui, à la force du poignet, se sont imposées dans des milieux masculins physiquement difficiles (l’agriculture, l’armée, le sport, la mécanique, etc.) pour « se donner un genre/un nouveau sexe », on se lance dans toute sorte d’activités qui nous détournent de ce à quoi notre sexe d’origine et notre corps sexué nous prédisposaient un peu plus à faire. « Il a choisi, dès son plus jeune âge, une profession plus ou moins libérale : il est tailleur, coiffeur, chapelier, antiquaire (bien sûr), ébéniste en meubles précieux, quelquefois notaire ou huissier. Il est bien rare qu’il exerce un métier manuel. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 102) ; « J’exerce ce métier qui en est si peu un. » (Christian à propos de son statut d’écrivain, dans l’autobiographie Parloir (2002) de Christian Giudicelli, p. 111) ; « J’habitais la banlieue et même si c’était intenable, j’étais toujours fourrée avec les garçons, je passais mon temps à réparer les mobylettes. C’était ma vie, ça : réparer des mobylettes, fumer des clopes, aller regarder le football. » (Gaëlle, une femme lesbienne de 37 ans, dans l’essai Se dire lesbienne : Vie de couple, sexualité, représentation de soi (2010) de Natacha Chetcuti, pp. 56-57) Par exemple, Violette Morris, la collaboratrice lesbienne de la Gestapo, dirigeait le Garage Perching en France, dans les années 1930. Oui, ce n’est pas parce qu’on s’affaire qu’on est efficace, qu’on « fait pleinement », et qu’on a échappé à l’image, au paraître, à une forme détournée de paresse !
Cela peut sembler paradoxal (c’est la sempiternelle disjonction entre les intentions et actes…) mais l’activisme est tout à fait une forme de fuite du Réel et de l’action vraie, libre. On s’agite mais on n’est ni vraiment efficace ni vraiment aimant. L’activisme est le propre de la pulsion. Et le désir homosexuel, de par son exclusion de la différence des sexes, est un des désirs humains les plus pulsionnels qui soient. Il est donc logique qu’il pousse celui qui s’y adonne à la fois à l’activisme et au dilettantisme.
Avec la pratique homosexuelle, on est plus dans le faire et dans l’avoir que dans l’être et le vouloir ; on est plus dans le ressenti que dans le véritable désir et le vouloir ; on est plus dans le droit que dans le devoir ; plus dans le fantasme que dans le Réel ; plus dans le génital que dans le sexuel (au sens large) ; plus dans l’excitation (intercalée de fortes phases d’engourdissement, de lassitude, de désinvolture) que dans l’engagement durable et solide. La vraie action, ce n’est pas tellement faire, ce n’est pas le rendement ou l’efficacité telle que le monde la définit : c’est aimer Jésus et être devant Lui. C’est pour ça que je crois qu’une Marthe Robin, qui est restée prostrée sur son lit pendant des années, a plus agi qu’un executive man qui s’agite dans tous les sens devant ses écrans. C’est pour ça aussi que je crois que le Paradis n’a rien de reposant !
La flemme homosexuelle, c’est surtout celle du déni des limites objectives du couple homo, c’est celle de l’angoisse (injustifiée) de la frustration génitale (nécessaire de temps en temps), c’est celle du déni de la beauté de la continence sexuelle (continence proposée de manière catastrophique et caricaturale par le curé du film « Paresse » (2000) de Frank Mosvold, ci-dessous), c’est celle du renoncement à la pratique homo, non pas parce que cette pratique serait intégralement mauvaise et sans bénéfices, mais bien parce qu’elle n’est pas la meilleure et qu’elle est excluante de la différence des sexes qui seule permet d’aimer pleinement. La paresse homosexuelle est au fond le refus de remettre en cause ses fantasmes amoureux asexués.
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