Jardins synthétiques
NOTICE EXPLICATIVE :
Côté Jardin
Le désir homosexuel ayant fui la différence des sexes et donc le roc du Réel humain, entraîne ceux qui s’y adonnent ou y identifient dans une forêt (= métaphore de la sexualité) qui a tout, en apparence du jardin classique rêvé. Au départ, il ressemble même à un joli cocon incestuel/incestueux, à un décor scintillant de fleurs et de feuilles cousues main par les photographes Pierre et Gilles. Mais peu à peu, cet espace vert montre son vrai visage de Jardin d’Éden inversé, de parc en papier mâché, de scène du péché originel (= le viol entre l’homme et la femme, ou le viol homosexuel homophobe.
N.B. : Je vous renvoie aux codes « Animaux empaillés », « Fleurs », « Un Petit Poisson, Un Petit Oiseau », « Chevauchement de la fiction sur la Réalité », « Planeur », « Focalisation sur le péché », « Maquillage », « Homosexuels psychorigides », « Femme et homme en statues de cire », « Plus que naturel », « Médecines parallèles », « Frankenstein », « Vierge », « Désert », « Solitude », « Femme allongée », « Milieu homosexuel paradisiaque », « Milieu homosexuel infernal », « Homosexuel homophobe », « Eau », « Sirène », « Ennemi de la Nature », « Homosexualité noire et glorieuse », « Aube », « S’homosexualiser par le matriarcat », « Ville », « Se prendre pour Dieu », « Bobo », « Innocence », « Fresques historiques », « Couple homosexuel enfermé dans un cinéma », et « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été à l’orée d’un bois », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.
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FICTION
a) Le joli jardin d’enfant :
Fréquemment, dans les fictions homo-érotiques, il est question d’un jardin ou d’une forêt où le héros homosexuel se trouve. Un jardin enchanté : cf. le film « The Garden » (1990) de Derek Jarman, le roman Archaos ou le Jardin étincelant (1975) de Christiane Rochefort, le film « Pink Narcissus » (1971) de James Bidgood, le film « The Hanging Garden » (« Le Jardin suspendu », 1997) de Thom Fitzgerald, le roman Le Jardin des chimères (1921) de Marguerite Yourcenar, le roman La Busca Del Jardín (1977) d’Héctor Bianciotti, le film « Les Enfants du Paradis » (1945) de Marcel Carné, le film « The Garden Of Eden » (1928) de Lewis Milestone, la chanson « L’Alizé » d’Alizée, la chanson « Paradis inanimé » de Mylène Farmer, le roman The Rubyfruit Jungle (1973) de Rita Mae Brown, le film « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure (avec la jardinerie de Cédric), le film « Les Lèvres rouges » (1971) d’Harry Kümel (avec la serre), le film « The Pleasure Garden » (1953) et le film « The Gardener Of Eden » (1981) de James Broughton, le film « Jubilé » (1978) de Derek Jarman (avec le jardinier homosexuel), le film « Le Jardin des délices » (1967) de Silvano Agosti, la chanson « Le Jardinier qui boite » de Charles Trénet, le film « Minuit dans le jardin du bien et du mal » (1997) de Clint Eastwood, le roman Les Dix Gros Blancs (2005) d’Emmanuel Pierrat (avec Juan le jardinier homo), le film « Sotvoreniye Adama » (« La Côte d’Adam », 1993) de Yuri Pavlov, le film « El Jardín Secreto » (1984) de Carlos Suárez, le film « Más Allá Del Jardín » (1997) de Pedro Olea, le film « Proteus » (2003) de Jack Lewis et John Greyson (avec le botaniste), le film « Je t’aime toi » (2004) d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky, le roman Aux jardins des acacias (2014) de Marie-Claire Blais, le film « Tomboy » (2011) de Céline Sciamma (avec la forêt comme lieu d’asexuation), le film « Alice au pays des merveilles » (2010) de Tim Burton, le film « Chloé » (2009) d’Atom Egoyan (avec le jardin d’Allan), le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears, le film « Homme au bain » (2010) de Christophe Honoré (avec les petits oiseaux en pleine ville de New York), le film « Le Fil » (2010) de Mehdi Ben Attia (avec le fantasme de Bilal, le bel ouvrier-jardinier en train de travailler dans le jardin, et regardé avec envie par le colon Malik), le film « Autoportrait aux trois filles » (2009) de Nicolas Pleskof (avec les fondus enchaînés d’objet ou de lampe électrique à des images de plantes, du soleil), le film « Big Eden » (2001) de Thomas Bezucha, le vidéo-clip « Only Gay In The World » de Ryan James Yezak (avec un jardin des origines version gay), la pièce Copains navrants (2011) de Patrick Hernandez (avec les fruits en plastique dans l’appartement de Vivi, l’un des héros homosexuels), le film « Friendly Persuasion » (« La Loi du Seigneur », 1956) de William Wyler (Jean Birdwell est pépiniériste), La pièce Jardins secrets (2019) de Béatrice Collas, etc.
Ce jardin apparaît comme une image d’Épinal figée, une vision extatique irréelle paradisiaque, une réminiscence d’une enfance idéalisée, d’un état intra-utérin fusionnel avec la mère (cinématographique), une rêverie édénique d’un « amour » homosexuel merveilleux, un décor de théâtre ou de cinéma. « Laisse-moi m’envoler vers un autre Jardin d’Éden. » (Benji s’adressant à son amant Maxence, dans la comédie musicale Sauna (2011) de Nicolas Guilleminot) ; « Nous étions seuls au monde. La forêt nous avait éloignés de tout et, plus ou moins, libérés de tout. Nous étions nus. Nous avions enlevé nos vêtements rapidement. » (Khalid et Omar, les deux amants du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 137) ; « Melocotón et boules d’or, deux gosses dans un jardin. » (cf. la chanson « Melocotón » de Colette Maniot) ; etc.
Par exemple, dans le roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, le héros est jardinier et patron d’une pépinière. Dans la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen, Louis, l’amant-jardinier sexy, est comparé à un « buisson qui court » par Tom, son futur amant. Dans la pièce L’Héritage de la Femme-Araignée (2007) de Christophe et Stéphane Botti, Audric a le pouvoir de créer des fleurs et s’intéresse à la botanique. Dans le film « Bug » (2003) d’Arnault Labaronne, la forêt d’Aurore est réduite à un décor de jeux vidéo. Dans le film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré, la Nature est réenchantée par les mythes grecs (peu réputés pour leur douceur…). Dans le film « Chloé » (2009) d’Atom Egoyan, Chloé, l’héroïne lesbienne, adore les jardins artificiels. Les premières images du film « Nuits d’ivresse printanière » (2009) de Lou Ye sont des nénuphars dans des bocaux. Dans son roman La Cité des rats (1979), Copi a construit une forêt tropicale aux dimensions disproportionnées puisqu’elle est regardée par des rats bisexuels voyant « des cerises grosses comme des pastèques » (p. 132). Dans le film « Morrer Como Um Homen » (« Mourir comme un homme », 2009) de João Pedro Rodrigues, Irène et Tonia, les deux hommes transsexuels M to F, se retrouvent dans une serre, un jardin synthétique. Dans le film « Temps de chien » (2011) de Viva Delorme, une jeune paysagiste lesbienne s’occupant des espaces verts d’une ville trouve un chien abandonné dans la forêt où elle travaille. Dans le film « Les Amitiés particulières » (1964) de Jean Delannoy, Georges et Alexandre s’enferment dans une serre pour y vivre leur amour pédophile interdit. Dans le film « Vita et Virginia » (2019) de Chanya Button, à plusieurs reprises, les amantes Virginia Woolf et Vita Sackville-West se retrouvent dans une serre.
Le plus souvent, le jardin des fictions traitant d’homosexualité est une composition, une reconstitution humaine. Il s’agit d’un jardin synthétique, artificiel : « Je déteste la campagne. Je n’apprécie la nature que dans les jardins des villes. » (Dominique, le héros homosexuel du roman Les Julottes (2001) de Françoise Dorin, p. 67) ; « Je viens de l’autre côté du miroir, […] du côté du faux jardin. » (la voix narrative de la pièce musicale Arthur Rimbaud ne s’était pas trompée (2008) de Bruno Bisaro) ; etc.
Il dit la vanité de l’orgueil humain. D’ailleurs, il arrive que le héros homosexuel se prenne pour un arbre ou une forêt, cherche à devenir l’androgyne ou Dieu : « Élève-toi avant que les chênes ne t’étouffent. […] Toi, tu n’es qu’un arbre banal. » (Négoce, le héros homosexuel de la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud) ; « Le vieil ami Tarzan a tout juste fini de se construire un enfant avec un bon tronc d’arbre, des lianes, un singe et des feuilles en matière plastique collées ensemble une à une. » (Copi, Un Livre blanc (2002), p. 102) ; etc. Mais cela le fait en réalité devenir objet. Par exemple, dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, Cameron Drake, l’acteur hétéro jouant au cinéma le rôle d’un gay, est décrit comme un « nain de jardin ».
Le jardin homosexuel fictionnel est souvent figuré par la métaphore asexuée et hyperféminisée de la jeune fille en fleur, de la Mère-Nature narcissique, allongée et suspendue entre Ciel et marécage, adoptant une posture alanguie et mortuaire qui la rend immortelle : cf. le tableau Ophélie (1852) de John Everett Millais, le poème « Ophélie » (1891) d’Arthur Rimbaud, le film « Hamlet » (1990) de Franco Zeffirelli, la chanson « Ophélie » de Dave, les toiles d’Ophélie de Gustave Moreau, les toiles Reproches d’Hamlet à Ophélie, Le Chant et la folie d’Ophélie et Le Suicide d’Ophélie (entre 1824 et 1859) d’Eugène Delacroix, etc.
La (vieille) jardinière apparaît très fréquemment dans les créations homosexuelles : cf. le film « Drôle de Félix » (1999) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, le film « 200 American » (2003) de Richard Lemay, la série Clara Sheller (2005) de Renaud Bertrand (avec la mère de JP, le héros gay, dans son jardin), le téléfilm « Sa Raison d’être » (2008) de Renaud Bertrand (avec le personnage d’Hélène), le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay (avec Rose, la « belle-mère » de Jean-Marc), le one-man-show Comme son nom l’indique (2008) de Laurent Lafitte (avec la tatie du héros homosexuel), la pièce Big Shoot (2008) de Koffi Kwahulé, le film « Sancharram » (2004) de Licy J. Pullappally (avec la grand-mère d’une des héroïnes lesbiennes, devinant, dans son jardin, l’homosexualité de sa petite-fille), le film « And Then Came Summer » (« Et quand vient l’été », 2000) de Jeff London (avec la tante qui jardine), le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears, etc.
« Ma mère prenait du temps pour jardiner, alors que notre jardin n’était qu’un petit carré d’herbe à peine plus grand qu’un tapis. » (Anamika, l’héroïne lesbienne du roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, p. 32) ; « Nos maris ont beaucoup de travail… et nous avons beaucoup de jardins. » (Marianne s’adressant à Irène dans la pièce Perthus (2009) de Jean-Marie Besset) ; « Derrière lui [Antoine] , Eva souriait, magnifique dans une robe Fendi en mousseline imprimée de motifs floraux. » (Antoine dans le roman Les Nettoyeurs (2006) de Vincent Petitet, p. 195) ; « Les fleurs aussi c’est essentiel. » (Catherine dans le film « Nés en 68 » (2008) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau) ; « Ma mère est allée s’enterrer encore vivante, un bouquet de fleurs entre les dents. » (Jeanne dans la pièce La Journée d’une rêveuse (1968) de Copi) ; « J’vais au jardin préparer les plantes pour le cimetière. » (Marcelle, la mère de la pièce Frères du bled (2010) de Christophe Botti) ; « La rose du matin est éclose à midi. » (Suzanne, la mère, dans le film « Potiche » (2010) de François Ozon) ; « Démerde-toi pour te réincarner en fleur, dans un champ vert et bleu. » (Vincent Garbo s’adressant à Carole, dans le roman Vincent Garbo (2010) de Quentin Lamotta, p. 89) ; « Dans toute femme, il y a une Ève malveillante qui sommeille. » (Rodin, le héros homosexuel de la série Joséphine Ange-gardien (1999) de Nicolas Cuche, épisode 8 « Une Famille pour Noël ») ; « C’est mal fichu, une fille. Il manque l’essentiel ! […]C’est pas drôle d’être homo. Y’en a marre, je deviens hétéro. Comment ça marche, une fille ? Ça mange quoi ? Ça boit quoi ? Faut arroser combien de fois par jour ? » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc.
Par exemple, dans le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, Catherine S. Burroughs est la femme végétale, adepte des fleurs. D’ailleurs, sa copine Muriel est fleuriste de métier. Dans la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim, « Chantal » est le nom de la fleur à qui Sébastien, le héros homo, parle, comme si elle était une personne à part entière. Dans son roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, Michael, le héros homosexuel, voit en sa mère une fleuriste, une forêt moderniste à elle seule : « J’avais repensé à l’amour de maman pour les hortensias. […] Maman était une authentique magicienne de l’hortensia. » (p. 109) Dans le roman At Swim, Two Boys (Deux garçons, la mer, 2001) de Jamie O’Neill, la Tante Ève est obsédée par son idée d’organiser une garden party. On peut véritablement parler de pouvoir hypnotique de cette mère végétale, car au moment où Ben, son copain, lui reproche « d’attribuer beaucoup de pouvoirs à sa mère », ce dernier lui répond avec désinvolture « ‘Vraiment ? ’, les yeux rivés sur le plafond fleuri » (idem, p. 153).
Bien plus souvent qu’on ne le croit, les créateurs homosexuels livrent la femme au végétal, à l’inconscient, à l’inhumain, au minéral, à l’insensible : cf. la chanson « Paradis inanimé » de Mylène Farmer, le film « La Fille aux jacinthes » (1955) d’Hasse Ekman, le roman À l’ombre des jeunes filles en fleur (1919) de Marcel Proust, le roman Notre-Dame des fleurs (1944) de Jean Genet, la chanson « The Rose » de Bette Midler, la chanson « La Flor De Mi Secreto » (« La Fleur de mon secret », 1995) de Pedro Almodóvar, la pièce Happy Birthday Daddy (2007) de Christophe Averlan (avec la figure de la mère et ses fleurs coupées), le vidéo-clip de la chanson « Gourmandises » d’Alizée, le roman Gaieté parisienne (1996) de Benoît Duteurtre (avec Cléopâtre, la fleuriste, ainsi que Marianne), le film « Les Amours imaginaires » (2010) de Xavier Dolan (avec Marie, la femme végétale), le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs (avec Eugenia arrangeant les fleurs du jour du mariage de Ben et George), etc.
Il existe une confluence entre la femme végétale et la femme-objet. Les deux sont déshumanisées et désincarnées. Par exemple, dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade, Benjamin s’adressant à son amant Pierre à propos de leur projet de mère-porteuse avec Isabelle (« Faire un enfant, ça fait plus hétéro avec l’actrice. »), se compare comme par hasard à une fleur (le cactus) et Pierre lui répond qu’il a cueilli Isabelle comme une fleur : « Les actrices aussi ont le droit de faire des enfants. » Dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, le narrateur homosexuel observant le public de l’Opéra de Montréal, décrit les femmes-objet soumises comme « des jeunes filles à la remorque de leurs parents, poncées, étrillées, enrégimentées dans l’opéra par des mères qui avaient elles aussi été des fleurs de tapis, jadis, mais qui avaient appris à les fouler avec le temps » (p. 43). Dans le film « L’Objet de mon affection » (1998) de Nicholas Hytner, George, le héros homosexuel, voit toujours dans le nez des filles et des femmes, une tulipe. Dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa ? (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, la belle-mère cachée de Nicolas, le héros homosexuel, se prénomme Rose.
b) Le jardin des supplices :
En réalité, le jardin homosexuel est le paradis de l’artifice anti-écologique, le théâtre du péché, du viol, de l’inceste, du meurtre homophobe, du cauchemar qu’est l’éloignement du Réel : cf. le film « Navidad » (2009) de Sebastian Lelio (avec Alicia, l’héroïne lesbienne abandonnée, trouvée dans une serre), le film « Les Filles du botaniste » (2006) de Daï Sijie (avec le meurtre parricide par le couple lesbien), le roman Le Jardin d’acclimatation (1980) d’Yves Navarre (avec Bertrand qui a subi une lobotomie orchestrée par sa famille qui veut le transformer en hétéro), la chanson « Miss Paramount » du groupe Indochine (avec la mention du film « Le Jardin des tortures »), le film « Notre Paradis » (2011) de Gaël Morel (se rapportant au lieu de prostitution masculine), le one-man-show Le Jardin des dindes (2008) de Jean-Philippe Set (avec le chasseur pourchassant Blanche-Neige), le film « The Apple » (2008) d’Émilie Jouvet, la chanson « Jardin de Vienne » de Mylène Farmer (parlant du suicide), le film « Secret Garden » (« Jardin secret », 1987) d’Hisayasu Sato, le film « Khochkach » (« Fleur d’oubli », 2006) de Salma Baccar, le film « Gan » (« Un Jardin », 2003) de Ruthie Shatz Adi Barash (racontant l’histoire de deux jeunes prostitués de Tel Aviv), le film « Le Jardin des arbres morts » (2014) de Yarriv Mozer, la chanson « L’Amour interdit » d’Hervé Vilar (avec le « jardin maudit »), etc.
Le jardin ou la forêt homosexuels n’annoncent rien de bon : « Le plus bel atout de la chambre était une cheminée en chêne sculptée de fruits et de fleurs.[…] Elle remarqua un visage parmi la flore sculptée et sursauta. Ses yeux firent la mise au point et elle en vit d’autres, joyeux et androgynes sous des cheveux emmêlés de lierre. Les sourires paraissaient bienveillants mais Jane les imaginait s’altérer avec les ombres, et elle espérait qu’ils ne perturberaient pas les rêves de l’enfant. » (Jane, l’héroïne lesbienne dans la chambre de son futur enfant, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 39) ; « Stephen [l’héroïne lesbienne] avait erré jusqu’à un vieux hangar où l’on rangeait les outils de jardinage et y vit Collins [la gouvernante de Stephen] et le valet de pied qui semblaient se parler avec véhémence, avec tant de véhémence qu’ils ne l’entendirent point. Puis une véritable catastrophe survint, car Henry prit rudement Collins par les poignets, l’attira à lui, puis, la maintenant toujours rudement, l’embrassa à pleines lèvres. Stephen se sentit soudain la tête chaude et comme si elle était prise de vertige, puis une aveugle et incompréhensible rage l’envahit, elle voulut crier, mais la voix lui manqua complètement et elle ne put que bredouiller. Une seconde après, elle saisissait un pot de fleurs cassé et le lançait avec force dans la direction d’Henry. Il l’atteignit en plein figure, lui ouvrant la joue d’où le sang se mit à dégoutter lentement. Il était étourdi, essayant doucement la blessure, tandis que Collins regardait fixement Stephen sans parler. Aucun d’eux ne prononça une parole ; ils se sentaient trop coupables. Ils étaient aussi très étonnés. […] Stephen s’enfuit sauvagement, plus loin, toujours plus loin, n’importe comment, n’importe où, pourvu qu’elle cessât de les voir. Elle sanglota et courut en se couvrant les yeux, déchirant ses vêtements aux arbustes, déchirant ses bas et ses jambes quand elle s’accrochait aux branches qui l’arrêtaient. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), pp. 38-39) ; « Le jardin, au lever du soleil, lui sembla tout à fait étranger, comme un visage bien connu qui se serait soudain transfiguré. […] Elle prit soin d’avancer doucement, car elle se sentait un peu fautive. » (idem, p. 135) ; « Nous [les Rats] lui [le serpent] exprimâmes notre admiration sincère et la Reine des Rats l’invita à passer les vacances de Pâques enroulé dans notre arbre si jamais à Pâques, lui, l’arbre et nous-mêmes nous nous trouvions encore en vie et en liberté. » (Gouri, le narrateur bisexuel du roman La Cité des rats (1979) de Copi, p. 76) ; « Le serpent répondit qu’il était hermaphrodite et qu’il se fécondait tout seul. » (idem, p. 77) ; « Mon parc est semé de gens morts ! » (Copi, La Journée d’une rêveuse, 1968) ; « Nunca me ha llamado la atención lo de Eva y la manzana, porque de Eva soy hermana y tentarse es cosa humana. » (cf. les paroles d’une chanson de Tita Merello, dans la pièce L’Ombre de Venceslao (1978) de Copi) ; « L’hortensia avait poussé à la diable, le sol était trop humide pour y ramper. Je n’aurais pu m’asseoir en dessous, même si je l’avais voulu. D’ailleurs, j’étais beaucoup plus grosse qu’à l’époque. Je suis pourtant restée longtemps accroupie, les paumes appuyées contre le sol humide, les ongles enfoncés dans la terre. Je me suis finalement relevée et, tandis que je retournais chez Esti et Dovid, je tentais de gratter la ligne de terre emprisonnée sous mes ongles. Et plus je grattais, plus elle s’enfonçait, le noir s’incrustait dans le rouge. […] Cela faisait des années que nous nous étions approprié l’hortensia. Dedans, nous étions invisibles, hors de portée de la maison, des regards du dessus et alentour. Il y avait l’odeur, je m’en souviens. Un arôme puissant d’hortensia pourri et d’humus. Encore maintenant, l’odeur végétale des hortensias conserve son pouvoir. » (Ronit, l’héroïne lesbienne parlant de l’hortensia, qui devient pour elle et sa compagne Esti le symbole de l’amour lesbien, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, pp. 212-213) ; « On est paumés en pleine forêt tropicale. » (Thomas s’adressant à son amant François, en Thaïmande, dans la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy) ; « J’ai un vrai verger dans le cul. » (le narrateur homosexuel à propos de la sodomie, dans le one-man-show Les Gays pour les nuls (2016) d’Arnaud Chandeclair) ; etc.
Par exemple, sans sa chanson « J’veux pas être jeune », Nicolas Bacchus se voit entraîné avec son amant « jusqu’au jardin désert qu’ils n’avaient pas cherché ». Dans le film « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1959) de Joseph Mankiewicz, Mrs Venable, la mère possessive de Sébastien (le héros homosexuel qu’elle a poussé vers la mort), possède un drôle de jardin en carton pâte, avec des statues de squelettes, des arbres exotiques improbables, des plantes carnivores… une sorte de Musée des Horreurs où va éclater le secret du viol de Sébastien. Dans le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino, Elio enlève le noyau d’une pêche pour s’y branler. Oliver, son amant, découvre cela, et ironise : « T’es déjà passé au règne végétal. À quand le règne minéral ? Tu as déjà renoncé au règne animal c’est-à-dire moi… » Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, est rejoué le péché originel : un prêtre catholique, Adam, court dans une forêt ; puis se fait tenter en vain par une femme, Eva, dont il rejette les avances ; ensuite, il tombe amoureux du jeune Lukacz, qui a tout physiquement du Christ ; et cet amour s’avère réciproque. Par ce film, on comprend que le péché d’Adam, c’est de vouloir séduire et posséder son père (ou son fils) : c’est un péché d’inceste. Dans le film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras, Ody porte son petit frère (homosexuel) Dany sur son dos dans la forêt, après une course-poursuite pendant laquelle Dany a tiré sur quelqu’un à l’arme à feu. Cette fuite violente du Réel est contrebalancée par des images d’une Nature digne des plus grands films d’animation Disney : tous les animaux de la forêt (biche, canards, chouette et même le lapin en peluche) s’animent sur la rive entourant la barque des deux héros. Dans le téléfilm « Baisers cachés » (2017) de Didier Bivel, Lors d’une fête, Louis et Nathan se donnent rendez-vous au vert (« Pars pas : on se retrouve dans le jardin. » dit Louis par texto) et s’embrassent pour la première fois dans une verrière : cette scène déclenchera sur eux une violente vague d’homophobie.
FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION
PARFOIS RÉALITÉ
La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :
Une sexualité végétale et végétative, figée et organisée comme un jardin d’enfant féminisé
La communauté homosexuelle a un goût prononcé pour les « jardins carte postale », la Nature artificielle/aseptisée, au détriment de la Nature réelle. Il faut que ça scintille, que la mort ou la violence ou le rappel des limites humaines soient totalement évacués. Grâce à la littérature, à la peinture, aux films, mais aussi à leur folie des grandeurs et leur fièvre acheteuse, certaines personnes homosexuelles ont construit concrètement dans leur petit « chez-soi » des jardins merveilleux, parfois avec du goût et du raffinement : Michael Jackson, Louis II de Bavière, Pierre et Gilles, Yves Saint-Laurent, Pierre Bergé, Jean Lorrain, Marcel Proust, Jean Cocteau, etc. « Nul mieux que Jean Lorrain n’a pu rendre la touffeur équatoriale de certains jardins déjà plus ou moins abandonnés, les palmiers géants, les cocotiers hauts de vingt mètres, dressés en colonnade de mosquée, le jaillissement fou d’ombelles et de palmes des bananiers, les fougères qui étaient leur dentelure sur les velours d’invraisemblables mousses. La décomposition lente des végétaux attirait cet esthète, comme un charme ajouté à cette frénétique torpeur. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 188)
Par exemple, pendant la période artistique baroque appelée « Art Nouveau » (1880-1910), les artistes homosexuels obéissent au principe de l’imitation de la Nature, ce qui entraîne le goût des lignes sinueuses, des jardins synthétiques, des espaces lointains exotiques, et des modèles gothiques.
Le fantasme de créer une forêt et une Nature tout seul est très marqué chez certaines personnes homosexuelles. Par exemple, dans le documentaire « La Villa Santo Sospir » (1949), grâce à un jeu de caméra filmant au ralenti et en marche arrière, Jean Cocteau se présente comme un créateur de fleurs.
La cristallisation de la forêt en jardin artificiel se présente souvent sous la forme d’une féminisation, d’une préciosité de femme-enfant mythique. Bien plus souvent qu’on ne le croit, les créateurs homosexuels livrent la femme au végétal, à l’inconscient, à l’inhumain, au minéral, à l’insensible : cf. les tableaux photographiques de Pierre et Gilles, la photo L’Apparition du fantôme du sex-appeal (Sheila Legge In Trafalgar Square, 1936) de Claude Cahun, etc. Dans le générique de son film « Huit Femmes » (2002), François Ozon attribue à chacune de ses héroïnes une fleur.
« Ce qui me plaisait plutôt, c’était de lui [Philomène] ressembler dans sa féminité. En effet, sa façon de marcher, de s’habiller ou de se tenir, dégageait un moment de magie qui me séduisait. Je la comparais de surcroît à une fleur sauvage, poussée au milieu d’une plate-forme cultivée. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 48)
Dans mon mémoire de DEA (Master 2) Le Sablier de Néstor Perlongher (2003), j’avais vu que le subconscient des personnes homosexuelles (la partie supérieure de leur sablier psychique) était souvent habité par une femme végétale, une Ève primitive, une prostituée-vierge damnée de toute éternité, qu’elles cherchent à rejoindre en empruntant le chemin incestueux et impossible de l’état intra-intérin désincarné.
b) Le Jardin des supplices :
Le Jardin d’Éden que semblent rechercher le désir homosexuel est en réalité l’enfer, un lieu où le fantasme de viol (ou bien le viol réel) s’exprime, où la sexualité est évacuée au profit de la génitalité et du sentiment désincarné. Charles Trénet a été trouvé nu quand il avait 15 ans, en train de s’amuser avec son camarade Max Barnes dans un jardin de l’Hôtel Mustafa Ier. J’étudie plus longuement la figure de l’actrice morte dans les codes « Mort-Épouse » et « Femme allongée » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels. Mais le motif d’Ophélie, le fameux personnage d’Hamlet (1598) de William Shakespeare (auteur lui-même homosexuel), a inspiré quelques artistes homosexuels, tels que le peintre français Eugène Delacroix, qui s’est intéressé à trois reprises (entre 1838 et 1844) à Ophélie, cette naïade noyée qu’il décrit comme « une branche fleurie à demi tombée dans les flots », à travers trois toiles : Reproches d’Hamlet à Ophélie, Le Chant et la folie d’Ophélie et Le Suicide d’Ophélie.
Dans son autobiographie Folies-Fantômes (1997), Alfredo Arias raconte qu’il a installé trois statues de ses tantes adorées, « ces trois femmes qui désormais régnaient entre les fleurs du jardin » (p. 148), en éloge funèbre.
Le jardin (réel ou symbolique), c’est là où les personnes homosexuelles pratiquantes ont enterré la différence des sexes et leur Désir pour leur préférer la peur et la violence, ont cherché fiévreusement leur origine pour ne pas affronter leur véritable Jardin secret (= Dieu). « Les personnes préoccupées de façon trop exclusive par la question de leur origine, ou des origines en général, ont tendance à se sentir exclues et persécutées. » (Jean-Pierre Winter, Homoparenté (2010), p. 94) Il est le lieu de l’asexuation et du mépris du corps humain sexué : c.f. le documentaire « Ni d’Ève ni d’Adam : une histoire intersexe » de Floriane Devigne diffusé dans l’émission Infrarouge sur la chaîne France 2 le 16 octobre 2018.
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